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Le contentieux de la propriété intellectuelle: cas de la marque de produits ou de services

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par Nadine Josiane BAKAM TITGOUM
Université de Dschang (Cameroun) - Diplome d'Etudes Approfondies 2008
  

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SECTION II : LA POSSIBILITE D'AGIR EN JUSTICE

De toute évidence, l'action en contrefaçon est celle qui doit être déployée par les victimes de la contrefaçon. Son efficacité est indéniable (§1). Cependant, parce qu'il lui est attaché des conditions restrictives fondées notamment sur le principe de la spécialité, d'autres actions civiles peuvent être entreprises à titre complémentaire (§2).

§1- L'EFFICACITE DE L'ACTION EN CONTREFACON

L'efficacité de l'action en contrefaçon se vérifie à l'aune de la délimitation du cadre de la poursuite (A) et à travers le caractère expéditif de la répression de la contrefaçon de marque (B)

A-LA DELIMITATION DU CADRE DE LA POURSUITE

La recevabilité de la demande est subordonnée à la condition de la compétence de la juridiction saisie (1), à la qualité des parties (2) et, le juge ne pourra asseoir sa conviction qu'au terme de l'instance (3).

1- La juridiction compétente

La compétence se vérifie à un double niveau, c'est-à-dire au plan territorial et au plan matériel.

Territorialement, le tribunal compétent est celui retenu en droit commun à savoir celui du lieu de la commission du délit ou celui du domicile du défendeur. S'il s'agit d'un commerçant, son domicile correspond au lieu de son inscription au RCCM. En cas de transfert d'établissement non enregistré, le tribunal de l'ancien siège social reste compétent. S'agissant du lieu du délit, le demandeur peut être confronté à un problème de choix du tribunal compétent lorsque les multiples actes successifs de contrefaçon ont été commis dans des lieux différents. Il importe d'exclure, dans le contexte de l'OAPI, la compétence du tribunal du lieu de dépôt car le siège de l'Organisation étant situé à Yaoundé au Cameroun, la reconnaissance d'une telle compétence reviendrait à admettre la compétence exclusive des juridictions qui s'y trouvent ; ce qui nous paraît absurde.

Matériellement, l'action en contrefaçon peut être intentée par la voie civile ou la voie correctionnelle138(*). Dans le premier cas, le tribunal civil est compétent et juge comme en matière sommaire. Au Cameroun, par exemple, le tribunal de grande instance ou le tribunal de première instance sera compétent en fonction du montant de la demande139(*). Dans le second cas, le juge pénal saisi pourra connaître des exceptions relatives à la propriété de la marque soulevée par le défendeur140(*). Si le tribunal correctionnel est saisi, la juridiction civile devra surseoir à statuer en vertu de la maxime d'après laquelle le criminel tient le civil en état.

Encore faut-il que le demandeur ait qualité pour agir et qu'il attraie le véritable contrefacteur en justice.

2- Quant aux parties à l'instance

En principe, l'action en contrefaçon est engagée par le titulaire de la marque contrefaite, mais d'autres personnes peuvent également avoir un intérêt à l'intenter. D'un point de vue théorique, c'est le parquet qui devrait prendre l'initiative de l'action. Le délit n'étant pas un délit privé, les poursuites pénales n'exigent donc pas une plainte de la part de la victime141(*).

Subsidiairement, des personnes autres que le titulaire de la marque peuvent avoir le droit d'agir en contrefaçon. C'est le cas du bénéficiaire d'un droit exclusif d'exploitation dont le contrat ne comporte aucune stipulation contraire. Toutefois, il doit préalablement mettre le titulaire de la marque en demeure d'agir ; ce n'est qu'à défaut qu'il le peut lui-même. C'est aussi le cas du cessionnaire qui peut agir, à condition d'avoir procédé aux formalités de publicité de la cession. Il est possible qu'il agisse même au sujet de faits antérieurs à la cession, puisque le cédant lui a transféré tous ses droits. Mais, en cas de cession partielle, il ne pourra agir que dans la limite de ce contrat. En outre, l'intervention est ouverte à un syndicat professionnel ou une organisation de consommateurs ou toute autre personne justifiant d'un intérêt à intervenir, soit aux côtés du demandeur, soit à ceux du défendeur.

L'action doit être intentée contre le défendeur indiqué. A l'évidence, il s'agit de l'auteur du délit. Ce délit doit être consommé car en la matière, la tentative n'est punissable que si la loi le prévoit expressément. Or, l'annexe III de l'accord n'y fait pas allusion.

Lorsque l'infraction s'est réalisée à travers une personne morale, on peut se heurter au principe de l'irresponsabilité pénale des personnes morales. Dans cette hypothèse, ce sont les responsables fautifs qui pourront faire l'objet de poursuites personnelles, dans la mesure où on peut leur reprocher une faute. En cas de redressement judiciaire ou de liquidation de biens, l'action sera dirigée en ce qui concerne l'existence de la contrefaçon, contre le syndic.

La recevabilité de la demande étant admise, s'ouvre alors l'instance proprement dite.

3- L'instance

La recherche de la preuve occupe une place de choix dans l'action en contrefaçon. Mais celle-ci peut être handicapée par certains obstacles.

a- L'établissement de l'existence de la contrefaçon

La contrefaçon est un fait illicite dont la preuve se rapporte par tous moyens. En plus des modes habituels que sont notamment le constat d'huissier, le témoignage et l'enquête de marché, la saisie-contrefaçon est un mode particulièrement adapté à l'action en contrefaçon.

En effet, la saisie-contrefaçon peut être demandée par le propriétaire de la marque ou le titulaire d'un droit exclusif d'usage142(*). Il convient de présenter une requête au président du tribunal civil, dans le ressort duquel les opérations doivent être effectuées, y compris à la frontière.

Il autorise par ordonnance rendue non contradictoirement pour éviter que la saisie ne soit inefficace. Cette ordonnance en précise les modalités et les conditions. Il nous semble que le juge ne saurait refuser la saisie lorsqu'elle est descriptive mais il détient un pouvoir d'appréciation en cas de saisie réelle. La saisie est effectuée par un huissier ou un officier public ou ministériel y compris les douaniers avec l'assistance d'un expert. Il doit être remis au saisi préalablement aux opérations, copies de la requête, de l'ordonnance et, le cas échéant, l'acte constatant le dépôt de la consignation. La saisie-contrefaçon peut être effectuée dans tous les lieux143(*) et toutes les mains où peuvent se trouver des éléments de preuve de la contrefaçon144(*).

La saisie-contrefaçon est généralement descriptive mais peut s'accompagner du prélèvement d'échantillons. Elle peut aussi être réelle c'est-à-dire emporter la saisie des produits ou services argués de contrefaçon par le saisissant. Malgré les termes de l'article 48, la saisie ne peut être que descriptive si elle concerne des services. La saisie réelle des produits critiqués a un caractère préventif puisqu'elle tend à prévenir la réalisation ou l'aggravation du dommage.

Mais en raison du préjudice que peut causer la saisie réelle au défendeur, le juge a la faculté de la subordonner à la constitution de garanties de la part du requérant, destinées à assurer l'indemnisation du défendeur pour le cas où l'action au fond serait jugée infondée. Il n'est cependant admis aucune confusion entre ce cautionnement et la caution judicatum solvi qu'est tenu de fournir le demandeur étranger en vertu de l'article 73 du Code de procédure civile et commerciale. Cette précision a été faite par le juge camerounais dans une espèce opposant une société étrangère à une autre, nationale, celle-ci accusée de contrefaçon145(*).

Aux termes de l'article 49, à défaut par le demandeur de s'être pourvu, soit par la voie civile, soit par la voie correctionnelle, dans le délai de dix jours ouvrables, la description ou la saisie est nulle de plein droit sans préjudice des dommages intérêts qui peuvent être réclamés, s'il y a lieu146(*).

D'où la prudence et la loyauté dont doit faire preuve le requérant car la défense n'est pas dépourvue de moyens.

b- Les obstacles à l'action en contrefaçon

Le défendeur dispose pour sa défense, de moyens divers relevant du droit commun de la procédure civile ou pénale et ceux propres au droit des marques. Entre autres, il peut démontrer que les actes critiqués ne constituent pas des contrefaçons, soit parce qu'il n'existe en réalité aucun risque de confusion, soit parce qu'il utilise le signe en déhors de la spécialité. Le défendeur peut également invoquer la nullité de la marque ou même l'antériorité de son exploitation.

S'il est vrai que l'action en contrefaçon obéit au civil comme au pénal à la prescription triennale, le contrefacteur ne peut, par contre, s'abriter derrière l'absence de réaction du défendeur. L'ancienneté et la continuité du délit n'enlèvent en rien son caractère répréhensible et par conséquent, l'application des sanctions prévues.

B-LE CARACTERE EXPEDITIF DE LA REPRESSION DE LA CONTREFAÇON DE MARQUE

Ce caractère tient à la fois à la variété des sanctions prévues (1) et à l'originalité des pouvoirs du législateur OAPI en matière répressive (2).

1- Les sanctions de la contrefaçon de marque

Elles sont civiles ou pénales.

Les sanctions civiles ont pour fondement la responsabilité civile prévue par l'article 1382 du Code civil. Le juge peut prononcer des injonctions en vue de faire cesser les troubles pour l'avenir. En revanche, il n'interdira pas la confection des produits ou la fourniture des services, en elles-mêmes, c'est-à-dire en déhors de toute utilisation de la marque d'autrui.

Les dommages intérêts sont octroyés au propriétaire de la marque en raison du préjudice subi du fait des atteintes à son droit de propriété et au trouble commercial perpétrés par le contrefacteur. L'évaluation de ce préjudice se fait suivant le critère de la perte subie ou celui du manque à gagner. Les tribunaux préfèrent cette dernière méthode qui correspond au bénéfice qu'aurait réalisé le propriétaire de la marque si la contrefaçon n'avait pas eu lieu.

Les sanctions pénales, quant à elles, concernent principalement les amendes et les emprisonnements. Dans l'ensemble, on note que les peines d'emprisonnements des anciens articles 37 et 38 ont été réduites alors que les amendes, elles, ont été significativement augmentées. Il semble que le législateur préfère frapper à l'endroit où la douleur sera la plus ressentie c'est-à-dire la bourse du contrefacteur. Serait-ce la dépénalisation de la contrefaçon ?

Des peines additionnelles sont également prévues et concernent l'affichage du jugement dans des lieux déterminés, son insertion partielle ou intégrale dans un journal d'annonce légale, l'interdiction de participer à des élections des chambres de commerce et de l'industrie et des chambres d'agriculture ne pouvant excéder dix ans, la confiscation des produits et les instruments ayant servi à commettre le délit, la remise au propriétaire de la marque contrefaite des produits contrefaisants et la destruction de ces produits.

Le pouvoir répressif du législateur est, à ce titre, original.

2- L'originalité du pouvoir répressif du législateur OAPI

Contrairement au législateur OHADA qui incrimine certains faits mais se garde de prévoir des sanctions pénales, le législateur OAPI donne les quantum des peines applicables directement dans les ordres juridiques nationaux. Or, il est traditionnellement reconnu que le domaine des libertés individuelles appartient au pouvoir législatif national. L'OAPI aurait-elle outrepassé les pouvoirs généralement consentis à toute organisation de coopération juridique ?

Si l'on considère l'accord de Bangui dans son ensemble, l'on relève qu'il est constitué d'un traité auquel sont incorporées des annexes. Ainsi en ratifiant ce traité, les autorités nationales, souverainement, consentent à l'applicabilité de ses dispositions principales ainsi que celles de ses annexes. C'est donc par voie de ratification que ces dispositions rentrent dans l'ordonnancement juridique interne des Etats membres.

Quoiqu'il en soit, cette option a le mérite de garantir une application uniforme des dispositions conventionnelles. Elle assure en amont cette unification tandis qu'une autre option consiste à mettre sur pied une juridiction supranationale à laquelle l'on assigne la fonction, en aval, d'assurer l'interprétation et l'application communes du traité et autres textes subséquents. Mais, jusque-là les questions pénales sont, en général, exclues du champ de compétence de cette juridiction147(*).

Cette originalité, en somme incontestable, ne saurait faire perdre de vue l'insuffisance de l'action en contrefaçon qui peut être comblée par d'autres actions.

* 138 Art 47 al 1 de l'annexe III.

* 139 Cf. loi n°89/019 du 29 décembre1989, modifiant et complétant certaines dispositions de l'ordonnance n°72/4 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire.

* 140 Art. 47 al.2 de l'annexe III.

* 141 TANGOUE Y TCHOUTEZO Edgar, La contrefaçon en matière de marque, mémoire de maîtrise. UDS/FSJP, 1997.

* 142 Art. 48 al.1 de l'annexe III.

* 143 Idem.

* 144 Par exemple, saisi entre les mains du saisissant lui-même, d'une montre contrefaite confiée pour réparation.

* 145 TGI de Bafoussam, jugement n°87/ADD/civ. Du 02 juillet 1996 précité, notamment « (...) qu'il s'agit de deux procédures différentes et dont la confusion des frais ne saurait être admise »

* 146 Ce délai passe ainsi d'un mois (ancien article50) à dix jours et traduit un souci de célérité.

* 147 Art.14 du traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire