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Recomposition des rapports ville - campagne en Ile de France: exemple de la zone maraichère de Cergy

( Télécharger le fichier original )
par Ibrahim HESSAS
Université Paris X (nanterre) - Master I Géographie et améngement (mondialisation et dynamiques rurales comparées) 2006
  

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Première partie :

L'agriculture en Ile de France : de la prise en compte spatiale à la considération
fonctionnelle.

1. La prise en compte de l'espace agricole dans l'aménagement régional en Ile de France :

La considération de l'espace agricole par les documents d'aménagement régional de l'Ile de France s'est faite d'une façon graduelle et tardive. Elle n'est devenue effective qu'après 83 ans des premières réflexions sur l'aménagement du territoire dans cet espace devenu la région Ile de France.

Jusqu'au milieu des années 1970, les schémas d'aménagement mis en place s'intéressaient beaucoup plus à l'organisation de l'expansion urbaine de la région parisienne, extrêmement forte notamment entre les deux guerres et après la seconde guerre mondiale, l'espace agricole été alors considéré comme une « réserve foncière » en attente d'urbanisation, de préférence la moins coûteuse pour l'Etat et les collectivités.

C'est ainsi que le PADOG de 1960 qui sépare les « zones urbaines » des « zones rurales » par un périmètre d'agglomération rigoureusement tracé en préconisant une reconstruction de la ville sur la ville, autorise par dérogation les constructions au-delà de ces limites et même sur des terrains non affectés à l'urbanisation à l'intérieur de ce périmètre4. Ces autorisations de construire sont délivrées par la CARP5 à condition que l'équipement des terrains soit pris en charge par le demandeur et non par les finances publiques. Les motivations des instigateurs de ce schéma sont plus la limitation des coûts de l'étalement urbain que la préservation de l'espace rural et agricole. Par ses préoccupations urbanistiques, le PADOG s'aligne largement sur ses prédécesseurs schémas d'urbanisation de la région parisienne. Dans le plan d'extension de Paris édité en 1911, qui se donne comme cadre d'extension le département de la Seine, les réflexions sont orientées vers l'amélioration de la circulation et la reconversion d'îlots insalubres en espaces libres. Son successeur de 1939 (appelé Plan Prost Dausset) qui s'applique à la région comprise dans un rayon de 35 Km autour de Notre Dame, donne la

4 - Paul Delouvrier estime que « deux tiers des demandes de dérogations pour construire ont été faites dans les zones rurales en dehors du périmètre délimité par le PADOG »

5 - Comité supérieur d'Aménagement et d'organisation générale de la Région Parisienne : elle est instituée par le gouvernement Poincaré auprès du ministre de l'intérieur par décret du 24 mars 1928 et succède à la commission d'aménagement et d'extension du département de la Seine instituée en 1925; selon J Bastié, ce fut le point de départ de toute l'oeuvre d'aménagement de la région parisienne.

Figure 01 : Le périmètre de la ceinture verte de la région d'Ile de France.

Zone d'habitat collectif

Espaces boisés 0 10 Km

Limites de la ceinture verte Source : IAURIF, 1995.

Zone d'habitat individuel

N

priorité à la lutte contre l'extension des lotissements par l'interdiction de construire au delà d'un périmètre d'agglomération (sauf par dérogation de la CARP) et au renforcement du réseau routier par la création de 3300 Km de voies nouvelles ; il préconise, en outre, des réserves « d'espaces libres publics et privés » et une limitation des hauteurs des immeubles selon les communes (Bastié, 1964 et 1984). Si le PADOG a le mérite d'être le premier schéma d'aménagement de la région parisienne à la considérer en sa globalité avec comme objectif la limitation de son extension en « tâche d'huile », le SDAURP qui lui a succédé en 1965, présente des idées révolutionnaires pour la région en ayant comme objectif la limitation de son extension en « doigts de gants » notamment par l'instauration du principe d'extension en ville nouvelles construites sur des « terrains neufs » séparées de l'agglomération. La limitation de l'urbanisation des vallées que promulgue ce schéma a suscité sa révision au cours des années 1970 et son remplacement par le Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région d'Ile de France (SDAURIF) de 19766.

Il s'agit enfin du schéma qui apporte un premier souffle aux espaces naturels par l'instauration de la notion de « trame verte » et de « zones naturelles d'équilibre ». Ce schéma a également supprimé trois villes nouvelles sur huit initialement prévues, à savoir celle du Vexin, de Mantes sud et de Meaux sud.

Depuis, l'intérêt grandissant qu'a pris l'espace agricole dans l'aménagement régional s'est traduit par la mise en place de projets spécifiques visant le maintien de ce type d'espaces notamment dans les périmètres contenus entre les villes nouvelles et entre celles - ci et l'agglomération parisienne. C'est dans cette logique qu'un projet d'envergure régionale est conçu au début des années 1980, puis mis en place en 1987 sous l'appellation de ceinture verte régionale.

Située à une distance comprise entre 10 et 30 Km du centre de la capitale, le projet de départ (de 1982) recouvre le territoire de 359 communes avec 264700 ha de superficie (près du quart de la surface régionale) et un tiers de la population régionale à 1404 habitants/Km². Entre 1987 et 1990, la zone d'étude de la ceinture verte a été agrandie vers l'extérieur pour englober la totalité des villes nouvelles, et pour inclure, au Nord, la pleine de France comprise dans le cercle des 30 Km ; elle s'étend désormais sur un espace total d'environ 300000 ha et comprend 410 communes avec un peu plus de 5 millions d'habitants (soit 1 667habitants/Km²). Si elle concerne tous les départements de la région (sauf Paris), elle se

6 - Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région d'Ile de France (le district est remplacé par le conseil régional d'Ile de France le jour même d'approbation de ce schéma).

situe essentiellement, pour 85% de sa surface, dans les quatre départements de la grande couronne (IAURIF, 1995).

Ce projet qui reprend les dispositifs du SDRIF de 1976, présente l'ambition d'ouvrir de nouveaux espaces de loisirs, en particulier, pour les fins de semaine, de maintenir l'agriculture dans les zones périurbaines et de maîtriser le front urbain en évitant l'extension en tâche d'huile de l'agglomération (AEV, 1987). Jusqu'en 1990, 37456 ha d'espace verts ont été ouverts au public dans le périmètre d'intervention de la ceinture verte.

Tableau 01 : Les espaces ouverts au public par le projet de la ceinture verte (jusqu'en 1990).

Type d'espaces

Surface en hectares

Petite couronne

Grande couronne

Total ceinture verte

Verts de proximité

881

2470

3351

Parcs

779

2545

3324

Forestiers

3584

26771

30319

Spécifiques

61

260

321

Terrains non aménagés

37

104

141

Espaces verts total

5306

32150

37456

Population en 1990

1765750

3283680

5049430

Espaces verts (m²/habitant)

30

98

74

Source : IAURIF, 1995.

Dans son rapport publié en 1987, l'agence des espaces verts de la région d'Ile de France voit en la mise en place de la ceinture verte une priorité régionale dont l'urgence se justifie par la nécessité de ralentir la consommation des espaces agricoles qui s'effectue à une vitesse impressionnante : 84900 ha ont été soustraits à l'agriculture, aux bois et aux forêts entre 1970 et 1986 (soit une moyenne de 5660 ha par année).

Tableau 02 : Les espaces agricoles et forestières en Ile de France avant la ceinture verte.

Années

Surfaces en milliers d'hectares

SAU

peuplerais

Bois et forêts

Territoires
agricoles non
cultivés

étangs

Territoire non
agricole
(sauf paris)

1970

658,0

13,0

261,2

48,7

2,0

213,0

1975

628,2

14,2

261,5

36,8

1,9

253,4

1980

619,0

14,3

260,1

17,0

1,9

284,2

1985

610,2

14,2

258,1

15,7

1,0

286,4

1986

609,3

14,2

258,0

15,8

1,0

287,0

Source : DRAF/ AEV, 1987.

Afin d'atteindre ses objectifs, la ceinture verte propose de mener des stratégies adaptées à l'état de l'espace agricole concerné : elle prévoit de réintroduire l'agriculture avec une double fonction d'accueil du public sur les espaces agricoles « dégradés » et propose de favoriser la fonction de production de l'agriculture sur les espaces agricoles « non dégradés ». Afin de maintenir l'agriculture, le projet propose de la mettre à l'abri des agressions urbaines (comme toute autre activité économique), notamment par des protections physiques (clôtures) ainsi que par le maintien d'espaces tampons entre ces espaces et la ville (AEV, 1987).

Bien que la croissance spatiale de l'agglomération parisienne s'est considérablement ralentie entre 1982 et 1990 (2100 ha par an contre 4400 ha pour la période 1975 - 1982), la consommation de l'espace agricole est restée de mise, elle s'effectue aussi par l'installation d'infrastructures, d'équipements et de zones d'activité économique ainsi que par l'ouverture d'espaces au public puisque plus de 2100 ha des espaces boisés ou cultivés ont été consacrés à la création d'espaces verts publics, de jardins familiaux, de terrains de sports et de loisirs de plein air (IAURIF, 1995). En revanche, c'est l'essor de l'habitat individuel qui semble le facteur le plus dévastateur des espaces agricoles, la consommation d'espace se trouve ainsi directement liée à l'importance relative de ce type d'habitat dans les constructions puisqu'il mobilise 80% de l'espace d'habitat alors qu'il n'offre que 28% de logements : le rapport des densités est supérieur à 10, c'est-à-dire qu'un logement individuel consomme dix fois plus d'espace qu'un appartement (Merlin, 2003).

Pour l'IAURIF, la disparition d'une majeure partie des 70000 ha d'espaces agricoles du projet de la ceinture verte est à prévoir d'ici 2015, dans le cas où la croissance urbaine de la région conserve la même répartition géographique, c'est-à-dire essentiellement dans le périmètre de la ceinture verte ; toutes les entités agricoles seront amputées avec la disparition complète de certaines d'entres elles, car au-delà de la stricte superficie d'urbanisation, celle-ci entraîne une destruction plus large (IAURIF, 2002). La proximité des constructions et la multiplication des voies de communication rendent les conditions d'exploitation difficiles ; les exploitants ayant un parcellaire éclaté sur plusieurs endroits, souffrent de l'allongement des temps de parcours pour les engins agricoles volumineux et lents qui doivent emprunter les axes de la circulation générale dans une région où le trafic est très dense jusqu'à des heures avancées de la nuit. D'ailleurs et devant l'ampleur de ce problème, un grand nombre d'agriculteurs de l'Ile de France souhaite la séparation des circulations (Poulot et Rouyres, 2005).

Graphe 02 : La répartition de l'urbanisation francilienne (1982 /1999).

Hors ceinture
verte
(27%)

En ceinture
verte
(73%)

Source des données : IAURIF (2002)

Cette expansion urbaine sur le territoire de la ceinture verte, est intervenu au moment où s'effectue le ralentissement progressif de l'urbanisation des villes nouvelles ; ces dernières n'ont pu absorber que 30% de l'urbanisation de la ceinture verte, les deux tiers restants étant principalement effectués sur les autres espaces constitutifs de cette ceinture qui sont majoritairement tenus par l'agriculture. Ainsi, la part des villes nouvelles dans l'urbanisation de la ceinture verte est passée de 36% entre 1982 et 1994 à 21% entre 1994 et 1999 (soit une diminution de 15%), tandis que la part de la ceinture verte dans l'urbanisation totale de l'Ile de France est passée de 70% à 80% (soit une augmentation de 10%) pour la même période (IAURIF 2002).

Dans les schémas directeurs, c'est au milieu des années 1990 que l'espace agricole est explicitement pris en compte d'une façon définitive par le SDRIF de 1994.

Ce schéma qui oriente les aménagements de la région à l'horizon 2015, exprime enfin l'engagement solennel de la région d'Ile de France à reconnaître l'espace agricole comme une composante essentielle et à part entière du territoire régional : les espaces agricoles, qui lorsqu'ils sont pris en compte, sont laissés en blanc « réserves foncières » par ses prédécesseurs, apparaissent finalement en légende du document accompagnant ce schéma avec le qualificatif « agricoles ».

Le SDRIF qui attribut à l'espace rural la valeur d'une « ressource rare » promulgue « la reconstruction de la ville sur la ville » afin d'économiser l'espace rural dans la couronne rurale et d'épargner la ceinture verte (Poulot et Rouyres, 2005) ; il préconise de modérer

davantage sa consommation en limitant à 1750 ha la surface à prélever annuellement hors infrastructures (soit une économie de 30% par rapport à la période précédente). Sur ce point, la mise en place d'un outil spécifique de suivi de la consommation des espaces agricoles est proposée. C'est à ce titre que les outils des services de l'Etat (direction régionale de l'équipement, direction régionale et interdépartementale de l'agriculture et de la forêt) et de l'IAURIF sont mis en commun au sein d'un groupe baptisé OCEAN7. Le SDRIF est le premier schéma directeur régional à affirmer la vocation économique et patrimoniale de l'agriculture. Il donne la priorité à l'activité agricole dans l'espace rural, y compris par rapport à certaines exigences environnementales (IAURIF, 2003). Il préconise aux collectivités de garantir des espaces agricoles cohérents, suffisamment étendus pour assurer des conditions satisfaisantes d'exploitations (Poulot et Rouyres, 2005) ; les surfaces retenues sont de l'ordre de 50 ha en agriculture de serre ou horticulture, 300 ha en agriculture spécialisée ou maraîchage, 2000 ha en agriculture de plaine ou grandes cultures. En conséquence, il prononce le caractère intangible des espaces jaunes « à l'intérieur de leurs limites historiques et naturelles ». La priorité est donnée à la préservation de la couronne rurale avec un développement modéré des bourgs et villages, et la création de parcs naturels régionaux.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein