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La cour pénale internationale et les juridictions internes des états

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par Serges NDEDOUM
Université de Dschang - Master 2014
  

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SECONDE PARTIE : LA COLLABORATION ENTRE LA COUR ET LES JURIDICTIONS NATIONALES EN MATIÈRE DE POURSUITES

Dans la lutte contre l'impunité des auteurs des crimes odieux, la Cour, pour une bonne justice, a besoin d'une étroite collaboration avec les États membres aux Statut. L'article 86 dudit Statut revient sur la question lorsqu'il dispose que : « (...), les États parties coopèrent pleinement avec la Cour dans les enquêtes et poursuites qu'elle mène pour les crimes relevant de sa compétence. ». À la lecture de cet article, on est tenté de croire que la Cour n'a de collaboration qu'avec les États Membres au Statut de Rome. Les États même non parties doivent apporter une aide à la Cour lorsqu'elle en fait la demande. Cette collaboration s'exprime mieux avec le principe de complémentarité. Ce principe est assorti de deux volets.

Le premier volet, a concerné la complémentarité en matière de compétence qui a fait l'objet de développement dans la première partie de ce travail. La seconde quant à elle, concerne la collaboration entre la Cour et les juridictions internes des États en matière de poursuites. À ce niveau, on parlera beaucoup plus d'entraide répressive entre les deux juridictions pour une meilleure administration de la justice pénale internationale. Claude LOMBOIS définit l'entraide répressive comme étant « l'ensemble des moyens par lequel un État prête le concours de sa force publique ou de ses institutions judiciaire à l'instruction, au jugement ou à la répression d'une infraction par une juridiction autre que celle qui relève de son ressort. »132(*). Il existe cependant deux formes d'entraide à savoir, l'entraide horizontale, lorsqu'un État prête le concours de sa force à un autre État ; l'entraide verticale lorsqu'il s'agit plutôt d'une juridiction internationale telle la CPI par exemple. C'est cette dernière forme qui nous intéresse. Et nous pouvons dire d'emblée que la verticalité dans cette deuxième forme d'entraide traduit déjà l'idée d'une supériorité des juridictions internationales sur les juridictions nationales. C'est la raison pour laquelle les décisions que pourront rendre ces différentes juridictions n'auront pas la même autorité de la chose jugée. Et aussi les exigences auxquelles ces États sont soumis.

Cependant, en ce qui concerne l'obligation pour les États de coopérer avec la Cour, le Statut n'a rien prévu en termes de sanctions. Est-ce à dire que les États ont une liberté en la matière ? Avant de répondre à cette préoccupation (chapitre2), il sera judicieux de revenir sur les mécanismes de l'entraide répressive verticale entre la Cour et les juridictions nationales (chapitre1).

CHAPITRE I : LES MÉCANISMES D'ENTRAIDE RÉPRESSIVE VERTICALE

L'intervention des États dans l'activité de la Cour revêt des formes différentes. Le Statut prévoit à cet effet dans son chapitre IX qui traite de la « coopération internationale et assistance judiciaire », différentes formes de concours des États. Certaines sont spécifiques aux États parties (section 2), tandis que d'autres peuvent, selon les circonstances, incomber aussi aux États non parties au Statut qui seraient liés à l'affaire en cours (section 1).

Section 1 -La participation des États à la procédure devant la Cour : l'assistance judiciaire et policière et l'exécution des sentences

C'est ici le lieu privilégié de la nécessité d'une étroite collaboration entre le ou les États et la Cour (Paragraphe1). L'intervention des États est indispensable, intervention sans laquelle l'activité de la Cour, est vouée à un échec quasi certain. Comme l'a affirmé un auteur à propos des tribunaux ad hoc, « ces tribunaux n'ont pas le pouvoir de commander (...) Ces tribunaux sont donc dépourvus du pouvoir de contrainte ; ce pouvoir demeure entre les mains d'États souverains.. »133(*).

Bien plus, la Cour ne dispose non plus d'établissements pénitentiaires pour l'exécution des sentences, et un appel est fait aux États en vue de combler ce manque (Paragraphe 2).

Paragraphe 1- Les organes judiciaires et policiers nationaux au service de la Cour

Lorsque, après examen des éléments d'une affaire, le procureur décide d'ouvrir une enquête et obtient en ce sens l'autorisation de la chambre préliminaire, il commence son enquête par la recherche d'indices et de preuves. C'est là une tâche complexe pour le procureur, qui peut se rendre lui-même sur les lieux ou faire exécuter les actes nécessaires sur place par les organes compétents de l'État. L'assistance des États est requise d'une part pour la recherche des preuves et indices et également pour l'identification des suspects (A). D'autre part, elle est également nécessaire pour l'arrestation, la détention et enfin la remise à la Cour du suspect (B).

A- L'assistance pour la recherche des preuves et indices

Le bureau du procureur a la charge de la conduite des enquêtes, et a donc besoin de mener des investigations sur les lieux de l'affaire. Il jouit pour cela des privilèges et immunités reconnus aux agents de la Cour dans l'exercice de leur tâche134(*). À la différence des procureurs des TPI - qui bénéficient d'une totale latitude pour prendre et adresser directement à un État toutes les mesures d'enquête qu'il estime nécessaires à ses investigations135(*)- le procureur de la CPI doit constamment rechercher la coopération des États sur le territoire desquels il envisage d'investiguer. Ceci est révélateur de la place de choix qui est accordée aux États par le Statut.

Le rôle des États (particulièrement ceux qui sont parties au Statut) est d'abord de se doter des mécanismes juridiques nécessaires afin de mieux répondre aux sollicitations de la Cour; et ensuite surtout de mettre à la disposition de la Cour leurs services compétents, afin d'accomplir les actes d'enquête, qui sont aussi nombreux que variés. C'est pour eux une obligation primordiale, qui doit être accomplie en temps utile avant que les souvenirs des témoins ne s'estompent ou que des preuves essentielles ne disparaissent. En effet, en plus des indices qu'il pourra obtenir de lui-même sur les lieux lors des interrogatoires de témoins par exemple, il peut être utile pour le procureur de la Cour de prendre connaissance de certaines informations en relation avec le cas qui l'intéresse, et qui sont en possession des services judiciaires ou policiers d'un État. De surcroît, en ce qui concerne les mesures de contrainte telles les arrestations de suspects et les saisies de pièces à conviction, le procureur ne peut agir directement sur le territoire des États. Seul l'État est détenteur du pouvoir de contrainte à l'intérieur de ses frontières, et le procureur est dans l'obligation d'obtenir que cet État mette ses forces à sa disposition et l'appui.

Un État peut cependant, pour des raisons de sécurité nationale, rejeter une demande d'assistance de la Cour. En effet, en vertu de l'article 72, l'État requis peut estimer que la divulgation d'informations relatives à l'enquête, pourrait porter atteinte à sa sécurité nationale, et refuser son assistance à la Cour en ne fournissant pas ces documents. La Cour peut, dans de telles circonstances, modifier sa demande en vue de permettre à l'État de l'exécuter sous une autre forme. Mais, toujours est-il que la demande, même modifiée, pourrait ne pas aboutir. En effet, l'État aura toujours le dernier mot, même s'il a l'obligation de consulter la Cour136(*), avant sa décision et de justifier son refus137(*). « Le principe de la souveraineté des États l'a encore emporté ».Cette possibilité leur est-elle reconnue lorsque la Cour est saisie par le Conseil de sécurité de l'ONU ? En principe, les États ne devraient pas pouvoir refuser d'apporter leur assistance dans cette hypothèse. Dans ce cas, la contrainte à l'encontre des États est plus grande parce que découlant de l'article 25 de la Charte. L'obligation de coopérer est ici doublement marquée pour les États parties. Mais ici encore, la souveraineté des États est mise en avant. Et, il n'est pas insensé d'affirmer que la menace d'une sanction du Conseil de Sécurité n'est pas toujours suffisante pour obliger un État à s'exécuter, même si juridiquement il est indéniable que cet État a une telle obligation. Ainsi, seule la volonté des États fera la différence, et cela dès l'ouverture de l'enquête jusqu'à l'exécution des peines prononcées.

B- L'arrestation, la détention et la remise de suspect à la Cour

Lorsque les éléments recueillis par le procureur et ses agents au cours de l'enquête font peser des soupçons sérieux sur une ou plusieurs personnes identifiées, le Procureur peut demander l'arrestation et la remise de ces personnes à la Cour. Ainsi, suite à la requête du Procureur et après avoir effectué un contrôle des éléments à charge, la chambre préliminaire de la Cour peut délivrer un mandat d'arrêt contre les suspects selon les conditions de l'article 58 (1) du Statut. Le mandat est adressé à l'État sur le territoire duquel se trouve la personne concernée. Ici encore, l'État a un rôle avéré. Les instances pénales internationales dépendent entièrement des États pour l'exécution des mandats d'arrêt, la CPI encore plus que les TPI. L'arrestation ne peut se faire que par les services de police habilités de l'État, et celui-ci doit mettre en oeuvre tous les moyens en vue de la localisation et de l'arrestation du suspect, conformément au mandat délivré par la Cour. C'est là une étape cruciale devant la Cour, dans la mesure où la présence de la personne suspecte est nécessaire à toute poursuite. La procédure devant la Cour est de type contradictoire et ne peut se dérouler qu'en la présence physique de l'accusé aussi bien devant la chambre préliminaire pour la confirmation des charges138(*), que devant la chambre de première instance lors du procès139(*), sauf dans des circonstances particulières. Le Statut ne prévoit pas de procès par contumace. Des personnes mises en cause et recherchées par les TPI, sont encore en liberté bien que identifiées et pratiquement localisées. La CPI n'est pas prémunie contre ces obstacles et il est nécessaire que soient précisées les conditions de la coopération entre elle et les États afin de permettre l'efficacité dans l'exécution de ses mandats. Le Statut prévoit en effet, que l'État qui reçoit un mandat d'arrêt émanant de la chambre préliminaire prend immédiatement les mesures appropriées pour son exécution. De plus, l'État doit faire exécuter ce mandat sans chercher à vérifier sa conformité à l'article 58 du Statut. Il a seulement le devoir de s'assurer - après coup - de l'identité de la personne arrêtée, de la régularité de la procédure et du respect de ses droits, en vertu de son droit interne et du Statut. Une fois que la personne suspectée est arrêtée, l'État qui la détient organise dans un délai raisonnable sa remise à la Cour. Il convient de souligner l'importante distinction entre la remise à la Cour, instance internationale et l'extradition vers un autre État140(*). Ces deux procédures répondent en effet à des logiques différentes. Ainsi, un État ne peut prétexter de la non extradition de ces nationaux prévue dans sa constitution pour refuser la remise à la Cour d'une personne qu'il détient. La Cour, contrairement aux tribunaux nationaux est une juridiction internationale, qui offre toute les garanties d'impartialité et du respect des droits de l'accusé. De ce fait, les États devraient assouplir leur législation sur la remise de personne à la Cour - par rapport aux dispositions sur l'extradition - afin de faciliter cette forme de coopération.

Le problème du choix entre l'extradition et la remise à la Cour peut également se poser lors de demandes concurrentes. Dans une telle hypothèse, la décision de l'État doublement requis est prise en fonction de plusieurs circonstances notamment sa qualité d'État partie ou non au Statut. En outre, une des difficultés qui peut également se poser concernant l'arrestation et la remise d'une personne à la Cour, est la position importante de cette personne dans la sphère des organes de l'État, qui va parfois jusqu'à lui conférer une immunité (de fait si ce n'est de droit) et qui rend quelque peu complexe sa capture. Une fois la personne arrêtée et remise à la Cour, la coopération des États ne s'arrête pas pour autant. En effet, même si ceux-ci ne sont pas très actifs au cours du procès proprement dit (bien qu'ils puissent ponctuellement intervenir)141(*), leur apport dans l'exécution des sentences prononcées est essentiel.

* 132 Lombois (C.), Droit pénal international, Op.cit.

* 133 Cassese (A.), « Y a-t-il un conflit insurmontable entre souveraineté des États et justice pénale internationale ? », in CASSESE (A.) et DELMAS-MARTY M., Crimes internationaux et Juridictions internationales, Paris, P.U.F., 2002, p. 17.

* 134 Cf. article 15 de l'Accord sur les privilèges et immunités de la Cour Pénale Internationale (ICC-ASP/3/Res.1).

* 135 Cf. le Règlement de procédure et de preuve des TPIY et TPIR, règle 40. Ce pouvoir découle du mode de création de ces tribunaux. Les résolutions du Conseil de sécurité confèrent en effet une force obligatoire aux actes et décisions de ces tribunaux envers les États.

* 136 Cf. article 97 du Statut.

* 137 Cf. article 93(6) du Statut.

* 138 Cf. l'article 61 du Statut.

* 139 Cf. l'article 63 du Statut

* 140 Cf. l'article 59 du Statut.

* 141 Cf. Règlement de procédure et de preuve devant la CPI, règle n°103.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery