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Les conseils de développement entre « empowerment » et démocratie participative

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par Yannis ALAYA
Université Reims Champagne Ardenne - Master Aménagement et Urbanisme 2017
  

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1.2La construction vers une démocratie participative

1.2.1 Une construction historique non loin de celle de l'empowerment- de 1960 à 1980.

Simon Wuhl, sociologue et ancien enseignant à l'Université Paris Nanterre, a réalisé de nombreux écrits sur les thèmes du « chômage, de l'exclusion, de l'analyse des politiques de l'emploi et de l'insertion » d'une part, et « de la justice sociale » d'autre part33. Par ailleurs il écrit sur les fondements de la démocratie participative en s'inspirant d'écrits de la politologue allemande, Hannah Arendt34.

La construction historique qu'il fait de la démocratie participative suit de nombreuses similitudes avec la construction du mouvement empowerment en France. L'évolution du statut des banlieues avec la création de dizaines de groupes d'actions municipaux (GAM) animés par des militants appartenant plutôt aux catégories sociales supérieures (professeurs, ingénieurs, professions libérales), afin de peser politiquement sur le choix des municipalités. Ils sont soutenus et même formés à la gestion des affaires municipales par l'Association pour la démocratie locale et sociale (ADELS).

Le point de départ de l'ascension des GAM est la victoire d'Hubert Dubedout à Grenoble, ville emblématique de leurs actions, aux élections municipales de 1965. Les mouvements de luttes urbaines soutenus par le milieu associatif marquent une réorganisation dans la prise de conscience des individus/citoyens face aux politiques publiques. Encore une fois l'évènement de 1968 marquera une fracture plus importante pour les politiques publiques en place mais aussi dans les mobilisations et luttes urbaines. Cette multiplication des luttes urbaines s'accompagne, elle aussi, d'un courant de recherche en sciences sociales dans ce domaine. Des sociologues comme Alain Touraine35 ou Manuel Castells36, à la suite du précurseur Henri Lefebvre37 , vont impulser les réflexions sur les mouvements sociaux urbains. Mais, malgré leur ampleur, ces mouvements ne s'incarnent pas dans une pratique politique susceptible de transformer en profondeur la situation socio-urbaine de l'époque.

Parallèlement on voit perdurer une démarche plus coopérative des GAM sur le plan local. Certaines municipalités mettent en place des commissions « extra-municipales », où des habitants peuvent confronter leur point de vue avec des élus locaux, des experts et des chercheurs, sur des choix d'aménagement et de gestion locale. Dans les années 1970, le cas de Grenoble mis à part, les résultats sont peu significatifs. Mais, outre que l'état d'esprit imprimé a largement préparé les victoires municipales de la gauche en 1977 (et peut-être, de l'élection présidentielle de 1981), on assiste alors à une phase d'apprentissage culturel d'un difficile travail en commun entre des acteurs appartenant à des univers sociaux très différents, qui s'avèrera très précieux pour les étapes ultérieures de développement de la démocratie participative.

33 Article consultable depuis le site http://www.simonwuhl.org/25.html

34 Hannah Arendt, Qu'est-ce que la politique, Seuil (trad. franç.), 1995.

35 Alain Touraine, La production de la société, Le Seuil, 1973

36 Manuel Castells et alii, Sociologie des mouvements sociaux urbains, Copedtih,1974

37 Henri Lefebvre, La révolution urbaine, Gallimard,1970.

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Toutefois, un exemple célèbre dans les années 1970 et 1980, celui de la mobilisation des habitants du quartier de l'Alma-gare à Roubaix, offre un aperçu d'une initiative socio-urbaine de contestation et de coopération, qui s'est inscrite dans la durée. Cette démarche participative s'est élaborée au fil des ans à travers plusieurs phases38 :

- 1967, la phase de contestation : sous l'égide de la Confédération Syndicale du Cadre de Vie (CSCV), les habitants du quartier se mobilisent contre un projet destructeur de rénovation urbaine imposé par la Ville.

- . 1973, le mouvement se structure en « contre-pouvoir » : les militants et les habitants font appel à des experts et à des chercheurs (grâce à des financements expérimentaux), l'ensemble étant réuni au sein d'un Atelier Populaire d'Urbanisme (APU). Cette instance est ouverte aux habitants du quartier qui viennent régulièrement y discuter de l'avenir de l'Alma-gare. L'atelier élabore un contre-projet, basé sur la prise en compte des qualités spatiales aux courées du Nord, il s'agit de sauvegarder les opérations de réhabilitation et de construction neuve.

- 1978, la phase de reconnaissance : la mairie de Roubaix retient dans ses grandes lignes le contre-projet de l'APU et accepte l'idée d'un schéma directeur d'aménagement du quartier, conçu en liaison étroite avec les habitants et leurs propres experts.

Cette conception de la démocratie participative, jouant sur les registres du conflit et de la coopération compétente avec les instances publiques locales, sera, par la suite, une référence importante pour tous ceux (militants associatifs, élus locaux, chercheurs, habitants non engagés) qui souhaiteront graver des démarches de démocratie participative dans le domaine de la gouvernance urbaine.

La politique menée par Hubert Dubedout sous une politique socialiste des années 80 (arrivé au pouvoir en 1981) et dans le montage du programme de requalification urbaine et sociale des quartiers difficiles. Il fait références aux mouvements sociaux et participatifs de l'Alma-gare de Roubaix en mettant en avant les dynamiques associatives formelles ou informelles, pour la réussite de cette politique de la ville.39

38 Albert Mollet (dir.), Quand les habitants prennent la parole, ministère du Logement, Plan Construction, 1981. 39Hubert Dubedout, Ensemble, refaire la ville, La Documentation française, 1983.

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Le rapport Dubedout ne se contente pas de déclarations sur le thème participatif : il contient des innovations institutionnelles importantes qui ouvrent des possibilités nouvelles à l'intervention des associations et des habitants dans l'élaboration de projets qui les concernent :

- Au niveau du quartier concerné, « une Commission locale » réunissant l'ensemble des forces institutionnelles (élus locaux, responsables administratifs, agents de développement, d'une part, et de la société civile (associations formelles ou informelles) d'autre part, est appelée à jouer un rôle d'élaboration collective sur les projets et programmes en débat.

- Au niveau de la ville, cette instance est élargie à d'autres acteurs plus indirects (les forces socio-économiques notamment), dans l'optique d'une harmonisation entre les programmes définis au niveau du quartier et les objectifs concernant l'ensemble de la cité.

- Au niveau central, la Commission nationale reproduit la composition des commissions

locales - avec toutefois, une présence moins forte des représentants de la société civile - et définit les grandes orientations ainsi que les répartitions budgétaires entre la quinzaine de quartiers particulièrement difficiles qui font partie de l'expérimentation au départ.

Simon Wuhl soumet une interrogation dans ses écrits, « peut-on porter sur ces initiatives d'encouragement à une intervention citoyenne plus active des habitants, des associations, et des médiateurs sociaux favorables à une démocratie plus participative ? » Il explique le bilan

de cette politique comme « plutôt décevante » Il s'explique par l'épuisement de la
participation de la société civile dans l'élaboration des projets et des programmes
, notamment lors de la généralisation d'une politique, envers les quartiers difficiles, à la fin des années 80. La politique de la ville qui est venue englober les politiques sociales de participation n'a pas permis de constituer les milieux associatifs formels et informels comme partenaire pérenne, crédible et porteur d'une compétence sur les questions de cohésion sociale et du vivre ensemble face au pouvoir des institutions. Le constat fait par Marie-Hélène Bacqué sur « le rendez-vous manqué entre la gauche et les habitants des quartiers populaires » marquera une rupture avec le mouvement participatif.

On ne peut pas dire que la démocratie participative, qui a pu naitre durant la période d'après-guerre, n'a pas eu de rôle dans la poursuite des politiques de développement social des quartiers en permettant de consolider la démocratie en place. Nous retrouvons de nombreuses opérations au service des villes qui n'ont eu de cesse que de stimuler la dimension participative autour des programmes. Mais et surtout, soutien à des associations

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existantes, jusqu'à l'incitation à en créer de nouvelles, afin de mettre en valeur des groupes de jeunes ou des mouvements de femmes.40 »

Elle a su mettre en avant et faire interagir les différentes parties prenantes de la politique de la ville, dans une nécessité de pérenniser les interactions entre les sphères institutionnelles (élus locaux, représentants administratifs, etc.) d'une part, et celle de la société civile (associations formelles, informelles, citoyens non engagés, etc.) d'autre part. « On a là un cadre particulièrement approprié pour l'initiation d'une démocratie délibérative dans le sens défini par Habermas, qui insiste sur les conditions d'organisation continue des délibérations les plus ouvertes aux citoyens, les plus informées et les plus argumentées possibles, en préalable aux décisions sur les choix publics.41 ».

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