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Open data : à  la recherche de standards communs pour la réutilisation de l'information publique

( Télécharger le fichier original )
par Josselin Henno
Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) - Master 2 Droit des nouvelles technologies 2011
  

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Année universitaire 2011-2012

Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
Faculté de Droit

Mémoire de Master 2 Droit des Nouvelles Technologies de l'Information et de la

Communication

Open Data : à la recherche de standards communs pour la
réutilisation de l'information publique

Réalisé par

Josselin Henno

Sous la direction de

Madame Mélanie Clément-Fontaine

2

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION 4

TITRE I - LA GENÈSE DE L'OPEN DATA 10

Chapitre 1 - Le champ d'application du régime de réutilisation de l'information

publique 11

Section 1 - L'information publique : définition négative 10

I - Les informations expressément exclues du régime de réutilisation 10

A - Les informations dont la communication ne constitue pas droit 11

B - Les informations produites par les administrations dans l'exercice d'une mission

de service public à caractère industriel ou commercial 13

C - Les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété

intellectuelle 16

II - Un régime dérogatoire pour les informations produites par les établissements et

institutions d'enseignement et de recherche et les établissements culturels 19

Section 2 - L'information publique : définition positive 21

I - Le choix du vocable « information » 21

II - Le caractère public de l'information 23

Chapitre 2 - Les modalités de réutilisation de l'information publique 26

Section 1 - La généralisation de la licence de réutilisation 26

Section 2 - Les modalités communes de réutilisation de l'information publique 28

I - Les obligations de l'administration 28

A - Principes de libre réutilisation et de non exclusivité 28

B - La tenue d'un répertoire des informations publiques 29

II - Les droits et obligations du Réutilisateur 30

A - Les droits du réutilisateur 30

B - Les obligations du réutilisateur 30

Section 3 - Le cas particulier de la tarification 32

I - Le mode de calcul de la tarification 32

II - La mise à disposition de licences type 33

3

TITRE II - LA STANDARDISATION DE L'OPEN DATA 35

Chapitre 1 - La « Licence Ouverte » du portail « data.gouv.fr » ou la simplification de la

réutilisation de l'information publique 37

Section 1 - La synthèse des droits et obligations du Réutilisateur 38

I - Les droits du Réutilisateur 38

II - Les obligations du Réutilisateur 39

A - La « paternité de l'Information » 39

B - L'intégrité de l'Information 41

Section 2 -La non responsabilité du Producteur : un ferment d'insécurité juridique 41

I - La non responsabilité du Producteur vis-à-vis des Réutilisateurs 41

A - Quant à la qualité de l'Information 41

B - Quant à la fourniture de l'Information 43

II - La non responsabilité du Producteur vis-à-vis des tiers 44

Chapitre 2 - La compatibilité de la Licence Ouverte avec les autres licences de

réutilisation 45

Section 1 - La compatibilité expresse de la Licence Ouverte 45

Section 2 - La compatibilité logique de la Licence Ouverte : l'exemple de la licence OdbL-

Paris 46

CONCLUSION 48

BIBLIOGRAPHIE 50

ANNEXES 54

4

INTRODUCTION

Bien informés, les hommes sont des citoyens ; mal informés, ils deviennent des sujets.

Alfred Sauvy

L'information en tant que telle a toujours eu une valeur économique : le meilleur exemple est celui d'une information qui fut payée trente pièces d'argent ; et ainsi l'ère chrétienne commença1.

Vittorio Frosini

1 - Open Data -littéralement les données ouvertes- est le concept selon lequel une information peut être librement utilisée, réutilisée et redistribuée par n'importe qui, à la seule condition, tout au plus, d'en mentionner la source et/ou rediffusant l'information, le cas échéant, selon la même licence ou une licence similaire2. Appliquée au secteur public, l'Open Data consiste donc à mettre à la disposition de tous les informations émanant des personnes publiques, afin d'en permettre la réutilisation, y compris dans un but commercial. Cette politique publique d'ouverture des informations, aujourd'hui en pleine expansion, trouve sa raison dans le constat suivant : à l'occasion de leurs activités, les personnes publiques produisent et collectent un grand nombre d'informations diverses et variées (des statistiques économiques, sociales, environnementales aux chiffres officiels de la délinquance, des services hospitaliers et de l'éducation nationale, en passant par des données horaires relatives aux transports publics...). Or ces informations sont susceptibles d'être valorisées par leur intégration dans des services tels que des sites web ou des applications mobiles, que le secteur privé est plus à même de développer. S'inscrivant dans le paradigme informationnel, le mouvement Open Data est animé par des enjeux d'ordre politique et d'ordre économique.

2 - Un mouvement politique. L'ouverture des informations publiques permet une plus grande transparence et une plus grande efficacité de l'action publique. Comme le disait le sociologue Dominique Cardon, « accéder aux données, c'est donner [aux citoyens] la possibilité de coproduire la décision avec l'exécutif ». Fort de ce constat, le président Obama a annoncé, dès son investiture en janvier 2009, la mise en oeuvre d'une politique publique dite Open Government

1 V. Frosini, Law and Liberty in the Computer Age. Ici, l'auteur se réfère implicitement au prix payé par les grands prêtres à Judas Iscariote pour la trahison de Jésus : voir Evangile selon Matthieu, XXVI, 14-16

2 Traduction libre de la définition posée par l'Open Knowledge Foundation ; http://opendefinition.org

5

Initiative, visant à « créer un niveau d'ouverture du gouvernement sans précédent », dans le but de « renforcer la démocratie et promouvoir son efficacité au sein du gouvernement »3. Cette initiative s'est traduite par la mise en ligne d'un portail4 rassemblant et mettant à disposition des informations publiques (environ 400 000 jeux de données)5 aussi diverses que l'évolution de la dette publique, la liste des brevets en cours, le nombre et la nature des infractions commises sur une année, les taux de pollution ou encore les subventions publiques versées au secteur culturel. Ce volontarisme des Etats-Unis en matière d'ouverture des informations publiques a suscité un engouement mondial, qui s'est manifesté par des initiatives Open Data tant à l'échelon local6 que national, dans une perspective de transparence et de gouvernance participative. L'intérêt manifesté par la société civile s'est traduit par le développement de services dont la matière première est l'information. La vie politique a ainsi vu émerger en son sein des observateurs d'un nouveau genre, permettant de vérifier les choix budgétaires (l'application Where does my Money Go au Royaume-Uni), l'activité des parlementaires (les sites NosDéputés.fr et NosSénateurs.fr créés par le collectif « Regards Citoyens » en France), l'évolution des travaux des bâtiments publics (l'application bePart en Allemagne), les résultats de chaque école avec les moyennes municipales, régionales et nationale (le site comparatuescuela.org au Mexique), ou encore les itinéraires conseillés pour les personnes à mobilité réduite (l'application Handimap à Rennes). Le gain démocratique et l'optimisation des services publics ont conféré au mouvement Open Data une légitimité incontestée.

3 - Un mouvement économique. Les services de l'information constituent un marché colossal7 dont il faut permettre le développement dans une perspective de croissance. La volonté de diffuser les informations publiques afin d'en extraire la richesse économique a été manifestée par les instances européennes dès la fin des années 808. Le coeur de cette stratégie de diffusion est le principe de disponibilité des informations publiques, posé à plusieurs reprises, notamment dans le Livre vert sur l'information émanant du secteur public dans la société de l'information9. Cette dynamique a achoppé sur des questions pratiques liées à la nature des informations publiques.

3 http://www.whitehouse.gov

4 http://www.data.gov

5 http://www.silicon.fr

6 Au 1er juin 2012, quatorze communes françaises s'étaient engagées dans une démarche d'Open Data, parmi lesquelles Nantes, Rennes, Bordeaux, Montpellier, Toulouse et Paris.

7 Le rapport MEPSIR (Measuring European Public Sector Information Resources) datant de 2006, financé par la Commission européenne, estimait le marché européen lié à la réutilisation des informations publiques à 27 milliards d'euros par an. Dans un rapport de août 2011 (Review of recent studies on PSI re-use and related market developments), ce marché était évalué à 32 milliards d'euros pour l'année 2010, soit une augmentation de 7% par an.

8 Décision du conseil des Ministres, 26 juillet 1988

9 Livre vert sur l'information émanant du secteur public dans la société de l'information - L'information émanant du secteur public : une ressource clef pour l'Europe, 1998

6

Celles-ci sont en effet susceptibles de contenir des droits de propriété intellectuelle, ce qui a fait glisser le débat sur la question de la politique tarifaire à mettre en oeuvre pour atteindre l'objectif d'accomplissement du marché de l'information, tout en préservant les intérêts des ayants droit. Par ailleurs, les opérateurs publics diffusant des données ont pu se voir reprocher des ententes ou des abus de position dominante. Il était donc nécessaire de clarifier ces points pour que la politique de réutilisation mise en oeuvre soit pérenne. Le cadre juridique de la réutilisation des informations publiques en Europe a ainsi été posé par la directive du 17 novembre 200310, qui a énoncé des principes juridiques pour la résolution de ces questions. Néanmoins, la directive laisse une entière marge de manoeuvre aux États membres sur la politique de diffusion à mettre en oeuvre, qui relève in fine de la souveraineté nationale11.

4 - Au plan théorique, les principes de l'Open Data ont été posés notamment par l'Open Knowledge Foundation12, organisme de droit anglais qui promeut la connaissance ouverte dans toutes ses formes. Selon cet organisme, l'Open Data n'est qu'une composante d'un mouvement plus large d'ouverture (Openness), comprenant aussi les contenus ouverts (Open Content) et les services ouverts (Open Service). Ainsi l'ouverture se définit par la possibilité pour tout un chacun de librement utiliser, réutiliser et redistribuer un contenu (au sens d'oeuvre de l'esprit) ou une information, subordonnée tout au plus à la mention de la paternité et/ou à une clause de partage à l'identique. Autrement dit, le principe « d'ouverture de la connaissance » s'oppose à l'exclusivité conférée par les droits de propriété intellectuelle (droits d'auteur et droits voisins, droit sui generis des bases de données, marques, brevets, etc.). Par ailleurs en 2007, le groupe de travail « Open Government Data »13 définissait les huit qualités requises pour qu'une information publique soit considérée ouverte : complète, primaire, opportune, accessible, exploitable, non discriminatoire, non propriétaire et libre de droits. Les licences libres14 se sont naturellement imposées comme l'instrument juridique de cette liberté. Développées initialement pour le partage d'oeuvres logicielles dans les années 80, les licences libres se sont peu à peu propagées à tous les champs de la

10 Directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public

11 Directive du 17 novembre 2003, considérant (9)

12 L'Open Knowledge Foundation est une association à but non lucratif promouvant la culture libre dans des domaines aussi variés que l'éducation, la science ou tout autre secteur d'activités produisant des données ouvertes. Elle a été fondée en 2004 à Cambridge au Royaume-Uni.

13 Le groupe de travail « Open Government Data » est un groupe d'une trentaine d'activistes et de praticiens de l'open government qui s'est réuni près d'un an avant l'entrée en fonction de Barack Obama.

14 « Les licences libres peuvent être définies comme des licences par lesquelles l'auteur autorise la copie, la modification et la diffusion de l'oeuvre modifiée ou non, de façon non exclusive, sans transférer les droits d'auteur qui y sont attachés et sans que l'utilisateur ne puisse réduire ces libertés tant à l'égard de l'oeuvre originelle que de ses dériviés. Les oeuvres ainsi diffusées sont qualifiées de libres ». M. Clément-Fontaine, L'oeuvre libre, JurisClasseur PLA, fascicule 1975

7

connaissance. Affûtées pour encadrer la réutilisation des informations publiques, elles synthétisent par la voie du contrat les droits et obligations du licencié.

5 - Si l'évolution du rôle assigné à l'information dans la société peut être résumée en trois âges : le secret, la transparence et le marché15, la question de son statut juridique est quant à elle beaucoup plus problématique. A l'ère de l'informatique et de la communication, l'information s'est détachée de son support, se démarquant ainsi par son « immatérialité radicale »16 : l'information est un bien qui a une valeur intrinsèque, indépendamment de son support de diffusion. L'avènement de l'information réifiée ne permet pas pour autant d'appréhender son statut, sa polymorphie empêchant de la classer dans telle ou telle catégorie juridique existante. Entre bien commun et propriété17, l'information n'est pas une idée (de libre parcours) mais un bien sur lequel peuvent être assis des droits de propriété intellectuelle. Ainsi, une information peut être totalement ou partiellement protégée par le droit sui generis des bases de données, un brevet ou un droit d'auteur. Le recours aux licences libres pour encadrer les conditions de réutilisation des informations publiques souligne cette ambivalence de l'information publique. Traditionnellement utilisées pour encadrer le partage des oeuvres de l'esprit, les licences libres se révèlent être des instruments juridiques efficaces pour régler le sort des droits de propriété intellectuelle qui peuvent être attachés aux informations publiques, tout en permettant à ces dernières d'être diffusées et réutilisées le plus largement possible. Au niveau du negotium, les licences libres encadrant la réutilisation d'informations publiques se distinguent des licences libres classiques par leur terminologie : il n'y est plus fait référence à la notion d'oeuvre mais à celle « d'information ». Autrement dit, par souci de simplicité, l'information est assimilée, par métonymie, aux oeuvres qu'elle est susceptible de comporter18.

6 - En France, le régime de réutilisation des informations publiques a été introduit par la directive du 17 novembre 2003, transposée par l'ordonnance du 6 juin 200519. Le choix du législateur a été d'ancrer le régime de réutilisation des informations publiques dans la loi du 17 juillet 1978, qui consacre le droit d'accès aux documents administratifs. Si l'accès et la réutilisation

15 H. Burkert, From the commercialization of public information to administration information law, Colloque Informatique et droit, Montréal, 1992.

16 E. Daragon, Etude sur le statut juridique de l'information, D., chr., 1998, p.65

17 P. Aigrain, Cause commune : l'information entre bien commun et propriété, Fayard, 2005

18 La licence OGL pour la réutilisation des informations publiques est plus explicite que la Licence Ouverte française sur ce point. Le terme « information » y est employé comme un synonyme « d'oeuvre protégée » ; « Information means information protected by copyright or by database right (for example, literary and artistic works, content, data and source code) offered for use under the terms of this licence »

19 Ordonnance n° 2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques

8

entretiennent des liens forts, ces deux régimes ne doivent pas pour autant être confondus, ce qui a fait regretter cet ancrage à certains auteurs20. Néanmoins, ce choix permet d'unifier dans un seul et même texte les règles essentielles relatives aux informations publiques.

7 - A la suite de la mise en oeuvre du régime de réutilisation des informations publiques, la question de leur mise à disposition s'est posée avec de plus en plus d'acuité, de manière à optimiser cette stratégie politique. A la recherche de standards communs pour simplifier la réutilisation des informations publiques et en maximiser le potentiel, l'Open Data s'est doté de principes et de normes pour permettre son épanouissement.

8 - Nous étudierons dans un premier temps la genèse de l'Open Data en France, caractérisée par l'instauration d'un régime de réutilisation des informations publiques (Titre I) puis nous nous pencherons sur la mise en oeuvre du portail « data.gouv.fr » et de la Licence Ouverte, inscrivant le mouvement Open Data dans un processus de standardisation (Titre II).

20 J.-M. Bruguière, Données publiques : la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 46, 17 novembre 2005, 1625

9

TITRE I - LA GENÈSE DE L'OPEN DATA

9 - Se donnant pour objectifs la modernisation politique et le développement de l'économie numérique, l'Union européenne a fixé un cadre à la réutilisation des informations publiques avec l'adoption de la directive du 17 novembre 2003 (la directive ISP). Les règles qu'elle énonce ont été transposées par l'ordonnance du 6 juin 2005 et son décret d'application du 30 décembre 200521, et figurent au chapitre II de la loi du 17 juillet 1978, intitulé « De la réutilisation des informations publiques ». Nous présenterons de manière classique le régime de réutilisation des informations publiques, en étudiant d'abord son champ d'application (chapitre 1) puis les modalités de sa mise en oeuvre (chapitre 2).

21 Décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005 relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, pris pour l'application de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978

10

Chapitre 1 - Le champ d'application du régime de réutilisation

10 - La loi du 17 juillet 1978 modifiée par l'ordonnance de 2005 pose le principe de libre réutilisation des informations publiques, ce qui signifie que ces informations « peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus »22. Précisée par la Licence Ouverte (voir Titre II), la notion de réutlisation recouvre plusieurs actions : reproduire, copier, publier et transmettre l'information ; diffuser et redistribuer l'information ; adapter, modifier, extraire et transformer à partir de l'information ; exploiter l'information à titre commercial. Néanmoins, toutes les informations détenues par les administrations ne peuvent pas être réutilisées. En effet, la directive ISP de 2003 et les textes de transposition français excluent certaines informations du champ de la réutilisation. Suivant cette exclusion expresse de certaines informations, nous poserons d'abord une définition négative de l'information publique (Section 1). Logiquement, nous nous essaierons dans un second temps à une définition positive de l'information publique (Section 2).

Section 1 - L'information publique : définition négative

11 - Par souci de clarté, nous distinguerons deux catégories d'informations ne pouvant pas faire l'objet d'une réutilisation. D'une part, certaines informations sont expressément exclues du régime de réutilisation par l'article 10 de la loi de 1978 modifiée (I). D'autre part, certaines informations ne sont pas exclues expressément mais n'ont pas le statut d'informations publiques : ce sont les informations produites par les établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les établissements culturels, qui suivent un régime dérogatoire (II).

12 - D'une part, ne sont pas réutilisables les informations exclues du régime d'accès par la loi du 17 juillet 1978. Ces informations n'étant pas communicables, elles ne peuvent pas, a fortiori, faire l'objet d'une réutilisation (I). D'autre part, la directive exclut expressément certaines informations du régime de réutilisation, que l'ordonnance de transposition a également exclues dans des termes quasi identiques (II).

I - Les informations expressément exclues du régime de réutilisation

13 - Certaines informations sont exclues du régime d'accès institué par la loi de 1978. Ces

22 Article 10 de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 modifiée par l'ordonnance du 2005-250 du 6 juin 2005

informations, dont la communication ne constitue pas un droit ne peuvent pas, a fortiori, faire l'objet d'une réutilisation (A). L'exclusion du régime de réutilisation des informations produites par les administrations dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial (B) est plus difficile à justifier, étant donné qu'un grand nombre de ces informations font l'objet d'un droit d'accès. En outre, le législateur a également exclu les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle (C), ce qui n'est pas sans poser de difficultés au plan théorique.

A - Les informations dont la communication ne constitue pas un droit

14 - La loi du 17 juillet 1978, modifiée par l'ordonnance du 6 juin 2005, prévoit en son article 10 a) que « ne sont pas considérées comme des informations publiques (...) les informations contenues dans les documents dont la communication ne constitue pas un droit en application du chapitre Ier ou d'autres dispositions législatives...». Néanmoins, exception de l'exception, cette exclusion tombe dès lors que « ces informations font l'objet d'une diffusion publique ».

15 - Le chapitre Ter de la loi de 1978, intitulé « De la liberté d'accès aux documents administratifs », prévoit en son article 6 que certaines catégories de documents suivent un régime dérogatoire du régime d'accès. Ces documents ne donnant pas lieu à un droit d'accès, ils ne peuvent, a fortiori, donner lieu à un droit de réutilisation. L'article 6 distingue entre les informations qui « ne sont pas communicables » et celles qui « ne sont communicables qu'à l'intéressé ». Dans le premier cas, ce sont des impératifs d'ordre public qui justifient le secret, tandis que dans le second cas, c'est la protection de certaines données à caractère personnel au sens de la loi du 6 janvier 1978 qui justifie cette communication sélective.

16 - En premier lieu, on trouve parmi les informations non communicables en toute hypothèse une liste exhaustive de documents fonctionnels de certaines administrations (les avis du Conseil d'État et des juridictions administratives, certains documents de la Cour des comptes, de l'Autorité de la concurrence et des établissements de santé).

17 - En second lieu, l'article 6 exclut du champ de la communication -et donc de la réutilisation- les « autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte » à des intérêts supérieurs. Sont ainsi énumérés le secret des délibérations du Gouvernement, le secret de la défense nationale, la conduite de la politique extérieure de la France,

11

12

la sûreté de l'État, la sécurité publique et la sécurité des personnes, la monnaie et le crédit public, la recherche des infractions fiscales et douanières, les autres secrets protégés par la loi. Cette deuxième série d'informations non accessibles et non réutilisables laisse une marge de manoeuvre très importante à l'administration, qui apprécie de manière discrétionnaire la demande de communication, étant entendu que les refus de communication -dans le cadre du régime d'accès-n'ont pas à être motivés. De façon corrélative, l'administration pourra faire le choix discrétionnaire de soustraire au régime de réutilisation les informations jugées sensibles. L'on voit ici que le mouvement Open Data ne remet pas en cause la souveraineté de l'Etat ; la réutilisation des informations publiques se réalise avec le concours de l'Etat, dans une perspective réformiste. Open Data n'est donc pas une fuite d'informations23 mais une ouverture régulée.

18 - S'agissant des informations qui ne sont communicables qu'à l'intéressé (dossier médical, appréciation ou jugement de valeur sur la personne...), ce sont là des documents administratifs ayant la nature de données à caractère personnel24 au sens de la loi du 6 janvier 1978. Ces données à caractère personnel n'ont donc pas vocation à être communiquées ou réutilisées.

19 - Néanmoins ce principe de prohibition est assorti d'exceptions. En effet les informations contenant des données à caractère personnel ne sont pas exclues en toutes circonstances du champ des informations publiques. L'article 13 de la loi du 17 juillet 1978 énonce que de telles informations peuvent tout de même faire l'objet d'une réutilisation « soit lorsque la personne intéressée y a consenti, soit si l'autorité détentrice est en mesure de les rendre anonymes ou, à défaut d'anonymisation, si une disposition législative ou réglementaire le permet. » En toute hypothèse, « la réutilisation d'informations publiques comportant des données à caractère personnel est subordonnée au respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 ».

20 - Cette disposition évoque « l'anonymisation » des informations. Ce traitement peut justifier une tarification de l'information publique. En effet l'article 15 de la loi de 1978 énonce que « Pour l'établissement des redevances, l'administration (...) tient compte (...) du coût d'un traitement permettant de les rendre anonymes ». Par ailleurs, l'anonymisation ne fait pas l'objet

23 Ainsi Wikileaks ne s'inscrit pas dans le mouvement Open Data, comme a pu le faire entendre Tim Berners-Lee au W3C le 14 décembre 2010 à Londres. Sur ce sujet, V. l'article du Hufftington Post daté du 20 décembre 2010, par Alexander Howard : http://www.huffingtonpost.com

24 Article 2 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 : « Constitue une donnée à caractère personnel toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d'identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres. »

13

d'une obligation de résultat à la charge de l'autorité détentrice, qui « y procède sous réserve que cette opération n'entraîne pas des efforts disproportionnés »25. L'on regrettera que la notion d'efforts disproportionnés n'ait pas été davantage étayée tant la marge d'appréciation laissée à l'administration paraît grande. En l'absence de contentieux sur ce point, il est difficile d'évaluer la portée de ce pouvoir d'appréciation, dont les contours seront dessinés par les avis de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA)26 et la jurisprudence du juge administratif.

21 - En outre, l'article 6 énonce que les documents mixtes, comportant des informations non communicables et des informations communicables sont communiqués « après occultation ou disjonction » des mentions non communicables.

22 - Nous avons vu que certaines informations sont exclues du régime de réutilisation par ce que leur communication ne constitue pas un droit, pour des raisons tenant soit impératifs d'ordre public, soit à la protection des libertés individuelles et plus particulièrement du droit au respect de la vie privée. Cette exclusion est facilement compréhensible en ce que les informations visées étaient déjà exclues du régime d'accès. S'agissant des informations susceptibles d'intéresser la sûreté de l'Etat, l'administration apprécie discrétionnairement la pertinence de leur communication, ce qui nous permet de conclure que la libération des informations publiques dépend in fine de la volonté de l'administration. D'autres catégories d'informations sont exclues du régime de réutilisation en raison de la valeur économique qu'elles renferment et qui est le fruit d'un investissement en partie privé : ce sont les informations produites par les administrations dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial.

B - Les informations produites par les administrations dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial

23 - Aux termes de l'article 10 b) de la loi du 17 juillet 1978, telle que modifiée par l'ordonnance du 6 juin 2005, « ne sont pas considérées comme des informations publiques (...) les informations contenues dans des documents élaborés ou détenus par les administrations mentionnées à l'article Ier dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial ».

25 Article 40 du décret du 30 décembre 2005

26 http://www.cada.fr : « La Commission d'accès aux documents administratifs a été créée en 1978 pour assurer la bonne application du droit d'accès. Elle est pour les citoyens comme pour les administrations, le premier interlocuteur en la matière. Elle rend des avis qui constituent une voie de recours précontentieuse »

14

24 - A la lecture de cette disposition, la réutilisation d'informations produites ou reçues à l'occasion d'un service public à caractère industriel et commercial (SPIC) semble prohibée par principe. Cette interdiction contraste avec la permissivité du régime d'accès sur ce point. En effet, l'article Ier de la loi du 17 juillet 1978 dispose que sont considérés comme documents administratifs (...) « les documents produits ou reçus, dans le cadre de leurs missions de service public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission », sans distinguer entre les services publics à caractère administratif et les services publics à caractère industriel et commercial. Là où la loi ne distingue pas... Dès lors, tous les établissements publics, nationaux ou locaux, et quel que soit leur caractère -administratif, industriel et commercial ou scientifique et culturel-, seraient assujettis à l'obligation de communication.

25 - Néanmoins il convient de nuancer cette astreinte au régime d'accès, qui ne vise en effet que les seuls documents détenus par les administrations susvisées dans le cadre de leur mission de service public. Ce critère de destination permet d'exclure du régime d'accès les documents administratifs27 dont l'intérêt général commande qu'ils demeurent occultes. Il en est par exemple ainsi en matière de marchés publics conclus par les établissements à caractère industriel ou commercial, où la vie des affaires s'accommode mal des regards indiscrets. Ainsi, certains documents élaborés ou détenus par les établissements publics à caractère industriel ou commercial (EPIC) ne revêtent pas un caractère administratif. La Commission d'accès aux documents administratifs précise que l'absence de caractère administratif d'un document correspond à l'absence de « lien avec l'organisation ou l'exécution de la mission de service public dévolue à ces établissements ». C'est ainsi que la CADA a rejeté le droit d'accès s'agissant de contrats conclus par la SNCF, ayant pour objet, notamment, la fabrication et la distribution des tenues des agents des gares28.

26 - Il résulte de ce qui précède 1) que certains documents administratifs produits ou reçus par les administrations dans l'exercice de leur mission de service public à caractère industriel et commercial peuvent être obtenus via le régime d'accès ; 2) que les informations contenues dans ces documents administratifs ne peuvent pas faire l'objet d'une réutilisation29. L'article 10 de la loi de

27 Ce sont en fait les informations contenues dans les documents administratifs qui sont visées.

28 CADA, avis n° 20090372 du 29 janvier 2009

29 Il en va de même pour les documents détenus par les organismes privés chargés d'une mission de service public. Ces documents ouvrent un droit d'accès dès lors qu'ils revêtent un caractère administratif mais ne peuvent aucunement faire l'objet d'une réutilisation.

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1978 laissait pourtant, avec sa formulation sans ambages, entrevoir un destin chantant aux informations issues du régime d'accès : « Les limites et les conditions de cette réutilisation sont régies par le présent chapitre, même si ces informations ont été obtenues dans le cadre de l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs...». Mais c'était sans compter sur une exclusion expresse des informations issues des SPIC au b) du même article.

27 - L'exclusion du champ de la réutilisation des informations produites par les administrations dans le cadre de leur mission de SPIC est un choix opéré par le législateur national. En effet, la directive ISP ne marquait pas une telle distinction entre les différentes natures de services publics mais se contentait d'exclure de son champ les « documents dont la fourniture est une activité qui ne relève pas de la mission de service public dévolue aux organismes du secteur public concernés en vertu de la loi ou d'autres règles contraignantes en vigueur dans l'État membre ou, en l'absence de telles règles, en vertu des pratiques administratives courantes dans l'État membre concerné ».

28 - Cette restriction du champ d'application du régime de diffusion et de réutilisation est un frein au mouvement Open Data en ce qu'elle bride le potentiel économique des informations du secteur public. C'est ce constat qui a conduit le Conseil National du Numérique a proposer en juin 2012 un élargissement du périmètre des informations publiques30 en y incluant les informations publiques issues des SPIC.

29 - L'ouverture des informations produites par les EPIC participe à l'efficacité de ces établissements en créant les conditions de l'innovation ouverte31. C'est pour cette raison que certains EPIC tels que la SNCF32 ont pris l'initiative de mettre à disposition certaines de leurs informations de manière à tirer profit de l'ingéniosité des développeurs, les plus talentueux d'entre eux étant récompensés. Le concours de la société civile pour améliorer les services participe du phénomène crowdsourcing. Ce néologisme issu de la contraction des termes « crowd » (la foule) et « outsourcing » (externalisation), qui n'a pas d'équivalent en français, semble avoir été conçu par Mark Robinson et Jeff Howe, ce dernier l'ayant popularisé dans un article du Wired magazine

30 Conseil National du Numérique, avis du 5 juin 2012, proposition n° 1

31 Rapport « Pour une nouvelle vision de l'innovation », de Paul Morand et Delphine Manceau, rendu au Ministre de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi en avril 2009 : www.industrie.gouv.fr/enjeux/innovation/rapport-morand-2009.pdf

32 http://data.sncf.com

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publié en 200633. Selon l'encyclopédie libre Wikipédia34, « Le crowdsourcing (...) est l'utilisation de la créativité, de l'intelligence et du savoir -faire d'un grand nombre de personnes, en sous-traitance, pour réaliser certaines tâches traditionnellement effectuées par un employé ou un entrepreneur »35. Un bon exemple de crowdsourcing en matière d'Open Data nous est donné par le projet OpenStreetMap, qui a pour but de constituer une base de données cartographiques du monde, en utilisant notamment le système GPS des utilisateurs. La finalité d'un tel projet est de créer des cartes sous licence libre, afin d'en faciliter l'exploitation.

30 - Nous avons vu que les informations produites par les administrations dans le cadre de leur mission de SPIC ont été expressément exclues du régime de réutilisation par le législateur national, alors même que ces informations, du moins celles qui concernent l'activité de service public de ces établissements, peuvent être communiquées via le régime d'accès. Une fois communiquées via le régime d'accès, il semblerait que ces informations puissent faire l'objet d'une réutilisation, ce qui brouille la distinction entre régime d'accès et régime de réutilisation. Cette restriction du champ des informations publiques est préjudiciable pour le mouvement Open Data. Cependant on constate que des initiatives de mises à disposition sont prises par les EPIC, qui y voient l'opportunité d'améliorer la qualité de leurs services à moindre coût, notamment par le recours au crowdsourcing. En outre, il convient de rapprocher l'exclusion de ces informations du régime de réutilisation de l'exclusion des informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle, qui se justifie par la protection des intérêts des ayants-droit.

C - Les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle

31 - Une des problématiques juridiques majeures soulevées par l'Open Data est la gestion des droits de propriété intellectuelle susceptibles d'être attachés aux informations publiques. Comme énoncé en introduction, le concept Openness qui sous-tend l'Open Data suppose que les informations soient « libérées » de tout droit exclusif. Or la directive ISP prévoit déjà en son article 1er 2. b) que la directive ne s'applique pas « aux documents dont des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle ». Le législateur communautaire précise dans le considérant (22) de la directive que la notion de droits de propriété intellectuelle recouvre uniquement les droits d'auteur et les droits voisins (incluant les formes de protection sui generis, ajoutant aussitôt que la directive

33 Jeff Howe, The rise of crowdsourcing, n°14.06, Juin 2006

34 http://fr.wikipedia.org

35 Wikipédia est donc un très bon exemple de crowdsourcing. En effet ce projet d'encyclopédie collaborative est porté par de nombreux contributeurs (plus de 5000 contributeurs actifs pour le Wikipédia français), dont les connaissances sont agrégées sous forme d'articles thématiques.

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n'est pas applicable « aux documents visés par les droits de propriété industrielle, comme les brevets, les dessins déposés et les marques et modèles ». En outre, il est précisé que les obligations imposées par la directive « ne s'appliquent que dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions des accords nationaux sur la protection des droits de propriété intellectuelle ». Il ne s'agit là que d'un paradoxe apparent. En effet, le législateur communautaire a entendu réaffirmer le principe d'exclusivité qui garantit la protection des droits de propriété intellectuelle. Dès lors, l'Open Data ne remet pas en cause les fondements juridiques de la propriété intellectuelle ; il s'agit pour les Etats de concilier respect des droits de propriété intellectuelle et ouverture des informations publiques. Ainsi, la mise en oeuvre juridique de l'Open Data implique une autorisation d'exploiter les droits de propriété intellectuelle qui peuvent accompagner les informations publiques (Voir Chapitre 2).

32 - L'ordonnance du 6 juin 2005 a transposé ce principe d'exclusion des droits de propriété intellectuelle en son article 10 c), qui modifie insensiblement la formule laconique de l'article premier de la directive. Ainsi, ne sont pas des informations publiques « les informations contenues dans des documents (...) sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle ».

33 - En pratique, les contours de cette exclusion sont difficiles à cerner dans la mesure où le législateur semble avoir assoupli cette limite au sein du régime d'accès. En effet, la protection des droits de propriété intellectuelle était déjà prévue dans la version initiale de la loi de 1978 en matière d'accès aux documents administratifs. Ainsi l'article 10 de la loi prévoyait que « Les documents administratifs sont communiqués sous réserve des droits de propriété littéraire et artistique ». Cette disposition était assortie d'un second alinéa, prévoyant l'interdiction « de reproduire, de diffuser ou d'utiliser à des fins commerciales les documents communiqués ». Or le nouvel article 9 de la loi, issu de l'ordonnance de 2005, a conservé le premier alinéa mais pas le second. Dès lors, il semblerait que les documents administratifs obtenus dans le cadre de la procédure d'accès puissent faire l'objet d'une réutilisation, quand bien même ils renfermeraient des objets protégés par des droits de propriété intellectuelle, ou du moins des droits de propriété littéraire et artistique.

34 - Par ailleurs, les « tiers » de l'article 10 c) ne font l'objet d'aucune définition. Les informations publiques étant produites ou reçues par les administrations, il convient d'envisager la possibilité que les tiers ainsi désignés soient les fonctionnaires, premiers artisans de l'information

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publique. Depuis la loi DADVSI36, les fonctionnaires sont considérés comme étant titulaires ab initio d'un droit d'auteur sur les oeuvres qu'ils créent, au même titre que les salariés37. Cette déclaration ne doit pas masquer le régime des auteurs fonctionnaires, qui demeure spartiate tant dans ses attributs moraux que patrimoniaux. D'une part, l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle soumet l'exercice de son droit de divulgation par « l'agent » au « respect des règles auxquelles il est soumis en sa qualité d'agent », et il ne peut ni « s'opposer à la modification de l'oeuvre dans l'intérêt du service », ni « exercer son droit de repentir et de retrait ». D'autre part, l'article L. 131-3-1 du code de la propriété intellectuelle organise une cession de plein droit à l'Etat du droit d'exploitation sur l'oeuvre, « Dans la mesure strictement nécessaire à l'accomplissement d'une mission de service public ». Néanmoins, si l'Etat souhaite réaliser une exploitation commerciale de ces oeuvres, il ne dispose plus envers l'agent que d'un droit de préférence38. Cette dernière considération est à prendre en compte s'agissant de la question de la gratuité des informations publiques. En effet, dès lors qu'une administration39 envisage de commercialiser des informations publiques contenant une oeuvre créée par un fonctionnaire, il doit au préalable conclure un contrat avec cet agent, en usant de son droit de préférence. A défaut de contrat, l'exploitation commerciale violerait les droits d'auteur de l'agent et la réutilisation de cette oeuvre serait une contrefaçon. Néanmoins, le risque pour les réutilisateurs d'informations publiques est à nuancer : la Licence Ouverte qui en cadre la réutilisation d'informations en France (Voir Titre II) dispose en effet que « Le « Producteur » garantit que « l'Information » ne contient pas de droits de propriété intellectuelle appartenant à des tiers ». Dès lors, en cas de litige relatifs à des droits de propriété intellectuelle, les réutilisateurs d'informations publiques pourraient engager la responsabilité du Producteur de l'Information.

35 - Il semblerait que le législateur ait souhaité que les informations publiques et les droits de propriété intellectuelle n'entretiennent aucun rapport entre eux. Cette analyse est corroborée par la formule de l'article 10 c) : « Ne sont pas considérées comme des informations publiques (...) les

36 Loi du 1er août 2006 relative aux droits d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information

37 L'article L. 111-1, alinéa 3, du Code de la propriété intellectuelle dispose : « L'existence ou la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu par le premier alinéa, sous réserve des exceptions prévues par le présent code. Sous les mêmes réserves, il n'est pas non plus dérogé à la jouissance de ce même droit lorsque l'auteur de l'oeuvre de l'esprit ou un agent de l'Etat, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public à caractère administratif, d'une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale ou de la Banque de France. »

38 Article L. 131-3-1 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle : « Pour l'exploitation commerciale de l'oeuvre mentionnée au premier alinéa, l'Etat ne dispose envers l'agent auteur que d'un droit de préférence ».

39 La formulation du deuxième alinéa de l'article L. 131-3-1 vise « l'Etat ». Il s'agit d'une maladresse du législateur car la disposition s'applique en fait à toutes les administrations.

38 - La directive du 17 novembre 2003 exclut de son champ d'application les « documents

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informations contenues dans des documents (...) sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle ». Mais les innombrables références aux droits de propriété intellectuelle dans le régime de réutilisation trahissent l'ambiguïté de ce rapport. Au soutien de cet argument, l'on citera l'article 25 de la loi de 1978, qui porte l'art de la contradiction à son climax. Dans un chapitre intitulé « Dispositions communes » (aux régimes d'accès et de réutilisation), cet article énonce : « Lorsqu'un tiers est titulaire de droits de propriété intellectuelle portant sur un document sur lequel figure une information publique, l'administration qui a concouru à l'élaboration de l'information ou qui la détient indique à la personne qui demande à la réutiliser l'identité de la personne physique ou morale titulaire de ces droits ou, si celle-ci n'est pas connue, l'identité de la personne auprès de laquelle l'information en cause a été obtenue ». Autrement dit, il se peut qu'une information publique soit grevée par des droits de propriété intellectuelle... Face à cette contradiction manifeste, la garantie d'absence de droits propriété intellectuelle qui est fournie par la Licence Ouverte (Voir Titre II) est une bénédiction.

36 - Nous avons vu que le législateur a expressément exclu du champ des informations publiques les informations les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle. Il ressort de cette exclusion de principe que le cadre juridique de l'Open Data ne remet pas en cause le droit de la propriété intellectuelle. Cependant, la portée de cette disposition sibylline est difficile à évaluer eu égard à l'absence de précision quant à la notion de « tiers » qu'elle évoque. L'article 25 de la loi, qui évoque l'hypothèse de l'existence de droits de propriété intellectuelle assis sur un document « sur lequel figure une information publique » rend d'autant plus opaque cette exclusion. En somme, le réutilisateur d'informations publiques ne peut que se parer de la garantie d'absence de droits de propriété intellectuelle sur les informations publiques mises à disposition.

37 - A mi-chemin entre les informations exclues du champ de la réutilisation et les informations devant faire l'objet d'une mise à disposition, on trouve les informations produites par les établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les établissements culturels, qui font l'objet d'un régime dérogatoire.

II - Un régime dérogatoire pour les informations produites par les établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les établissements culturels

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détenus par des établissements d'enseignement et de recherche » et les « documents détenus par des établissements culturels »40. Cette exclusion s'est traduite par l'instauration d'un régime dérogatoire pour la réutilisation de ce type d'informations. En effet, l'article 11 de la loi de 1978 dispose que les « établissements et institutions d'enseignement et de recherche » ainsi que les « établissements, organismes ou services culturels » peuvent fixer les conditions dans lesquelles les informations peuvent être réutilisées, le cas échéant.

39 - Au niveau de l'Union européenne, cette exclusion de principe des informations culturelles du champ des informations publiques procède d'une impossibilité pour les Etats membres de s'accorder une définition des informations émanant des institutions culturelles : des musées aux archives en passant par les bibliothèques et les universités, la diversité des informations culturelles rend complexe la mise au point d'une définition unitaire et donc d'un régime commun. Par ailleurs, les enjeux liés aux droits de propriété intellectuelle attachés à de telles informations à achever de dissuader le législateur de les intégrer dans le régime de réutilisation.

40 - C'est le coût lié à la diffusion des informations culturelles qui représente un frein pour les institutions détentrices de telles données. Ainsi, dans une communication du 7 mai 2009 relative au réexamen de la directive, la Commission a constaté que les États membres -à l'exception de la Lettonie et de la Lituanie- estimaient « que les charges administratives et les coûts associés ne seraient pas compensés par les avantages potentiels », faisant état notamment de droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers sur « une grande partie des données ».

Article premier, 2. e) et f)

41 - La Commission prône au contraire41 la numérisation des collections culturelles pour

« [favoriser] l'accès à la culture en rendant le patrimoine culturel détenu par les institutions culturelles européennes (...) plus facilement accessibles à des fins professionnelles, éducatives et récréatives ». La Commission affiche en effet sa volonté de « promouvoir l'accès aux informations scientifiques et la préservation de ces dernières ». Pour ce faire, elle prône une ouverture large de ces informations « à des fins de consultation et de réutilisation ».

42 - S'agissant du patrimoine culturel, la Commission affiche également sa volonté de numériser les collections culturelles, considérant que « la numérisation fait de ces ressources un

40 Article premier, 2. e) et f)

41 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2011, modifiant la directive 2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public

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atout durable pour l'économie tout en créant de nombreuses possibilités d'innovation ». Par ailleurs, ces objectifs de disponibilité et de numérisation ouverture des données culturelles seraient « conformes aux objectifs conformes à l'agenda européen de la culture et au programme de travail du Conseil en faveur de la culture ».

43 - Dès lors on est en droit d'espérer une modification de la directive ISP en ce sens. Cette entrée des informations culturelles dans le champ des informations publiques se traduirait par une modification de l'article 2. e) de la directive de manière à réintégrer dans le champ d'application de la directive les « documents détenus par (...) des bibliothèques universitaires (...) autres que des documents issus de la recherche protégés par des droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers ». Si cette proposition aboutissait à une modification effective de la directive, seraient alors réutilisables les informations scientifiques universitaires dès lors qu'aucun droit de propriété intellectuelle n'y fait obstacle.

44 - Certaines institutions culturelles n'ont pas attendu l'intervention du législateur pour libérer leurs informations, et ont fixé elles-mêmes les conditions de réutilisation, conformément aux dispositions de l'article 11. Cette « exception culturelle » a par exemple été utilisée par BnF pour les données bibliographies enrichies42 ou la bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg43.

45 - Au terme de cette première section, nous avons écarté du champ de l'information publique les informations dont la communication ne constitue pas un droit (soit en considération d'impératifs d'ordre public, soit au nom de la protection des données à caractère personnel), les informations produites par les administrations dans l'exercice d'une mission de service public à caractère industriel ou commercial et les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle. En outre nous avons identifié des informations faisant l'objet d'un régime dérogatoire à l'endroit des informations produites par les établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les établissements culturels. Pour ce type d'informations, les « établissements » mentionnés ont une liberté de mise à disposition. Cette définition en creux permet d'aborder à présent l'information publique en en proposant une définition positive.

42 http://data.bnf.fr

43 http://www.bnu.fr

Section 2 - L'information publique : définition positive

46 - Nous étudierons dans un premier temps le choix du législateur de consacrer le vocable « information » (I) puis nous étudierons le caractère public de l'information (II).

I - Le choix du vocable « information »

47 - Si l'expression « information publique » a été consacrée en droit interne par l'ordonnance de transposition du 6 juin 2005, le choix d'ancrer le régime de réutilisation dans la loi du 17 juillet 1978 est susceptible d'entraîner une confusion avec les « documents administratifs » du régime d'accès. Par ailleurs, ce risque de confusion est entretenu par le choix du législateur communautaire d'introduire la notion générique de « document » pour désigner l'objet de la réutilisation, c'est-à-dire « l'information »... En outre, l'expression « Open Data » est traduite le plus souvent, et à juste titre, par « données ouvertes » ou « données publiques », le terme « donnée » ayant une signification juridique singulière. Face à ce maquis linguistique, il convient de distinguer chacun de ces termes un par un.

48 - La pluralité de ces termes et leur polysémie appellent une étude plus approfondie, dont le point de départ peut être arrêté à l'endroit de la notion de « document », introduite par la directive ISP de 2003. Cette notion qui se veut générique couvre, aux termes du considérant (11), « toute représentation d'actes, faits ou informations - et toute compilation de ces actes, faits ou informations - quel que soit leur support (écrit sur papier ou stocké sous forme électronique ou enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel), détenue par des organismes du secteur public ». De cette définition naît une double confusion.

49 - D'une part, le choix du terme « document » pour désigner de manière générique « toute représentation d'actes, faits ou information » induit une confusion entre l'information et le support de cette information. Or c'est bien le contenu du document et pas le support dont la directive entend encadrer la réutilisation. Par ailleurs, le terme « document » est susceptible d'être confondu avec l'expression « document administratif » employée dans le chapitre Ier du titre Ier de la loi du 17 juillet 1978, relatif à la « liberté d'accès aux documents administratifs ». S'agissant de du régime d'accès, l'expression « document administratif » est justifiée par le contexte historique de ce régime : les administrations « sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande ». Ce texte est antérieur à l'ère numérique et par

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conséquent, la communication d'une information supposait donc nécessairement la communication du support physique sur lequel elle se trouvait. En revanche, le choix du législateur européen d'opter pour le vocable « document » ne trouve aucune justification acceptable. En effet à l'ère numérique l'information est autonome, détachée de son support. Il eût donc été préférable que la directive introduise une notion générique d'« information » plutôt que de document.

50 - D'autre part, l'emploi de l'expression « représentation d'actes, faits ou informations » dans la directive ISP induit une confusion avec la notion de « donnée », qui est classiquement définie comme la représentation d'une information sous une forme conventionnelle destinée à faciliter son traitement. Autrement dit, « la donnée est donc de l'information, un produit « formaté » pour pouvoir être traité par un système informatique »44.

51 - Par ailleurs, l'expression « données ouvertes » n'a pas de résonance juridique en droit français. Cette expression a néanmoins le mérite de renvoyer clairement au mouvement Open Data et aux principes de partage qui le sous-tendent.

52 - Au final, le choix du législateur interne de privilégier le terme « information » permet de ne pas restreindre le champ de la réutilisation aux seules informations formatées -les données publiques- mais d'y inclure également toute forme d'information. Néanmoins, il convient également de noter que certains auteurs privilégient l'expression « données publiques » au motif que les difficultés juridiques se « posent essentiellement à propos de produits informatiques intégrant »45.

53 - Il n'existe aucune harmonie sémantique au sein des textes se rapportant à l'Open Data. Le choix du législateur français pour le vocable « information » dans la transposition de la directive ISP est donc louable en ce que ce terme générique permet d'appréhender l'information sous sa forme physique (au sein d'un document papier) et sous sa forme numérique (une base de données). Il est cependant regrettable que le législateur n'ait pas harmonisé la loi de 1978 sur ce plan en modifiant notamment le chapitre Ier relatif au régime d'accès, dans lequel le terme « document administratif » continue de prospérer. Au-delà de ces considérations terminologiques, dont nous abstrairons en privilégiant systématiquement le terme « information », il convient à présent étudier le caractère public de l'information.

44 Jean-Michel Bruguière, Les données publiques et le droit, Litec, 2002

45 Philippe Gaudrat, Commercialisation des données publiques, La Documentation française, 1992

II - Le caractère public de l'information

54 - Le caractère public de l'information peut être appréhendé soit dans une perspective matérielle, soit dans une perspective organique. Dans la première hypothèse, c'est le critère du service public que l'on va retenir. Partant, on considérera que l'information publique est l'information produite ou détenue dans l'exercice d'un service public. Dans la seconde hypothèse, la perspective organique renvoie quant à elle à l'origine publique de l'information. Ainsi entendue, l'information publique est l'information produite/détenue par l'administration.

55 - Par ailleurs, les auteurs ont tergiversé sur le vocable à employer pour désigner l'action définissant la relation entre l'administration et l'information. D'une part, le terme « production » a le mérite de renvoyer à l'activité du service public, mais restreint le champ de l'information publique en excluant les informations « détenues » mais non produites par l'administration. D'autre part, la « détention » suppose l'existence d'un support incorporant l'information, ce qui ne rend pas compte de manière satisfaisante de l'autonomie de l'information vis-à-vis de son support. Néanmoins, on pourrait objecter que, par métonymie, la « détention de l'information » signifie la « détention du support sur lequel figure l'information », étant entendu que le support -papier ou électronique- n'est pas un élément pertinent dans la perspective de la réutilisation.

56 - La directive ISP du 17 novembre 2003 a opté pour l'approche organique, puisqu'elle « concerne la réutilisation des informations du secteur public ». Dans son article premier relatif à ses objet et champ d'application, la directive précise cette approche organique en visant les « documents46 existants détenus par des organismes du secteur public des États membres ». De manière tautologique, le considérant (11) énonce qu'un « document détenu par un organisme du secteur public est un document dont cet organisme est habilité à autoriser la réutilisation ». Dans le cadre de la directive ISP, l'article 2. 1) précise qu'il faut entendre par organismes du secteur public « l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public et les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou un ou plusieurs de ces organismes de droit public ».

57 - L'ordonnance de transposition du 6 juin 2005 a repris l'approche organique, l'article 10 énonçant que peuvent être « utilisées47 les informations figurant dans des documents produits ou

46 Rappelons que le terme « document » est ici employé comme un terme générique et peut donc être remplacé par « information » pour plus de clarté.

47 Il semblerait que l'absence du préfixe « ré » soit une maladresse du législateur. Le chapitre II de la loi de 1978 dans lequel figure l'article 10 susvisé est en effet intitulé « De la réutilisation des informations publiques » et le terme « réutilisation » y est employé à de multiples reprises pour définir l'action se 24

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reçus par les administrations mentionnées à l'article 1er ». Or l'article premier de la loi du 17 juillet 1978 énumère les administrations concernées par la liberté d'accès aux documents administratifs : « l'État, les collectivités territoriales ainsi que (...) les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées de la gestion d'un service public ».

58 - L'on peut s'interroger sur la signification du vocable « document » employé dans l'article 10 susvisé. Il semble s'agir du support de l'information, ce qui le distingue du « document » au sens de la directive qui, rappelons-le, vise « tout contenu quel que soit son support ». Pour autant, s'agit-il d'un « document administratif » au sens de l'article premier de la loi de 1978 ? Rien n'est moins sûr au vu de la liste - non exhaustive - que ce dernier dresse : « les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, précisions et décisions ». Pour certains auteurs48, cette confusion entre l'information et son support provient de l'ancrage du régime de réutilisation des informations publiques dans la loi de 1978, dont l'objet initial est l'accès aux documents administratifs. En outre, l'on notera que l'expression « produits ou reçus » pour désigner quels sont les documents éligibles au régime de réutilisation pourrait également être employée s'agissant des informations qu'ils contiennent. En somme, la confusion entre les documents et les informations est une véritable plaie pour la bonne compréhension de la loi en ce qu'elle rend la délimitation de son champ d'application très difficile.

59 - Malgré les incertitudes qui planent sur la définition des informations publiques, le choix du législateur d'opter pour une approche organique et une énumération des informations exclues permet de délimiter le champ d'application du régime de réutilisation des informations publiques. Il convient d'étudier à présent les modalités de ce régime de réutilisation.

rapportant à l'information. Celle-ci ayant déjà été utilisée par l'autorité administrative qui l'a produite, elle ne peut donner lieu qu'à une nouvelle utilisation.

48 J.-M. Bruguière, Données publiques : la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 46, 17 novembre 2005, 1625

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Chapitre 2 - Les modalités de réutilisation de l'information publique

60 - La directive de 2003 permet aux États membres « [d'autoriser] la réutilisation des documents49 sans conditions ou (...) [d'imposer] des conditions, le cas échéant par le biais d'une licence réglant des questions pertinentes »50. N'ayant initialement choisi la licence que pour la réutilisation payante d'informations publiques, la France a finalement généralisé ce mécanisme (section 1). La loi de 1978 modifiée par l'ordonnance de 2005 énonce les modalités communes de la réutilisation des informations publiques (section 2) et traite du cas particulier de la tarification (section 3).

Section 1 : La généralisation de la licence de réutilisation

61 - Le choix d'encadrer la réutilisation par une licence est clair et non équivoque s'agissant de la réutilisation payante d'informations publiques51 mais, concernant la réutilisation gratuite, un doute a longtemps plané sur le point de savoir si la conclusion d'une licence était nécessaire. Partant, certains auteurs ont posé la question de la licéité d'une licence pour la réutilisation gratuite d'informations publiques, considérant que cela revenait à ajouter une condition -la contractualisation- qui ne figure pas dans la loi52. En effet, l'article 16 de la loi du 17 juillet 1978 prévoit que la réutilisation d'informations publiques soumise au paiement d'une licence donne lieu à la délivrance d'une licence, mais ne dit mot s'agissant de la réutilisation gratuite. Partant, l'on pourrait considérer que la licence gratuite nouvellement introduite porte atteinte au principe de libre réutilisation érigé par l'article 10 alinéa 1 de la même loi. Néanmoins, le décret d'application du 30 décembre 2005 semble faire référence à une licence générale de réutilisation en son article 37, évoquant une « demande de licence » préalable à la réutilisation, ajoutant que cette demande doit « préciser l'objet et la destination, commerciale ou non, de la réutilisation envisagée »53. Puis la circulaire du 29 mai 2006 a en partie dissipé ce malentendu en énonçant : « Il n'est pas interdit à l'administration d'utiliser également les licences en cas de mise à disposition gracieuse ». Mais la circulaire précise aussitôt que « la licence ne peut dans ce cas servir qu'à rappeler ou préciser à

49 Au sens générique

50 Article 8.1 de la directive ISP

51 Loi du 17 juillet 1978, article 16 al. 1 : « Lorsqu'elle est soumise au paiement d'une redevance, la réutilisation d'informations publiques donne lieu à la délivrance d'une licence »

52 G. Lambot, Données moi, Revue Lamy Droit de l'immatériel, 2010, n° 62, à propos de la licence « information publique librement réutilisable » initiée par le ministère de la Justice et des Libertés

53 L'article 37 précise en son deuxième alinéa que « [la demande de licence] peut être présentée en même temps que la demande d'accès au document soit ultérieurement ».

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l'utilisateur les conditions d'usage fixées par l'article 12 de la loi du 17 juillet 1978 », à savoir le respect de l'intégrité des informations publiques. C'est ainsi que le mécanisme de la licence s'est généralisé, que la réutilisation soit payante ou non, étant précisé que cette licence ne peut ajouter aucune condition supplémentaire à la loi de 1978 lorsque la réutilisation envisagée est gratuite.

62 - Entre le décret d'application de décembre 2005 et l'introduction d'une licence générale de réutilisation des informations publiques à la fin de l'année 2011, six années se sont écoulées pendant lesquelles ont cohabité un principe de libre réutilisation54 posé par l'article 10 et un recours effectif aux licences de réutilisation de plus en plus prononcé. Pendant cette période intermédiaire, les licences émises par les organismes publics avaient pour finalité de préciser le régime de réutilisation des informations publiques dans certains cas particuliers. Ainsi est apparue la « Licence de réutilisation non commerciale » des informations sur les chevaux Equipaedia55, ou encore la « Licence information publique librement réutilisable » (LIP) du ministère de la Justice56.

63 - La question du recours à une licence gratuite été simplifiée en octobre 2011 avec l'introduction d'une licence-type intitulée « Licence Ouverte », rédigée pour la réutilisation d'informations provenant du portail « data.gouv.fr » (Voir Titre II) mais applicable à tous types de réutilisation gratuite. L'APIE57 énonce en effet sur son site que « lorsque la réutilisation est gratuite ou relève des seules conditions générales fixées par la loi, il convient de se reporter à la licence ouverte conçue et publiée par la mission Étalab ». Puisque la Licence Ouverte s'applique à toute réutilisation gratuite et qu'elle s'impose comme un complément des dispositions légales, on peut donc considérer que la réutilisation gratuite des informations publiques est le cas général de réutilisation. La réutilisation payante fait quant à elle l'objet de règles spéciales avec des licences particulières.

64 - La distinction entre réutilisation gratuite (Licence Ouverte) et réutilisation payante (licence spéciale) étant clarifiée, il convient à présent de nous intéresser aux modalités communes de réutilisation.

54 Principe auquel il est toujours fait référence par la Commission d'accès aux documents administratifs : « Le nouvel article 10 pose, au contraire [de l'ancien qui posait un principe d'interdiction], un principe de libre réutilisation des informations publiques, sous les réserves et dans les conditions prévues par le chapitre II de la loi du 17 juillet 1978 »

55 Cette licence émise par l'Ecole nationale d'équitation concerne exclusivement les informations extraites de la « base SIRE » et a pour particularité de n'être valable qu'un an.

56 http://www.rip.justice.fr

57 L'Agence du patrimoine immatériel de l'État est un service à compétence nationale rattaché au ministre de l'économie et du budget, créé en 2007. L'APIE est chargée de la gestion du patrimoine immatériel de l'Etat (brevets, marques, images, bases de données....) : http://www.economie.gouv.fr

58 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social

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Section 2 - Les modalités communes du régime de réutilisation de l'information publique

65 - Le régime de réutilisation encadre les modalités de réutilisation tant du côté de l'administration (I) que du réutilisateur (II).

I - Les obligations de l'administration

A - Principes de libre réutilisation et de non exclusivité

66 - Si la directive ISP « ne contient aucune obligation d'autoriser la réutilisation des documents », la formule générale et abstraite de l'article 10 de la loi de 1978 semble consacrer un principe de libre réutilisation : « Les informations (...) peuvent être réutilisées ».

67 - Un des corollaires de ce principe de libre réutilisation est le principe de non exclusivité, introduit par la directive ISP dans le but de préserver la concurrence sur le marché des services de l'information. Ainsi aux termes du considérant (20) de la directive, « les organismes du secteur public devraient respecter les règles applicables en matière de concurrence (...) en évitant autant que faire se peut de conclure, entre eux, et avec des partenaires privés, des accords d'exclusivité ». L'article 11 de la directive est plus ferme sur ce point puisqu'il pose le principe d'interdiction des accords d'exclusivité, « la réutilisation des documents [étant] ouverte à tous les acteurs potentiels du marché ». Ce principe d'interdiction des accords d'exclusivité est encore plus prégnant dans l'ordonnance de 2005, qui dispose en son article 14 que « la réutilisation d'informations publiques ne peut faire l'objet d'un droit d'exclusivité accordé à un tiers ».

68 - Par exception, il est possible de déroger à ce principe de non exclusivité « lorsqu'un droit d'exclusivité est nécessaire pour la prestation d'un service d'intérêt général », exception reprise par l'article 14 de l'ordonnance. Le considérant (20) a identifié une situation dans laquelle un accord d'exclusivité était envisageable : la publication d'une information par un éditeur commercial, qui poserait l'octroi d'un droit d'exclusivité comme condition de son action.

69 - Dans sa communication du 7 mai 200958, la Commission a relevé que certains pays tels

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que les Pays-Bas le Royaume-Uni avaient « effectué des études poussées pour recenser les accords d'exclusivité conclus entre le gouvernement central et les autorités locales ». Par ailleurs, « la Lettonie a lancé une procédure visant à garantir que tous les droits exclusifs accordés sont conformes à la directive et que les autorités chargées de la concurrence ont été consultées au préalable ».

70 - En toute hypothèse, la pertinence de chaque accord d'exclusivité est amenée à être remise en question au fur et à mesure puisqu'au terme de l'article 11 de la directive, « le bien-fondé de l'octroi de ce droit d'exclusivité fait l'objet (...) d'un réexamen » au moins tous les trois ans.

71 - Par ailleurs les autorités administratives qui détiennent des informations publiques doivent mettre à la disposition du public un répertoire des principales informations publiques.

B - La tenue d'un répertoire des informations publiques

72 - Pour que les informations publiques puissent faire l'objet d'une réutilisation, encore faut-il que les réutilisateurs potentiels sachent quelles sont les informations disponibles. Cette méta-information fait donc heureusement l'objet d'une obligation pour « les administrations qui produisent ou détiennent des informations publiques », l'article 17 de la loi de 1978 les enjoignant de tenir « à la disposition des usagers un répertoire des principaux documents dans lesquels ces informations figurent ».

73 - Le caractère non exhaustif de ce répertoire a été confirmé par la circulaire du 29 mai 2006, qui précise que « les administrations disposent donc d'une marge d'appréciation pour définir les documents qui doivent y figurer, en tenant notamment compte de l'intérêt que pourrait présenter leur réutilisation ». En outre, la CADA a précisé à ce sujet que l'absence de constitution d'un tel répertoire n'expose pas la collectivité publique à des sanctions59.

74 - En somme l'administration n'est soumise à aucune obligation de mise à disposition mais il découle de la loi de 1978 un principe de libre réutilisation. Par ailleurs, l'administration doit respecter un principe de non exclusivité et tenir un répertoire des informations publiques. A ces obligations de l'administration font face les droits et obligations des réutilisateurs d'informations

européen et au Comité des régions, concernant la réutilisation des informations du secteur public et le réexamen de la directive 2003/98/CE)

59 CADA, conseil n° 20062173 du 8 juin 2006

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publiques.

II - Les droits et obligations du réutilisateur

A - Les droits du réutilisateur

75 - Aux termes de l'article 10 de la loi de 1978, les informations publiques peuvent être « utilisées par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public ». Cette formule abstraite permet au réutilisateur une grande liberté quant à la destinée des informations publiques, y compris dans un but commercial (développement d'un service de l'information tel qu'une application smartphone par exemple) ou encore dans le but de critiquer l'administration sur sa gestion des services publics. Cependant, cette liberté s'exprime dans le respect de certaines obligations à la charge du réutilisateur.

B - Les obligations du réutilisateur

76 - Si la réutilisation d'informations publiques est libre, elle n'est pas pour autant dénuée d'obligations à la charge du réutilisateur. L'article 10 de la loi de 1978 précise à ce sujet que les « limites et conditions » de la réutilisation d'informations publiques s'appliquent non seulement pour les informations publiques mises à disposition par l'administration mais aussi pour les informations « obtenues dans le cadre de l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs ». Cette disposition fait le lien entre le régime d'accès et le régime de réutilisation en consacrant un principe d'unicité des informations publiques : quel que soit le mode d'obtention -demande d'accès ou mise à disposition- les informations publiques sont soumises aux mêmes règles au stade de leur réutilisation.

77 - Une obligation de respect de l'intégrité des informations publiques est mise à la charge du réutilisateur. Mais il ne s'agit pas là d'une obligation équivalente au respect de l'oeuvre de l'auteur60, qui serait trop contraignante en matière de réutilisation d'informations publiques. L'article 12 de la loi de 1978 dispose que « Sauf accord de l'administration, la réutilisation des informations publiques est soumise à la condition que ces dernières ne soient pas altérées, que leur sens ne soit pas dénaturé et que leurs sources et la date de leur dernière mise à jour soient mentionnées ». A contrario, le réutilisateur peut modifier les informations publiques, les adapter et les traduire sans

60 Article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle

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avoir à en demander l'autorisation, et ce dans les limites susmentionnées.

78 - La violation de cette obligation est passible de sanctions aux termes de l'article 18, qui distingue selon que la réutilisation s'est faite à des fins commerciales ou non. Ainsi, la réutilisation d'informations publiques à des fins non commerciales en violation des dispositions de l'article 12 est passible d'une amende pouvant aller jusqu'à 1 500 euros (contravention de 5e classe). Lorsque la violation de ces dispositions intervient dans le cadre d'une réutilisation à des fins commerciales, « le montant de l'amende est proportionné à la gravité du manquement commis et aux avantages tirés de ce manquement », dans la limite de 150 000 euros (amende portée à 300 000 euros en cas de récidive). Pour les entreprises, un manquement réitéré est passible d'une amende égale à « 5% du chiffres d'affaires hors taxes du dernier exercice clos dans la limite de 300 000 euros ». Si l'omission de la source et/ou de la dernière date de mise à jour de l'information est facile à déterminer, il en va autrement de la dénaturation du sens, laquelle ne fait l'objet d'aucune précision. Cela est regrettable au plan de la sécurité juridique, d'autant plus que la formulation de cette obligation laisse entendre que la dénaturation du sens des informations publiques est une infraction objective. Partant, la bonne foi du réutilisateur serait indifférente.

79 - En pratique, la CADA peut-être saisie d'une plainte déposée par l'administration dont les informations ont été altérées/dénaturées et est compétente pour appliquer les sanctions de l'article 18 de la loi61. Au vu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel62, la sanction susceptible d'être prononcée, en tant qu'elle émane d'une autorité administrative agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique, à la nature d'une sanction administrative. En cas de contestation de la sanction prononcée par la CADA, le réutilisateur d'informations publiques, devenu justiciable, devra donc s'en remettre au juge de l'excès de pouvoir pour que soit engagée la responsabilité de l'administration. Le régime de la sanction administrative a été défini par la jurisprudence administrative, qui s'est efforcée de limiter le pouvoir coercitif que la loi avait

61 Article 22 de la loi du 17 juillet 1978 : « La commission, lorsqu'elle est saisie par une administration mentionnée à l'article 1er, peut, au terme d'une procédure contradictoire, infliger à l'auteur d'une infraction aux prescriptions du chapitre II les sanctions prévues par l'article 18 ».

62 Décision n° 2009-580 DC du 10 juin 2009 relative à la loi dite « HADOPI », considérant 14 : « Considérant que le principe de la séparation des pouvoirs, non plus qu'aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle, ne fait obstacle à ce qu'une autorité administrative, agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique, puisse exercer un pouvoir de sanction dans la mesure nécessaire à l'accomplissement de sa mission dès lors que l'exercice de ce pouvoir est assorti par la loi de mesures destinées à assurer la protection des droits et libertés constitutionnellement garantis ; qu'en particulier doivent être respectés le principe de la légalité des délits et des peines ainsi que les droits de la défense, principes applicables à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si le législateur a laissé le soin de la prononcer à une autorité de nature non juridictionnelle »

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conféré à certaines administrations afin de respecter le principe de la séparation des pouvoirs. Ainsi le Conseil d'Etat fait prévaloir le principe d'interprétation stricte à propos du principe de légalité63. En toute hypothèse, le principe non bis in idem trouvera à s'appliquer, de telle sorte qu'une sanction pénale ne pourra se superposer à une sanction administrative (et vice versa)64.

80 - En plus de ces modalités communes à toute réutilisation d'informations publiques, le législateur a prévu des règles spéciales pour encadrer leur tarification le cas échéant.

Section 3 - Le cas particulier de la tarification

81 - Si la gratuité de l'information publique est revendiquée par les acteurs de l'Open Data, le régime de réutilisation instauré en 2005 prévoit la possibilité pour la puissance publique de tarifer certaines informations (I). Dans cette hypothèse, la réutilisation se fait dans des conditions prévues par des licences spéciales (II).

I - Le mode de calcul de la tarification

82 - La question de la tarification des informations publiques a été abordée par la directive ISP, qui a cherché à limiter le montant des redevances mises en oeuvre par les États membres : « Lorsque des redevances sont prélevées, le total des recettes provenant de la fourniture et des autorisations de réutilisation de ces documents ne dépasse pas le coût de collecte, de production, de reproduction et de diffusion, tout en permettant un retour sur investissement raisonnable »65.

83 - L'encadrement de la tarification des informations publiques a été transposé à l'article 15 de la loi de 1978, qui énumère les postes qui peuvent être pris en compte dans le calcul de l'assiette de la redevance. Ainsi, au-delà du coût marginal de mise à disposition des informations, « l'administration peut aussi tenir compte des coûts de collecte et de production des informations » ainsi qu'une « rémunération raisonnable de ses investissements, comprenant le cas échéant un part au titre des droits de propriété intellectuelle ». En toute hypothèse, l'administration ne doit pas fixer un montant de redevances trop élevé, au risque de se voir reprocher un abus de position dominante en application de la théorie des facilités essentielles.

63 Conseil d'État 4 mars 1960 Lévy : RDP 1960 p. 1030

64 Ce principe a été rappelé par l'arrêt de Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l'homme du 10 février 2009, requête n° 14939/03, Sergueï Zolotoukhine c. Russie

65 Directive ISP, article 6

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84 - A ces dispositions légales encadrant le mode de calcul de la tarification font écho des dispositions contractuelles précisant les modalités de réutilisation payante des informations, au sein de licences type mises à la disposition des réutilisateurs.

II - L'élaboration de licences type

85 - Suivant les prescriptions de la directive, le législateur français a prévu que la réutilisation d'informations publiques soumise au paiement d'une redevance donne lieu à la délivrance d'une licence66. « Cette licence fixe les conditions de la réutilisation des informations publiques », qui « ne peuvent apporter de restrictions à la réutilisation que pour des motifs d'intérêt général et de façon proportionnée. Elles ne peuvent avoir pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence ».

86 - En outre, l'alinéa 3 de l'article 16 enjoint les administrations de « mettre préalablement des licences types, le cas échéant par voie électronique, à la disposition des personnes intéressées par la réutilisation de ces informations ». Le projet de licence payante, a été établi par l'administration avec le concours de l'Agence du patrimoine immatériel de l'État (APTE). Ont ainsi été élaborés et mis à la disposition des administrations deux modèles de licences type, qui « ont vocation à s'appliquer lorsque la réutilisation est soumise à des conditions particulières et/ou au paiement d'une redevance »67. S'agissant de « modèles de licences », les administrations qui souhaitent recourir à la tarification pour la réutilisation de certaines de leurs informations publiques ne sont pas tenues de les reprendre mot pour mot, à condition de respecter les exigences légales. L'un de ces modèles répond strictement aux exigences de la loi de 1978 (licence avec livraison unique des informations) tandis que « le deuxième va au-delà des exigences de la loi et répond aux attentes des administrations et des opérateurs en organisant des modalités particulières de mise à disposition des informations publiques, lorsqu'elles comportent des mises à jour » (licence avec livraison successive des informations).

87 - Si la diffusion et la possibilité de réutilisation des informations publiques constituent l'essence de l'Open Data, le potentiel des informations publiques n'a pu être pleinement atteint via le régime mis en place par la directive TSP et les textes de transposition qui l'ont accompagnée. En

66 Loi du 17 juillet 1978, article 16 al. 1 : « Lorsqu'elle est soumise au paiement d'une redevance, la réutilisation d'informations donne lieu à la délivrance d'une licence »

67 https://www.apiefrance.fr

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effet, le maquis juridique des règles de réutilisation ainsi que la faible inclinaison de la puissance publique à diffuser les informations produites ou reçues par les administrations ont contrarié l'épanouissement du mouvement. Mais l'Open Data a trouvé un second souffle en 2011, avec la mise en oeuvre d'un portail mettant à disposition les informations publiques, toutes réutilisables via une contractualisation standardisée.

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TITRE II - LA STANDARDISATION DE L'OPEN DATA

88 - Le mouvement Open Data a pris une dimension nouvelle en France, avec la mise en ligne le 5 décembre 2011 d'un site internet « data.gouv.fr » ayant pour finalité de « rassembler et mettre à disposition librement l'ensemble des informations publiques »68. Ce « portail unique interministériel des données publiques », dont la création a été décidée par le conseil de modernisation des politiques publiques du 30 juin 2010, a été réalisé par la mission « Étalab », organisme ad hoc créé par le décret du 21 février 2011. Ce faisant, la France a emboîté le pas des États-Unis et du Royaume-Uni, qui ont mis en ligne leur portail des informations publiques respectivement en mai et septembre 2009.

89 - Le portail « data.gouv.fr » doit mettre à disposition « librement, facilement et gratuitement le plus grand nombre d'informations publiques »69 émanant « de l'État, des établissements publics administratifs et, si elles le souhaitent, des collectivités territoriales et des personnes de droit public ou de droit privé chargées d'une mission de service public »70. Autrement dit, seules les administrations centrales et les établissements publics à caractère administratif ont l'obligation de coopérer avec la mission Étalab à la mise en ligne de leurs informations publiques ; les autres administrations ne sont qu'incitées à le faire. Le caractère supplétif de la mise à disposition d'informations publiques par les collectivités territoriales et les personnes chargées d'une mission de service public ajourne la question du sort des initiatives locales qui ont vu le jour ça et là71.

90 - Une licence gratuite a spécialement été élaborée pour la réutilisation des informations publiques mises en ligne sur le portail « data.gouv.fr ». Cette licence type marque l'avènement d'une standardisation de la réutilisation des informations publiques, simplifiant considérablement la démarche des réutilisateurs (chapitre 1). Néanmoins, le contenu de la licence et la gestion du portail « data.gouv.fr » soulève la problématique de l'articulation de ce régime avec les autres régimes de réutilisation (chapitre 2).

68 Décret n° 2011-194 du 21 février 2011 portant création d'une mission « Etalab » chargée de la création d'un portail unique interministériel des données publiques

69 Circulaire du 26 mai 2011 relative à la création du portail unique des informations publiques de l'Etat « data.gouv.fr » par la mission « Etalab » et l'application des dispositions régissant le droit de réutilisation des informations publiques

70 Décret du 21 février 2011, article 2

71 Les collectivités territoriales qui ont ouvert leurs informations publiques ont emprunté des voies différentes. Ainsi la ville de Rennes a développé sa propre licence, tandis que Montpellier se réfère aujourd'hui à la Licence Ouverte et que Paris a opté pour une version française de la licence ODbL.

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Chapitre 1 - La « Licence Ouverte » du portail « data.gouv.fr » ou la simplification de la réutilisation des informations publiques

91 - La licence applicable aux informations publiques mises en ligne sur « data.gouv.fr » a été élaborée par un groupe de travail conduit par « Étalab » et composé de l'APIE, du COEPIA72 et des administrations concernées, conformément aux prescriptions du Premier ministre73. Cette licence a été présentée en octobre 2011, soit plus d'un mois avant l'ouverture du portail « data.gouv.fr ». Cette « Licence Ouverte/Open Licence » (ci-après « la Licence Ouverte » ou « la licence ») se veut un « outil juridique adapté »74 à la réutilisation gratuite des informations publiques mises en ligne.

92 - La Licence Ouverte est un contrat conclu entre, d'une part, le « Producteur », défini comme « l'entité qui produit « l'Information » et l'ouvre à la réutilisation dans les libertés et les conditions prévues par cette licence », et d'autre part le « Réutilisateur », défini comme « toute personne physique ou morale qui réutilise « l'Information » conformément aux libertés de cette licence ». La licence donne également une nouvelle définition de « l'Information », qui se distingue de la notion « d'information publique » au sens de la loi de 1978 puisqu'elle se restreint ici à « des données ou informations proposées dans les libertés et conditions de cette licence ». En outre, les « données ou informations qui ont été créés75 soit directement à partir « d'Informations », soit à partir d'une combinaison « d'Informations » et d'autres données ou informations qui ne seraient pas soumises à cette licence » sont des « Informations dérivées » au sens de la licence. On retrouve ici une approche similaire à celle qui caractérise l'oeuvre dérivée en droit d'auteur qui rappelons-le, est l'oeuvre qui incorpore une oeuvre préexistante et qui est créée sans le concours de l'auteur de l'oeuvre préexistante (le cas échéant il s'agirait d'une oeuvre de collaboration). Ainsi l'Information dérivée est à l'Information ce que l'oeuvre dérivée est à l'oeuvre. La logique du droit d'auteur irrigue le droit des informations publiques (Voir point 5), au risque d'entretenir une confusion entre les notions d'oeuvre et d'information.

93 - Mais contrairement au droit d'auteur, le formalisme du droit des informations publiques est réduit à la portion congrue. Sur le portail « data.gouv.fr » et plus généralement dans le régime de réutilisation mis en place dans le sillage de la directive ISP, les réutilisateurs d'informations

72 Conseil d'orientation de l'édition publique et de l'information administrative

73 Circulaire du 21 février 2011, Annexe III

74 Id.

75 Faute présente dans la licence

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publiques n'ont pas à demander d'autorisation pour réutiliser les informations mises à disposition. Ainsi, à l'instar des contrats de licence proposés sur le portail des informations publiques du Royaume-Uni (« data.gov.uk »), la Licence Ouverte fonctionne selon le principe du click and use : la contractualisation s'effectue par la seule réutilisation des informations mises en ligne, auxquelles le Réutilisateur accède en cliquant sur le lien de téléchargement du fichier.

94 - La Licence Ouverte simplifie la réutilisation des informations publiques en ce qu'elle synthétise les droits et obligations du Réutilisateur (section 1). Sa compatibilité avec d'autres licences en fait un outil juridique privilégié pour la réutilisation d'informations publiques de sources diverses (Section 2).

Section 1 - La synthèse des droits et obligations du Réutilisateur

95 - Suivant un schéma contractuel traditionnel, la Licence Ouverte énumère de façon exhaustive les droits (I) et obligations (II) du Réutilisateur.

I - Les droits du Réutilisateur

96 - La Licence Ouverte permet de réutiliser librement l'Information obtenue sur le portail « data.gouv.fr », le réutilisateur pouvant la reproduire, la copier et la transmettre, la diffuser et la redistribuer, l'adapter, la modifier et en extraire et transformer certains éléments, et enfin l'exploiter à titre commercial. La dimension économique de la réutilisation de « l'Information » soumise à la licence est soulignée par deux exemples : la possibilité de combiner « l'Information avec d'autres « Informations » et la possibilité de l'inclure dans un produit ou application.

97 - Par analogie avec les oeuvres libres, on peut ici parler d'information libre. En effet, la Licence Ouverte remplit les conditions pour recevoir la qualification de licence libre. Plus précisément, il s'agit d'une licence de type domaine public en ce qu'elle confère « les libertés de copier, diffuser et modifier l'oeuvre sans qu'il y ait l'obligation d'accorder les mêmes libertés lors d'une rediffusion de l'oeuvre [ou l'information] modifiée ou non »76.

98 - Cette liberté sans contrepartie transparaissait déjà dans l'article 10 de la loi du 17 juillet 1978, les Informations téléchargées sur le portail « data.gouv.fr » sont des informations publiques

76 M. Clément-Fontaine, L'oeuvre libre, JurisClasseur PLA, fascicule 1975

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qui « peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents [dans lesquels figurent les informations publiques] ont été produits ou reçus ». La Licence Ouverte vient donc confirmer par la voie contractuelle le choix qui avait été consacré par la voie légale.

99 - La Licence Ouverte fait expressément référence à cet article 10 mais, au lieu d'en recopier le contenu, reformule la disposition en en corrigeant les défauts. Ainsi, il n'est plus fait référence à de quelconques documents mais directement aux « informations publiques » que « les administrations produisent ou reçoivent ». Par ailleurs, il est préciser que ces informations publiques peuvent être « réutilisées [et non pas « utilisées »] par toute personne physique ou morale ». Cet exercice de réécriture auquel s'est livrée la mission Étalab ne modifie pas la substance de l'article 10 mais a le mérite d'employer le vocabulaire idoine en matière de réutilisation, en dissipant quelque peu la confusion produite par l'ancrage du régime de réutilisation dans un texte régissant le droit d'accès. Toujours est-il que ces modifications stylistiques nous semblent pertinentes et devraient inspirer le législateur.

100 - Le réutilisateur peut exercer ces libertés à condition de respecter les obligations que la licence lui impose.

II - Les obligations du Réutilisateur

A - La « paternité de l'Information »

101 - La réutilisation d'informations publiques dans les conditions de la Licence Ouverte est possible à condition de « mentionner la paternité de l'information ». L'emploi du vocable « paternité » est une nouvelle référence au droit d'auteur, filant un peu plus l'assimilation de l'information à l'oeuvre. Pour autant, l'obligation de respect de la paternité de l'information doit être distinguée du droit au respect de son nom que détient l'auteur en vertu de l'article L. 121-177. Il s'agit en effet pour le Réutilisateur de mentionner non pas le nom de l'auteur mais la « source » de l'information -précisant que la notion de source recouvre « a minima le nom du Producteur »- ainsi que « la date de sa dernière mise à jour ».

77 Article L. 121-1 al. 1 du code de la propriété intellectuelle ; « L'auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre. »

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102 - Si un objectif légitime de traçabilité de l'information semble fonder cette obligation, une incertitude demeure quant à la portée de celle-ci. En effet, le Producteur est défini comme « l'entité qui produit l'information ». Selon cette définition organique, il faudrait donc mentionner le nom de l'entité dont émane effectivement l'information. Cette entité est mentionnée dans l'en-tête de l'Information mise en ligne sur le portail « data.gouv.fr ». Par exemple, l'Information intitulée « Financement et dépenses de la sécurité sociale » émane du Ministère du Travail, de l'Emploi et de la Santé. Cette donc cette entité qu'il faudrait mentionner lors de la réutilisation de cette Information. C'est cette approche que semble privilégier la Licence Ouverte puisqu'il est précisé que « le Réutilisateur peut notamment s'acquitter de cette condition en indiquant un ou des liens hypertextes (URL) renvoyant vers « l'Information » et assurant une mention effective de sa paternité ».

103 - Mais lorsqu'on observe la seconde partie de la définition du « Producteur », à savoir « l'entité qui (...) ouvre [l'Information] à la réutilisation dans les libertés et les conditions prévues par cette licence », l'identité de ce dernier est loin de tomber sous le sens. En effet, l'expression « ouvrir à la réutilisation » est suffisamment sibylline pour laisser une marge d'appréciation regrettable du point de vue de la sécurité juridique. Si l'on s'en tient aux textes régissant la mise à disposition des informations publiques sur « data.gouv.fr », c'est la mission Étalab qui est indirectement chargée de « mettre à disposition librement l'ensemble des informations publiques » via la création du portail « data.gouv.fr ».

104 - Cette question triviale s'agissant de la réutilisation d'un seul jeu de données s'avère autrement complexe dans l'hypothèse d'une réutilisation combinant plusieurs jeux de données émanant de différentes entités voire obtenues sur différents portails d'informations publiques. Dans le doute, il est préférable d'indiquer les liens hypertextes renvoyant vers l'Information, comme suggéré par la licence.

105 - En toute hypothèse, la licence énonce que « cette mention de paternité ne doit ni conférer un caractère officiel à a réutilisation de « l'Information », ni suggérer une quelconque reconnaissance ou caution par le Producteur, ou par toute autre entité publique, du « Réutilisateur » ou de sa réutilisation ».

106 - Par ailleurs, le Réutilisateur est soumis à une obligation de respect de l'intégrité des informations publiques.

B - L'intégrité de l'Information

107 - La Licence Ouverte est silencieuse au sujet d'une obligation de respect de l'intégrité de l'Information qui pèserait sur le Réutilisateur. Cependant le régime spécial de licence institué pour la réutilisation des informations publiques mises en ligne sur « data.gouv.fr » n'est pas autonome. En effet si l'on se reporte à la lettre du décret du 21 février 2011, le portail « data.gouv.fr » a vocation a « rassembler et mettre à disposition librement l'ensemble des informations publiques ». Les Informations au sens de la licence n'étant ni plus ni moins que les informations publiques au sens du décret (dans la mesure où elles sont réutilisables dans les conditions de la licence), leur réutilisation ne saurait s'abstraire des règles générales posées par la loi de 1978. Dès lors, l'article 12 de cette dernière, qui conditionne la réutilisation à la non altération des informations publiques et à la non dénaturation de leur sens, trouve à s'appliquer.

108 - La Licence Ouverte pose un principe de non responsabilité du Producteur, ce qui représente un ferment d'insécurité juridique préjudiciable au développement de l'Open Data.

Section 2 - La non responsabilité du Producteur : un ferment d'insécurité juridique

109 - La Licence Ouverte est marquée par la non responsabilité du Producteur de l'Information tant vis-à-vis des Réutilisateurs (I) que des tiers (II).

I - La non responsabilité du Producteur à l'égard des Réutilisateurs

110 - La licence ouverte comporte un volet responsabilité qui marque un désengagement du Producteur quant à la qualité de l'information (A) et quant à sa fourniture (B). Cette non responsabilité du Producteur a pour effet de placer le Réutilisateur dans une situation d'insécurité juridique. En effet celui-ci doit assumer seul le risque d'une information erronée ou d'un problème dans la fourniture des informations sur lesquelles repose son service.

111 - L'obligation de respect de l'intégrité des informations publiques posée par l'article 12

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A - Quant à la qualité de l'Information

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de la loi de 1978, et qui a également vocation à s'appliquer à la réutilisation dans le cadre de la licence, n'est pas réciproque. En effet, la Licence Ouverte pose un principe de non responsabilité du Producteur s'agissant de la qualité de l'Information, qui est « mise à disposition telle que produite ou reçue (...) sans garantie expresse ou tacite... ». Ce faisant, le Producteur s'abstrait de toute obligation s'agissant de l'exploitabilité de l'Information.

112 - Ainsi le portail data.gouv.fr comporte des informations publiques qui ne sont pas nécessairement des données78 et qui sont parfois éparpillées entre plusieurs fichiers. Ces informations publiques, si elles ont le mérite d'exister et d'être disponibles, nécessitent un traitement pour pouvoir être réutilisées.

113 - Plus généralement, la problématique de l'exploitabilité des informations publiques renvoie à la question des standards ouverts, définis en droit français comme « tout protocole de communication, d'interconnexion ou d'échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d'accès ni de mise en oeuvre »79. Il faut entendre ici la notion de « format » comme la manière dont les données sont codées, le fichier étant le support immatériel de l'information. Les acteurs de l'Open Data revendiquent à juste titre que les informations publiques soient mises à disposition « sous un format ouvert et interopérable »80. Or on remarque en pratique que le portail data.gouv.fr comporte de nombreux fichiers sous un format fermé tel que le .xls, qui correspond aux tableurs de Microsoft Excel, là où des équivalents ouverts tels que le .ods ou le .xml auraient pu être privilégiés81.

114 - Les informations publiques mises à disposition sous un format propriétaire sont susceptibles d'entraîner des problèmes d'interopérabilité, dans l'hypothèse où un Réutilisateur souhaiterait combiner de telles informations avec d'autres informations sous un autre format. L'efficience du régime de réutilisation des informations publiques du portail « data.gouv.fr » est donc directement corrélée avec la mise à disposition de ces informations sous des standards ouverts.

115 - Malgré l'importance de la question des formats ouverts pour garantir l'interopérabilité, il résulte de l'annexe V de la circulaire du 26 mai 2011 que « Les typologies de formats (...) sont [déterminées] selon un plan d'action et un calendrier préparé par Etalab en concertation avec

78 Représentation d'une information sous une forme conventionnelle destinée à faciliter son traitement

79 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numériques, article 4

80 Déclaration sur l'Open Data en France (juin 2011), rédigée par Creative Commons France, Regards Citoyens, Open Knowledge Foundation et Veni Vidi Libri

81 http://www.regardscitoyens.org

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chaque ministère », ces derniers « [privilégiant] notamment les formats exploitables comme ceux tabulaires (CSV, ODS, XLS, etc.), textes (ODS, RTF, TXT, etc.), structurés (XML, etc.), géographiques (GML, KML, etc.), sémantiques (RDF, etc.), ou calendaires (iCalendar, etc.) » , sans distinction entre formats ouverts et propriétaires.

116 - Cette marge de manoeuvre de l'administration est regrettable eu égard à l'enjeu de l'interopérabilité et de la combinaison d'informations qu'elle permet. En outre, ce laxisme est très critiquable eu égard au Référentiel Général d'Interopérabilité (RGI)82, qui « a pour objectif de guider les autorités administratives dans l'adoption de normes, standards et bonnes pratiques, afin de favoriser l'interopérabilité de leurs systèmes d'information ». Il serait donc souhaitable de privilégier les formats ouverts, au besoin en faisant peser sur le Producteur ou sur la mission Étalab une obligation en ce sens.

117 - Par ailleurs, aux termes de la Licence Ouverte, « [le Producteur] ne peut garantir l'absence de défauts ou d'irrégularités éventuellement contenues83 dans l'Information ». C'est ainsi qu'ont été publiées en juin 2012 sur le portail data.gouv.fr des jeux de données concernant l'attribution des marchés publics d'État pour les années 2008, 2009 et 2010 comportant de nombreuses erreurs, comme le rapportait le site d'information « owni.fr »84. En définitive, ces fichiers erronés sont inexploitables par les Réutilisateurs.

118 - Le rapport Mandelkern85 avait déjà souligné en son temps l'importance de la qualité des informations publiques, énonçant que « Les sites diffusant des données publiques se devraient d'être des références en matière de qualité, pour défendre le crédit de la puissance publique qui est attaché aux données, pour assurer la qualité des produits dérivés ou des activités qui en dépendent, telles que la recherche et l'enseignement ».

B - Quant à la fourniture de l'Information

119 - La fréquence de mise à jour de certaines informations publiques est déterminante pour

82 Créé par l'article 11 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005, la version 1.0 du RGI a été publiée le 16 juin 2009 et approuvée officiellement par un arrêté du Premier ministre du 9 novembre 2009

83 Faute présente dans la licence

84 http://owni.fr

85 Diffusion des données publiques et révolution numérique : Rapport, Dieudonné Mandelkern et Bertrand du Marais (1999)

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leur réutilisation. En effet, le potentiel économique de certaines informations diminue avec l'écoulement du temps, et certaines n'ont de valeur qu'à la condition d'être actualisées à journée voire à la minute (taux de particules fines dans l'atmosphère, places de parking libres, etc.). Pour ce type de réutilisation, il est capital d'assurer d'excellentes conditions de mise à jour de manière à les rendre attractives. Or la Licence Ouverte a fait le choix d'une non responsabilité du Producteur, qui « ne garantit pas la fourniture continue de l'Information ». La Licence Ouverte n'est donc pas adaptée à la réutilisation d'informations publiques en temps réel, le risque juridique lié à un défaut de fourniture de l'autorité administrative étant trop élevé. Pour ce type d'informations publiques, il faudra recourir à la licence de l'APIE prévoyant expressément la livraison successive des informations. Cette « Licence pour une livraison successive d'informations publiques régulièrement mises à jour » a été développée dans le but de « prendre en compte les besoins concrets des opérateurs privés ». Dans cette hypothèse, des investissements techniques par la puissance publique tels que la mise en place de serveurs dédiés justifient une contrepartie financière. Partant, ce type de réutilisation s'écarte du modèle Open Data et de son principe de gratuité.

120 - Par ailleurs, la Licence Ouverte pose un principe de non responsabilité du Producteur vis-à-vis des tiers.

II - La non responsabilité du Producteur à l'égard des tiers

121 - La Licence Ouverte énonce que « Le Réutilisateur est le seul responsable de la réutilisation de l'Information », précisant que « [Le Producteur] ne peut être tenu pour responsable de toute perte, préjudice, ou dommage de quelque sorte causé à des tiers du fait de la réutilisation ». Cette non responsabilité du Producteur du fait de la réutilisation, si elle est fondée en son principe, est préjudiciable pour les Réutilisateurs d'informations publiques. Dans l'hypothèse où les informations réutilisées s'avéraient fausses et que cela causait un préjudice à un tiers, le Producteur ne serait pas responsable. Il serait donc souhaitable que le Producteur soit responsable non pas du fait de la réutilisation -qui lui échappe- mais de la qualité des informations qu'il met à disposition, prenant à son compte leur validité.

122 - Simple à utiliser, la Licence Ouverte encadre les conditions de la réutilisation des informations publiques. Le succès de cette licence libre dépend en outre de sa compatibilité avec d'autres licences de réutilisation.

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Chapitre 2 - La compatibilité entre la Licence Ouverte et les autres licences

123 - Le potentiel des informations publiques étant étroitement lié avec la possibilité des les combiner entre elles, la compatibilité des licences de réutilisation s'avère déterminante pour une réutilisation massive des informations publiques. La Licence Ouverte se veut être un instrument juridique adapté à une telle réutilisation, en prévoyant expressément sa compatibilité avec certaines licences (I) et en étant rédigée de manière à être logiquement compatible avec de nombreuses autres licences (II)86.

Section 1 - La compatibilité expresse de la Licence Ouverte

124 - Face à l'abondance de licences libres qui inondent le mouvement de l'Open Data, la mission Étalab aurait pu faire le choix d'utiliser une licence déjà existante. Mais elle a préféré créé une nouvelle licence, en prévoyant sa compatibilité expresse et non exhaustive (« notamment compatible ») avec trois licences susceptibles d'être employées pour la réutilisation d'informations publiques. Il s'agit des licences « Open Government Licence » (OGL) du Royaume-Uni, « Creative Commons Attribution 2.0 » (CC-BY 2.0) de Creative Commons et « Open Data Commons Attribution » (ODC-BY) de l'Open Knowledge Foundation.

125 - La compatibilité expresse de la Licence Ouverte avec la licence OGL n'est guère surprenante eu égard à leurs nombreuses accointances. Développée pour la réutilisation des informations mises en ligne sur le portail « data.gov.uk », ouvert en janvier 2010, la licence OGL semble avoir fortement inspiré les rédacteurs de la Licence Ouverte, tant leur structure et les formules employées sont similaires87.

126 - Les licences CC-BY 2.0 et ODC-BY 2.0 sont deux licences libres posant comme seule condition la mention de la paternité. A la différence de la première qui encadre le partage d'oeuvres en général, la seconde est spécifiquement dédiée aux bases de données. Ainsi la licence ODC-BY ne s'applique qu'à la base données et non à son contenu, pour lequel le concédant est invité à utiliser

86 Sur la compatibilité expresse et la compatibilité logique : http://vvlibri.org

87 A titre d'exemple, la possibilité de réutiliser l'information publique est étayée par les mêmes exemples : « ...en la combinant avec d'autres « Informations », ou en l'incluant dans votre propre produit ou application », faisant écho à « ...by combining it with other Information, or by including it in your own product or application »

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d'autres licences compatibles avec la licence ODC-BY88. Cette dernière est donc l'avatar contractuel et libre du droit sui generis des bases de données89. Dans l'hypothèse d'un produit combinant une Information sous Licence Ouverte et une base de données sous licence ODC-BY, le Réutilisateur pourra donc réutiliser librement90 cette base mais pas les oeuvres qu'elle contient prises de manière individuelle.

127 - Au-delà de ces licences avec lesquelles la Licence Ouverte est expressément compatible, il existe d'autres licences Open Data avec lesquelles la compatibilité de la Licence Ouverte n'est pas établie.

Section 2 - La compatibilité logique de la Licence Ouverte : l'exemple de la licence ODbL - Paris

128 - Traduite en anglais et rédigée de manière à être « compatible avec toute licence libre qui exige a minima la mention de paternité », la Licence Ouverte est affûtée pour une compatibilité logique très large. Mais un examen des deux licences envisagées est nécessaire pour déterminer si celles-ci sont réellement compatibles. En l'espèce, la question de la compatibilité entre deux licences ne se pose que dans l'hypothèse où le licencié entend distribuer un produit composé d'Informations sous Licence Ouverte et de contenus (bases de données, autres oeuvres) placés sous une autre licence.

129 - Nous avons choisi d'analyser la compatibilité entre la Licence Ouverte et la licence ODbL - Paris, instaurée par la ville de Paris pour la réutilisation de ses informations publiques sur son portail « opendata.paris.fr », ouvert en janvier 2011. On y trouve notamment des informations relatives à la liste des équipements de proximité tels que les piscines, les gymnases et les

88 « ...this licence only governs the rights over the Database, and not the contents of the Database individually. Licensors may therefore wish to use this licence together with another licence for the contents. »

89 En France, c'est l'article L. 341-1 du CPI qui définit le champ d'application de la protection des bases de données : « Le producteur d'une base de données, entendu comme la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d'une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel. Cette protection est indépendante et s'exerce sans préjudice de celles résultant du droit d'auteur ou d'un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs. »

90 « The rights granted cover, for example : a. Extraction and Re-utilisation of the whole or a Substantial part of the Contents ; b. Creation of Derivative Databases ; c. Creation of Collective Databases ; d. Creation of temporary or permanent reproductions (...) ; e. Distribution, communication, display, lending, making available, or performance to the public (...) »

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bibliothèques, la liste des bureaux de vote ou encore la liste des écoles maternelles et élémentaires. L'hypothèse est donc celle d'une personne qui souhaite réutiliser des informations extraites sur les portails « opendata.paris.fr » et « data.gouv.fr » en vue de les intégrer dans un produit destiné à être commercialisé.

130 - La licence ODbL - Paris a été adaptée de l'Open Database Licence de l'Open Knowledge Foundation, avec l'aide d'organismes de la société civile91. De même que la Licence Ouverte, cette licence est libre en ce qu'elle permet le partage (« copier, distribuer et utiliser la base de données »), la création (« produire des créations à partir de la base de données ») et l'adaptation (« modifier, transformer et construire à partir de cette base de données »). L'absorption d'une de ces licences par l'autre est donc possible.

131 - S'agissant des conditions à respecter, les deux licences obligent leur utilisateur à mentionner la paternité. Néanmoins, elles se distinguent sur les conditions à respecter lors du partage. En effet la licence ODbL énonce en son article 4.4 une obligation de « partage à l'identique des conditions initiales »92, toute base de données dérivée utilisée publiquement devant respecter les conditions soit de la licence ODbL dans sa version actuelle ou dans une version ultérieure, soit d'une licence compatible. A défaut d'une « déclaration publique d'acceptation d'une licence compatible »93, il existe une insécurité juridique quant à la compatibilité d'une licence avec la licence ODbL. Néanmoins, l'article 4.5 intitulé « Limitation du Partage à l'identique aux conditions initiales » précise que l'intégration d'une base de données sous licence ODbL « pour réaliser une Création Produite94 n'implique pas la création d'une Base de données dérivée ». Autrement dit, la personne qui intègre des éléments d'une base de données sous licence ODbL à un produit qu'elle distribue n'est pas tenue à l'obligation de partage à l'identique concernant le produit qu'il a créé. Si cette interprétation venait à être confirmée par la ville de Paris, la réutilisation des informations publiques gagnerait en sécurité juridique.

91 http://www.vvlibri.org , http://www.regardscitoyens.org et Chapitre France de Creative Commons

92 Expression issue du « ShareAlike » des licences Creative Commons, et qui désigne le caractère copyleft d'une licence.

93 L'article 4.4.5 de la licence énonce en effet que « Les Cédants de licences peuvent désigner un serveur mandataire pour déterminer les licences compatibles au titre de l'Article 4.4 a iii. Dans ce cas, la déclaration publique d'acceptation d'une licence compatible émanant du mandataire autorisé Vous permet d'utiliser ladite licence compatible. »

94 La licence ODbL définit la « Création produite » comme « une création (tel qu'un support visuel, audiovisuel ou audio, ou un texte) résultant de l'utilisation de la totalité ou d'une Partie Substantielle du Contenu (à travers une recherche ou une autre requête de la présente Base de données, d'une Base de données dérivée ou de la présente Base de données en tant que partie d'une Base de données collaborative »

CONCLUSION

132 - Au terme de cette étude, nous pouvons affirmer que le mouvement d'ouverture des informations publiques en tant que stratégie politique fait consensus dans toutes les démocraties modernes. Les promesses d'optimisation de l'action publique et de croissance économique louées par les défenseurs de l'Open Data ont convaincu l'Union européenne dès 2003, qui a lancé un vaste chantier pour harmoniser la réutilisation des informations publiques au niveau communautaire. C'est ainsi que la France s'est dotée d'un régime juridique de réutilisation relativement satisfaisant, malgré les errements sémantiques engendrés par l'ancrage du régime de réutilisation dans une loi consacrée à l'accès aux informations publiques.

133 - Cependant l'Open Data n'a véritablement pris son essor qu'à partir de 2009, avec le choix opéré par les Etats-Unis d'encourager la réutilisation en mettant à disposition sur internet un nombre considérable d'informations réutilisables très simplement. Ce « passage à l'acte » matérialisé par l'ouverture d'un portail des informations publiques a essaimé à travers le monde, convaincant tour à tour les Etats et les autorités locales.

134 - Ce succès de l'Open Data s'est traduit par une multiplication inouïe des licences libres, instruments juridiques « façonnés » pour une telle ouverture. Par ailleurs, les approches Open Data se sont diversifiées, chacun interprétant le concept selon ses intérêts. La pluralité de ces initiatives est ambivalente en ce qu'elle fait s'épanouir le mouvement Open Data tout en le diluant dans un océan de subtilités.

135 - Mais le propre de l'Open Data, c'est son caractère global : ce qui fait la force d'une information, c'est sa capacité à être facilement réutilisée et combinée avec d'autres informations. Pour ce faire, deux objectifs doivent être poursuivis : l'harmonisation du cadre légal de la réutilisation et l'harmonisation du cadre technique. Ce mouvement de standardisation est le propre d'un phénomène mature et durable. Ainsi, les initiatives visant à promouvoir la compatibilité des licences de réutilisation doivent être encouragées, de même que celles visant à promouvoir la standardisation des normes techniques. D'une part, il serait donc souhaitable que les institutions mettant à disposition leurs informations par le biais d'une licence soit convertissent cette licence en une licence plus reconnue et donc plus fédératrice, soit déclarent leur licence expressément compatibles avec les licences mieux reconnues. Cette seconde hypothèse est davantage souhaitable

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dans le cas de licences spécifiques, rédigées pour organiser la réutilisation d'informations au statut particulier. D'autre part, il serait également souhaitable que des standards soient promus au niveau international, notamment quant au format des fichiers et à leur qualité, de manière à simplifier leur réutilisation.

136 - Aujourd'hui en Europe, la proposition de révision de la directive ISP de 200395 est en marche96. Aux termes de ce projet, l'ouverture des informations publiques deviendrait un principe avec l'instauration d'un droit de réutilisation opposable aux Etats membres. Le champ des informations publiques serait élargi aux informations culturelles et la tarification reléguée au rang d'exception. En outre, la qualité des informations mises à disposition serait mieux contrôlée et le recours aux licences types mieux encadré, notamment via des lignes directrices. Cette évolution possible de l'Open Data est souhaitable afin que toute la richesse des informations publiques puisse être révélée.

95 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public, 12 décembre 2011

96 Guy Lambot, Réutilisation des informations du secteur public : la révision de la directive 2003/98/CE est en marche, Légipresse septembre 2012, n°297

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BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

· Vittorio Frosini, Law and Liberty in the Computer Age, Universitetsforlaget,1995

· Jeremy Rifkin, The Age of Access: The New Culture of Hypercapitalism, Where all of Life is a Paid-For Experience, Tarcher, 2001

· Jean-Michel Bruguière, Les données publiques et le droit, Litec, 2002

· Guide d'accès aux documents administratifs, La Documentation française, 2008

ARTICLES

· Herbert Burkert, From the commercialization of public information to administration information law, Colloque Informatique et droit, Montréal, 1992

· Mélanie Clément-Fontaine, Les licences Creative Commons chez les Gaulois, Revue Lamy Droit de l'immatériel, janvier 2005, n°1

· Benoît Tabaka, De l'accès à la réutilisation : le nouveau régime applicable aux données publiques, Revue Lamy Droit de l'Immatériel, juillet 2005, n°7

· Jean-Michel Bruguière, Données publiques : la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 46, novembre 2005

· Ruth Martinez et Bernard Marx, La longue marche de l'information publique, de la liberté d'accès aux documents administratifs à la réutilisation commerciale des informations publiques, Documentaliste-Sciences de l'Information, 2007/3 Vol. 44, p. 218-227

· Guy Lambot, Données moi, Revue Lamy Droit de l'immatériel, juillet 2010, n°62

· Antoine Chéron, La réutilisation des données publiques : bases de données et open data, AJ Collectivités territoriales, septembre 2011, n°9

· Olivier P. Hance, L'information et le droit : la question du statut juridique de l'information, Lamy Droit de l'Immatériel, octobre 2011, n°75

· Mélanie Clément-Fontaine, L'oeuvre libre, JurisClasseur PLA, fascicule 1975

· Guy Lambot, Réutilisation des informations du secteur public : la révision de la directive 2003/98/CE est en marche, Légipresse septembre 2012, n°297

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TEXTES

· Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés

· Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal

· Circulaire du 14 février 1994 relative à la diffusion des données publiques

· Directive 98/CE du 17 novembre 2003 du Parlement européen et du Conseil concernant la réutilisation des informations du secteur public

· Ordonnance n°2005-650 du 6 juin 2005 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques

· Ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives

· Décret n°2005-1755 du 30 décembre 2005 relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, pris pour l'application de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978

· Loi n° 2006-961 du 1 août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information

· Décret n°2011-194 du 21 février 2011 portant création d'une mission « Etalab » chargée de la création d'un portail unique interministériel des données publiques

· Décret 2011-577 du 26 mai 2011 relatif à la réutilisation des informations publiques détenues par l'Etat et ses établissements publics administratifs

· Circulaire du 26 mai 2011 relative à la création du portail unique des informations publiques de l'Etat « data.gouv.fr » par la mission « Etalab et l'application des dispositions régissant le droit de réutilisation des informations publiques

AVIS/CONSEILS CADA

· CADA, avis n°20090372 du 29 janvier 2009

· CADA, conseil n° 20062173 du 8 juin 2006

JURISPRUDENCE

· Conseil d'État 4 mars 1960 Lévy : RDP 1960 p. 1030

· Conseil d'Etat, 29 juillet 2002, n° 200886, Société Cegedim

· Cour européenne des droits de l'homme, Grande Chambre, 10 février 2009, requête n° 14939/03, Sergueï Zolotoukhine c. Russie

· CE, Ass., 10 juillet 1996, Sté Direct Mail Promotion

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RAPPORTS :

· Livre vert sur l'information émanant du secteur public dans la société de l'information - L'information émanant du secteur public : une ressource clef pour l'Europe - 1998

· Rapport Mandelkern : Diffusion des données publiques et révolution numérique (1999)

· Rapport MEPSIR (Measuring European Public Sector Information Resources) de la Commission européenne - 2006

· Partager notre patrimoine culturel - Propositions pour une charte de la diffusion et de la réutilisation des données publiques culturelles numériques - 2009

· Pierre Chrzanowski - data.gov.uk, l'ouverture des données publiques au Royaume-Uni, Ambassade de France au Royaume-Uni, Service Science et Technologie, mars-avril 2011

· Déclaration sur l'Open Data en France (juin 2011)

· Pour une politique ambitieuse des données publiques - Ecole des ponts ParisTech - 2011

· Review of recent studies on PSI re-use and related market developments, G. Vickery - 2011

SITES INTERNET

· http://www.data.gouv.fr

· http://www.etalab.gouv.fr/

· http://www.economie.gouv.fr/apie

· http://okfn.org

· http://opendefinition.org/

· http://www.donneeslibres.info/

· http://www.regardscitoyens.org/

· http://libertic.wordpress.com/

· http://blog.vvlibri.org

· http://www.data-publica.com/

· http://fing.org/

· http://owni.fr/

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ANNEXES :

· Licence Ouverte / Open Licence

· Licence ODbL - Paris






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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe