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L'égalite souveraine des Etats au miroir de la mondialisation

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par Patsho LULA MUNGENGA
Université de Kinshasa - Licence 2006
  

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II. Ingérence humanitaire

L'idée d'ingérence humanitaire est apparue durant la guerre du BIAFRA (1967-1970). Le conflit a entraîné une épouvantable famine, largement couverte par les médias occidentaux mais totalement ignorée par les Chefs d'Etat et de gouvernement au nom de la neutralité et de la non-ingérence. Cette situation a entraîné la création d'ONG comme Médecins sans frontières qui défendent l'idée que certaines situations sanitaires exceptionnelles peuvent justifier à titre extraordinaire la remise en cause de la souveraineté des Etats. Le concept a été théorisé à la fin des années 1980, notamment par le professeur de droit Mario BETTATI ou l'homme politique Bernard KOUCHNER.(45(*))

Cette notion d'ingérence peut être confondue dans plusieurs cas pour ainsi violer les principes cardinaux de l'égalité souveraine des Etats. Ainsi, pour bien cerner cette notion internationale de l'ingérence ou intervention d'humanité, il sied d'élucider en premier lieu sa définition (a) et en deuxième lieu, d'en préciser le contenu (b).

a. Définition

Les défenseurs de l'ingérence humanitaire la justifient principalement au nom d'une morale d'urgence : « on ne laisse pas les gens mourir ». Elle puise son fondement dans la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Pour eux, une ingérence n'est donc légitime que lorsqu'elle est motivée par une violation massive des droits de l'homme et qu'elle est encadrée par une instance supranationale, typiquement le Conseil de Sécurité des Nations Unies.(46(*))

Mario BETTATI précise le terme ainsi : « l'ingérence désigne en droit international l'immixtion sans titre d'un Etat ou d'une organisation internationale dans les affaires qui relèvent de la compétence exclusive d'un Etat tiers ». On ne devrait donc ne retenir dans le champ du droit d'ingérence humanitaire que les actions transfrontalières des gouvernements ou des organismes publics internationaux, à l'exclusion des ONG dans la mesure où, comme leur nom l'indique, elles sont non gouvernementales.(47(*))

Soulignons en outre que le droit d'ingérence tel que défini par ses créateurs est, pour eux, un devoir qui est devenu un droit international. En revanche les opposants au concept le voient par exemple comme un devoir qui ne manifeste qu'un néocolonialisme malvenu, illégal donc ne crédite aucune validité au droit d'ingérence.(48(*))

b. Contenu

Notion âprement discutée et contestée depuis sa naissance, en 1987, dans la mouvance du « mouvement sans-frontièriste » (Médecins du monde, Médecins sans frontière, Reporters sans frontières, etc.), le droit d'ingérence comporte un contenu éthique, politique et juridique. Il est à la fois « droit de », « droit à », et même « devoir », selon le côté où on se situe, celui de l'homme moral qui, doublement, croit devoir agir et se croit en droit d'agir, ou bien du côté de la victime, qui est en droit d'attendre une aide. Le droit d'ingérence sonne à la fois comme un devoir et un droit. Il est droit pour l'ingéré ; et il est droit et devoir à la fois pour l'ingérant.

L'ingérence humanitaire est, à la fois, un droit subjectif (comme attente personnelle) et un droit positif (défini par des règles explicites, objectives, au niveau international, notamment par la Charte de l'ONU et par les résolutions du 8 décembre 1988 et du 14 décembre 1990 de l'AG).

Ainsi, par exemple la charte, dans son article 42, dispose : « si le Conseil de Sécurité estime que les mesures prévues à l'article 41 seraient inadéquates ou qu'elles se sont révélées telles, il peut entreprendre, au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales. Cette action peut comprendre des démonstrations, des mesures de blocus et d'autres opérations exécutées par des forces aériennes, navales ou terrestres de Membres des Nations Unies. C'est ce qui est couramment appelé « opération de maintien de la paix des Nations Unies.

Quant bien même que la charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un Etat, elle reconnaît pour celles-ci le droit d'application des mesures de coercition prévues au chapitre VII.(49(*))

Soulignons en sus que l'ingérence humanitaire est un droit politique en ce qui concerne l'appréciation et la détermination des normes éthiques et pratiques pouvant justifier l'ingérence. La politique de l'ingérant détermine aussi bien l'opportunité que la nature, le degré et la durée de l'ingérence.

Le droit d'ingérence est ambivalent ou, si l'on veut, trivalent et, aux yeux de plusieurs juristes, fondamentalement ambigu et inapproprié parce que véhiculant une confusion dangereuse, renchérit NGOMA BINDA. Sa prétention à la nouveauté est récusée. On le juge superfétatoire face à l'existence de plusieurs instruments juridiques déjà présents dans le droit international.(50(*))

Olivier RUSSBACH(51(*)) le pense même être une tentative d'escroquerie : un « détournement du droit humanitaire » créé depuis Henri Durant avec la Croix Rouge et confirmé par la Charte des Nations Unies, sur la conventions de la Hayé et les conventions de Genève (1949) et leur protocoles additionnels (1977). On le dit être « un droit aux fondements incertains, au contenu imprécis et à géométrie variable ». On le pense susceptible de justifier toutes sortes d'interventions, même agressantes, et secrètement chargées de désirs d'hégémonie, d'intensification de l'exploitation et de recolonisation des Etats faibles.

C'est au non de la conscience morale supposée universelle et, en particulier, au nom de la morale des droits de l'homme que le droit d'ingérence se trouve affirmé avec insistance. Les français Bernard KOUCHNER et Mario BETTATI(52(*)), premiers promoteurs de ce « nouveau » droit, le fondent sur une « morale de l'extrême urgence face à l'inhumanité, face à la barbarie de la fin de ce XXe siècle ». Le droit d'ingérence est donc toujours déjà, selon BETTATI, un droit humanitaire. Tout autre droit d'ingérence est non fondé, il est un non-droit, une agression pure et simple. Fondé sur la « morale de l'extrême urgence ; le droit d'ingérence se donne comme un droit de réponse au « malheur des autres », un droit d'agir chez les autres, et éventuellement sans leur consentement. Il se fonde sur l'aspiration dont la légitimité interdit à la conscience de refuser d'apporter assistance à quiconque se trouve en danger réel de mort et d'indignité.(53(*))

Bien qu'en revanche depuis décembre 1988, la notion d'ingérence humanitaire soit reconnue par le droit international, certains pensent qu'elle devrait rester dans la sphère des valeurs strictement morales. Cette notion est en effet totalement contraire aux fondements du droit international qui stipule qu'un Etat n'est lié par une règle de droit que s'il l'a acceptée en ratifiant un traité ou en adhérant à une règle préexistante. Dans la pratique, les actions d'ingérence humanitaire sont toujours réalisées par des contingents nationaux, ce qui peut impliquer deux situations relativement différentes ; le « droit » d'ingérence et le « devoir » d'ingérence.(54(*))

Le droit d'ingérence, terme créé par le philosophe Jean-François REVEL en 1979, est la reconnaissance du droit qu'ont une ou plusieurs nations de violer la souveraineté nationale d'un autre Etat, dans le cadre du mandat accordé par l'autorité supranationale. Dans la pratique, au nom de l'urgence humanitaire, il n'est pas rare que le mandat soit fourni rétroactivement : ainsi l'intervention de la France en Côte d'Ivoire s'est faite initialement sans mandat de l'ONU.(55(*))

Cependant, le devoir d'ingérence est l'obligation qui est faite à tous les Etats de fournir assistance, à la demande de l'autorité supranationale. Il est évident que c'est cette notion qui est la plus proche du concept originel d'ingérence humanitaire. Elle est également largement rejetée par les Etats membres de l'ONU qui y voient une remise en cause inacceptable de leurs prérogatives.(56(*))

En dépit des idées généreuses du concept, qui place au premier rang des valeurs comme la démocratie ou le respect des droits de la personne humaine, il a dès l'origine suscité le questionnement, voire critique.

Dans les faits, une mission d'ingérence est parfois contraire aux objectifs fondamentaux de l'ONU (le maintien de la paix), en tout cas toujours en contradiction avec l'article 2.7 de la Charte des Nations Unies.

Pour de nombreux juristes, la création de ce concept n'a pas lieu d'être. En effet, la charte des Nations Unies contient déjà de nombreuses dispositions allant dans ce sens, en particulier, dans chapitres VI et VII. Il ne s'agissait donc pas de la création d'un nouveau droit, mais simplement de la mise en application de droits déjà existants.

