Introduction
Le lundi 8 janvier 1996, François Mitterrand1(*) qui souffre d'un cancer de la
prostate, s'éteint au petit matin à son domicile parisien, 7 mois
après avoir quitté l'Elysée. Agé de 79 ans,
l'ancien chef d'Etat, a indéniablement marqué la vie publique et
politique nationale. Des messages affluent du monde entier, lui rendant
hommage. Il est inhumé à Jarnac en Charente trois jours plus
tard.
Dix ans après sa mort, de sa ville natale à
Paris où les socialistes organisent une journée porte ouverte au
siège du PS2(*), la
journée du dimanche 8 janvier 2006 est vouée aux
commémorations de la mort de l'ancien Président de la
République. Dépôt de gerbes sur la tombe, séances
d'hommages, discours des représentants de ses anciens opposants, du
Gouvernement et de l'actuel Président de la République, se
joignant aux cérémonies.
Quatorze ans de pouvoir pour le seul Président de
Gauche sous la 5ème République auront permis aux
médias de montrer sa part de lumière : abolition de la peine
de mort, réformes sociales, Europe, Grand Louvre ; mais aussi sur
sa part d'ombre, montée du chômage, Vichy, écoutes
téléphoniques et autres affaires.
François Mitterrand a été l'un des plus
charismatiques hommes politiques français du 20ème
siècle. Il semble inévitable qu'à ce titre les
médias donnent à l'anniversaire de sa mort une couverture
importante. Il ne s'agit pas là de juger si l'occurrence devient un
événement, car il s'avère comme évident que
l'actualité brûlante est plus importante, mais plutôt de
voir comment, une dizaine d'années après, les médias
oscillent entre l'Histoire et la Légende d'un homme qui a marqué
son siècle et son pays.
Première Partie : 10ème anniversaire de
la mort de Mitterrand : du pourquoi au comment
Lorsque l'on se lance dans une recherche en communication, il
est important de savoir s'organiser. Il n'existe pas de recette
« toute faite ». Il est de notre propre
responsabilité de créer ses outils et son propre angle d'attaque.
Cette partie est donc consacrée à la construction
méthodologique nécessaire au traitement de mon sujet.
I -
Préliminaires à la recherche en médiatisation
I - 1 : Pourquoi
Mitterrand ?
Il est évident que le chercheur se doit de rester
neutre dans l'objet de sa recherche, mais l'être humain qui est
derrière a forcément un avis déjà tout fait sur la
question qu'il cherche à prouver ou à infirmer. C'est pour cette
raison qu'il est impossible pour moi de définir le pourquoi de ma
problématique sans développer un minimum les a priori et
les raisons qui m'ont poussée à orienter ma recherche dans un
sens bien particulier
Il y a dix ans, un matin, au lycée, j'apprenais la mort
de François Mitterrand. Je ne vais pas faire ici l'analyse et le bilan
du mandat. Qu'il me soit juste permis de repenser à ce que Mitterrand
incarnait pour ma génération : une figure de sage, de
grand-père, de président "naturel" puisque, née en 1981,
j'ai grandi avec son mandat. Son portrait était accroché au
préau de mon école, observant mes jeux d'enfants, les fêtes
scolaires et les répétitions musicales. Pendant quatorze ans, ses
voeux de fin d'année ont été écoutés avec
attention dans ma famille où l'on a plutôt le coeur à
gauche. Je me souviens des premiers sujets télévisés
parlant politique que je comprenais plus ou moins. Je crois que Mitterrand,
à l'époque, m'inspirait une sorte de respect et qu'il est le
point de départ de ma passion pour la politique. C'est donc avec un
certain plaisir que je me penche aujourd'hui sur l'anniversaire de sa mort.
Bien sûr le rapport à Mitterrand a changé, et c'est
davantage la leçon politique qui aboutit au 10 mai 1981, la
volonté au service du changement, la nécessité
d'espérance, que je retiens.
Mais, avant ma recherche, j'avais le sentiment que
c'était le personnage plus que l'homme politique qui était
célébré. Rien sur l'exercice du pouvoir ou qui ressemblait
à un bilan de sa politique. Au-delà des insuffisances, des
échecs voire des dérives qu'il faut toujours rappeler et garder
en mémoire pour préparer l'avenir, il y avait pourtant des
aspects de la politique Mitterrandienne que la gauche aurait pu chercher
à réhabiliter aujourd'hui, ou dont elle aurait pu souligner
l'actualité. Au lieu de cela, il me semblait que tout le monde
préférait communier dans le souvenir de Mitterrand le grand
homme, le personnage de roman, l'homme de lettres, celui qui incarnait la
grandeur de la France.
* 1 Biographie
complète en Annexe 1
* 2 PS : Parti
Socialiste français
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