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Sécurité et sureté maritime : de l'élaboration des textes à  la difficulté de mise en oeuvre

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par Mohamed Saà¯d HAFFAF
Université d'Angers - Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées en droit maritime et des transports 2002
  

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PREMIERE PARTIE : LA SECURITE MARITIME

Section 1 : SOURCE ET LEGITIMITE D'UNE REGLEMENTATION SANS CESSE EN ESSOR :

Il convient tout d'abord d'analyser le processus d'élaboration d'une réglementation en matière de sécurité maritime avant d'étudier à qui la tâche de cette élaboration doit ou peut être attribuée.

SOUS SECTION I : GENESE D'UNE REGLEMENTATION EN FAVEUR DE L'AMELIORATION DE LA SECURITE MARITIME :

Comprendre le cheminement de l'apparition d'un règlement dans le secteur de la sécurité maritime, nous impose deux réflexions : la première consistera à constater comment émerge la conscience que dans tel ou tel domaine une réglementation devient nécessaire et la deuxième portera sur l'étude de la frontière entre cette prise de conscience et la volonté politique de l'élaboration d'une réglementation.

CHAPITRE PREMIER : LES EVENEMENTS DE MER ET LEUR ENSEIGNEMENT :

§1.1 : LES CATASTROPHES INSTRUCTIVES

Avril 1912 : Le TITANIC(2), paquebot réputé insubmersible qui effectuait son voyage inaugurale entre Southsampton via Queenstown et New York avec 2358 passagers à son bord ,sombre au large de Terre Neuve, victime d'un heurt avec un iceberg , victime également de l'orgueil démesuré de ses propriétaires (1) .

(1) : La prestigieuse récompense du ruban bleu était attribuée au navire qui effectué la traversé de l'atlantique le plus rapidement possible, récompense détenue par la compagnie CUNARD. Les divers témoignages ont permis d'établir que le représentant de l'armateur à bord du TITANIC a influencé la décision du commandant de ne pas réduire la vitesse malgré des alertes météorologiques signalant la présence d'iceberg dans les parages du TITANIC

La rapidité à laquelle a sombré le navire dans une eau glaciale causa la disparition de plus de 1500 personnes (femmes, enfants, adultes, vieillards). Le monde entier découvre alors l'ampleur d'une catastrophe maritime, et les professionnels du secteur maritime quant à eux doivent redevenir humbles, attitude qu'ils avaient tendance à oublier avec la modernisation technologique. Ils devront accepter que la mer restera à jamais un milieu hostile à l'homme, ce que la révolution industrielle avait un temps fait oublier. Vu l'ampleur de la catastrophe qui a touché toutes les couches sociales dont beaucoup d'aristocrates Anglais, une conférence internationale pris place à Londres en 1914 et mis en évidence de nombreux facteurs accablants, qui couplés les uns aux autres ont entraîné cet évènement de mer.

En prenant l'exemple du TITANIC, il est certain que dans l'esprit des armateurs et du grand public, ce paquebot était insubmersible. Il a fallut cette catastrophe pour révéler les nombreuses lacunes dans le domaine du compartimentage et de l'équipement des navires.

C'est ainsi que cette évènement de mer a conduit à l'élaboration de règles internationales obligatoires pour les navires marchandes, règles englobant les domaines techniques de construction de navire, de détection incendie, d'équipement pyrotechnique et de drome de sauvetage dans le but d'améliorer le sauvetage de la vie humaine en mer.

Sans entrer dans une simple énumération de catastrophe, il est cependant indispensable de citer les autres principaux évènements ayant entraîné une évolution ou une création de texte en faveur de l'amélioration de la sécurité maritime.

Le 18 Mars 1967 le pétrolier libérien Torrey canyon s'échoua au large de la Cornouaille. Cet évènement entraînant une pollution de 250 kilomètres des côtes britanniques et de 100 kilomètres des côtes Françaises, est à l'origine de l'adoption de la convention de 1969 sur le droit d'intervention en haute mer, la convention CLC 69 et de la création du FIPOL en 1971, fond d'indemnisation des dommages causés par le transport par mer d'hydrocarbures ainsi que de la convention Marpol de 1973, convention qui traite de la pollution opérationnelle par hydrocarbure.

C'est en 1978 que la convention Marpol subit de nombreuses modifications, cette révision a été motivée par l'échouement de l'AMOCO CADIZ, pétrolier battant pavillon libérien, qui déversa plus de 240000 T de pétrole au large Portsall

Peu de temps après, le 7 mars 1980 le pétrolier panaméen TANIO se rompt en deux au large des côtes françaises, déversant plus de 6000 tonnes de Fuel lourd N°2 ; ce dernier accident fût à l'origine du Mémorendum de Paris autrement appelé « contrôle par l'Etat du port » et a pour objectif de pallier les insuffisances des états du pavillon.

Quelques fois une seule catastrophe ne suffit pas à faire progresser le domaine de la sécurité maritime : ainsi alors que le naufrage du Herald of Free Enterprise au large de la Belgique en 1987 causait la mort de 193 personnes, catastrophe qui conduisit l'OMI a adopter une résolution en matière de gestion de la sécurité, il fallut l'incendie survenue à bord du Scandinavian Star, ferry danois, et ces 158 morts en Avril 1990 en Mer du Nord pour rendre obligatoire cette réglementation.

L'échouement du pétrolier américain Exxon Valdez au large de l'Alaska, poussera les Etats-Unis à adopter l'Oil Pollution Act 90, réglementation unilatérale mais qui sera reprise dans ces grands traits par l'OMI en 1992, avec la modification des règles MARPOL et qui concerne surtout l'exclusion des navires pétrolier simples coques .

C'est à la suite d'une série d'accidents comme celui du Haven (2) en 1991, de Aegean Sea en 1992 et enfin du Braer (3) en 1993 que la commission Européenne proposa une politique commune de la sécurité maritime.

En 1994 le naufrage de l'Estonia en Mer Baltique causa la mort de 852 personnes : s'ensuivi des modifications de SOLAS par l'OMI et surtout l'établissement de normes régionales décidées par la

(2) : Pétrolier chypriote qui pris feu au mouillage dans le golf de Gênes avant d'exploser et de se briser en deux déversant 30000 tonnes de pétrole.

(3) : Pétrolier libérien qui s'échoua aux îles Shetland déversant 84000 tonnes de pétrole

conférence de Stockholm et qui concerne la stabilité des ferries après avarie pour les régions de la mer baltique et de la mer du nord.

Enfin je citerai ici les évènements qui ont sans doute marqué considérablement l'opinion public, plus attentive aujourd'hui au problème d'environnement et qui ont été à l'origine de nouvelles mesures émises par la Commission Européenne : ce sont en 1999 le naufrage du chimiquier Erika qui a amené la commission à s'interroger sur le contrôle des sociétés de classification et l'application des normes de sécurités.

Et enfin dernièrement la perte du pétrolier PRESTIGE au large des côtes de Galice qui a accéléré le processus de bannissement des navires pétroliers simples coques, mesures déjà énoncée dans les propositions de la commission Européenne suite à l'ERIKA dit paquet ERIKA I et ERIKA II.

Voici donc la liste des évènements majeurs ayant abouti à une modification, à la création de textes en faveur de la sécurité maritime mais qui ont aussi eu une incidence fondamentale sur l'évolution des régulateurs et des autorités normatives. Malheureusement ces mesures sont systématiques les conséquences de catastrophes et n'ont jamais devancé les évènements. J'invite le lecteur à effectuer cette constatation à la lecture de cette énumération de catastrophes.

La catastrophe du TITANIC a donc finalement été le point de départ d'une synergie sécuritaire dans le domaine maritime et comme nous pourrons le constater plus en aval lors de cette étude, les améliorations dans le domaine de la sécurité maritime sont souvent le fruit d'une réflexion menée suite à une catastrophe maritime, les enquêtes accidents.

§1.2 : LES ENQUÊTES ACCIDENTS :

Comme nous avons pu le constater dans l'énumération précédente, les mesures prises en faveur de l'amélioration de la sécurité maritime le sont pour la plus part à la suite d'une analyse effectuée afin de connaître les circonstances de l'accident. Cette analyse est effectué lors d'une enquête dite enquête accident : commission ad hoc encore récemment, elle s'impose maintenant aux états du pavillons dont un navire est impliqué dans un accident majeur.

La première « enquête accident » majeure menée à la suite d'une catastrophe a été celle constituée à la suite du naufrage du TITANIC : elle a été menée par la commission sénatoriale des Etats-Unis et publiée le 28 mai 1912 (4).

Parallèlement à cette commission d'enquête, une autre analyse avait lieu de l'autre côté de l'Atlantique à Londres, du coté du Board of Trade, le ministère Britannique du Commerce, enquête qui se déroula du 2 Mai 1912 au Mercredi 3 Juillet 1912.

Cette commission enquêta spécialement sur le nombre d'embarcations, radeaux, engins de sauvetage et autres équipements pour la sécurité des passagers, et suivi les recommandations émises par la commission sénatoriale reprises afin d'établir une nouvelle réglementation.

Bien que la première convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer eu lieu à Londres en 1914 s'appuya sur les éléments retenus par ces premières enquêtes, ces mesures restèrent longtemps en sommeil suite aux évènements tragiques de la première guerre mondiale(5).

Donc depuis la catastrophe du TITANIC, l'intérêt des enquêtes après accidents ne peut être remis en cause.

Cependant il n'existait pas de réel cadre, les enquêtes étant menés au coup par coup et l'organisme chargé de mener l'enquête constituée au cas par cas.

L'apparition des commissions d'enquêtes a été une grande amélioration dans l'efficacité et surtout la vitesse de réaction.

Le texte fondateur qui fixe désormais les conditions et modalités des enquêtes après accident pour le maritime est le texte de l'OMI intitulé « code pour la conduite des enquêtes sur les accidents et incidents de mer » résolution A 849(20) du 27 novembre 1997.

L'OMI qui s'est également doté d'un groupe de travail au sein du sous comité Flag State Implementation (FSI ) sur les « accidents et enquêtes ».

La directive Européenne 1999/35/CE du Conseil de l'Union Européenne « relative à l'exploitation en toute sécurité de services réguliers de transbordeurs rouliers et d'engins à passagers à grande

(4) : Bulletin de la Navigation et des Pêches maritimes, rapport de la commission Sénatoriale des Etats-Unis sur la Catastrophe du TITANIC, source : gallica.bnf.fr.

(5) : Il fallut près de 15 ans avant que ces mesures ne soient appliquées.

vitesse » se réfère explicitement à la résolution de l'OMI précédemment mentionnée et fait mention d'enquêtes obligatoires prévues en cas d'accident.

A noter l'existence d'un Forum International des enquêteurs sur les accidents maritime (MAIIF),en anglais le Marine Accident Investigators International Forum, qui a pour objet de favoriser les contacts directs entre enquêteurs de pays différents. L'intérêt étant que dans certains Etats les BEA mer ne sont pas dissociés des administrations chargées de la réglementation et des contrôles.

Bien que les enquêtes accidents s'imposent maintenant aux Etats du pavillon, il est cependant des commissions d'enquêtes permanentes possédant une réputation de qualité et de compétence comme le Marine Accident Investigations Branch (MAIB ) pour l'Angleterre .

La France possède également une commission d'enquête permanente reconnue sur le plan international, le BEA mer (Bureau Enquête Accident).

Le BEA mer n'a été mis en place qu'à la suite de l'arrêté du 16 décembre 1997 portant création du BEA pour réaliser des enquêtes après évènements de mer, permettant ainsi d'appliquer les dispositions de la résolution A 849(20) de l'OMI portant  « Code pour la conduite des enquêtes sur les accidents et les incidents de mer ».

Ce service est constitué au sein de l'Inspection générale des affaires maritimes.

L'année 2002 a constitué un tournant décisif pour le BEA mer ; en effet, depuis sa création en décembre 1997 et jusqu'à fin 2001, le BEA mer n'avait qu'une existence réglementaire suite à l'arrêté du 16 décembre 1997 .

Depuis le début de l'année 2002, le statut du BEA mer s'est vu modifié et prendre un statut législatif grâce à la loi n°2002-3 du 3 janvier 2002 sur notamment les enquêtes techniques et administratives après événements de mer.

Ce texte dans son titre III, élargit les possibilités d'investigation des organismes permanents chargés de la conduite des enquêtes techniques dans le secteur de la navigation maritime et dans celui des transports terrestres, organise également la coordination des travaux des BEA avec ceux des autorités judiciaires éventuellement saisie des mêmes faits et enfin règle la collaboration avec les

Etats étrangers qui pourraient être concernés.

Le statut du BEA est bien sur la pierre angulaire fondatrice de cette organisation, cependant ce qui lui confère une réelle légitimité est son mode de fonctionnement qui doit mener à des résultats d'enquêtes indiscutables afin d'imposer sa crédibilité dans le milieu professionnel.

En effet le BEA est constitué d'un collège permanent d'experts et professionnels maritime autour du directeur du BEA représentant ainsi un panel assez complet du milieu maritime ce qui le différencie des autres bureaux enquête accident européen existant qui ont très peu d'autonomie dans le choix de leurs collaborateurs.

De plus le directeur peut, s'il le juge utile, s'adjoindre les services d'un expert temporaire dans tel ou tel domaine afin d'être le plus précis possible dans les enquêtes.

Le domaine de compétence touche tout accident dont le déroulement a eu lieu dans les eaux territoriales françaises, tout accident où l'on déplore une victime de nationalité française ou tout accident dont les répercutions environnementales touchent les intérêts français tel qu'énuméré dans le titre III, art 14,II.

Malheureusement le BEA mer ne peut qu'émettre des recommandations et n'a pas d'action impérative sur les acteurs de la sécurité maritime ; cependant son directeur mise sur la publicité des recommandations(récapitulées chaque année dans le rapport annuel) et le fait que le BEA possède de plus en plus une image de professionnalisme, qui lui vaut d'être reconnu sur le plan international par la commission européenne dans le cas du « PRESTIGE » , la Commission européenne ayant exprimé son souhait d'être tenue informée du déroulement des travaux d'enquête, le BEAmer s'est également rapproché de ses services à cet effet.

Mais le point essentiel de ces commissions d'enquêtes reste leur contribution en matière d'amélioration de la sécurité maritime :

Le but premier du BEA étant la recherche du fait technique ayant entraîné l'accident afin d'éviter qu'il ne se reproduise, le directeur du BEA compte énormément sur le dialogue avec les entreprises

concernées dans une affaire afin de connaître les positions de ces entreprises qui sont le plus à même d'apporter des éclaircissements ou même des solutions.

Et le dialogue peut parfois apporter de réels progrès techniques en matière de sécurité maritime comme ce fût le cas pour deux recommandations émises à la suite du naufrage du IEVOLI SUN, concernant le constructeur VINEL pour les dégagement d'air et le constructeur FRAMO pour son système d'assèchement des ballasts qui ont été pris en compte immédiatement et intégré dans leur nouveau système.(6)

De même font parti des recommandations du BEA suite à la catastrophe de l'ERIKA, la demande d'une plus grande transparence concernant les sociétés de classifications. Le BEA qui s'attaque aussi à la notion de « safe manning certificat » autrement dit l'effectif minimum de sécurité à bord d'un navire, effectif approuvé par les Etats du pavillons et qui parfois ne constitue même pas un minimum suffisant au respect de la réglementation des temps de repos.(7)

La contribution des enquêtes techniques après accidents n'est donc plus à démontrer, les commissions permanentes facilitant encore plus le déroulement de ces enquêtes.

Mais pourquoi alors les enseignements des catastrophes sont ils pris en compte dans certains cas afin de faire évoluer ou de créer un texte réglementaire dans tel ou tel domaine de la sécurité ? En fait la question est de savoir quelle est la motivation réelle qui a entraîné les organes régulateurs et normatifs à établir des règles qui peuvent bien souvent entraver le commerce maritime et son maître mot «  la rentabilité ».

Monsieur Boisson( directeur communication et affaires juridiques, bureau veritas) nous en apporte sans doute un élément de réponse dans ses propos tenus lors du colloque Saferseas (8) : « la chaîne de l'amélioration de la sécurité maritime est pour l'instant : catastrophe plus travail sur les consciences de la part des médias égal obligation pour les gouvernement de réagir. ».

(6) : Voir pour l'aspect technique les recommandations chapitre 10 du rapport d'enquête finale du IEVOLI SUN : http://www.equipement.gouv.fr/actualites/rapports

(7) : toutes ces recommandations sont rappelées dans les rapports annuels du BEA pour 1999, 2000 et 2001

(8) : Colloque Saferseas, organisé à Brest les 11-16 Mars 2002, Conférence Sécurité Maritime et Protection de l'Environnement Marin

C'est sur ce postulat que se développera mon argumentaire au cours de la prochaine section de cette partie consacrée à la sécurité.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus