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Culture et football au Cameroun. le cas du canon sportif de Yaoundé dans la région du centre; une contribution à  l'anthropologie du football

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par Mouafo Nopi ARNOUX
Université de Yaoundé I - Master en Anthropologie 2014
  

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II.1.5 Le football ; une activité culturelle, rituelle et magico-religieuse

Le football Africain est un football psycho-théorique, magico-religieux et technico-tactico-physique. Pour Pierre LAFRANCHI et al. (2002) dans Le football, il signale qu'« il est pur, naïf et infantile ». Il est tributaire du style de jeu, qu'il soit défensif (antijeu) ou offensif, décrit l'ensemble des expressions caractéristiques d'un collectif à même de conférer un cachet  ou une identité à l'équipe. Alain EHRENBERG (1985) voit en le football « une représentation symbolique des valeurs fondamentales de la société moderne ». Il ajoute aussi que

Le football n'est pas un agent de manipulation, mais un enjeu entre des forces qui, dans certaines conjonctures, se l'arrachent et tentent d'imposer leur légitimité sur la scène publique. Il ne s'agit évidemment pas de défendre ici une quelconque " pureté '' du sport .Elle fait elle-même partie de l'enjeu, mais de mieux situer le problème. Si les rapports entre sport et politique sont étroits, ils sont contradictoires et ambigus, pour le moins complexes.

Pour renchérir, Béa VIDACS4(*) souligne que le football favorise la formation de l'identité et l'identification des niveaux d'exclusion, de la culture à la région, de la région à la nation, de la nation au continent et du continent au monde, selon les conditions économiques, politiques, raciales et les circonstances historiques. C'est dire que le football uni et divise les peuples en ceci que les matchs entre vétérans et jeunes, publics et privés, armées et civils, employeurs et employés renforcent le lien entre les peuples et les cultures malgré l'ethnicité en tant que danger, qui abdique la méritocratie, détruit l'objectif de l'équipe et réduit le rendu lors des matchs. Cette ethnicité selon elle peut être manipulée par le « nous » contre le « vous », le « soi » et l'« autre » selon les termes de MBONJI EDJENGUELE (2000). Au niveau local, cette ethnicité abonde, par contre au niveau national, il est réduit. Pour Théodore ATEBA YENE (1990) et Béa VIDACS (2010), le football comprend à la fois une partie cachée (dessous) et visible (dessus) et est régi parce que Béa VIDACS appelle  « le principe de la parenté » gouvernant le football. Comme celui d'autres continents, il possède son propre style et ses propres conceptions du jeu.

Le football dans chaque société a ses spécificités et ses réalités et les joueurs, leur propre manière de penser, de s'exprimer. Ce football repose sur la conservation du ballon afin de mieux construire le jeu. Proposant une inauguration de la tradition totémique des fauves et rapaces, lieux sacrés, le club Manguissa appelé « Lion Sportif » répandu la nouvelle et c'est ainsi que la dénomination des clubs de football, est tributaire des éléments culturels ou naturels de l'environnement. C'est le cas des clubs tels que « Caïman » de Douala relatif à l'élément « eau » ; « Bamboutos » de Mbouda en rapport avec les Monts Mangwa, lieux sacrés ; « Tonnerre Kalara Club » de Yaoundé relatif à un phénomène naturel culturalisé ; « Coton Sport » de Garoua en rapport avec la culture prédominante ; « Fôvù » de Baham relatif au Dieu de la grotte; « Aigle » de Dschang ; « Scorpion » de Mbe etc. Ces dénominations montrent la relativité ethnique et le retour à la terre mère. Pendant les préparations des matchs et les compétitions, les clubs, en fonction de leurs ethnonymes, veulent faire régner à jamais leur suprématie sur les autres or pour qu'il y ait domination, il faudrait qu'un club soit plus combatif et mieux préparer, ceci avec l'exclusion du paramètre des officiels. Une fois celui mis en exergue, tout devient spéculation.

Notons aussi les ancêtres, qui jouent un rôle dans la victoire ou la défaite des clubs sur le stade, par le fait de n'avoir pas été consulté lors de l'aménagement du stade Omnisport de Yaoundé en 1972 car dit-on le squelette des morts a été exhumés et mis à nu  troublant ainsi leur tranquillité; c'est ce dont signalait déjà MBONJI EDJENGUELE (1998) dans Les cultures de développement en Afrique : essai sur l'impossible développement sans révolution culturelle qu' « en négro-culture, les morts ne sont pas morts puisqu'ils vivent à travers les vivants, leurs progénitures ». Pour cela, ils formulent une malédiction sous forme de magie contre des individus et des formations.

Les mystères de la culture africaine paraissent difficiles à comprendre pour les allogènes pourtant ils constituent le cosmos des peuples noirs d'Afrique. Dans l'équipe nationale tout comme dans les clubs, les camerounais n'ont pas la même tradition historique et culturelle encore moins les même intérêts économiques, pratiques et religieuses. Les pratiques « maraboutiques » illustrent la logique des jeux au hasard car la « mentalité magique » selon Jean MFOULOU cité par Charles ATEBA EYENE (2011) fragilise tout effort pouvant contribuer au développement du sport. Joseph OWONA cité par Charles ATEBA EYENE (2011), renchérit en présentant cela comme les « ruses et pièges à éviter pour la qualité du mouvement sportif car pour lui, ce système de prédiction des marabouts à plusieurs fois montré ses limites sinon le Vaudou béninois et la Magie indienne auront fait de leurs pays des champions du monde

Pourtant si le sport migre d'une activité physique vers une activité sociale codifiée, cela fait partie intégrante du concept de culture ou de civilisation dont Edward Burnett TYLOR (1871) dans Primitive culture, résume en un « tout complexe qui comprend les connaissances, les croyances, l'art, les lois, la morale, la coutume et toutes autres capacités ou aptitudes acquises par l'homme en tant que membre de la société ». C'est dire que toute activité est culturelle et holiste, totale et doit selon MBONJI EDJENGUELE (2000) dans les Cultures-vérités en Afrique. Le soi et l'autre. Ethnologie d'une relation d'exclusion, sortir de l'art de vivre pour la science ou la vérité de vivre. Le football en tant que production culturelle puisant dans les valeurs du passé en effectuant un va et vient permanent avec le présent, représente la sensibilité, le mode de vie d'un peuple afin qu'il ne participe à la civilisation universelle.

Marc AUGE (1982 ; 1998) et Christian BROMBERGER (1995) apportent une approche entre sport et religion bien distincte de celle de Jean-Marie BROHM (1983) qui pour lui, voit des métaphores religieuses du discours sportif à travers las pratiquants, les cathédrales etc., la dimension sacrée des maillots, des trophées et des médailles ; en ceci que le sport-spectacle football devient pour certaines personnes ou groupes de personnes une religion de substitution c'est-à-dire qui fonctionne comme une « religion sans Dieux » . Cette discipline sportive entretient d'étroite relation avec le sacré car il pallie le recul de la religion traditionnelle dans les sociétés modernes. La cérémonie sportive constitue un rite qui rassure les participants contre l'angoisse et canalise les émotions. Marc AUGE (1982) évoque la conception zoulou du football est influencée par la soumission des guerriers au roi Shaka, organisateur de la nation zoulou au début du XIXème siècle. Pour cela, autour d'un grand feu, le guérisseur anti-sorcier responsable blessures sur le corps, faisait absorber aux joueurs des potions afin de donner force et vaillance ; blindait les chaussures et maillots comme armes de combat et l'abstinence sexuelle comme manifestants de l'organisation guerrière et sportive. Il écrit à cet effet :

Peut-on, par exemple, aimer le football, regarder la télévision, et rendre compte du fait que pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, à intervalles réguliers et à heure fixe, des millions d'individus s'installent devant leur autel domestique pour assister et, au sens plein du terme, participer à la célébration d'un même rituel ?

L'espace sportif ou le stade quant à lui, devient un milieu d'enculturation, d'intégration et d'échange à travers des chorégraphies et autres prestations et à partir d'un ensemble d'idées et de sentiments et de pratiques.

* 4 Idem

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