Plus fondamentale que ce problème de droit, l'ingérence humanitaire souffre d'un certain nombre de contradictions qui sont principalement dues à la confusion volontairement entretenue entre droit et devoir d'ingérence. Il est en effet difficile dans ces conditions de séparer les mobiles humanitaires des mobiles politiques et d'assurer du total désintéressement des puissances intervenant.(57(*))

Bien qu'elle se veuille universelle, la déclaration des droits de l'homme est fortement influencée par les travaux des philosophes occidentaux du siècle des lumières et plus généralement par la morale judéo-chrétienne. L'ingérence a donc toujours été une action dirigée depuis le nord vers les pays du sud. Il est ainsi peu vraisemblablement que des contingents rwandais seront un jour chargés de mission de maintien de la paix en Irlande du nord, ou que des Libanais interviendront au Pays basque.

En réalité les Etats puissants ont peu de risque d'être cible d'une action d'ingérence. Par exemple les populations de Tchétchénie sont sans doute autant en danger aujourd'hui que l'ont été les Kosovars, il y a quelques années, mais la Russie étant infiniment plus puissante sur la scène internationale que la Serbie, il est peu probable qu'une action internationale se mette en place.(58(*))

Il est donc logique qu'une remise en cause dissymétrique de la souveraineté des Etats se heurte à des réticences très fortes. Ainsi le sommet du G-77, qui réunit les Etats les plus pauvres, a condamné en 1990 le « prétendu droit d'intervention humanitaire » mis en avant par les grandes puissances.(59(*))

En occident également l'ingérence humanitaire a des opposants. Beaucoup trouvent qu'elle ressemble un peu trop au colonialisme du XIX siècle, propageant les valeurs de la démocratie libérale et considérant les autres cultures comme quantité négligeable. Il lui est également reproché son caractère événementiel : elle a tendance à s'exprimer dans le chaud de l'action, pour donner bonne conscience aux téléspectateurs occidentaux, et à négliger les conflits oubliés par les médias ou les détresses chroniques. Comme le prouve la crise ouverte autour de l'intervention américaine en IRAK, le délicat équilibre entre la répression des bourreaux et le respect de l'égalité souveraine des nations reste donc à trouver.

Partant de tout ce qui est dit , il y a lieu de remarquer que le principe de l'égalité souveraine des Etats se heurte à plusieurs sortes de limitations. Ainsi, l'Etat peut voir son intégrité territoriale entachée, notamment, dans le cadre de l'intervention sollicitée où il accepte volontairement l'intervention d'un Etat soit d'une organisation internationale sur son territoire. En outre, les organisations internationales, en générale et l'ONU en particulier , peut agir dans le cadre de l'application des chapitres VI et VII de la charte, sous forme des opérations de maintien de la paix dans un Etat avec ou sans le consentement de ce dernier en vue de sauvegarder la paix et la sécurité internationale.

Cependant, il sied de le souligner avec toute sérénité que le droit international n'autorise pas à un Etat d'intervenir dans les affaires intérieures d'un autre même sous prétexte d'intervention humanitaire. Cette pratique devra être rejetée en vertu du principe de l'égalité souveraine des Etats.

Outre la limitation de l'intervention sollicitée et d'ingérence humanitaire, le principe d'égalité souveraine trouve d'autres limitations notamment dans la pratique des Etats, particulièrement dans leur participation aux organisations internationales.

* (45) http://fr.wikipedia.org/Ing/ingerence_humanitaire.

* (46) Idem

* (47) Mario BETTATI , Le droit d'ingérence, Ed. De noël, Paris, 1987, p.12.

* (48) DEMANGE BOST , A. , Le droit d'ingérence ou la souveraineté des Etats, Mémoire, Institut d'Etudes Politiques de Lyon, Lyon, 2000-2001, p.17.

* (49) Voir art. 2 §7 de la Charte de Nations Unies.

* (50) NGOMA BINDA, « Indépendance, Droit d'ingérence et Politique Hégémoniques », in Les enjeux de la mondialisation pour l'Afrique, Ed. Loyola xxxx

* (51) RUSSBACH Olivier, ONU contre ONU, Le droit international confisqué, La découverte, Paris, 1994, p.56.

* (52) KOUCHNER B. Mario BETTATI, Le devoir d'ingérence. Peut-on les laisser mourir ?, Denoël, Paris, 1987, p.86

* (53) KOUCHNER, B., Le malheur des autres, Odile Jacob, Paris, 1991.

* (54 )http://fr.wikipedia.org/Ing/ingerence_humanitaire.

* (55) Idem

* (56) Ibidem.

* (57) http://fr.wikipedia.org/Ing/ingerence_humanitaire..

* (58) http://wikipedia.org/Ing/ingerence_humanitaire

* (59) Idem

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984