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Ebanda tono (les peaux tachetées): utilisations et représentations de la faune sauvage (Gabon)

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par Florence Mazzocchetti
Université de Lettres et sciences humaines, Orléans - Master2 2005
  

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I.4 Les « vampireux » et leur jalousie

Un autre point positif pour la conservation se situe au niveau des croyances aux sorciers « vampireux » et de leur jalousie. En effet, pour un Bakota le malheur ne frappe jamais par hasard, il a toujours une cause mystique. Par exemple, si, en forêt, un homme meurt ou se fait charger par un animal, c'est qu'une personne lui a lancé un mauvais sort depuis le village.

Ce sort peut venir d'un sorcier vampireux  qui agit par jalousie si un chasseur tue beaucoup de gibiers et qu'il ne le partage pas avec les autres villageois. Il en est de même pour les femmes qui pêchent beaucoup de gros poissons. Les vampireux n'aiment pas qu'une personne sorte du commun, ils n'aiment pas les réussites trop voyantes et exubérantes.

C'est donc eux qui sont actuellement les derniers garants d'une limitation de la ponction des ressources en faune car pour éviter la jalousie du vampire, il faut soit se limiter dans la prédation, soit partager avec les autres membres de sa famille ou même des autres villageois. Tout comportement individualiste est fortement réprimandé par l'ensemble de la communauté.

Bien sûr, comme me l'on souvent dit mes interlocuteurs, si un chasseur ne souhaite pas partager, il va ruser et cacher le « surplus » de gibier avant d'arriver au village : « Pour éviter le Vampire, si on a fait une bonne chasse et qu'on ne veut pas partager, on cache (le gibier) dans un endroit et on le dit à notre femme pour qu'elle aille le récupérer et le préparer discrètement. ». Le chasseur peut aussi dissimuler son gibier afin de le vendre aux passants sur le bord de la route, en cachette des gens du village.

Mais ce comportement ne peut être répété indéfiniment sans que la communauté ne s'en aperçoive ; ainsi, seulement un nombre restreint de gibier peut être caché.

Étant donné la faible fertilité des sols de forêt dense humide en Afrique et la faible productivité de

la forêt tropicale en général, le mode de vie traditionnel des chasseurs-cueilleurs et des agriculteurs n'est viable que dans une situation de stabilité écologique, de faible densité de populations humaines et de prélèvements des ressources naturelles axés uniquement sur la consommation locale. Mais, toutes ces transformations ont rendu obsolète les gestions traditionnelles des ressources naturelles. Pourtant, en les valorisant, elles pourraient s'intégrer dans la conservation de l'environnement, car certains termes, comme  zones mises en repos  ou  lieux interdits  « parlent » à la conscience Bakota.

II Utilisations des connaissances empiriques dans la conservation

Dans le chapitre précédent, nous avons remarqué que les connaissances biologiques et éthologiques des Bakota sur les animaux de la forêt restent, dans l'ensemble, assez complètes. Elles constituent un autre point positif pour la conservation car elles peuvent servir à la compréhension d'éventuels plans de gestion de la faune dans la région. C'est pourquoi, elles doivent impérativement être prises en compte par les biologistes. Bien sûr, à l'inverse, si ces connaissances se perdent, leur disparition constituera un frein pour ces projets.

Il faut donc valoriser ces connaissances et les intégrer en particulier dans les programmes scolaires. En effet, les savoirs culturels traditionnels, non enseignés dans l'école classique, peuvent être transmis aux élèves en s'appuyant sur les anciens. Il peut s'agir de la langue maternelle et donc de la tradition orale ainsi que de l'histoire des communautés. Il peut s'agir de surcroît des savoirs taxonomiques, méthodologiques ou manuels concernant le milieu naturel et, par ricochet, de toute une panoplie de savoirs techniques sur la chasse, la pêche, la cueillette etc. Cela permettra à la fois de fixer la jeunesse dans les villages et de renouer le dialogue entre les générations (F. Grenand, 2000).

Les savoirs éthologiques et biologiques sur la faune peuvent également être mis en valeur et utilisés dans des projets de développement durable. Les chasseurs sont souvent les premières personnes convoitées par les programmes de tourisme de vision ou de chasse sportive, en servant de guide ou de pisteurs.

III Les préoccupations des Bakota sur le devenir de leur forêt

Comme nous l'avons souvent répété, les Bakota restent, pour la plus grande majorité, presque entièrement dépendant des ressources de la forêt. Aussi, les craintes qu'ils formulent au sujet du devenir de leur forêt montrent en fait, les préoccupations qu'ils ont sur leur propre futur.

Pour eux, les deux principaux facteurs de la disparition des animaux sont la chasse au fusil et les exploitations forestières. Ils sont tout à fait conscients des répercussions que ces activités engendrent pour eux, comme me l'expliquait le chef de quartier Bordeaux à Makokou :

« Ce qui fait fuir les animaux ? C'est le fusil et les engins des forestiers. Il y a trop de chasseurs, ils sont obligés d'aller jusqu'à Bélinga. Ici, autour de Makokou, il n'y a quasiment plus d'animaux et c'est interdit de chasser la nuit car c'est devenu trop dangereux, les gens se tirent dessus, il y a eu beaucoup d'accidents. »

Ce sont à peu près les mêmes remarques qui sont faites au niveau des villages forestiers :

« Avant, il y avait beaucoup d'animaux autour des villages, mais maintenant on a les fusils donc ils ont fuit. » Vieux Ikota, Mbondou

Avec cette « pénurie » de gibier autour des villes et des villages de la région, il n'est pas étonnant que la réserve d'Ipassa et le parc de l'Ivindo soient fortement convoités par les chasseurs qu'ils soient professionnels ou non. C'est ce que me disait l'un de mes interlocuteurs à Makokou :

«Tous les animaux que je vous cite ne sont plus ici. Ils sont partis à cause des chasseurs (chasse de nuit) et des forestiers. Il faut faire plus de 2 ou 3 km pour les trouver. Y a qu'à Ipassa où on peut les trouver mais c'est une réserve, donc on peut pas aller chasser là-bas. »

Ainsi, les quelques jeunes chasseurs sur Makokou que j'ai rencontré ont plus ou moins avoué que parfois ils pénétraient dans la réserve pour aller chasser, bien qu'ils sachent les risques qu'ils encourent.

Certains ont également la crainte de voir disparaître toute la forêt : « Ici, si ça continue, ça va devenir comme un désert car ils détruisent tous les arbres. ». Ils craignent aussi que les animaux reviennent un jour se venger :

« Les animaux disparaissent à cause des braconniers et des forestiers. Mais, un jour, tous les animaux vont revenir pour manger nos plantations derrières les maisons car les forestiers leur enlèvent toute leur nourriture en forêt. »

Vieux de Makokou.

Ces craintes se retrouvent chez d'autres peuples de chasseurs dont les coutumes ont été perturbées par l'invasion coloniale et l'intrusion du fusil moderne. Les australiens Unambal ont interprété les violations des terres interdites et les massacres pur et simple des animaux, nullement justifiés par des besoins alimentaires ni disciplinés par des règles, comme l'annonce de l'apocalypse, la fin du monde (Massenzi, 1999).

Malgré ce constat fait par la population Bakota sur les dangers menaçant les ressources naturelles de leur région, il n'y a pas de réel changement dans leurs pratiques. Car ceux qui pâtissent des inconvénients de cet appauvrissement, en font le constat, mais se contentent d'y remédier de la façon la plus simple possible : aller plus loin chercher le gibier là où il se trouve. Cette poursuite dans la voie d'une chasse « opportuniste » mais aussi extrêmement passive, entraîne la surexploitation de la faune sauvage, ce qui risque non seulement de conduire à l'extinction au niveau local de certaines espèces, mais de rendre les conditions de vie des populations encore plus dures, et de compromettre fortement le développement socio-économique de la région.

Toutefois, peuvent-ils faire autrement ? Et si oui, comment les aider ? Le fait que les Bakota se sentent eux-mêmes en danger face à la disparition de la forêt et de ses ressources est, il me semble, un facteur très positif pouvant les amener à réfléchir sur ces problèmes et à y apporter leurs propres solutions. Car, comme le pense Vanwijnsberghe (1996), il semble dangereux de leur proposer une solution « toute faite » sortie des plus beaux manuels qui, en cas d'échec risque d'entraîner chez une population déçue, une franche opposition pour tout ce qui est conservation de la nature. C'est parfois le cas, dans la zone d'étude, ce qui provoque des conflits entre les agents de la conservation (WWF, WCS, Service des Eaux et Forêts) et la population locale.

Evidemment, tout ceci ne pourra se faire sans le soutien financier et logistique des grandes ONG, des gouvernements nationaux et des instances internationales. Toutefois, il ne faudrait pas non plus tomber dans l'utopie du « bon sauvage », seul capable de vivre en harmonie avec la nature et de la respecter...

IV Une limite de la gestion « participative » : la gestion inconsciente des ressources fauniques

Depuis que les agences de conservation ont inscrit la gestion participative et le développement intégré à leur agenda, c'est-à-dire depuis le début des années 80, la plupart des projets ont adopté une perspective participative. Cette approche remet en cause les préceptes de la période conservationniste précédente en s'appuyant sur les populations locales et sur la recherche de solutions socio-économiques pour résoudre les problèmes écologiques. Mais, comme toute nouvelle approche, elle n'est pas parfaite. Joiris (2000), dans son article La gestion participative et le développement intégré des aires protégées, fait une bonne synthèse sur la faisabilité de cette approche dans le domaine de la conservation. Pour ma part, je ne vais insister que sur les dangers liés à une attente trop grande et parfois utopiste des gestions traditionnelles.

Tout d'abord, les gestions traditionnelles que nous venons d'examiner, permettent sans doute de limiter la ponction des ressources fauniques et donc favorise la reconstitution des stocks, mais ceci est fait sans qu'il y ait de but « conscient » de la part des populations étudiées. Car, lorsque je demandais à mes interlocuteurs s'il existait des règles de gestion coutumières liées à la chasse, la réponse était toujours négative :

« Avant, il n'y avait pas d'interdits pour la chasse, on chassait tout ce qu'on pouvait. Aujourd'hui, c'est les Eaux et Forêts qui ont mis des interdits. » Vieux Ikota, Mbondou

Comme nous venons de le voir plus haut, que la chasse soit pratiquée seule ou qu'elle soit collective, toutes les proies étaient bonnes à capturer, y compris les femelles en gestation ou les bébés. Bien sûr, à l'époque précoloniale, la chasse centrée sur la subsistance ne causait pas de gros dégâts sur l'effectif global des différentes espèces de faune qui se reconstituait à moyen ou long terme grâce :

1) à la faible densité de population

2) à des techniques de chasse et des armes traditionnelles moins performantes qu'à l'heure actuelle limitant une ponction trop rapide de la ressource

3) à leur mobilité limitant l'épuisement des ressources naturelles aux alentours du village.

Grâces à ces règles simples, les chasseurs et leurs familles trouvaient toujours du gibier en abondance. Il leur était ainsi très difficile de concevoir qu'une espèce puisse être mise en danger de disparition à cause de la chasse. Encore aujourd'hui, certaines personnes ont la conviction que les ressources de la forêt sont inépuisables et que si, à un endroit, on ne récolte plus de gibier, c'est que les animaux sont soit devenus malins et qu'ils évitent les pièges, soit qu'ils ont fuit ailleurs, un peu plus loin.

Cette vision de profusion des ressources naturelles conjuguées à des pratiques de chasse adaptées au contexte social, a empêché ces populations d'instaurer des règles strictes et « conscientes » de protection et de gestion des animaux de la forêt, telles que les conçoivent les Occidentaux contemporains.

En effet, les recherches scientifiques en archéologie ont démontré que, depuis toujours, la plupart des extinctions d'espèces animales (mais aussi végétales) sur la planète sont corrélées avec l'arrivée de l'Homme sur les territoires en question. L'homme a donc depuis toujours, une certaine propension à détruire qui l'entraîne inexorablement à sa perte, à plus ou moins brève échéance. Mais, lorsque qu'il se sent physiquement en danger, il met en place des règles de gestions des ressources en créant des lieux interdits et en limitant la ponction. Moins il y a de ressources et plus les règles sont strictes et conscientes.

Chaque peuple a trouvé des solutions adaptées à son mode de vie et à son milieu. Aujourd'hui, le défit de l'être humain est d'établir de nouvelles règles de gestion qui soient adaptées au nouveau contexte local et international ; chose, il est vrai difficile dans un monde en perpétuelle mutation, où tout va de plus en plus vite et dont les conséquences de nos actions nous paraissent de moins en moins contrôlables...

Il ne faut donc pas miser uniquement sur la gestion traditionnelle des ressources naturelles, puisqu'elles ne sont plus guère adaptées au contexte global actuel ; cela serait dangereux et fortement néfaste pour le bon fonctionnement des futurs projets de conservation et surtout pour le devenir des populations locales.

En conclusion de ce chapitre, il est évident que la modernisation, au sens large du terme, est un des principaux facteurs de dégradation du milieu naturel en particulier de la faune sauvage.

L'un des faits les plus marquants de ce modernisme est sans doute l'abandon, plus ou moins net et avancé, des traditions cynégétiques qui tenaient lieu de mode de gestion. Nous l'avons vu, la chasse commerciale a pris le pas sur la chasse de stricte subsistance, car même les chasseurs villageois vendent aujourd'hui la majeure partie de leur gibier.

L'apparition des armes à feu modernes a contribué à diminuer la crainte et le respect du chasseur traditionnel pour le grand gibier. En augmentant considérablement l'efficacité de la chasse65(*), à laquelle s'ajoute la nécessité de rentabiliser le coût des munitions, elles faussent le processus traditionnel de choix du gibier et accentuent la pression de chasse sur les espèces les plus prisées, généralement celles considérées comme les plus rentables économiquement.

Les chasseurs extérieurs, le plus souvent venant des centres urbains, ont fortement perturbé la régulation traditionnelle. Tout d'abord, par leur ignorance de l'éthologie et de l'abondance des espèces et ensuite par leur non respect des liens cosmologiques qui unissent les populations locales aux animaux sauvages. En retour, leur modèle productiviste a fortement influencé les chasseurs locaux.

De plus, la vision de l'univers comme un tout vivant naturel et surnaturel, n'est plus partagée par l'ensemble de la communauté Bakota. Aujourd'hui, les jeunes scolarisés affichent un certain scepticisme envers ces croyances : ceci explique, entre autre, l'abandon progressif des interdits alimentaires.

Toutefois, certains de leurs comportements ou certains propos contradictoires laissent pourtant supposer que les idées venues de l'extérieur se superposent aux schémas culturels préexistants. Il n'en reste pas moins l'abandon rapide ou insidieux des us et coutumes cynégétiques, des cérémonies, des interdits alimentaires etc. contribue à la perte du respect du gibier. La rupture du lien fondamental entre les hommes et les animaux aura sans doute, si l'on n'y prend garde, des conséquences extrêmement dramatiques pour des populations forestières telles que les Bakota.

Conclusion

Pour conclure ce mémoire, reprenons, tout d'abord, les questionnements que nous nous posions au début de cette recherche. Tout d'abord, nous avons vu que les Bakota entretiennent toujours, à l'heure actuelle, des relations autres qu'alimentaires et économiques avec la faune sauvage. En effet, même si ces pratiques tendent à disparaître petit à petit, les animaux sont utilisés dans de nombreux domaines de la vie des Bakota, et singulièrement dans le domaine magico-religieux où la présence des animaux est flagrante, en particulier dans les rites et les cérémonies.

Les utilisations que font les Bakota de la faune et les relations qu'ils entretiennent avec elle, sont similaires à la plupart des peuples Bantous du bassin du Congo (Chardonnet et al, 1995 ; Ichikawa, 1996 ; Lahm, 1996 ; Tchatat, 1999 ; Vanwijnsberghe, 1996). On retrouve, grosso modo, les mêmes interdits alimentaires au sujet des animaux tachetés, des carnivores, du Céphalophe à front noir ou de l'Antilope de Bates. Il en va de même pour les caractéristiques magiques de certains animaux comme l'Oryctérope, le Bongo et la Genette servaline.

La présence des animaux dans la littérature orale est statistiquement plus abondante chez les Bakota que chez les autres ethnies, mais ils partagent tous de nombreux contes en commun.

Alors, qu'est ce qui uni plus particulièrement les Bakota entres eux ? Et bien, nous l'avons vu, il s'agit de la Panthère, car tous les Bakota s'identifient à cet animal, qu'ils l'aient en eux ou pas. En effet, depuis les guerres tribales, la Panthère est devenue l'animal symbole identitaire de tous les sous-groupes Kota, une sorte de Totem ethnique et non clanique. C'est aussi pourquoi, bien que la circoncision soit pratiquée chez tous les peuples Bantous, le test du Ngoye n'est présent que chez les Bakota.

Par contre, la Panthère n'est quasiment pas utilisée et, malgré la disparition progressive des interdits alimentaires, elle reste encore très peu consommée. Elle n'a pas non plus d'importance dans les pratiques magico-religieuses. Là, l'animal qui domine est la Genette servaline qui possède des pouvoirs magiques très puissants. Elle est indispensable car c'est elle qui est le lien entre le monde invisible des Ancêtres et celui visible des Hommes. C'est également le cas pour les autres peuples du Gabon et du bassin du Congo en général. Si elle vient à manquer, elle peut être remplacée par d'autres animaux tachetés de la même famille, après que la peau de l'animal de substitution ait subit une préparation spécifique. En définitive, les animaux tachetés ont un rôle et une importance particulière chez les Bakota, mais il s'agit de variantes appartenant à un fond culturel aux peuples forestiers de cette région du globe.

Mais, pour mieux comprendre le rôle de ces animaux et la signification de leurs taches, une étude approfondie est nécessaire ; elle doit être menée auprès des spécialistes que sont les guérisseurs Nganga. Pour cela, l'idéal serait d'être soi-même initié à ces pratiques et aux différentes « danses » (en faisant attention de ne pas perdre l'objectivité du chercheur), et d'avoir une bonne maîtrise de la langue pour surmonter les obstacles liés à la présence d'un interprète.

Cette étude est aussi un aperçu général sur les relations socioculturelles que les différents groupes Kota, situé dans la région de Makokou, entretiennent avec la faune sauvage. Aussi, les divers domaines cités (pharmacopée, interdits alimentaires, traditions orales, rites et cérémonies etc.) peuvent tous faire l'objet d'études plus approfondies qui permettront à la fois une meilleure compréhension de ces relations et donc de la culture Kota, mais aussi une comparaison plus objective et exhaustive entre les différents sous-groupes.

En ce qui concerne l'utilisation de ces données sur les interrelations socioculturelles entre les Bakota et la faune sauvage, nous avons vu qu'elles peuvent s'appliquer - au moins en partie - dans différents domaines de la conservation de l'environnement et du développement durable. Les gestions traditionnelles peuvent servir de base à de nouveaux plans de gestion de la faune ; les connaissances empiriques sur l'éthologie et la biologie des animaux peuvent servir dans les programmes de tourisme de vision et de chasse sportive enfin, les traditions orales et les savoirs traditionnels peuvent servir dans la sensibilisation et l'éducation.

Mais si le débat est toujours d'actualité, nous savons que conservation et exploitation sont intimement liées et nécessitent l'une comme l'autre de s'assurer que l'effectif minimal des animaux, nécessaire à une reproduction dynamique et au maintien des populations, soit atteint. Il faut également que les différents programmes de conservation de l'environnement prennent réellement en compte les besoins des populations locales, et que leur développement et leur bien-être deviennent une priorité. Pour cela, de gros efforts sont encore à faire car c'est toujours la vision ethnocentrique de la conservation qui domine.

L'un des principaux défis adressé à la gestion des ressources naturelles à travers tout le bassin du Congo est le rétablissement de systèmes d'utilisation des ressources dans lesquels les populations locales conservent le contrôle de l'utilisation des terres sur base d'une éthique d'autorégulation afin de préserver les ressources qui leur sont nécessaires.

Bien que la prise en compte des populations locales soit nécessaire dans tout programme de conservation et de développement durable, il ne faut toutefois pas tomber dans l'utopie du « bon sauvage » respectant la Nature et vivant en parfaite harmonie avec Elle.

En effet, les pays du bassin du Congo doivent refonder une nouvelle alliance entre l'Homme et la nature et mettre en oeuvre des politiques de conservation dignes de ce nom. Mais, il est irresponsable de prétendre arriver à ce résultat par la seule gestion participative, idéalisée par beaucoup. L'implication de dirigeants énergiques, avec une conscience environnementale forte, est une condition nécessaire à la réussite de la gestion en partenariat, tout comme la mise à contribution de tous les acteurs : ceux-ci, dont les ONG, devront monter en puissance, sous la houlette de tels dirigeants.

Ce choix n'est pas le plus facile. Mais il est de loin le plus porteur d'espoir pour l'avenir dans le contexte actuel. L'impulsion politique doit venir des leaders, la construction pratique ne peut venir que de la base, de la société elle-même.

 

Fin

Bibliographie

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Table des Matières

Sommaire.....................................................................................................................p1

Résumé.......................................................................................................................p3

Remerciements...............................................................................................................p4

Liste des abréviations.......................................................................................................p5

Phonétique....................................................................................................................p5

Introduction................................................................................................................p6

Contexte scientifique..............................................................................................p8

Problématique....................................................................................................p15

Méthodologie.................................. ..................................................................p17

* 65 Nous pouvons aussi rajouter, en plus de l'efficacité, la baisse du danger vis à vis des animaux sauvages, car l'arme à feu permet d'abattre l'animal depuis une plus grande distance. Paradoxalement, si le danger relatif à la traque de la faune sauvage a diminué, la sécurité de la chasse s'est tout de même dégradée. En effet, les accidents de chasse ont fortement augmenté à cause du nombre de plus en plus élevé de chasseurs en forêt qui se tirent dessus.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams