Au lendemain de l'indépendance, l'Algérie se
réveillait sur une grande priorité, celle qui consiste à
reconstruire son état indépendant. Dans le domaine du patrimoine
culturel, la colonisation française de 132 ans a laissé des
structures réglementaires et institutionnelles que l'Algérie ne
trouvait solution que de les reconduire, tout en gardant la souveraineté
de son état indépendant. Cela est, peut être,
expliqué par le fait que « ... le savoir-faire scientifique
technique faisait défaut à la nouvelle nation et le manque de
professionnels qualifiés ne permettait pas d'explorer tous les vestiges
que recèle la terre algérienne, ajouter à cela le fait que
l'Algérie, sortie de 132 ans de colonisation, ne pouvait se
reconnaître aussitôt dans l'ensemble des vestiges laissés
par les ennemis d'hier »113. On va analyser la politique
patrimoniale algérienne à partir de ses phases historiques, son
contexte législatif et réglementaire, son contexte institutionnel
pour terminer avec un diagnostic et un état des lieux de la protection
du patrimoine culturel, bâti en particulier, au sein de cette politique.
Ce passage nous sera utile pour passer à l'étude de la place et
de l'importance des abords du patrimoine bâti dans la politique
patrimoniale nationale.
Le schéma directeur des zones archéologiques et
historiques rédigé par les services du ministère de la
culture en 2007, a élaboré un phasage historique de
l'évolution de la politique patrimoniale en Algérie sous cinq
phases principales. On ne présentera que quatre du fait que la
première explique la phase coloniale de 1830 à 1962, laquelle on
a déjà analysé. Les quatre phases"" de la politique
patrimoniale de l'Algérie indépendante sont :
· Reconduction de la léMislation
francaise relative aux « monuments et sites » alMériens,
1962-1967: juste après l'indépendance, en
décembre 1962, une loi était publiée portant la
reconduction de la politique coloniale, tout en gardant la souveraineté
algérienne, jusqu'à la préparation et l'élaboration
d'un nouvel ordre
113 KESSAB Ammar, «Face au défi de la
globalisation, quelle politique du patrimoine pour l'Afrique ? »:
Le cas de l'Algérie, in colloque l'Afrique et la
culture africaine dans le monde globalisé du lierne siècle,
Yaoundé, 7, 8 et 9 avril 2009.
114 Ministère de la culture, « schéma
directeur de zones archéologique et historiques », Alger, 2007,
P15.
96
LA BASILIQUE ST-AUGUSTIN ET SES ABORDS A ANNABA
Pour une reconnaissance politique et sociale des valeurs des
abords du patrimoine bâti en Algérie
national. Les dispositions de la politique française
sur les monuments et sites historiques, naturels, archéologiques et sur
la publicité et les enseignes étaient reconduites suivant la loi
n° 62-157 du 31 Décembre 1962 tendant à la reconduction
jusqu'à nouvel ordre de la législation en vigueur au 31
Décembre 1962.
· Le premier support législatif
algérien sur les « monuments et sites »,
1967-1998: le mouvement politique de «
l'algérianisation » du dispositif législatif national avait
mis fm à la politique dite de reconduction. Cette fin était,
à la suite, concrétisée par la production de la loi du 5
Juillet 1973. Dans ce cadre politique, la première production
législative sur les monuments et sites était l'ordonnance 67-281
du 20 Décembre 1967 relative aux fouilles et à la protection des
sites et monuments historiques et naturels. Cette ordonnance avait
contrôlé les actions et les effets de la protection du patrimoine
algérien, bâti et naturel, pour 37 ans jusqu'à la
production de la loi de 1998. Dans le cadre de cette ordonnance, plusieurs
textes fondamentaux étaient produits en matière de monuments et
sites de l'Algérie. Ils seront analysés dans le contexte
législatif et réglementaire.
· Une loi sur le « patrimoine
culturel » de l'Algérie 1998-2003: la loi 98/04
portant la protection du patrimoine culturel, a illustré un grand
changement dans la politique patrimoniale algérienne. Ce changement
consiste en l'appellation de patrimoine culturel, qui veut dire toutes les
formes du patrimoine matériel et immatériel, qui soit un
référent principal de l'identité national depuis la
préhistoire et jusqu'à nos jours. L'autre point marquant de cette
loi était la reconnaissance du patrimoine immatériel, qui
constitue la dimension vivante de la culture algérienne, et la
mobilisation des moyens et des acteurs pour sa protection. Il est important
aussi de mentionné que c'est le premier texte reconnaissant les «
abords des monuments historiques » avec une volonté pour les
protéger. A cette phase, une conscience patrimoniale était, plus
ou moins, atteinte surtout avec l'implication de la société
civile.
· La mise en oeuvre de la loi portant la
protection du patrimoine culturel depuis 2003 : avec la loi
98/04, on constatait la volonté politique vers un autre niveau de
conscience patrimoniale, dans le passage de l'intérêt porté
sur les «monuments et sites » à un intérêt au
patrimoine culturel, matériel et immatériel. La phase des
années 2000 consiste à la construction, la restauration et la
consolidation de l'identité nationale. Pour cette politique, le
patrimoine culturel renvoie à deux notions fondamentales :
l'identité et le territoire. Par rapport à l'identité, les
actions de l'inventaire et du
97
La protection des abords du patrimoine bâti dans la
politique patrimoniale CHAPITRE algérienne et
leur place dans les actions d'urbanisme QUATRIEME
classement des biens culturels, matériels et
immatériels, sont fondées sur une approche totale et
intégrale qui rejette la notion de périodisation, pour construire
une identité nationale authentique à toutes les périodes
historiques de l'Algérie. Par rapport au territoire, la politique
patrimoniale algérienne est consciente que le patrimoine culturel
participe à la fabrication des territoires et qu'elle reconnaisse,
aussi, que ces biens forment eux-mêmes des territoires, qui soient la
somme des lieux de mémoire qui constituent les fragments de notre
identité nationale.