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L'abstentionnisme électoral au Cameroun a l'ère du retour au multipartisme

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par Augustin TALA WAKEU
Université de Dschang-Cameroun - Master en Science Politique 2012
  

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B- L'ETABLISSEMENT D'UNE CERTAINE CONFUSION AUTOUR DES URNES, DES BULLETINS ET DES BUREAUX DE VOTE

L'organisation et le déroulement du processus électoral nécessitent que certaines dispositions soient prises en compte sinon il y a des risques que certains citoyens mécontents de ce processus soient tentés de s'abstenir. Dans cette perspective, l'abstentionnisme aurait pour origine non seulement les problèmes d'urnes et de bulletins mais aussi les problèmes de non repérage des bureaux de vote et de leur éloignement.

 L'absence ou l'arrivée tardive des matériels de vote est récurrent dans l'organisation des scrutins au Cameroun. C'est officiellement pour cette raison que le président de la République a reporté d'une semaine les élections législatives et municipales de 2002 d'une semaine. Au-delà du manque des enveloppes, de l'isoloir et de l'encre qui ne sont pas moindres dans le découragement des électeurs, l'absence d'urnes, de cadenas et de bulletins de vote sont tout aussi des facteurs majeurs de découragement des citoyens121(*). Ainsi, l'insuffisance des bulletins de votes (Owona Nguini, 1997 : 776) constitue un facteur important entravant la participation électorale car, certains citoyens comme nous l'avons déjà précisé, en seront découragés.

De même, les ruptures de stocks de bulletins de vote, et la confusion des couleurs entre ceux-ci (Eboussi Boulaga, 1997 : 118) peuvent aussi décourager certains ou même inciter les partis politiques à appeler leurs militants et sympathisants à ne plus participer au vote. En fait, l'absence des bulletins de vote de certains partis dans certains bureaux (Nkainfon Perfura, 1994 : 234) est gérée comme si l'on savait déjà que le nombre de votants pour ces partis ne sont pas nombreux. Les bulletins sont en principe confectionnés dans la même proportion pour tous les partis. Dans le cas contraire, il y a des risques que l'insuffisance de bulletins de vote soit considérée comme une manoeuvre claire d'exclusion. La réalité est que, généralement, ce sont les partis politiques d'opposition qui se plaignent de l'absence de leurs bulletins : tout se passe comme si on s'arrangeait pour que les autres partis en manquent et pas celui du parti au pouvoir. C'est pour cette raison que l'on peut considérer cette situation comme une tactique de diminution des chances de certains partis de l'opposition au profit du parti au pouvoir ; ce qui a pour effet d'effriter le capital électoral des autres partis et de diminuer le corps électoral. Cette pratique dite discriminatoire viserait semble-t-il, à privilégier un parti au détriment des autres ; dans certains cas cela est susceptible d'amener les électeurs à s'abstenir. Mais, nous ne devons pas confondre cette absence de bulletins de vote avec le cas où les partis ne présentent pas les candidats dans certaines circonscriptions électorales comme c'est souvent le cas lors des législatives et des municipales d'autant plus qu'il est normal que, les bulletins des partis n'ayant pas présenté de candidats dans certaines circonscriptions ne figurent pas dans ces circonscriptions et partant dans leurs bureaux de vote le jour du vote. Par ailleurs, les citoyens peuvent être tout simplement victimes du non repérage des bureaux de vote et de leur éloignement.

Les problèmes de non repérage des bureaux de vote et de leur éloignement entâchent sérieusement la participation des électeurs aux élections. Le fait est que, nombreux sont les citoyens qui n'ont pas pu voter parce qu'ils n'ont pas retrouvé leur bureau de vote ou que ces derniers ne sont tout simplement pas accessibles (Eboussi Boulaga, 1999 : 117). Ainsi, lors de l'élection présidentielle de 2004, plusieurs électeurs ne parvenaient pas à repérer leurs bureaux de vote alors qu'ils y avaient été inscrits122(*). Il arrive parfois que ceux qui ne prennent pas part au vote l'expliquent par le fait que leurs bureaux de vote se trouvent dans d'autres départements, régions, arrondissements ou même dans un autre quartier. Dans ce cas, on dit qu'ils sont « mal inscrits » car leur lieu de résidence ne correspond pas à leur lieu d'inscription. Par conséquent, ils sont quasi matériellement empêchés de voter, ce qui constitue l'un des facteurs majeurs de l'augmentation des taux d'abstention (Braconnier et Domargen, 2007 : 7) au Cameroun. Ces cas de « mal inscrits » sont légions au Cameroun.

De même, la mal-inscription touche aussi les personnes qui déménagent régulièrement malgré leur inscription sur les listes. Les jeunes par exemple constituent une couche sociale très mobile et difficilement joignable par les partis politiques (Duval, 2005 : 59). Par conséquent, ils ne sont pas autorisés à voter car ne figurant pas sur les listes de leur nouveau lieu d'aménagement. Donc, si la distance à parcourir pour aller voter est réduite cela faciliterait le vote (Duval, 2005 :65) des citoyens, à contrario si la distance est longue, les citoyens seront tentés de ne pas y participer. Les observateurs ont souvent noté les cas de nombreux citoyens ne sachant pas où se rendre pour voter, errant à la recherche des bureaux de vote où ils étaient censés se présenter (Eboussi Boulaga, 1997 : 127) sans les trouver. C'est une situation que l'on peut soupçonner comme étant volontairement orchestrée par les responsables en charge du processus électoral. A titre d'exemple, l'ONEL a dénoncé le fait qu'en milieu urbain les électeurs soient arbitrairement inscrits loin de leur lieu de résidence123(*). Dans tous les cas, nombreux sont les bureaux de vote inaccessibles, non repérables, mais aussi les cas de longues distances qui sont autant de facteurs favorisant le découragement des citoyens et conduisant parfois à des forts taux d'abstention lors des élections. De manière concrète, les bureaux inaccessibles concernent le plus souvent les personnes handicapées et ceux du troisième âge, même s'il faut noter que certains bureaux à cause des intempéries et du mauvais état des routes restent souvent inaccessibles le jour du vote, comme ce fut le cas dans le Centre, le Sud, le Sud -Ouest et l'Extrême-Nord en 2004124(*). En observant le tableau ci-dessous, on comprendra que les problèmes de non repérage, d'accessibilité et d'éloignement des bureaux de vote sont importants et constituent véritablement un frein à la participation électorale car, un nombre prépondérant de bureaux dans différentes localités du pays en sont concernés.

Tableau n°12 : CHIFFRES PAR REGIONS DES BUREAUX DE VOTE AYANT EU LES PROBLEMES DE REPERAGE, D'ACCESSIBILITE et D'ELOIGNEMENT EN 2004.

REGIONS

NOMBRE DE BUREAUX : NON REPERABLES, NON ACCESSIBLES ET ELOIGNES

TOTAL DES BUREAUX DE VOTES PAR REGION

ADAMOUA

15

942

CENTRE

131

3709

EXTREME-NORD

129

3338

EST

14

998

LITTORAL

146

2567

NORD

43

1335

NORD-OUEST

30

1839

OUEST

66

2097

SUD-OUEST

18

1572

SUD

20

1146

TOTAUX

612 (soit un pourcentage de 3.13)

19543

Source : Rapport de l'ONEL sur le déroulement de l'élection présidentielle de 2004, p89.

Les problèmes liés aux bureaux de vote accentuent donc les possibilités d'effritement des taux de participation soit par leur non repérage, par leur éloignement ou soit par leur inaccessibilité. A partir du tableau, on peut conclure que plusieurs électeurs ont connu des problèmes liés aux bureaux de vote et en conséquence, se sont parfois abstenus de voter.

Paralèllement, la localisation de certains bureaux de vote dans les domiciles privés, les chefferies, les commissariats et les gendarmeries n'a pas contribué à la stimulation de la participation électorale. Il faut déjà noter que leur localisation dans les commissariats et les gendarmeries fait peur à certains citoyens qui les considèrent comme des lieux de répression125(*) pouvant les pousser à s'abstenir. Dès lors, il faut s'interroger sur le choix de ces lieux qui n'est pas innocent, étant donné qu'il semble avoir pour but d'orienter le choix des électeurs en les intimidant, ou de les décourager au maximum à se rendre aux urnes. Dans la même logique, l'ouverture tardive des bureaux de vote et les problèmes d'approvisionnement en matériels électoraux, ou encore le déplacement de certains bureaux de vote ne sont pas de nature à produire une forte participation (Owona Nguini, 1997 : 763 et 776). Ces facteurs combinés à l'entretien d'une atmosphère propice à l'organisation non harmonieuse des élections expliquent d'une certaine manière l'abstentionnisme au Cameroun.

* 121 Lire à ce sujet le Rapport General de l'ONEL., 2002, op. cit., p. 59.

* 122 Lire à ce sujet le Rapport Général de l'ONEL., 2004, 2004, p. 88.

* 123 Lire à ce sujet le Rapport Général de l'ONEL., 2002, op. cit., p. 63.

* 124 Lire le Rapport Général de l'ONEL., 2004, op. cit., p. 91.

* 125 Lire à ce propos le Rapport Général de l'ONEL., 2004, op. cit., p. 87.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote