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Les dons, phénomène anthropologique au coeur des élections au Burkina Faso: une analyse des comportements électoraux dans la ville de Ouagadougou

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par Oumarou Kologo
Université de Ouagadougou - DEA de sciences politiques 2007
  

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Section II. L'apport des dons dans la formation du citoyen

Les dons comme nous l'avons développé, constituent une manne à la fois pour les électeurs et pour les partis politiques. Ces derniers en ont besoin pour assurer leur présence effective sur le champ politique, pour faciliter la transmission de leurs messages et surtout pour gagner la confiance de la grande majorité de l'électorat, encore grippée aux gains. Dans cette section nous développerons l'importance des dons dans l'organisation des activités de formation (§1) et son rôle dans la promotion de la participation citoyenne (§2).

§1- De l'organisation des activités de formation

Les scrutins sont les moments d'apprentissage et de formation, en un mot de socialisation des citoyens. C'est pendant ces moments que les populations se frottent aux questions politiques qui leur semblent parfois étranges, incomprises et insensées. Ils augurent aussi des occasions inédites pour assurer la transmission des valeurs démocratiques cardinales et les rudiments de la culture politique. Cependant le rôle des partis consacré par la Constitution en son article 13 est de  concourir à l'animation de la vie politique, à l'information et à l'éducation du peuple ainsi qu'à l'expression du suffrage. Les partis n'étant pas que des machines électorales, ils ne peuvent attendre les campagnes pour accomplir la mission qui leur est dévolue par la loi fondamentale. Elle devrait s'inscrire dans leurs actions quotidiennes. Toutes choses qui impliquent des besoins de financements.

Selon Braud153(*), les partis sont des organisations stables, qui mobilisent les soutiens en vue de participer directement à l'exercice du pouvoir politique central. Dans leur tentative de conquête, la place de la formation de l'électorat est d'une importance capitale. C'est pourquoi, les partis initient certaines activités comme les ateliers et les séminaires de formation. Bagoro dit à cet effet que  les partis doivent avoir d'importantes activités dans les phases pré ou post-électorales car l'intervalle entre deux élections s'il est judicieusement exploité, peut être profitable à un parti154(*). Ces activités empêcheraient la rupture du contact entre les partis ou leurs leaders et la population.

Du point de vue théorique, les statuts de certains partis prévoient des activités de formation de leurs membres. La plupart des activités exécutées annuellement tournent cependant autour des rencontres habituelles d'échanges entre les membres du bureau politique national. En somme, les textes des partis prévoient des conseils trimestriels, des congrès chaque trois (3) ans et bien sûr des rencontres de sections. Ce sont en général les membres du secrétariat exécutif national, quelques délégués (des jeunes et de femmes) ainsi que les représentants des sections provinciales ou régionales qui participent aux conseils trimestriels. Pour les congrès, tenus pour l'ensemble chaque trois ans, ce sont les membres du bureau exécutif national, les délégués de femmes et d'enfants, les représentants provinciaux ou régionaux et départementaux qui y prennent part.

Les appellations varient selon les partis, mais dans l'ensemble, les activités qu'on retrouve dans les statuts des partis sont : les conventions (CDP, MPS/PF), le conseil national (tous les partis au moins une fois/an), l'université d'été (CDP) les congrès (tous les partis) chaque trois ans, etc.

En clair, seuls les militants engagés dans les bureaux centraux ou dans les sections prennent part aux rencontres ci-dessus énumérées. Ce sont des cadres d'échanges, de formations ou de renforcement des capacités des leaders. Concernant les activités qui favorisent la formation des citoyens, on note les journées parlementaires, les séminaires, conférences et ateliers.

Les journées des groupes parlementaires ont souvent été l'occasion où les élus des partis rencontrent leurs militants. Les invitations pour ces journées parlementaires ne concernent que les militants des localités où se tiennent les journées. Cette activité, financée par l'Etat, contribue à la formation des citoyens. Les partis exploiteraient cette seule occasion pour se rapprocher de leurs électeurs.

Du reste, les activités de formation citoyenne prévues par les partis sont peu nombreuses et malgré tout, elles ne sont pas exécutées. Elles sont entre autres, les conférences, les séminaires et les ateliers. Ce sont des activités qui devraient être financées par les partis eux-mêmes, ce qui rend difficile leur faisabilité. Les rares conférences faites sont des conférences de presse pour éclairer une question ou répondre à une situation de crise. Les ateliers et séminaires sont très rarement tenus. Pourtant ce sont les principales activités qui peuvent concourir à la formation du citoyen. Comment expliquer que malgré leur importance, ces activités semblent être délaissées au profit de simples réunions de bureaux?

De l'avis de Bagoro, « les partis politiques burkinabè semblent oublier qu'en démocratie, le pouvoir se conquiert quotidiennement par le travail de terrain long et patient 155(*)». Les partis ignorent-ils vraiment ce rôle ou n'ont-ils pas les moyens nécessaires à son accomplissement?

Selon certains dirigeants politiques, les partis auraient chacun un programme annuel dûment élaboré. Mais, dans la pratique, il ressort que peu d'activités prévues sont réalisées chaque année. La raison principale étant que les partis se retrouvent souvent dans une situation financière inconfortable. Comme nous l'avions déjà souligné, pour leur fonctionnement durant l'année 2007, les partis ont reçu chacun une somme modique. Cette somme comme on peut le constater, est très insuffisante pour assurer l'entretien des sièges des partis encore moins leur permettre d'organiser un atelier de formation. Aussi, il faut noter le fait que la plupart des partis ne possèdent pas encore de ressources propres. Comment pourrait-il en être autrement quand le peu de membres ne peuvent honorer leurs cotisations ? Selon N.S : « de nombreux membres de partis ne se sentent pas encore responsables de la situation de leurs partis. La preuve en est qu'ils continuent de penser qu'ils viennent aux rencontres des partis comme les meetings pour soutenir les leaders politiques. Ils attendent de ce fait tout de leurs leaders.156(*)». Abondant dans ce sens, P.E. du MPS/PF explique que pour organiser un meeting à Ouagadougou, les partis doivent louer des cars pour convoyer les populations des quartiers dans les lieux du meeting. Certains ne viendraient pas d'elles mêmes, si aucune action de motivation n'a été prise. Il faut remarquer que même certains élus des partis ne s'acquittent pas des contributions prévues par les textes de leurs partis. Ceci explique que peu de partis, (hormis les grands partis) arrivent à jouer efficacement leur rôle puisque son exécution implique des dépenses importantes.

La pauvreté des partis politiques constitue un frein à l'enracinement de la démocratie. En effet, toute activité tendant à socialiser les électeurs c'est-à-dire leur inculquer des valeurs citoyennes, coûte énormément et paraît irréaliste pour la grande majorité des partis. L'Etat ne pouvant supporter seul tous les financements indispensables au bon fonctionnement des partis, il appartient aux différents partis de travailler à trouver les moyens pour l'exécution de leur rôle de formateur. Cela est d'autant plus fondamental puisque l'absence de formation effective des citoyens n'est pas de nature à favoriser la consécration du processus démocratique.

Il faut dire que la formation n'est pas pour l'essentiel des partis une activité réaliste, non pas pour des raisons de coûts seulement mais aussi pour des raisons de ressources. Certains partis n'ont pas de ressources propres, à mesure d'assurer une formation. Ainsi que le souligne Z.R du RFI/PJB : «il y a des partis factices. Ils n'ont pas de siège véritable, et même quand ils en disposent, la secrétaire est la femme du président du parti. Leur bureau politique est aussi artificiel. On a constaté que pour certaines réunions où les partis sont convoqués, c'est soit le président, soit sa femme qui vient ». Dans ces conditions de manque crucial de ressources humaines, certains partis ne peuvent assurer d'eux-mêmes une formation. Il est évident que si la formation est assurée par les ressources des partis, elle leur reviendrait moins coûteuse. Mais l'absence de ressources exige qu'ils fassent recours à des formateurs externes, ce qui est plus coûteux pour les partis. Or, il n'est pas certain que ces formateurs extérieurs aux formations politiques, épousent ou respectent la ligne idéologique de ces dernières.

Soulignons aussi que les logiques sournoises qui sous-tendent la création de certains partis au Burkina pourraient expliquer qu'ils ne mettent pas l'accent sur la formation des citoyens. Puisque ceux qui les ont créés ne visaient que les ressources, il n'est pas étonnant que ce qui les préoccupe soit premièrement la recherche des moyens d'accès à celles-ci. La formation tendrait à éclairer les populations et à les sortir des cadres de simples maillons exploitables (de bétail électoral), ce qui n'est pas de nature à favoriser la réalisation des rêves de ceux qui ont créé leurs partis. Il ne faudra pas incriminer tous les partis, car il en existe qui ont été créés dans l'objectif de mener une lutte franche pour la conquête du pouvoir. Ces derniers sont conscients de leur rôle combien important dans la construction démocratique et ils s'évertuent malgré leurs moyens assez limités de le remplir pleinement.

Somme toute, peu de partis arrivent à exécuter des activités de formation destinées aux citoyens (leurs militants). La raison majeure avancée est pour l'essentiel la question de ressources financières. Mais on pourrait ajouter le problème de ressources humaines et même d'objectifs pour certains partis. Il apparaît cependant qu'il ne peut avoir de démocratie véritable sans une réelle formation des citoyens à la maîtrise et à l'accomplissement de leurs devoirs civiques et politiques. Un citoyen accompli (qui joue pleinement son rôle dans la cité) participera sans doute à la construction et à l'enracinement de la démocratie. Les activités menées par la majorité des partis politiques impliquent beaucoup les membres des bureaux politiques, ce qui ne participe pas à la formation des citoyens. Or, la participation des citoyens à la vie politique est exigée par ce qu'elle est indispensable à l'instauration d'une véritable démocratie. Le recours à la réglementation ne pourra à lui seul venir à bout de la corruption électorale que pourraient conduire les multiples « dons électoraux ». Il est nécessaire de recourir à des actions de sensibilisation, d'information, lesquelles actions se retrouvent dans la formation. Il est aussi nécessaire que des stratégies et des moyens soient trouvés pour favoriser une participation citoyenne.

* 153 P. Braud, Sociologie politique, Paris, LGDJ, 6e édition, p405. Dans le même sens, J. Lapalombara et M. Weiner repris par R.G. Schwartzenberg relève qu'un parti politique peut se définir selon 4 critères : il s'agit d'une organisation durable, c'est-à-dire qui a une expérience de vie politique supérieure à celle de ses dirigeants ; d'une organisation locale bien établie et entretenant des rapports réguliers et variés avec l'échelon national ; la volonté délibéré de prendre et d'exercer le pouvoir seuls ou avec d'autres et non pas simplement d'influencer le pouvoir ; le souci enfin de rechercher le soutien populaire à travers les élections ou de tout autre manière. R.G Schwartzenberg, Sociologie politique, Paris, Montchrestien, 1998, p 403-404.

* 154 B. Bagoro, op.cit. p82.

* 155 B .Bagoro, op. cit. p 82.

* 156 N.S. conseiller régional du centre pour le CDP.

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