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La cour pénale internationale et les juridictions internes des états

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par Serges NDEDOUM
Université de Dschang - Master 2014
  

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Section 2 : L'incapacité de poursuite ou de jugement des États

La notion d'incapacité sera analysée ici à travers une définition au sens du Statut de Rome (Paragraphe1), et aussi sur les interrogations concernant les suites de la décision de l'État qui a déféré l'affaire devant la CPI pour cause d'incapacité (Paragraphe2).

Paragraphe1-La notion d'incapacité des juridictions nationales

Le terme incapacité désigne en droit une situation dans laquelle une personne physique ou morale se trouve défaillante pour tenir ses engagements. Le terme s'oppose à la notion de capacité qui se définit comme étant l'aptitude reconnue à toute personne d'être sujette de droits et d'obligations. Cette notion contient deux degrés, à savoir la capacité de jouissance et la capacité d'exercice. La première étant reconnue à toute personne, la seconde pour s'appliquer nécessite une aptitude dont l'absence se traduit par une incapacité. L'État en tant que personne morale de droit public interne, pour ce qui est de ses relations internes, ou de droit public international, s'agissant de ses relations avec l'extérieur, est soumis à ces règles. Dans le combat contre l'impunité des crimes graves, il serait inconcevable pour la Communauté Internationale d'être indifférente face à l'incapacité des États à réprimer les violations des droits humanitaires internationaux. Pour cette raison et pour ne pas porter atteinte à la souveraineté des États et à remettre en cause la priorité des juridictions nationales, les rédacteurs du Statut de Rome ont pris le soin de dégager les contours de la notion d'incapacité des États (A). L'intervention de la Cour à cet effet ne demeure pas cependant sans heurts pour ces juridictions (B).

A- L'incapacité et le Statut de Rome

Comme nous l'avons déjà mentionné, une affaire est déclarée recevable d'après l'article17 du Statut devant la CPI si l'État compétent en l'espèce est dans l'incapacité de mener véritablement à bien des poursuites. Les éléments permettant de déterminer l'incapacité de l'État de mener à bien ces poursuites sont prévus à l'article 17 (3) qui dispose que : «Pour déterminer s'il y a incapacité de l'État dans un cas d'espèce, la Cour considère si l'État est incapable, en raison de l'effondrement de la totalité ou d'une partie substantielle de son propre appareil judiciaire ou de l'indisponibilité de celui-ci, de se saisir de l'accusé, de réunir les éléments de preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement à bien la procédure»119(*). Il ressort de cette disposition qu'un État est incapable soit en raison de l'effondrement de tout ou partie de son appareil judiciaire, soit en raison de l'indisponibilité d'un système répressif en la matière. L'analyse de ces notions est laissée à la seule discrétion de la Cour. Car, il n'est prévu nulle part l'explication sur les notions d'effondrement et d'indisponibilité. Mais à notre sens, on peut bien comprendre que l'appareil judiciaire d'un État peut s'effondrer suite peut-être à la décriminalisation d'une situation menaçant la paix internationale, ou encore le vice de corruption qui remet en cause l'impartialité et l'indépendance des juges. Bref, l'effondrement de l'appareil judiciaire peut aussi être considéré comme étant les failles que peuvent présenter les législations pénales nationales comme par exemple leur inadaptation aux normes internationales.

S'agissant de l'indisponibilité, on peut comprendre par là une absence de législation pour la répression, c'est-à-dire qu'au moment des faits, l'État n'a pas de base légale pour connaître de la question, tel par exemple le cas du Cameroun qui n'a pas encore de législation sur les crimes relevant de la compétence de la Cour - ce qui pose le problème de la légalité des délits et des peines, qui est un principe qui sauvegarde et protège les droits des justiciables - ou alors l'État a adapté sa législation au lendemain de la commission de l'infraction. Dans de telles situations, l'État ne peut pas poursuivre et juger les auteurs des crimes graves en application du principe de la non rétroactivité de la norme pénale qui est une règle tout comme celle de la légalité des délits et des peines applicable en droit international et qui a fait l'objet d'intégration dans les législations internes120(*). Il se rend ainsi indisponible.

La charge de la preuve ici pour déterminer l'incapacité des juridictions nationales incombe au procureur de la CPI. Il s'agira pour lui de prouver dans un premier temps l'effondrement ou l'indisponibilité de l'appareil judiciaire national qui doit être total ou partiel. Dans un deuxième temps, démontrer que l'État est incapable de se saisir de l'accusé, de réunir les éléments de preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement à bien la procédure. Et enfin, il est nécessaire de mettre en valeur le lien de cause à effet, c'est-à-dire démontré que cette incapacité est le résultat de l'effondrement ou de l'indisponibilité de l'appareil judiciaire. Dans ce cas, nous pouvons imaginer que l'État, après avoir constaté son incapacité, décide de lui-même de se dessaisir et de déférer la situation devant la CPI. À titre d'exemple l'Ouganda, la RDC, la RCA et la Côte d'Ivoire après qu'ils aient constaté leur incapacité à mener véritablement à bien les poursuites des personnes présumés avoir commis des crimes internationaux sur leurs territoires ont déféré ces situations à la CPI. Mais qu'adviendra-t-il si un État rend une décision et que la Cour estime qu'il n'aurait pas due ou alors qu'il y avait un manque de volonté de sa part ? Quid de l'application du Principe non bis in idem ?

B- Les implications des notions d'incapacité et de manque de volonté dans le respect de la règle non bis in idem

L'article 20(1) du Statut de Rome dispose que : «Sauf disposition contraire du présent Statut, nul ne peut être jugé par la Cour pour des actes constitutifs de crimes pour lesquels il a déjà été condamné ou acquitté par elle».  L'al.2 du même article poursuit : «Nul ne peut être jugé par une autre juridiction pour un crime visé à l'article 5 pour lequel il a déjà été condamné ou acquitté par la Cour».

L'article 20 (1 et 2) pose le principe non bis in idem. Ce principe existait bien sûr avant la CPI et signifie que nul ne peut être jugé deux fois pour la même infraction. Dans le cas de la CPI, il signifie d'une part que nul ne peut être jugé deux fois pour la même infraction et d'autre part que nul ne peut être jugé par une autre juridiction pour un crime pour lequel il a déjà été condamné ou acquitté par la CPI.

L'article 20(3) du Statut de la CPI tout en réaffirmant le principe non bis in idem pour des infractions ayant été jugées par une juridiction autre que la CPI, pose les conditions dans lesquelles la CPI aura compétence pour rejuger ces criminels. Cet article, comme l'article 17, présente les limites du droit qui appartient à la CPI de remettre en cause la bonne foi de l'État et le bon fonctionnement de son appareil judiciaire. Le Paragraphe3 de cet l'article laisse supposer par une interprétation à contrario que les cas prévus pourront fonder une exception d'incompétence ou d'irrecevabilité. Lorsqu'une enquête ou des poursuites ont déjà eu lieu au niveau national et ont conduit soit à un acquittement, soit à une condamnation, la CPI décide que l'affaire est irrecevable en vertu de l'article 17 Paragraphe1 alinéa b du Statut de la CPI.

L'article 20(3 a) prévoit que la CPI est compétente et que l'affaire est recevable si la procédure devant la juridiction nationale avait pour but de soustraire la personne accusée à sa responsabilité pénale. Les termes employés par cette disposition sont quasiment identiques à ceux de l'article 17 (2). La preuve de cette intention doit reposer sur des faits qui représentent plus qu'une simple négligence ou inadvertance. Il pourrait s'agir notamment d'un acquittement injustifié au regard des éléments de preuve solides du dossier, une peine sans commune mesure avec la gravité du crime, un détournement ou un manque de rigueur dans la conduite des poursuites.

L'article 20(3b) rappelle inévitablement l'article 17(2c), qui conditionne la compétence de la CPI à une absence d'indépendance et d'impartialité au vu des garanties judiciaires prévues par le droit international, ainsi qu'à une manière de conduire la procédure incompatible avec l'intention de traduire l'intéressé en justice. Les éléments nécessaires pour établir la compétence de la CPI en vertu de cet article sont exactement les mêmes que ceux de l'article 17 (3c).

Au reste, la CPI comme les autres juridictions internationales applique le principe non bis in idem sauf si la procédure devant l'autre juridiction avait pour but de soustraire l'accusé à sa responsabilité pénale ou a été conduite d'une manière qui démentait l'intention de l'État de traduire l'intéressé en justice. Toutefois, une autre question nous revient à l'esprit, celle de possibilité pour les États de reprendre l'affaire après déferrement devant la Cour pour cause d'incapacité. Bref, est-il permis à un État d'interrompre l'action de la CPI ?

* 119 Yirsob Dabire (D.), Le rôle et la place des États dans le fonctionnement de la Cour pénale internationale, DEA de droit public, Université de Genève, 2006, p.35.

* 120 Le Cameroun pour sa part a reconnu ces principes d'abord dans le préambule de la constitution du 18 janvier 1996 ensuite dans son code pénal précité: art.17 pour le principe de la légalité des délits et des peines « les peines et les mesures sont fixées par la loi et ne sont prononcées qu'à raison des infractions légalement prévues ; et l'art.3 pour le principe de la non rétroactivité : « Ne sont pas soumis à la loi pénale les faits commis antérieurement à son entrée en vigueur ou ceux qui n'ont pas été jugés avant son abrogation expresse ou tacite. »

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