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Le secteur informel à  l'épreuve du droit des affaires OHADA

( Télécharger le fichier original )
par Thierry Noël KANCHOP
Université de Dschang - DEA en droit communautaire 2009
  

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REPUBLIQUE DU CAMEROUN

Paix - Travail - Patrie
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MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT

SUPERIEUR
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UNIVERSITE DE DSCHANG
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FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES

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REPUBLIC OF CAMEROON

Peace - Work - Fatherland
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MINISTRY OF HIGHER

EDUCATION
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UNIVERSITY OF DSCHANG
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FACULTY OF LAW AND POLITICAL

SCIENCES
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LE SECTEUR INFORMEL

L'EPREUVE DU DROIT DES

AFFAIRES OHADA

Mémoire soutenu publiquement en Mai 2009 vue de l'obtention du
Diplôme d'Études Approfondies (D.E.A) en Droit Communautaire
et Comparé CEMAC.

KANCHOP Thierry Noel
Assistant de cours à la Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques Yaoundé II-Soa (Cameroun).
E-mail: noelkanchop@gmail.com

Tel : +(237) 77380159 / 94021924

Sous

La Direction du : et La Supervision du :

Dr. DJOUTSOP Phostin Roger Pr. Yvette R. KALIEU ELONGO
Chargé de Cours de Droit Privé Agrégée des facultés de Droit

INTRODUCTION

La recomposition de l'environnement juridique mondial sous l'influence des lois du marché suscite des enjeux importants relativement à la croissance économique des nations. Cependant la dynamique de construction des nouveaux paysages normatifs semble s'orienter vers une gestion communautaire des intérêts nationaux. C'est pourquoi, en Afrique, l'intégration régionale est élevée au rang de palier fondamental entre le national et l'international1. La signature à Port-Louis le 17 octobre 1993 du Traité instituant l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA)2 a donné une vision nouvelle de l'intégration communautaire par le droit. Avec cet instrument juridique, les États signataires se sont engagés dans la mise sur pied d'un instrument juridique capable de moderniser3, d'assainir4 et de sécuriser5 l'environnement économique des Etats d'Afrique Francophone à travers un droit commun des affaires, adapté aux réalités6 de l'Afrique et surtout à son projet de développement économique7. C'est ainsi que l'objectif d'harmonisation ou

1Abdoullah Cissé, « L'harmonisation du droit des affaires en Afrique : l'expérience de l'Ohada à l'épreuve de sa première décennie », Revue Internationale de Droit Economique, 2004, P. 1.

2 Le traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique signé le 17 octobre 1993 à Port-Louis (ILE MAURICE) et dont l'entrée en vigueur est effective depuis juillet 1995 confie la production du droit des affaires à un organisme dénommé Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA). Pour le moment seize états sont membres de l'organisation il s'agit de la République du BENIN, le BURKINA FASO, la République du CAMEROUN, la République du CENTRAFRICAINE, la République fédérale islamique des COMORES, la République du CONGO BRAZZAVILLE, la République de COTE D'IVOIRE, la République GABONAISE, la République de GUINEE EQUATORIALE, la République du MALI, la République du NIGER, la République du SENEGAL, la République du TCHAD, la République TOGOLAISE.

3 POUGOUE (P.G.), ANOUKAHA (F.) et NGUEBOU (J.), Droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique OHADA, Presses universitaires d'Afrique, 1998, p. 3.

4 Cf. Préambule du Traité de l'OHADA.

5 DIAKHATÉ (M.), « OHADA : un nouveau droit des affaires pour sécuriser l'investissement en Afrique », in http:/// www. Oecd.org/dataoecd/19/14/23731286.pdf.

6 Article 1 du traité OHADA.

7 KONE (M.), Le nouveau droit commercial des pays de la zone OHADA : Comparaison avec le droit français, Thèse de doctorat, Paris, 2003, P. 1.

mieux, d'uniformisation8 a conduit les Etats signataires du Traité à s'intéresser aux domaines fortement attractifs du droits des affaires, bien que l'opportunité soit laissée au Conseil des ministres d'intégrer dans le vaste chantier de l'harmonisation, toute matière qui intéresse le droit des affaires ou qui est jugée nécessaire par ledit Conseil9. L'oeuvre de l'OHADA dans les pays d'Afrique Noire intervient dans un contexte économique particulier eu égard à la lente croissance économique mais surtout à l'ampleur du secteur informel.

En effet, La décennie 80 marque le début de la crise économique et la mise du continent africain (en proie à des difficultés économiques) sous quasi tutelle du F.M.I. et de la Banque Mondiale. Implicite dans les années 7010, le secteur informel a pris son envol de nos jours au point d'arriver à concurrencer le secteur formel. Que de temps perdu aujourd'hui à élaborer des plans de sauvetage et de restructuration, à réduire des dettes, alors qu'entre temps les populations doivent vivre ou plutôt survivre : d'où la floraison et l'ampleur des activités du secteur informel11.

L'apparition de la notion de « secteur informel » est souvent attribuée au célèbre « rapport Kenya » du BIT (BIT 1972) 12. A partir de ce moment, la notion a animé la littérature sur le développement des pays africains, parce que

8 MATOR (B.) et THOUVENOT(S.), « L'uniformisation du droit des affaires en Afrique par l'OHADA », in la semaine juridique, entreprise et affaires, no 5 du 28 octobre 2004, p. 5.

9 Article 2 du Traité OHADA. On peut dès lors constater qu'au plan législatif, huit actes uniformes sont déjà disponibles sur des matières aussi diverses que : le droit commercial général, le droit des sociétés commerciales et G.I.E., le droit des sûretés, les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, les procédures collectives d'apurement du passif, le droit de l'arbitrage, la comptabilité des entreprises et les contrats de transport de marchandises par route, ( Les textes relatifs à ces actes uniformes sont disponibles sur le site de l'OHADA, sur le lien hhttp:/ // www. Ohada. com/ textes. php. D'autres actes uniformes sont aussi en cours d'élaboration, notamment celui relatif au droit du travail.).

10 Déjà à l'époque coloniale, les agents économiques arrivaient à soustraire leur production de l'impôt
dit "impôt de capitation", dénoncé par les leaders des mouvements de résistance.

11 LAUTIER (B.), L'économie informel dans le tiers monde, col repères, édition la découverte, Paris, 1994, p. 3.

12 Le terme « secteur informel » aurait été utilisé pour la première fois d'après Richard Walter ; Richard Walter, Formation en secteur informel : note de problématique et de présentation d'une étude pour l'AFD, Février 2006. , dans une étude sur l'emploi urbain au Ghana et officialisé en 1972 par une publication de l'Organisation International du Travail sur l'emploi au Kenya.

désignant des réalités complexes et diverses, renvoyant pour l'essentiel à l'ensemble des activités économiques qui se réalisent en marge des législations pénale, sociale et fiscale ou qui échappent à la Comptabilité Nationale ; c'est-àdire à l'ensemble des activités qui échappent à la politique économique et sociale, donc à toute régulation de l'Etat13. Ainsi ce secteur se caractérise par l'absence de reconnaissance juridique et par une coexistence plus ou moins pacifique avec le secteur formel14, d'où la floraison de qualificatifs péjoratifs pour désigner les multiples facettes des activités de l'informel15. Toutefois, cette informalité juridique n'enlève en rien la place qu'occupe le secteur informel dans la dynamique des économies africaines car il est constant d'y relever l'ampleur et la densité des activités informelles à coté de celles dites formelles16. Le commerce n'échappe pas à cette informalité car, au sein de la multitude des agents qui naviguent dans le secteur informel, se trouve en bonne place le commerçant personne physique, qui appelle notre attention dans le cadre de cette réflexion.

En effet, le secteur informel présente une grande densité faisant intervenir autant les personnes morales que les personnes physiques. L'hypothèse selon laquelle une personne morale agirait comme commerçant informel recouvre celle de la société créée de fait ; or cette notion n'est souvent évoquée que lors d'un contentieux entre associés et pose essentiellement des difficultés de preuve. Alors qu'un véritable problème subsiste sur l'existence de telles sociétés, de

13 L'économie informelle en Afrique, in « Afrique: Histoire, économie, politique. », http://www.laconscience.com/article.php?id_article=7879 Il faut noter que bien que le concept ait été inventé dans les années 70, la réalité sociale lui a longtemps préexisté.

14 COGNEAU, RAZAFINDRAKOTO, ROUBAUD, « Secteur informel et ajustement au Cameroun », in Revue d'économie du développement, 1996, p. 4.

15 LAUTIER (B.) op.cit p. 12.

16 Il y a un dédoublement du secteur formel en secteur informel où chaque activité dite "en règle" a une réplique. Tout se passe comme si l'économie de ces pays affiche deux faces. L'informel et le formel sont donc intimement liés, ne serait-ce que par la monnaie dont ils font un usage commun. En définitive, c'est l'incapacité de l'État de répondre aux besoins fondamentaux de la population dans les domaines de l'emploi, de la santé, du logement et de l'éducation qui est à l'origine du foisonnement du secteur informel. Face à l'échec des pouvoirs publics, le secteur informel est venu en quelque sorte à la rescousse du modèle légal (formel).

pareilles difficultés n'apparaissent pas grandement pour les commerçants personnes physiques de l'informel qui sont de plus en plus nombreux et qui agissent habituellement au vu et au su de tous.

Sans commerçant, pas de fonds de commerce ; Sans fonds de commerce, pas d'activité économique véritable; Sans une telle activité, aucun espoir de développement. Le commerçant et le fonds de commerce sont donc au coeur de la vie des affaires et des préoccupations politico-économiques, d'où leur stricte réglementation par le législateur OHADA à travers les Actes Uniformes, mais plus particulièrement celui relatif au Droit Commercial Général adopté en 1997 et entré en vigueur le 1er janvier 199817. Cet Acte uniforme pose les règles juridiques particulières, applicables aux commerçants dans l'exercice de leurs activités professionnelles, et régit aussi l'activité commerciale, voire les actes de commerce accomplis par toute personne. Le Droit pluridisciplinaire des affaires OHADA18 est désormais confronté à cette réalité ambiante du secteur informel.

Il est donc question ici, de faire une étude sur le commerçant personne physique du secteur informel. Encore faudrait-il avoir une nette perception du concept « commerçant personne physique » pour mieux l'observer dans le monde informel. Le commerçant est une personne qui effectue des actes de commerce et en fait sa profession habituelle19. Cette définition brève de l'AU.DCG ne rend pas totalement compte de la réalité en matière de définition du commerçant. En effet elle fait intervenir deux idées principales : l'accomplissement d'actes de commerce et la profession habituelle. Ces deux idées sont complétées par une troisième qui renvoie à la notion d'indépendance, donc, à l'exercice par le commerçant en son nom et pour son compte. Il demeure toutefois difficile de cerner la notion de commerçant, en raison de l'imprécision

17 Voir Art 289 AU.DCG.

18 Il a un domaine plus vaste que celui du droit commercial classique et englobe aussi bien des questions relevant tant du droit public (intervention de l'Etat dans l'économie, droit fiscal), ou certaines branches du droit privé (droit du travail..), que des domaines entièrement nouveaux (droit de la consommation). Pour ce domaine large du doit des affaires, voir Art 2 du Traité OHADA.

19 Art 2 AU. DCG

des articles 3 et 4 de l'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général, qui rendent flous les contours de la notion essentielle d'acte de commerce. Heureusement, à l'instar du Droit français20, une technique permet d'atténuer sensiblement la difficulté de la qualification : Il s'agit de la présomption de commercialité édictée par l'article 38 de l'AU.DCG lorsque l'immatriculation au Registre du Commerce et du crédit mobilier a été effectuée21.

Par conséquent, les difficultés sont régulièrement observées à la qualification de commerçant du secteur informel. Le recours à la notion de « commerçant de fait » peut permettre d'évacuer ces difficultés. Cette expression a été utilisée par M. Pédamon et renvoie à une personne répondant à la définition du commerçant, mais qui n'a pas satisfait à l'obligation d'immatriculation au Registre du Commerce et du crédit mobilier. La locution « de fait » désigne en droit une situation réelle proche de celle prévue par les textes, qui ne respecte pas totalement l'orthodoxie juridique, mais produit cependant certains des effets de la situation de droit correspondante. La théorie des situations de fait est d'usage fréquent en droit des affaires : la notion de société de fait ou de dirigeant de fait est couramment employée22. Alors, cette locution « de fait » peut être rapprochée du qualificatif « informel » qui gouverne certaines activités commerciales ; ainsi, commerçant de fait et

20 L'article L 123-7 du code de commerce français édicte une présomption de commercialité lorsque l'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés a été effectuée.

21 ART. 38 AU.DCG : « Toute personne immatriculée au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier est présumée, sauf preuve contraire, avoir la qualité de commerçant au sens du présent Acte Uniforme. Toutefois, cette présomption ne joue pas à l'égard des groupements d'intérêt économique.

Toute personne physique ou morale immatriculée au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier est tenue d'indiquer sur ses factures, bons de commande, tarifs et documents commerciaux, ainsi que sur toute correspondance, son numéro et son lieu d'immatriculation au Registre. ».

22 ART. 864 : AU. SC.GIE : « Il y a société de fait lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales se comportent comme des associés sans avoir constitué entre elles l'une des sociétés reconnues par le présent Acte uniforme. ».

ART. 865 : AU. SC.GIE : « Lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales ont constitué entre elles une société reconnue par le présent Acte uniforme mais n'ont pas accompli les formalités légales constitutives ou ont constitué entre elles une société non reconnue par le présent Acte uniforme, il y a également société de fait. ».

commerçant du secteur informel seraient tous deux des branches d'un même arbre qui n'est rien d'autre que l'informalité juridique.

Toute personne physique, ayant la qualité de commerçant au regard du Droit OHADA, est tenue de se faire inscrire au RCCM23. Cette immatriculation est soumise à un formalisme rigoureux, ce qui témoigne de son importance dans la réglementation du Droit commercial24.

Dans un premier temps, le Registre était un bottin dépourvu d'effet juridique réel25, puis les conséquences de l'inscription sont devenues de plus en plus importantes. Le RCCM est progressivement devenu un instrument de publicité juridique, renseignant les tiers sur les activités, la qualité et la capacité du commerçant26. L'immatriculation a donc pour but de faciliter la rapidité des transactions commerciales car, à partir d'un numéro d'identification il est aisé de se reporter au RCCM pour trouver tous les renseignements relatifs au commerçant. Cette publicité destinée à renseigner les tiers assure aussi leur sécurité juridique : dans l'hypothèse d'une discordance entre la réalité et la situation juridique, on tient compte de la mention au Registre. L'incitation est donc forte pour que les assujettis accomplissent rapidement les formalités afin d'assurer la concordance entre la réalité de la situation et l'inscription27.

En raison de ce caractère obligatoire, il existe des contraintes pour obliger les commerçants à s'inscrire.28 Les manquements à cette obligation

23 Registre du commerce et du crédit mobilier.

24 Sur la réglementation rigoureuse de RCCM, titre I du livre II de l'AU. DCG

25 Le registre du commerce qui avait été institué dans les pays d'Afrique Noire par une loi du 18 mars 1928 était un simple répertoire dont le contenu n'avait pas une véritable valeur juridique. Le législateur Ohada en le renommant `'RCCM», l'a réorganisé et moderniser à travers d'une part l'élargissement de son contenu qui, en plus des renseignements sur les commerçants, reçoit l'inscription des sûretés mobilières ; et d'autre part l'organisation de sa structure en forme pyramidale présentant un fichier local, un national et un régional.

26 Art.19 AU.DCG.

27 ELHOUEISS (J-L.), « Le commerçant de fait », Frédéric FIRHOLTZ, novembre 2004, http://sites.estvideo.net/fdm/doc/bqbrse/20042005/commfait.doc

28 Art. 42 AU.DCG :« Faute par un commerçant personne physique ou morale de requérir son
immatriculation dans le délai prescrit, la juridiction compétente peut, soit d'office, soit à la requête du

peuvent d'ailleurs générer un régime de responsabilité à l'égard des contrevenants à la réglementation du RCCM 29; Il est également obligatoire de faire figurer le numéro d'immatriculation sur tous les documents que le commerçant communique au public (factures, notes de commande, documents publicitaires...)

Nonobstant toutes ces mesures contraignantes et incitatives, il existe toujours des situations où le commerçant ne sera pas immatriculé, souvent pour des raisons dissimulatrices ou pour des causes de négligence, d'ignorance ou tout simplement de prépondérance de la préoccupation de survivre sur la volonté d'une conformité juridique. C'est donc là le secteur informel, ou du moins l'attitude des commerçants personnes physiques qui oeuvrent dans l'informel. Contrainte sociale, ambiguïté économique, ou défit juridique? En tout état de cause, le droit des affaires OHADA est d'une part confronté à cette réalité vivante, et doit d'autre part faire avec cette dernière qui n'est pas prête de disparaître de si tôt.

Il faudrait être très prudent dans l'adoption d'un critère de définition du secteur informel car ce dernier a régulièrement été au carrefour de nombreuses divergences d'opinions et d'idéologies entre chercheurs en sciences économiques et sociales. Le microcosme de l'informel présente généralement

Greffe en charge du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier, ou de tout autre requérant, rendre une décision enjoignant à intéressé de faire procéder à son immatriculation.

Dans les mêmes conditions, la Juridiction compétente peut enjoindre à toute personne physique ou morale immatriculée au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier, de faire procéder :

- soit aux mentions complémentaires ou rectificatives qu'elle aurait omises,

- soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclaration inexacte ou incomplète, - soit à sa radiation. ».

29 Article 43 « Toute personne tenue d'accomplir une des formalités prescrites au présent titre, et qui s'en est abstenue, ou encore qui aurait effectué une formalité par fraude, sera punie des peines prévues par la loi pénale nationale, ou encore le cas échéant par la loi pénale spéciale prise par l'Etat partie en application du présent Acte Uniforme. » Il faut cependant noter que ni la loi Camerounaise N° 2003/008 du 10 juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans certains Actes Uniformes OHADA, ni la loi sénégalaise N ° 98/22 du 26 mars 1988 portant sur les sanctions pénales applicables aux infractions contenues dans l'AU. SCGIE, n'assortit pas le défaut d'inscription de sanctions pénales.

trois réalités concrètes : D'abord, l'informel caractérisé par une intention frauduleuse qu'on range globalement sous le vocable « d'économie dissimulée » ou « irrégulière » ou encore « économie souterraine ». Ensuite, l'informel animé plus par une intention de survie qu'une volonté dissimulatrice et qu'on classe souvent sous l'expression « d'économie de la débrouille ou de survie » ou tout simplement « d'économie non déclarée », cette dernière fonctionnant parfois au vu et au su de tous. Et enfin l'informel matérialisé par un caractère illicite qu'on nomme par l'expression « d'économie criminelle », cette dernière constituée pour l'essentiel des activités interdites ou qui portent atteinte à l'ordre public30. Ce dernier volet lié à l'économie « noire » n'est pas pris en compte ici dans l'appréhension de la notion de secteur informel. Les deux premiers par contre, sont plus considérés car, il s'agit d'activités non officielles, donc susceptibles de réglementation ou de récupération économique et surtout juridique31. Les études sur le secteur informel convergent désormais vers l'ensemble des activités normales par leur nature intrinsèque mais qui sont irrégulièrement exercées ou encore qui ne sont pas « enregistrées » et qui échappent à la comptabilité nationale et à la reconnaissance juridique. Il apparaît d'ailleurs qu'après avoir longtemps cherché à éradiquer le secteur informel, il faut plutôt essayer de composer avec. Le credo sur l'économie informelle a changé, il n'est plus celui de « l'abattre à tout prix », mais celui de « faire chemin ensemble »; d'où sa prise en compte dans les stratégies de développement économique en Afrique32. En effet, l'économie informelle

30 Emission Radiophonique, « Mémoire d'un continent », Le secteur informel en Afrique, RFI. Voir également (P) YOULOU, Economies informelles et criminalités: La face cachée de la mondialisation: L'Afrique subsaharienne, Penant No 861, octobre- décembre 2007, p. 471.

31 Pour Gérard Winter (ancien directeur de l'IRD), on peut définir le secteur informel comme un secteur potentiellement légalisable, l'économie de la drogue par exemple ne fait pas partie du secteur informel. In `' Le secteur informel en Afrique.», http://www.temoust.org/spip.php?article6939

32 Le secteur informel, en Afrique, a pris une importance telle que la Banque Mondiale et le F.M.I. ont pris la résolution de l'encourager et dorénavant d'insérer ses activités dans les stratégies de développement du continent. C'est ainsi que les institutions de Brettons Wood se penchent avec attention sur les projets, soit des paysans regroupés au sein des coopératives, soit de toute organisation de personnes qui conçoivent et mettent en oeuvre des activités économiques d'un intérêt social et

apparaît sans conteste comme un phénomène qui, sans prendre l'allure d'un tranquillisant s'ajoutant à l'opium des peuples d' Afrique Noire, calme les tensions, nourrit des espoirs et aide à survivre. Survivre mal, moins bien ou à peine, mais survivre en attendant mieux33.

Alors, si les activités du secteur informel sont traversées pour les unes par une intention frauduleuse, et pour les autres par une raison de survie, le droit des affaires doit pouvoir en tenir compte afin d'être un droit non seulement rigoureux mais aussi et surtout réaliste. Ce défi s'impose à la législation OHADA qui ambitionne de régir toutes les situations de la vie intéressant les affaires pour être un droit effectif et efficace, ou tout simplement un ensemble de règles « communes, simples, modernes et adaptées » à l'espace économique des pays membres34. Un constat évident et clair fait l'unanimité de nos jours, il s'agit de l'ampleur et de la densité de l'économie informelle en Afrique ; les circonstances qui ont causé l'émergence du secteur témoignent aujourd'hui de sa taille sans cesse grandissante dans ce continent35. Dès lors, on est porté à

d'auto-développement bien avéré. Ces agents économiques subissent des stages d'initiation aux techniques de gestion, à la concurrence et à l'économie de marché. De plus en plus, les gouvernants africains aménagent des conditions de micro-crédits adaptées au secteur informel afin d'améliorer leurs activités. Le but sans doute étant de ramener les activités du secteur informel dans le formel. On aperçoit de nos jours de vastes programmes gouvernementaux d'appui au secteur informel dans l'espace Ohada comme Par exemple, au Cameroun avec le PIAASI (Programme Intégré d'Appui aux Acteurs du Secteur Informel), et d'autres programmes rencontrés au Burkina Faso, au Sénégal, au Togo., au Bénin ... . En clair, les activités du secteur informel jouent un rôle dynamique dans les économies africaines. C'est le point de vue du Bureau International du Travail (B.I.T.) qui, a mis l'accent sur les aspects positifs de ce secteur rentable, productif et créatif. D'où sa proposition de repenser le processus évolutif spécifique du secteur informel qui est un facteur de développement de l'Afrique ; Le vrai problème qui subsiste étant celui de l'articulation des deux secteurs.

33 MASAMBA MAKELA (R.), « L'applicabilité du droit des affaires au secteur informel », http// www.congolegal.com, p. 1.

34Lire en ce sens le projet d'uniformisation du droit des affaires qui a vu le jour lors de la réunion des ministres des finances de la zone franc à Ouagadougou en 1991. Lire également les conclusions de la réunion des chefs d'Etats à Libreville en 1992. http://droit.francophonie.org/dfweb/publication.do?publicationId=3356

http://www.ina.fr/archivespourtous/index.php?vue=notice&from=fulltext&full=afrique+bongo+bereg ovoy+libreville&num_notice=1&total_notices=1 Voir aussi Art 1er du Traité OHADA.

35 Entre les années 50 et 80, l'Afrique s'est distinguée par un boom démographique inversement proportionnel à la croissance économique. Avec un revenu per capita inférieur à 1000 dollars, ces pays n'ont pas moins franchi le cap de 24% de croissance démographique par an. Preuve s'il en était que pauvreté et forte natalité font bon ménage (le lit du pauvre est fécond). Au cours de la même période, la population urbaine s'élevait au rythme de 6% par an et celle des villes périphériques de 10% alors

s'interroger sur la prise en compte du secteur informel par le droit harmonisé des affaires de l'OHADA dans un contexte marqué par son foisonnement et son expansion en Afrique en général, et dans l'espace subsaharien en particulier. En effet, peut-on véritablement cerner le secteur informel ? Peut-on lui appliquer les règles du secteur formel ?

La réalité ambiante de l'informel a fait développer les commerçants personnes physiques d'une catégorie particulière, gérant ou possédant un fonds de commerce aussi particulier. Ce qui justifie l'inquiétude majeure de l'applicabilité des dispositions du droit des affaires OHADA à de tels commerçants. Pour en avoir l'esprit clair, on pourrait prendre une activité quelconque du secteur informel (le commerce informel du textile par exemple) pour observer cette applicabilité du droit des affaires, mais ceci restreindrait la possibilité d'un compte rendu total et profond sur la question, et réduirait de ce fait la pertinence du problème. Il serait donc plus judicieux de faire un voyage beaucoup plus large au coeur du secteur informel afin de mieux appréhender au regard du Droit OHADA, la commercialité du secteur informel d'une part (I), et d'autre part l'applicabilité de ce Droit harmonisé des affaires au commerçant personne physique du secteur informel. (II)

que l'accroissement des emplois offerts dans le secteur formel ou secteur moderne ne représentait que 2%. Les crises économiques mondiales créées par des décisions politiques, en particulier la crise de la dette des pays africains, les programmes d'ajustement structurels du FMI et de la BM (démantèlement du secteur public), ont également favorisé l'éclatement du secteur informel. Très vite, la demande d'emplois est apparue supérieure à l'offre et le besoin d'assurer sa survie est devenu plus conséquent. Quelques indications statistiques révèle qu'en Afrique, la part du secteur informel dans l'emploi total en zone urbaine est de 80% au Bénin (1992), 57% au Cameroun (1993) 72% en Gambie (1993), 79% au Ghana (1997), 77% au Sénégal (1991), 17% en Afrique du Sud (1995) et 56% en Tanzanie (1991), 67% à Dar-es-Salaam (1995). Les chiffres sont 28% pour le Maroc (1988) et 39% pour la Tunisie (1981). Pour la Tunisie, mais recouvrant l'ensemble de l'économie (zones urbaines et rurales) le chiffre est de 38% en 1995. Vu ceci, on est porté à se demander si à la trilogie déterminante classique (secteur primaire, secondaire et tertiaire), doit-on ajouter un quatrième secteur qui serait le secteur informel ayant droit de cité au même titre que ses trois rivaux ?

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LA COMMERCIALITE DU SECTEUR INFORMEL

Le terme « commercialité » ne fait réellement pas l'objet d'une définition claire et précise ; Les dictionnaires juridiques restent muets sur la question. La référence au dictionnaire LAROUSSE permet de donner une définition en retenant de la commercialité, ce qui appartient au commerce. En effet, cet essai de clarification ne dissipe en rien le iou qui entoure la commercialité, dans la mesure où le terme commerce ne fait pas lui aussi l'objet d'une clarification précise36. A la fin, c'est à travers la notion d'actes de commerce, qui elle même induit celle de commerçant, qu'est appréhendée la commercialité. Parler de la commercialité du secteur informel commande donc de rester dans la même logique en recherchant dans ce secteur, ce qui touche au commerce en incitant l'application du droit commercial.

En effet, en raison de la particularité du secteur informel due à son informalité juridique, il est convenable de scruter de près le commerçant d'un tel secteur qui, en réalité est un commerçant sui generis (Chapitre I), dont le bien précieux comme tout commerçant est le fonds de commerce (Chapitre II).

36 Le mot commerce a plusieurs sens ; Dans le langage littéraire, il signifie relation ou fréquentation. Dans ce sens, on parle par exemple du commerce (ou de la fréquentation) des gens de lettres. Même dans le langage juridique, le mot commerce n'est pas univoque ; dans le droit Romain par exemple, commercium était employé pour designer les rapports juridiques de tous ordres que les hommes établissaient entre eux dans l'utilisation des biens. On disait alors que les choses étaient in commercio ou extra commercium. De nos jours, le terme commerce a une signification différente selon qu'il est utilisé par les économistes ou les juristes. Pour les premiers, le commerce concerne la circulation et la distribution des richesses, non la production qui relève de l'industrie. Pour les seconds, il désigne à la fois la production, la circulation et la distribution des richesses, l'industriel en droit étant un commerçant.

CHAPITRE I

LE COMMERCANT DU SECTEUR INFORMEL :
UN COMMERCANT SUI GENERIS

L'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général regroupe la définition du commerçant et celle des actes de commerce, comme pour signifier la nécessaire relation qu'il y a entre l'une et l'autre37. Le commerçant ne saurait donc faire l'objet d'une étude profonde sans appel aux actes de commerce. Il en est de même du commerçant du secteur informel. Alors, avant de marquer un temps d'arrêt sur l'activité commerciale dans le secteur informel (section 2) ; il serait important au préalable, d'appréhender la personne même du commerçant dans ledit secteur, car pour l'essentiel, il ne respecte pas les conditions subjectives d'exercice de la profession commerciale. (Section 1)

SECTION I

L'IRRESPECT DES CONDITIONS LIEES A LA PERSONNE POUR L'EXERCICE DE LA PROFESSION COMMERCIALE DANS LE SECTEUR INFORMEL

Le droit Commercial est dominé par le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, proclamé dès les années 170038, et devenu par la suite principe à valeur constitutionnelle établie39. Par ce principe, l'accès au commerce est ouvert à tout le monde, il n'y a ni sélection, ni « numerus clausus

37 AU. DCG, Chapitre I.

38 Décret d'Allarde des 2 et 17 Mars 1791 et la loi Royer du 27 décembre 1973, Art 1.

39 V. Cons. Constitutionnel, 16 jan, 1982:D., 1983.169, note L. Hamon et les obsv. de MM. Savy au D.,1983, doc.105 et J.Mestre, D.,1984.

», et c'est le jeu de la libre concurrence qui élimine les plus faibles ou les moins nantis de compétences et de stratégies40. Il en résulte que l'accès à la profession commerciale ne devrait faire l'objet d'aucune limitation ; c'est ce que semble d'ailleurs admettre l'article 2 AU.DCG quand il dispose que: « Sont commerçants ceux qui accomplissent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ». On pourrait croire à la lecture de cet article que l'accomplissement des actes de commerce suffit pour acquérir la qualité de commerçant ; Il n'en est rien car en réalité, si cet accomplissement est nécessaire, il demeure insuffisant. La qualité de commerçant est gouvernée par des restrictions subjectives tenant tant au souci d'assainir les professions commerciales qu'à celui de protéger le commerçant contre son immaturité. Le secteur informel s'inscrit comme un milieu favorable au contournement des restrictions au principe de la liberté du commerce et de l'industrie, comme on peut le constater à travers le mépris des règles de capacité pour exercer le commerce d'une part (para 1), et la méconnaissance des empêchements à l'exercice d'une telle activité d'autre part. (para 2)

PARA I : LE MEPRIS DE LA CAPACITE D'EXERCER LE

COMMERCE

En raison de son caractère risqué, le commerce et les activités y relatives font l'objet d'une restriction de ses acteurs lorsqu'ils présentent une incapacité quelconque. La capacité est un terme ambivalent, elle désigne à la fois l'aptitude d'une personne à être titulaire des droits et des obligations et son pouvoir à les mettre en oeuvre41. Aux termes de l'article 6 AU.DCG : « Nul ne peut accomplir des actes de commerce à titre de profession habituelle s'il n'est

40 PEDAMON (M.), « La liberté d'entreprendre et l'intervention des autorités publiques, dans les autorités publiques et l'entreprise privée », in Rev.jurisp.com., n° spec, 1983, p. 13

41 Il s'agit de la capacité de jouissance et celle d'exercice qui ne sont pas toujours liées car en effet, la personne humaine a en principe la jouissance des droits à la naissance, voir dès sa conception, alors qu'elle n'en aura l'exercice qu'à l'age de la majorité, à moins d'user dans les cas permis, de l'exercice par représentation.

juridiquement capable d'exercer le commerce. ». La capacité relevant du statut personnel, son organisation est l'oeuvre des droits nationaux. Pour l'essentiel, l'incapacité d'exercer le commerce frappe les mineurs (A), certains majeurs dits incapables (B). Sur cette question, la femme mariée a connu une nette évolution.

(C)

A - LE MINEUR

Le mineur est généralement défini comme la personne physique de l'un ou de l'autre sexe qui n'a pas encore atteint l'âge de la majorité fixé ici par chaque droit national42. L' AU.DCG en son article 7 al 1 dispose que: « Le

mineur, sauf s'il est émancipé, ne peut avoir la qualité de commerçant nieffectuer des actes de commerce. » Au regard de cet article, la qualité de

commerçant du secteur informel à attribuer ou non à un mineur doit être envisagée selon qu'il est (2) ou non (1) émancipé.

1° Le mineur non émancipé et l'impossible rattachement à la qualité

de commerçant du secteur informel.

Le mineur non émancipé est protégé non seulement du commerce mais aussi de la commercialité. En effet, à la lecture de l'article 7 al 1 de l'AU.DCG, l'incapacité du mineur d'exercer le commerce est double: L'incapacité d'avoir la qualité de commerçant et celle d'effectuer les actes de commerce. Aucune autorisation ou aucun procédé détourné ne peut lever cette incapacité car en principe, la personne qui désire exercer le commerce est généralement astreinte à un certains nombre d'obligations dont l'observation lui conférera la qualité de commerçant 43; pourtant, le mineur non émancipé est par définition incapable de faire le commerce. Il ne peut donc en toute hypothèse acquérir la qualité de

42 L'âge de la majorité civile est fixé à 21 ans au Cameroun (Ord N°81/02 du 29 juin 1981 portant organisation de l'état civil), au Sénégal (Art 276 al 1, C. fam.) et au Togo (Art 265 C.fam), à 20 ans au Burkina Faso (Art 554 C.pers et fam.).

43 Il s'agit en particulier de la capacité juridique et l'immatriculation au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier.

commerçant même à titre de sanction44, encore que son incapacité d'effectuer les actes de commerce est absolue45. Des arrêts de Cours d'Appel en France, bien anciens mais toujours d'actualité46 ont jugé que cette mesure édictait une règle absolue qui interdisait de recourir à la notion de commerçant de fait lorsqu'il s'agit d'un mineur47. Il s'agit bien sûr dans le cadre du droit OHADA du mineur non émancipé qui ne peut donc être qualifié de commerçant de fait ou tout simplement celui du secteur informel. Alors, les mineurs non émancipés qui s'adonnent aux activités commerciales dans le secteur informel ne peuvent ni à titre de rigueur ou de faveur, bénéficier ou subir les dispositions juridiques qui découlent du statut de commerçant, et les actes de commerce, même isolés, conclus par ces derniers sont en principe nuls. Il s'agit sans doute d'une nullité relative ne pouvant être invoquée que par le mineur une fois devenu majeur, ou son représentant légal, mais jamais par son cocontractant puisqu'il est question de la protection du mineur48.

44 Par exemple pour subir la rigueur du droit des affaires et se voir appliquer les procédures collectives d'apurement du passif.

45 Cette solution se justifie dans son ensemble car les mineurs non émancipés sont trop jeunes pour mesurer les risques courus. Cette incapacité radicale et absolue vaut aussi bien pour les actes civils que les actes de commerce. De tels mineurs ne sont capables que pour les actes usuels de la vie courante et les actes conservatoires. Ainsi, lorsqu'un commerçant décède, laissant des héritiers mineurs, ceux-ci ne peuvent pas personnellement exploiter le fonds qui sera soit vendu, soit mis en location gérance ou encore apporté dans une société dans laquelle les associés n'ont personnellement la qualité de commerçant. Le fonds échu au mineur peut aussi être exploité en vertu d'un droit d'usufruit par celui de ses père et mère qui a le droit de jouissance légale à la condition que celle-ci ou celui là ait personnellement la capacité de faire le commerce.

46 CA Aix 2 jan.1876 et CA Douai 16 Août 1869. V ELHOUEISS, op.cit., p 4. et http://fr.wikipedia.org/wiki/Cour_d'appel_d'Aix-en-Provence

47 Il faut rappeler que ces arrêts aménagent cette protection du mineur sans distinguer qu'il est émancipé ou non car l'article L121-2 du Code de Commerce Français dispose que: « Le mineur même émancipé, ne peut être commerçant. » Alors contrairement au droit Ohada, l'émancipation en France n'a aucun intérêt en droit commercial car le mineur émancipé demeure incapable en matière commerciale ; l'émancipation qui est possible à partir de seize ans ne lui donne pas le droit de devenir commerçant. (C.Civ., Art477, al2).

48 La question du régime de cette nullité reste controversée, pour le Pr Yves Guyon,cette nullité obéirait au droit commun ; elle n'est pas encourue de plein droit mais suppose que l'acte a été défavorable au mineur par application de l'adage « Minor restituitur non tanquam minor sed tanquam loesus . ». Pour cet auteur dont nous partageons l'avis, si cette interprétation est exacte, elle réduirait considérablement le domaine de la nullité puisque les actes équilibrés, qui sont les plus nombreux, demeureraient valables.

Cette situation peut être source de débat dans notre société actuelle où la réalité sociologique est plutôt autre. En effet, il faudrait peut être prendre l'exemple des villes d'Afrique en général et celles du Cameroun en particulier pour se rendre compte du nombre important de mineurs qui font le commerce à titre de profession habituelle et même avec une dextérité que certains majeurs n'ont pas. Combien de jeunes enfants au Cameroun abandonnent les études après le cycle primaire ou ayant à peine débuté le cycle secondaire, pour se livrer au commerce ? Combien sont ces jeunes qui débutent un commerce d'aiguilles et de tournevis pour finir quincailliers ? Combien de jeunes commencent par vendre du pain chaque jour dans un panier pour ensuite devenir boulangers ou propriétaires des grandes structures agroalimentaires ? Combien sont ces mineurs qui gèrent des fonds de commerce dans le respect des règles de l'art en matière d'affaires ? La réponse, on la connaît, car il n'est pas étonnant de constater que dans notre société actuelle, il y a beaucoup de jeunes mineurs qui exercent une activité commerciale pour assurer le paiement de leurs frais scolaires parce qu'abandonnés par les parents ou parce que orphelins, ou tout simplement parce qu'ils ont choisi de déserter le chemin de l'école pour s'installer à titre professionnel et habituel dans le commerce.

Cette situation est de nature à faire méditer sur l'applicabilité de l'article 7 al 1 AU.DCG en Afrique ; cette disposition semble être très absolue. Devrait t-on toujours protéger ces mineurs commerçants de la commercialité et du commerce? Ne devraient-ils pas être soumis au droit des affaires autant pour ses rigueurs que pour ses faveurs en raison de leur état de commerçants professionnels ? Toutes ces questions sont troublantes car elles génèrent de grands questionnements sur l'âge réel pour l'exercice normal des professions commerciales dans notre contexte Africain.

A cet égard, on serait tenté de penser à une majorité ou à une minorité commerciale, permettant d'intégrer dans le champs du droit des affaires ces mineurs aux habitudes professionnelles. Cette situation serait sans doute de

nature à créer une véritable disparité entre le souci de protection du mineur tel qu'organisé par le Code Civil et son insécurité liée à l'intervention dont il fait preuve dans le monde des affaires. Mais ce serait également là une affirmation de la spécificité du droit des affaires, qui se plaît d'ailleurs à se singulariser par son caractère dérogatoire au droit commun. En tout état de cause, la difficulté demeure en ce qui concerne ces mineurs non émancipés, à moins que survienne leur émancipation pour leur conférer un statut proche de celui du majeur ordinaire.

2° Le mineur émancipé et la possibilité de rattachement au

commerçant du secteur informel

Le mineur émancipé est la personne physique de l'un ou de l'autre sexe qui n'a pas encore atteint l'âge de la majorité, mais qui en raison d'un acte juridique a été relevée de son incapacité. L'alinéa 1er de l'article 7 de l'AU.DCG lève la double incapacité du mineur à avoir la qualité de commerçant et à effectuer les actes de commerce lorsqu'il est émancipé. La question ne se pose donc plus en terme de la capacité d'exercice d'activités commerciales par le mineur émancipé mais beaucoup plus en termes de causes d'émancipation, qui ici sont déterminées par chaque droit national via le droit des personnes et de la famille.

Au Cameroun par exemple, ces causes d'émancipation tournent autour d'un cas d'émancipation de plein droit et des cas facultatifs d'émancipation. L'émancipation de plein droit du mineur s'obtient par son mariage (Art 476 CC), ce mariage ne peut intervenir avant dix huit ans chez le garçon et quinze ans pour les filles sauf dispense accordée par le Président de la République pour motifs graves49. Pour les cas facultatifs d'émancipation, il est tenu compte de l'âge du mineur qui peut à l'âge de quinze ans révolus, être émancipé par son

49 Art 52 de l'ordonnance N° 81/02 du 29 juin 1981 portant organisation de l'état civil et diverses dispositions relatives à l'état des personnes physiques.

père ou à défaut sa mère sur simple déclaration reçue par le juge du TGI50, soit à partir de dix huit ans révolus par le conseil de famille pour le mineur resté orphelin de père et de mère51.

Il faut rappeler que dans la plupart des autres législations nationales, le mariage apparaît comme la cause d'émancipation de plein droit du mineur à telle enseigne que les disparités qui surgissent résultent des autres cas d'émancipation52. En droit commercial donc, le mineur émancipé est un véritable majeur, et son déploiement dans le secteur informel n'enlève en rien son aptitude à être qualifié de commerçant de fait et donc, à être frappé des rigueurs du droit des affaires. Le mineur émancipé bénéficie ainsi de la capacité d'exercer le commerce au même titre que le majeur à moins que ce dernier soit déclaré incapable.

B - LES MAJEURS INCAPABLES

Il n'est pas expressément traité de l'incapacité du majeur dans l'AU.DCG. Toutefois une déduction permet de faire la lumière sur la question car, en autorisant à accomplir les actes de commerce à titre de profession habituelle que les personnes juridiquement capables, l'article 6 de l'AU.DCG exclut tacitement les majeurs incapables de l'exercice des professions commerciales. Cette situation se justifie par l'état de tels majeurs qui doivent être ténus à l'écart des risques que pourrait générer l'exercice d'une profession

50 Art 477 CC.

51 Art 478 CC.

52 Au Burkina Faso par exemple, le mineur peut être émancipé par jugement lorsqu'il exerce une profession séparée lui permettant de subvenir à ses besoins et s'il à atteint l'âge de seize ans révolus (Art.623 c.pers., et fam du Burkina) ou lorsque étant en tutelle, il a atteint l'âge de dix huit ans accomplis et est autorisé par la déclaration d'émancipation à accomplir des actes de commerce et à acquérir la qualité de commerçant( Art 626.al 2 et al 3, C. pers. et fam du Burkina.). Au Sénégal et au Togo, le mineur peut être émancipé volontairement par les parents ou par le conseil de famille s'il atteint l'âge de dix huit révolus (Art.335, al.2, C. fam. Du Sénégal ; Art. 311, al. 2,C.fam.du Togo.). Toutefois, au Togo, il peut faire le commerce comme un majeur s'il y a été spécialement autorisé selon les formes du code de commerce (Art 315 C. fam.du Togo.) ; alors qu'au Sénégal, la situation est plus ambiguë car la loi se contente de déclarer le mineur émancipé capable comme un majeur de tous les actes de la vie civile (Art. 339 al. 1er, C.fam du Sénégal.).

commerciale. En l'absence de dispositions uniformes sur le statut des majeurs incapables, il y a lieu de se référer aux règles prescrites par le Droit Civil en la matière. Pour l'essentiel, deux régimes sont aménagés et concernent aussi bien le majeur représenté que le majeur assisté.

1° Le majeur représentéIl est question ici du majeur en tutelle qui est une personne dont les

facultés mentales sont altérées par une infirmité, une maladie ou un affaiblissement dû à l'âge. Ce dernier est généralement dans un état habituel d'imbécillité, de démence ou de fureur qui empêche la libre expression de sa volonté. Le Code Civil dans sa version applicable au Cameroun parle dans ce cas de l'interdiction. L'interdit est assimilé au mineur pour sa personne et pour ses biens, c'est-à-dire qu'il ne peut être commerçant, même par représentation car, il n'y a pas de représentation possible dans l'exercice d'une profession53. Il s'agit donc d'une incapacité de jouissance. La protection qui lui est due l'emporte sur celle des tiers avec qui il contracte, et comme le mineur, qu'il se déploie dans le secteur informel en exerçant une activité commerciale, il ne sera pour autant pas considéré comme commerçant, et les actes par lui posés subiraient la même sanction que celle du mineur à moins d'être rescindables pour cause de lésion ; ce qui n'est pas très différent lorsque le majeur est plutôt assisté.

2° Le majeur assistéL'assistance du majeur renvoie au régime de la curatelle car en telle

hypothèse, le majeur sans être hors d'état de manifester sa volonté, a besoin d'être conseillé ou contrôlé dans les actes de la vie civile en raison de son intempérance, de sa prodigalité et de son oisiveté, qui l'exposent au besoin ou à la compromission de l'exécution de ses obligations. La question de savoir si le

53 PEDAMON (M.), Droit commercial, Commerçants et fonds de commerce, concurrence et contrat du commerce, Dalloz, 1994, p. 107.

majeur en curatelle peut ou non faire le commerce n'est pas clairement tranchée dans les législations des pays de l'espace OHADA. Traditionnellement, on conclut à l'impossibilité de faire le commerce ; on estime que l'autorisation générale éventuellement donnée par son curateur de faire le commerce ne saurait couvrir l'incapacité de faire des actes déterminés sans l'assistance ou les conseils du curateur54. Au Cameroun, il est défendu au majeur en curatelle à l'issu d'une procédure judiciaire introduite devant le TGI par un parent: « de plaider, de transiger, d'emprunter, de recevoir un capital mobilier et d'en donner décharge, d'aliéner ni de grever ses biens d'hypothèques sans l'assistance du conseil. »55. Cette hypothèse est identique aux restrictions faites aux majeurs en tutelle56, et l'on pourrait penser aux mêmes solutions à savoir l'impossibilité d'exercer des actes de commerce et de devenir commerçant. La femme mariée fut pendant longtemps frappée par les mêmes restrictions.

C - LA FEMME MARIEE

La capacité de la femme mariée de faire le commerce n'a pas toujours été admise car cette dernière était rapprochée des incapables. Elle ne pouvait faire le commerce qu'avec l'autorisation de son mari ou ultérieurement parce que celuici pouvait s'y opposer. L'évolution du droit sur la condition de la femme permet de nos jours de réserver à cette dernière un traitement meilleur que celui qui se faisait auparavant. En effet, de l'incapacité à la capacité contrôlée57, la femme

54 AKUETE (S.) et YADO (J.), OHADA, Droit Commercial général, collection Droit Uniforme Africain, Bruylant, Bruxelles, p. 99.

55 Art 513 C. Civ

56 Art 499 C. Civ

57 L'évolution de la condition de la femme mariée s'est faite en plusieurs étapes. Sous le Code Civil de 1804 et le Code de Commerce de 1807, la femme était une véritable incapable ; elle ne pouvait exercer une profession séparée de celle du mari qu'avec l'autorisation de celui-ci. Cette incapacité était générale et jouait aussi bien en matière civile qu'en matière commerciale. La situation va commencer à changer par une loi du 18 Février 1938 qui va consacrer l'émancipation juridique de la femme mariée. Cette émancipation a consister à permettre à la femme mariée d'une part, de faire valablement des actes de commerce isolés et d'autres parts, d'ester en justice sans l'autorisation du mari.. ce qui sera consolidé par une autre loi du 22 Septembre 1942 qui modifiera certaines dispositions du Code

est passée à l'égale capacité. C'est sans doute dans le but d'exprimer cette égalité que l'AU.DCG abandonne le terme de "femme mariée" pour consacrer celui du "conjoint du commerçant". En effet l'al 2 de son article 7 dispose: « Le conjoint d'un commerçant n'aura la qualité de commerçant que s'il accomplit les actes visés aux articles 3 et 4 ci-dessus, à titre de profession habituelle, et séparément de ceux de son époux. » L'article 4 al 2 du code commerce n'avait envisagé que le cas de la femme mariée qui n'était pas réputée marchande publique si elle ne faisait que détailler les marchandises du commerce de son mari ; elle le devenait quand elle exerçait un commerce différent de celui de son mari. L'AU.DCG élimine toute discrimination entre la femme mariée et son époux quand il fait usage de l'expression « conjoint du commerçant. »

L'exercice séparé étant une question de fait, il n'est pas toujours évident de clarifier la situation des époux dont l'un au moins est commerçant, ceci devient encore plus délicat dans le secteur informel où l'économie de la survie et de la débrouille a fait développer une solidarité de moyens dans la mise en oeuvre et l'exercice du commerce par les époux ; la situation de fait ne permettant pas toujours de savoir si l'un de ceux-ci est un collaborateur, un co-exploitant ou un salarié:

- S'il est collaborateur à l'activité commerciale de son époux, par exemple, s'il détaille les produits de son conjoint ou l'y remplace de temps en temps, il n'acquiert point la qualité de commerçant et ne peut a fortiori être considéré comme commerçant informel ;

- S'il est salarié de son conjoint, il y a donc une relation de travail et la contrepartie de la prestation de l'époux salarié sera une rémunération, en pareil cas, le salarié n'est pas commerçant en raison du défaut d'indépendance ;

de Commerce notamment l'article dont L'alinéa 1er dispose désormais que: « La femme peut être marchande publique à moins que le mari ne s'y oppose. ».

- S'il est co-exploitant de son conjoint il est commerçant en raison de son indépendance dans l'activité commerciale co-exploitée.

La situation est moins difficile lorsque l'époux a son commerce différent de celui de son conjoint, chacun des deux est commerçant pour son propre compte. Il ne faudra sans doute que procéder à la détermination des pouvoirs dont dispose chaque époux sur ses biens58.

Ces restrictions liées au défaut de capacité sont accompagnées d'autres qui s'apparentent à des empêchements à l'exercice de la profession commerciale en raison de la protection de cette profession, ou tout simplement de la sauvegarde de l'intérêt général. C'est par contournement de ces exigences que certaines personnes exercent un commerce informel.

PARA II : LA MECONNAISSANCE DES EMPECHEMENTS A L'EXERCICE DU COMMERCE DANS

LE SECTEUR INFORMEL.

L' informalité juridique en matière de commerce se manifeste avec plus d'importance lorsqu'il est question des empêchements à l'exercice de la profession commerciale tenant, soit au défaut de compatibilité de cette dernière avec toute autre profession, soit au défaut d'honorabilité ou d'autres restrictions objectives. En effet, alors que les incapacités ont pour but de protéger l'incapable lui-même et sont sanctionnés par le défaut de la qualité de commerçant, il existe d'autres limitations aux principes du libre accès aux professions commerciales qui ont des buts et des sanctions différents, justifiés par le souci du législateur d'assurer la police de la profession commerciale ou

58 Dans le silence de l'AU.DCG sur la question il faut se refermer tant qu'elle demeure applicable au dispositions de L'Art 5 du Code de Commerce qui donne à la femme marchande le droit de s'obliger personnellement par les actes qu'elle fait pour les besoins de son commerce et d'obliger aussi son mari s'il y a communauté entre eux. La réciprocité établie par l'al 2 de l'Art 7 AU. DCG, doit conduire à ce que cet Art. concerne dorénavant le mari comme la femme ; ce qui peut être dangereux pour le patrimoine familial lorsque les affaires de l'époux commerçant tournent mal. La solution pour les époux commerçants résiderait dans le choix d'un régime matrimonial séparatiste.

tout simplement ce qu'il est convenu d'appeler un ordre public économique.59 Les incompatibilités et les déchéances tiennent une place importante au registre de ces empêchements60, qui demeurent somme toute indifférents à la qualification de commerçant informel.

A - L'INDIFFERENCE DE L'INCOMPATIBILITE DANS LA QUALIFICATION DE COMMER~ANT INFORMEL.

L'exercice de certaines fonctions, professions ou responsabilités est déclaré incompatible avec le commerce afin de protéger leur dignité qui s'accommoderait mal de l'esprit de spéculation. En effet, le fondement attribué aux incompatibilités demeure discuté ; habituellement on justifie leur existence davantage par un motif de conscience professionnelle61. D'une manière générale, une même personne peut difficilement exercer dans les conditions satisfaisantes plusieurs fonctions aussi éloignées les unes des autres que sont les charges publiques dont le but est la satisfaction des besoins d'intérêt général, les professions libérales qui sont animées par la prestation de service et enfin le commerce dont le but principal est la réalisation des bénéfices. L'art 8 al 1er de

l' AU.DCG énonce que: « Nul ne peut exercer une activité commerciale
lorsqu'il est soumis à un statut particulier établissant une incompatibilité.
».

59 On touche ici à un des aspects de la réglementation administrative et professionnelle du commerce qui vise à restreindre dans un but d'intérêt général, la liberté d'entreprendre. Le législateur agit ici dans un intérêt de police au sens large pour protéger les commerçants, le commerce, les consommateurs etc... Voir PEDAMON (M.), Op.cit., n° 129, p. 110.

60 Il existe en plus des incompatibilités et des déchéances, d'autres restrictions qui peuvent être liées aux autorisations administratives pour l'exercice d'un commerce. Il s'agit par exemple de l'exercice du commerce par les étrangers. Au Cameroun par exemple, l'exercice du commerce par un étranger est soumis à deux conditions:

- L'exigence d'une réciprocité législative comme le rappelle l'art. 9 de la loi du 10 Août 1990 régissant l'activité commerciale au Cameroun ;

- L'obtention d'une carte professionnelle de commerçant étranger délivrée par les services administratifs compétents après vérification de la régularité du séjour de l'étranger.

61 GUYON (Y.), Droit des affaires- Droit commercial général et sociétés, T1, 8ème éd, Paris, Economica, 1994, n° 48, p. 43.

Avant d'envisager des sanctions à la violation des incompatibilités, (2) il faudrait d'abord les explorer de près pour en appréhender le contenu. (1)

1° L'incompatibiité des professions commerciales avec certaines

fonctions.

L'art 9 AU. DCG énumère une série de fonctions ou professions avec l'exercice desquelles le commerce est incompatible. Cet article dispose en effet que: « L'exercice d'une activité commerciale est incompatible avec l'exercice des fonctions ou professions suivantes :

- Fonctionnaires et Personnels des Collectivités Publiques et des Entreprises à participation publique ;

- Officiers Ministériels et Auxiliaires de Justice : Avocat, Huissier, Commissaire Priseur, Agent de Change, Notaire, Greffier, Administrateurs et Liquidateurs Judiciaires ;

- Expert Comptable agréé et Comptable agréé, Commissaire aux Comptes et aux Apports, Conseil Juridique, Courtier Maritime ;

- plus généralement, de toute profession dont l'exercice fait l'objet d'une réglementation interdisant le cumul de cette activité avec l'exercice d'une profession commerciale. ». Il s'agit là en réalité des incompatibilités minimales62 qui peuvent faire l'objet d'extension par chaque Etat membre eu égard à la formulation libérale dudit article. Ainsi, il appartient à chaque Droit national de définir les statuts particuliers et de préciser s'ils sont ou non incompatibles avec l'exercice d'une profession commerciale63. Dans tous les cas, des sanctions sévères sont prévues pour ceux qui transgressent ces exigences de compatibilité.

62 AKUETE (S.) et YADO (J.), Op.cit ., n° 176, p. 105.

63 ANOUKAHA (F.), « L'incompatibilité d'exercice d'un activité commerciale dans l'espace OHADA: le cas du Cameroun », Annales de la FSJP, T5, 2001, PUA, n° 25 et ss, p. 14.

2° Les sanctions de la violation des incompatibiités.

La violation de l'interdiction d'exercer le commerce résultant d'une incompatibilité n'entache pas la validité des actes conclus à l'égard des tiers de bonne foi. En effet, en plus des sanctions disciplinaires, professionnelles et même pénales64, la méconnaissance des incompatibilités entraîne une sanction particulière: celle de la qualification du contrevenant comme commerçant de fait ou de l'informel65. Il ne sera donc considéré comme commerçant que pour les obligations et les non- avantages. Par conséquent, les tiers avec qui il a contracté pourront se prévaloir des actes issus de son activité. Le contrevenant pourra par exemple faire l'objet de la liquidation judiciaire, alors qu'il ne pourra être ni électeur, ni éligible dans les instances consulaires. C'est ce qui explique que des notaires puissent être astreints devant les tribunaux de commerce lorsqu'ils ont fait des opérations commerciales et financières prohibées par leur statut66. On ne saurait admettre que ces derniers puissent échapper aux conséquences de leur fait en tirant précisément argument de cette illicéité, ou en considérant que l'activité commerciale n'a pas été exercée pour la seule raison qu'elle l'a été illicitement. Prétendre le contraire serait méconnaître la distinction fondamentale entre d'une part, les critères de l'activité commerciale, et, d'autre part, les conditions d'exercice de cette activité. La violation de cellesci n'empêche évidement pas l'application de ceux-là67. Il s'agira donc de lui appliquer un régime de rigueur68, comme dans le cas du commerce exercé au mépris d'une mesure de déchéances.

64 Sur le plan disciplinaire et professionnel, on peut observer la révocation du fonctionnaire, la destitution de l'officier ministériel. Des sanctions pénales sont parfois prévues, par exemple pour le fonctionnaire qui prend un intérêt dans une affaire qu'il était chargé de contrôler ou avec laquelle il était chargé de conclure un marché. (Art. 37 du décret du 12 Octobre 2000 portant statut de la fonction publique et Art135 et 136 du Code Pénal.

65 L' Art 8 AU.DCG est clair sur la question: Les actes accomplis par une personne en situation d'incompatibilité restent valables à l'égard des tiers de bonne foi. Ceux -ci peuvent donc s'en prévaloir à la différence de l'auteur de l'acte.

66 Com. 2 Février. 1970: D., 1970, 430 ; JCP 1970. II. 16313, obs. J.A.

67 SAVELI (B.), note sous com., 2 février 1970, op.cit.

68 Voir infra p. 57 ss.

B - LES DECHEANCES ET LE COMMERCE INFORMEL

L'idée que le commerce suppose une bonne moralité fut très développée dans le passé. Elle a toutefois subit un recul avec l'économie libérale qui estimait que le seul jeu de la concurrence devait suffire à éliminer les mauvais commerçants. Par prévention, le législateur anticipe en fermant l'accès à l'exercice du commerce à ceux qui ont déjà fait la preuve de leur indignité. Il s'agit de la déchéance comprise comme la perte d'un droit infligée soit à titre de sanction, soit en raison du non respect des conditions de l'exercice de ce droit. Les déchéances sont inspirées par un souci général d'assainir les professions commerciales et beaucoup plus par la sauvegarde des droits du public qui doit être protégé contre les personnes d'une moralité douteuse.

S'il est vrai que les déchéances apparaissent comme une sanction fermant l'accès à l'exercice du commerce, il est également constaté que les commerçants du secteur informel sont parfois des personnes qui ont déjà fait l'objet d'un défaut d'honorabilité et qui, dès lors, exercent une activité commerciale en violation de ces déchéances. En effet, par sa caractéristique dissimulatrice, l'informel offre souvent un moyen aux personnes déchues d'exercice du commerce de contourner cet empêchement en continuant leurs activités commerciales. Ces derniers qui ne peuvent en principe avoir la qualité de commerçant, subiront toutefois les obligations de cette qualité sans oublier les sanctions qui jalonnent l'exercice du commerce au mépris de telles déchéances. Avant de s'intéresser à de telles sanctions, (2) il serait ordonné d'observer au préalable les cas de déchéance. (1)

1° Les cas de déchéance

L'AU.DCG en son article 10 énumère trois (3) séries de cas dans lesquels le commerçant est déchu du droit de faire le commerce. L'origine de la

déchéance peut être soit une décision d'une juridiction étatique, soit celle d'une juridiction professionnelle. L'Acte Uniforme emploie de façon impropre le terme d'interdiction69 pour designer ces déchéances qui frappent la personne exerçant le commerce par elle-même ou par personne interposée.

La déchéance d'origine judiciaire consiste soit en une interdiction générale, définitive ou temporaire prononcée par une juridiction de l'un des Etats parties, que cette interdiction ait été prononcée comme peine principale ou comme peine complémentaire, soit en une condamnation définitive ou en une peine privative de liberté pour crime ou délit de droit commun, ou à une peine d'au moins trois mois d'emprisonnement non assortie de sursis pour un délit contre les biens ou une infraction en matière économique et financière. La déchéance peut être de droit, il en est ainsi lorsque qu'une décision prononce la faillite personnelle d'un commerçant ; cette faillite emporte de plein droit l'interdiction générale de faire le commerce70. Il en est de même en cas de condamnation d'une personne à une peine perpétuelle ou de condamnation pour tout autre crime71. La déchéance peut également être facultative et laissée à l'appréciation souveraine des juges. Il en sera ainsi en cas de condamnation d'une personne pour délit contre les biens ou toute autre infraction en matière économique et financière72.

Quant à la déchéance d'origine professionnelle, elle est édictée dans chaque cas lorsque le statut professionnel concerné le prévoit. La déchéance

69 Le lexique des termes juridiques dans sa treizième édition définit l'interdiction comme la situation juridique d'une personne privée de la jouissance et de l'exercice de ses droits en totalité ou en partie en vertu de la loi ou d'une décision judiciaire. Nul doute qu'à la lecture de cette définition, l'on se rende compte que l'interdiction intègre à la fois les incompatibilités qui sont établies par la loi et les déchéances qui découlent d'une décision judiciaire. Toutefois, le législateur Ohada en usant l'interdiction dans l'Art 10 de L'AU.DCG, voulait sans doute parler de la déchéance puisqu'il est question ici des interdictions d'exercer une activité commerciale issue d'une décision soit d'une juridiction étatique, soit d'une juridiction professionnelle.

70 Art 203 AU.PCAP.

71 Art 31 du Code Pénal Camerounais.

72 Il s'agit pour l'essentiel de toutes les infractions qui sont courantes dans les milieux d'affaires (chèques sans provision, usure, fraudes) et des délits classiques contre les biens (vol, recel, abus de confiance, escroquerie...).

prononcée par une juridiction professionnelle ne s'applique qu'à l'activité commerciale concernée73, une déchéance générale d'exercer le commerce ne pouvant être prise que par les juridictions étatiques. Dans tous les cas, qu'elle soit d'origine étatique ou professionnelle, de nature temporaire ou définitive, la déchéance peut être couverte et la personne frappée pourra en être relevée sur sa requête cinq (5) années au moins après sa condamnation, par la juridiction qui a prononcée ladite déchéance. Le failli pourra aussi être relevé de sa déchéance conformément aux conditions et à la procédure prévue par les articles 204 et ss de l'AU.PCAP.74

Lorsque la personne déchue exerce une activité commerciale sans être relevée de sa déchéance, il en ressort qualifié de commerçant de l'informel pour subir la rigueur du droit des affaires comme le témoignent d'ailleurs les sanctions aménagées en pareille hypothèse par le législateur Ohada.

2° Les sanctions de l'exercice du commerce par un déchu

La violation des déchéances entraîne des sanctions prévues par l'AU.DCG en son Art 12. En effet, ces sanctions concernent d'une part l'inopposabilité aux tiers de bonne foi des actes accomplis en violation de la déchéance, et d'autre part l'opposabilité de ces actes à l'interdit lui-même. La bonne foi des tiers est toujours présumée ; elle suppose que le tiers croyait en la validité de l'acte qu'il a passé avec l'interdit. Il appartiendra par conséquent à celui qui invoque l'irrégularité d'un acte passé de démontrer que le tiers avait connaissance de l'irrégularité au moment ou il contractait. L'on peut s'interroger sur l'option du législateur OHADA en ce qui concerne le choix de l'inopposabilité comme sanction de l'exercice du commerce par un déchu. N'est-elle pas moins rigoureuse que la nullité, et donc plus indulgente à l'égard

73 PEDAMON (M.), op.cit., N° 134 , p 113.

74 Ces articles aménagent la réhabilitation du déchu qui peut être soit de plein droit, soit facultative, ceci en cas de clôture d'une procédure collective pour extinction du passif ou lorsque le déchu bénéficie du consentement unanime de ses créanciers pour sa réhabilitation après remise entière de ses dettes par ces créanciers.

du déchu ? On pourrait répondre par la négative car en réalité, le droit des affaires, ne souhaitant pardonner aucun forfait à la personne qui fait le commerce malgré une mesure de déchéance, ne s'appliquera pas en sa faveur mais bien plus contre lui et ceci sans ménagement. Ainsi, il est normal que l'acte de commerce accompli par un déchu ou un indésirable en violation de sa situation, soit néanmoins considéré comme un acte de commerce valable, lui privant la possibilité de se rétracter car, comme le dit l'adage "nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude."75

Au delà de ce que l'on pourrait qualifier des critères personnels de la commercialité informelle, marquée en général par l'irrespect des conditions classiques tenant à la personne pour exercer le commerce, il existe d'autres critères qu'on pourrait qualifier de réels et qui concernent l'exercice d'actes de commerce ou tout simplement l'activité commerciale dans le secteur informel.

SECTION II

L'ACTIVITE COMMERCIALE DANS LE SECTEUR INFORMEL

L'on est porté à se demander si les actes de commerce dans le secteur informel sont des actes de commerce au sens de l'article 3 de l'AU.DCG. Comme mentionné plus haut, la qualité de commerçant est inextricablement liée à l'exercice d'une activité commerciale.76 L'activité commerciale ne pouvant pas se concevoir sans référence aux actes de commerce77, le législateur OHADA sans définir la notion essentielle d'actes de commerce78 a opté pour une méthode par énumération qui a consisté à présenter

75 MASAMBA MAKELA (R.), op.cit., p. 11

76 Art 2 AU.DCG

77PEDAMON (M.), op.cit., N°206, p. 168.

78 Bien qu'ayant actualisé l'article 632 du Code de Commerce, L'AU.DCG en son article 3 ne résout pas le problème de la définition de la notion d'acte de commerce. Sur la question, la doctrine française a bâti une théorie générale des actes de commerce partagée entre deux courants opposés. Pour le 1er courant, ce qui caractérise le commerce c'est son objet, sa nature, peu importe la personne qui l'accomplit: C'est la conception dite objective. Pour le deuxième courant qui estime que le droit commercial a été à l'origine un droit professionnel, l'acte de commerce est celui qui est accompli par

de façon indicative, une série d'actes dont l'accomplissement habituel et indépendant confère à la personne concernée la qualité de commerçant. La doctrine a vu dans les actes de commerce le centre de la commercialité.79 Dans le secteur informel le constat est semblable mais avec quelques précisions, car s'il est évident que l'activité commerciale dans ledit secteur, respecte les exigences d'habitude et d'indépendance (para II) , il n'est pas toujours aisé d'identifier les actes de commerce dans l'économie informelle au regard de l'énumération faite par les textes. (Para I)

PARA I : LES ACTES DE COMMERCE DU SECTEUR

INFORMEL.

La théorie traditionnelle des actes de commerce présente généralement trois catégories d'actes de commerce que sont : Les actes de commerce par nature, les actes de commerce par accessoire et les actes de commerce par la forme. S'il est remarquable de constater que l'acte de commerce par la nature apparaît comme l'acte de commerce par excellence du secteur informel (A), il est toutefois possible de s'intéresser à la théorie de l'accessoire dans le secteur informel (B). Quant à l'acte de commerce par la forme ou actes de commerce objectifs, ils sont réputés commerciaux quels que soient leur objet et leur but et quelle que soit la personne qui les accomplit. Ces actes ont donc un caractère commercial même si c'est un non commerçant ou encore quelqu'un du secteur informel qui l'effectue ; il s'agit ainsi d'une commercialité en vertu de la loi80. IL sera beaucoup plus question ici des deux autres catégories.

un commerçant: C'est la conception dite subjective. L'une comme l'autre de ces conceptions présentent des insuffisances qui ne facilitent pas l'appréhension de la commercialité.

79 PEDAMON (M.), op.cit., N°206, p. 168. Toutefois il s'agissait particulièrement de la catégorie des actes de commerce par nature.

80 PEDAMON (M.), op.cit., N°214, p. 174.

A - L'ACTE DE COMMERCE PAR NATURE : ACTE DE COMMERCE PAR EXCELLENCE DU SECTEUR INFORMEL

Il est reconnu qu'en matière commerciale en général, l'acte de commerce par nature tient une place importante car il s'agit manifestement de l'acte qui matérialise la spéculation et la recherche du lucre. Le secteur informel en la matière n'est donc pas une exception. Il est plutôt une confirmation de cette place de l'acte de commerce par nature dans le commerce en général. Au regard de l'énumération faite par l'Art 3 AU.DCG, l'on peut observer dans cette catégorie d'acte de commerce par nature ou par leur objet, une autre division qui fait état de l'achat pour la vente, des opérations de services et de l'exploitation industrielle des ressources naturelles.

L'achat pour revendre est considéré comme le prototype même de l'acte de commerce par nature ; alors qu'il s'agisse du colportage, du « Bayamsellam »81, de la vente à la sauvette ou de toute autre activité du secteur informel, on retrouve bien l'achat des denrées et marchandises pour revendre soit en nature, soit après les avoir travaillé82. Ce n'est pas l'achat pris singulièrement qui est commercial, mais aussi la vente ; il s'agit d'un mouvement « achat- vente » réalisé dans l'intention d'effectuer des bénéfices par la différence entre le prix d' achat et celui de la revente. Ce qui signifie que demeure civile l'activité de celui qui tantôt achète, tantôt revend. Il faut rappeler que cet achat pour la revente cadre avec ce que l'on a qualifié par économie de la débrouille ou de la survie83.

En ce qui concerne l'économie dite souterraine ou dissimulée, en plus de l'achat pour la revente, on peut recenser d'autres opérations dites de services qui, bien que se déroulant généralement dans le cadre d'une entreprise, peuvent

81 Ce terme désigne au Cameroun l'activité des femmes qui achètent des denrées et marchandises dans les zones rurales pour les revendre en zone urbaine afin d'y tirer les moyens de leur subsistance.

82 FONE (A.M.), « le secteur informel Camerounais au regard du droit commercial », An.FSJP, Dschang, TII, PUA, 1998, pp 123.

83 Voir supra, page 7.

être effectuées par le commerçant informel. Il en est par exemple des opérations financières comme on peut le constater avec le notaire qui se livre aux activités de courtage, d'agence d'affaires et même de banque, lorsqu'il effectue des prêts à titre onéreux en utilisant l'argent laissé en dépôt par ses clients et ceci à ses risques84. Qu'il s'agisse du secteur informel, de la survie ou de l'économie souterraine, les acteurs qui y opèrent effectuent des actes de commerce par nature avec une forte domination des actes d'achat pour la revente. Ces actes sont donc commerciaux, contrairement aux actes civils, à moins que ces derniers soient faits pour les besoins du commerce du commerçant de fait.

B - LA COMMERCIALITE PAR ACCESSOIRE ET
LE SECTEUR INFORMEL

Certains actes qui ne sont pas objectivement commerciaux et qui ne constituent point la trame d'une activité commerciale accèdent toutefois à la commercialité lorsqu'ils sont accomplis par un commerçant en liaison avec son commerce. Il apparaît peut être surprenant de faire appel à la théorie de l'accessoire dans le secteur informel en raison de l'informalité juridique qui caractérise les commerçants d'un tel univers. Toutefois, il faut reconnaître que dès lors que la qualité de commerçant informel est reconnue à une personne, la théorie de l'accessoire peut jouer et faire déclarer commerciaux les actes normalement civils de cette personne. Pour l'essentiel, l'acte peut être accessoire à la profession commerciale (1) ou à un acte de commerce à titre principal. (2)

1° Les Actes de commerce accessoires à la profession commerciale.

La théorie des actes de commerce par accessoire encore appelés actes de commerce relatifs ou subjectifs, puise son fondement dans les articles 631 et 632 du Code du Commerce (dans sa version d'avant 1960) qui considèrent

84 Com, 2 février. 1970, JCP, 1970, II N°16313.

comme actes de commerce, les engagements, transactions et obligations entre
commerçants, présumés contractés pour les besoins de leur profession.

L' AU.DCG en son article 3 est plus explicite sur le sujet lorsqu'il range dans les actes de commerce d'une part, les contrats entre commerçants pour les besoins de leur commerce et d'autre part, les actes effectués par les sociétés commerciales. On admet toutefois que la théorie des actes de commerce par accessoire s'applique même aux engagements extra-contractuels du commerçant.

Pour la première catégorie, à savoir les actes juridiques, il faut dire que la situation des personnes physiques est plus complexe que celle des sociétés commerciales85. Il y a lieu tout d'abord d'écarter de la théorie de l'accessoire tous les actes faits par le commerçant pour les besoins de sa vie privée ainsi que tous les actes accomplis à titre gratuit à moins qu'ils ne se rattachent à l'exploitation commerciale. En dehors de ces cas, il est généralement admis que la théorie des actes de commerce par accessoire atteigne les contrats les plus variés passés par le commerçant dans l'intérêt de son commerce. (Achat ou location du matériel d'outillage, emprunt contrat d'assurance, de transport, achat ou vente d'un fond de commerce). La théorie de l'accessoire atteint aussi les obligations quasi contractuelles contractées par le commerçant dans l'exercice de son commerce.86 Il s'agit là d'une oeuvre de la jurisprudence car les textes de loi en la matière ne parlent que d'acte de commerce. En pareille hypothèse, il faut que la faute du commerçant se rattache à l'exercice du commerce informel. Dans la mesure où la jurisprudence fait désormais présumer comme commercial tout engagement extracontractuel du

85 La situation des sociétés commerciales est plus simple car n'ayant pas de vie privée et obéissant au principe de la spécialité, les sociétés commerciales ne peuvent accomplir que des actes de commerce quand bien même leur objet serait civil, pourvu qu'elles soient commerciales par leur forme ; il en est de même à fortiori si la société a un objet commercial.

86 Tel est par exemple le cas de la gestion d'affaires ou de la répétition de l'indu. Voir à ce sujet Req., 15 décembre 1856, D., 1857, 1, 170. Civ., 5 février 1097, D., 1097, 1,429, S, 1907, 1, 305, note Lyon Caen.

commerçant dès lors qu'il se rattache à l'exercice du commerce,87 sont qualifiés d'actes de commerce par accessoire les engagements extracontractuels nés d'une faute personnelle du commerçant informel aussi bien que ceux nés du chef de ses préposés dans l'exercice de leur fonction ou ceux nés des risques d'exploitation.

Pour la deuxième catégorie, à savoir les faits juridiques, la commercialité par accessoire a été étendue aux délits et quasi-délits commis par le commerçant dans l'exercice de sa profession. Ici, ce n'est pas le but poursuivi par le commerçant qui est déterminant puisque l'obligation ne naît pas d'un acte de volonté. C'est le fait que l'engagement soit né à l'occasion de l'activité commerciale et du fait de cette activité. Ainsi seront qualifiés d'actes de commerce les agissements de concurrence déloyale ou de diffamation fait par le commerçant informel. Toutefois, ne sont pas des actes de commerce les accidents de travail, les actions en contrefaçon et les actions en responsabilité civile pour réparation de dommages de toute nature causés par un véhicule dudit commerçant. Il se verra de ce fait appliquer le droit commercial dans sa rigueur si l'acte est accessoire à sa profession commerciale informelle ou plutôt à un acte de commerce à titre principal.

Quid du caractère accessoire par rapport à un acte de commerce à titre principal ?

2° Les actes de commerce accessoires à un acte de commerce
à titre principal

Il s'agit dans ce cas des actes accomplis par des non commerçants mais qui sont commerciaux parce qu'ils se rattachent à un acte de commerce à titre principal. L'article 91 du code de commerce en son alinéa premier en donnait un exemple en prévoyant qu'est commercial le gage constitué par un individu non commerçant pour un acte de commerce. Il en était de même d'un billet à ordre

87 Req., 21 juillet 1936, Gaz.pal., 1936, 2, 609.

souscrit par le débiteur d'une dette commerciale ou d'un chèque tiré en règlement d'une dette commerciale. Mais ceci ne vaut désormais plus que pour le chèque car l'article 4 AU DCG a rendu commercial par la forme le billet à ordre au même titre que la lettre de change, et le warrant. En dehors de ces actes déclarés commerciaux par la forme entre toutes personnes, les autres en réalité sont des actes qualifiés par la doctrine d'acte mixte, c'est-à-dire en l'espèce des actes qui présentent la caractéristique d'être commerciaux pour l'une des parties (ici le commerçant informel) et civil pour l'autre.

Les actes de commerce doivent être exercés comme profession habituelle mais aussi de façon indépendante pour appeler la qualité de commerçant informel.

PARA II : L'EXERCICE HABITUEL ET INDEPENDANT DU COMMERCE ET LE SECTEUR INFORMEL

Tel que définit à l'article 2 AU DCG la qualité de commerçant est conditionnée par l'accomplissement d'actes de commerce88 comme profession habituelle mais aussi de façon indépendante. Ces exigences s'appliquent également dans la détermination de la qualité de commerçant de l'informel tel qu'on peut l'observer à travers les notions d'habitude (A), et d'indépendance. (B)

A - L'EXERCICE HABITUEL

Il serait préférable de parler de l'exercice des actes de commerce à titre de profession habituelle car, habitude et profession présentent des connexités

88 Le commerçant est celui qui fait des actes de commerce tels qu'ils sont énumérés à l'article 3 de l'AU.DCG ou prévus par les lois spéciales en raison du caractère énonciatif et non limitatif de cet article. Toutefois il faut écarter de fait une série d'actes de la logique de l'article 2 AU.DCG. Il s'agit d'une part des actes de commerce par accessoire, qui supposent que leur auteur est déjà commerçant, et d'autre part les actes de commerce par la forme qui bien qu'étant commerciaux, ne confèrent pas la qualité de commerçant à leur signataire. Ce sont donc principalement les actes de commerce par nature ou par l'objet dont l'accomplissement peut conférer la qualité de commerçant.

fortes dans l'appréhension de l'attitude et le comportement du commerçant, qu'il soit du secteur informel ou formel. L'habitude se caractérise d'abord par un élément matériel qui suppose la répétition des actes et des opérations; toutefois il est difficile et même impossible de fixer de manière abstraite et absolue le nombre d'actes nécessaires et la cadence à laquelle ils doivent être accomplis.89 L'habitude suppose également un élément intentionnel en l'absence duquel on n'est pas commerçant. L'habitude fait présumer la profession commerciale. La profession renvoie ici à une occupation déterminée et apparente dont on peut tirer ses moyens d'existence. La profession suppose selon certains auteurs soit une entreprise organisée, soit au moins un fonds de commerce et une clientèle.90 Cette interprétation n'est pas toujours suivie et c'est l'activité véritable qui compte plus que le cadre dans lequel elle s'exerce.91

Dans le secteur informel lorsque le commerçant ne vit et n'exerce que son commerce, bien sûr informel, il y a moins de difficulté à déduire l'exercice d'acte de commerce comme profession. La difficulté apparaît lorsque le commerce informel est exercé de façon complémentaire ou concomitante à une activité ou une profession civile. Cette situation se justifie par le souci de ces personnes de trouver des ressources supplémentaires pour arrondir les revenus généralement insuffisants, reçus de ces professions civiles. Trois situations peuvent être envisagées :

- la profession commerciale constitue la profession principale parce

qu'elle procure la plus grande partie des ressources nécessaires aux besoins de l'existence. L'intéressé est commerçant même s'il exerce accessoirement une profession civile. Il en est ainsi du vendeur à la sauvette (à l'instar des vendeurs de friperie dans les pays membres de l'OHADA) qui s'adonne aux activités agricoles pendant ses heures perdues.

89 GUYON (Y), op.cit., N°71, p. 63.

90 HOUIN (R) et PEDAMON (M), op.cit., N°244, p. 266.

91 C'est ainsi que la jurisprudence considère le spéculateur d'habitude comme un commerçant pourtant il n'a pas de fonds de commerce ; il est donc un professionnel en raison de la répétition des actes de spéculation dont il tire ses principaux moyens d'existence.

- La profession commerciale est secondaire mais sans lien nécessaire

avec la profession civile principale. L'intéressé est également considéré comme commerçant car la règle de l'accessoire ne joue pas, il faut toutefois que les actes de commerce aient un caractère habituel et non pas occasionnel. Tel est le cas du notaire qui se livre aux opérations bancaires en octroyant des prêts avec intérêts au public avec l'argent reçu de ses clients. La solution est justifiée car le caractère secondaire ne doit pas permettre à l'intéressé d'éluder les obligations qui incombent aux commerçants. Certains auteurs donnent de à ce phénomène, le nom de para-commercialité.92

- L'activité commerciale est le complément nécessaire d'une

profession civile. L'intéressé ne devient pas pour autant commerçant. Ainsi un médecin généraliste achète des moustiquaires qu'il revend à ses clients après les avoir imprégnés d'une substance protectrice contre l'anophèle. Mais cet achat pour revendre est tellement accessoire par rapport aux prestations fournies par ledit médecin, que l'ensemble de la profession demeure civil. Il faudrait même sans doute aller plus loin et considérer qu'un achat pour revendre intervenu dans ces conditions est en réalité un acte civil par accessoire93. Toutefois, la situation peut devenir difficile si l'activité commerciale est plus importante que l'activité civile principale. En telle hypothèse, l'intéressé est commerçant. Le cas se rencontre notamment chez les enseignants de la matière informatique dans nos établissements scolaires, lesquels se transforment en fournisseurs de pièces informatiques à leurs collègues et aux élèves ; cette activité est parfois très importante et ne peut être retenue comme le complément indispensable de la profession civile d'enseignant informatique.

Qu'en est-il de la notion d'indépendance dans l'exercice des actes de commerce ?

92 GUYON (Y), op.cit., N°73, p. 64.

93 GUYON (Y), op.cit., N°91, p. 84.

B - L'EXERCICE INDEPENDANT

L'exercice d'une activité commerciale pour son nom et pour son compte est une exigence que la jurisprudence a ajoutée à la définition textuelle du commerçant. Seul mérite la qualité de commerçant celui qui court le risque du commerce et qui agit de façon indépendante, c'est-à-dire en son nom et pour son compte personnel. L'identification de cette activité indépendante n'est pas toujours aisée, encore moins dans le secteur informel où le sentiment de la débrouillardise fait généralement naître une solidarité familiale dans les activités menées, mais surtout dans les moyens mis en oeuvre pour ces activités. C'est ainsi que beaucoup, à moins d'être salariés, participent comme collaborateurs ou représentants du véritable maître de l'affaire. Ceux là ne sont donc pas commerçants comme c'est généralement le cas du conjoint du commerçant qui collabore ou participe simplement à l'activité commerciale de son époux, sans en être co-exploitante. (Voir supra, page 19).

Le commerçant du secteur informel présente, à n'en point douter, des particularités quant à son identification au regard des dispositions de l'AU.DCG. Si les critères réels d'identification (ici l'activité commerciale marquée par l'accomplissement d'actes de commerce comme profession habituelle) de l'opérateur informel sont plus proches de la norme, il n'en est pas de même des critères personnels qui s'éloignent considérablement des exigences légales en la matière.

Il faut sans doute scruter de près le bien de tels opérateurs qui n'est rien d'autre que le fonds de commerce, pour mieux se convaincre de ces particularités qui singularisent les opérateurs du secteur informel.

CHAPITRE II

LE FONDS DE COMMERCE DU SECTEUR INFORMEL :
UN BIEN PARTICULIER

S'il y a une peur qui hante au quotidien tout commerçant, c'est sans doute celle de perdre son fonds de commerce, car ce dernier est son bien précieux ou plutôt l'élément essentiel de son patrimoine. Le législateur OHADA sur la lignée de son homologue Français en a pris conscience et de ce fait, a réglementé avec minutie autant le contenu que la protection du fonds de commerce ; mais aussi sa circulation et toutes les opérations qui l'entourent. Dès lors, le fonds de commerce apparaît comme l'un des éléments centraux de la vie et du droit des affaires, tant il est vrai que sa disparition cause du tort non seulement au commerçant et à sa famille qui en dépend, mais surtout à la société qui par principe encourage l'initiative privée en général et les activités commerciales en particulier afin de disposer d'une économie à réseau étoffé. La notion de fonds de commerce est relativement récente car elle est une création de la pratique commerciale française au cours du XIXème Siècle. Le Droit s'en est saisi sous l'effet de la nécessité d'une double protection : D'une part, protéger le commerçant contre les attaques de concurrents en raison des investissements intellectuels et financiers souvent importants qu'il a réalisés lors de la mise sur pied de son activité ; D'autre part, protéger les créanciers du commerçant contre la dissipation d'un élément souvent important de son patrimoine qui est le fond de commerce ou son prix de cession.94

94 Une personne ne pouvant avoir qu'un patrimoine, la théorie du patrimoine d'affectation est exclue
en ce qui concerne le fonds de commerce et, les créanciers du commerçant sans distinction d'origine

De grandes controverses doctrinales ont donc ponctué la détermination de la nature juridique de ce bien du commerçant. Finalement, les auteurs se sont accordés pour lui reconnaître d'abord le caractère d'un bien unitaire distinct des éléments qui le composent, et ensuite le caractère d'un bien meuble incorporel car, il est composé de biens meubles et de biens incorporels qui sont assimilés à des meubles.95 L'Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général ne définit pas la notion de fonds de commerce, il en donne plutôt les éléments constitutifs. Ainsi, son article 103 en son al 1er dispose que : « Le fonds de commerce est constitué par un ensemble de moyens qui permettent au commerçant d'attirer et de conserver une clientèle.». L'al 2 du même article poursuit en énonçant qu'il regroupe différents éléments mobiliers corporels et incorporels. L'article 104 quant à lui désigne la clientèle, l'enseigne, le nom commercial comme éléments obligatoires du fonds de commerce à côté des éléments subsidiaires que l'article 105 énumère.96 Il ressort de tous ces textes que le fonds de commerce comprend une série d'éléments disparates, tous mobiliers. De là, on est inéluctablement porté à s'interroger sur le contenu du fonds de commerce dans le secteur informel. L'opérateur d'un tel secteur a-t-il un fonds de commerce avec tous les

civile ou commerciale ont action sur tous ses biens, mais surtout ont un droit d'opposition sur le prix de la vente du fonds de commerce.

95 Bien que le fonds de commerce comprend des éléments corporels, il demeure un bien meuble incorporel en raison de l'importance des éléments incorporels dans l'ossature général du fonds de commerce. Comme tel, la règle de l'article 2279 du Code Civil qui édicte que: « En fait de meubles, possession vaut titre. », ne lui est pas applicable.

96 L'article 10 dispose en effet que: « Le fonds de commerce peut comprendre en outre, à condition qu'ils soient nommément désignés, les éléments suivants :

- les installations,

- les aménagements et agencements,

- le matériel,

- le mobilier,

- les marchandises en stock,

- le droit au bail,

- les licences d'exploitation,

- les brevets d'inventions, marques de fabrique et de commerce, dessins et modèles, et tout autre droit de propriété intellectuelle nécessaires à l'exploitation. »

éléments prévus par l'AU.DCG ? Le fonds de commerce du secteur informel est-il identique à celui du secteur formel ?

D'emblée la réponse ne peut être positive car l'informalité juridique ou encore les motivations psychosociales et / ou économiques qui accompagnent la logique de l'informel sont par voie de conséquence, de nature à altérer ou à désagréger les éléments qui le composent. A la vérité, le fonds de commerce dans le secteur informel présente de curieuses particularités eu égard non seulement à l'altération (section 1), mais aussi et surtout à la fragilité (section 2) de certains de ces éléments.

SECTION I

PARTICULARITE LIEE A L'ALTERATION DE CERTAINS
ELEMENTS DU FONDS DE COMMERCE INFORMEL

Les opérateurs du secteur informel disposent d'un fonds de commerce profondément altéré et désagrégé comme on peut l'observer à travers l'inconstance du fonds commercial (PARA I) et l'inconsistance des ses éléments corporels. (PARA II)

PARA I : L'INCONSTANCE DU FONDS COMMERCIAL DANS LE SECTEUR INFORMEL

Le fonds commercial est un concept nouveau introduit par l'AU.DCG pour désigner des éléments particuliers entrant nécessairement dans la composition du fonds de commerce. Sa caractéristique principale est d'être exclusivement composé d'éléments incorporels que sont la clientèle, l'enseigne et le non commercial97. Dans le secteur informel, ce fonds commercial est grandement altéré et ceci en fonction de la situation du commerçant informel. Il

97 Art 104 AU.DCG.

faut rappeler en effet que lorsqu'il s'agit de l'économie de la survie ou de la débrouille (faisant appel aux petits commerçants sur les rues, colporteurs, ambulants, bayam-sellam, ou toute activité commerciale exercée au vu et au su de tous), ce fonds commercial perd sa constance alors que pour ce qui est de l'économie souterraine (cas du notaire précité), il est quasi dilué ou tout simplement, difficile à appréhender. Dans tous les cas, les éléments qui constituent le fonds commercial dans le secteur informel ne sont pas toujours conformes à l'esprit du législateur OHADA, comme on peut d'ailleurs le constater à travers la clientèle (A) l'enseigne et le non commercial. (B)

A - LA CLIENTELE

C'est l'élément essentiel du fonds de commerce. Il en constitue la finalité, puisque tous les autres éléments convergent vers sa conquête et son maintien.98 On définit généralement la clientèle comme l'ensemble des personnes qui se fournissent chez un commerçant ou qui ont recours à ses services.99 Il peut s'agir des personnes attirées par les qualités propres du commerçant, par exemple ses qualités d'accueil et de compétence professionnelle, ou des personnes attirées par l'implantation géographique du fonds de commerce. Dans ce dernier cas, on parle de chalands. Toutefois l'AU.DCG ne fait pas de distinction entre clientèle et achalandage.

En partant du principe qu'il n'y a pas de fonds de commerce sans clientèle, l'ensemble de la doctrine reconnaît que la jurisprudence réserve un sort particulier à la clientèle parmi les éléments du fonds de commerce. En effet, la vente d'un élément quelconque du fonds de commerce sans la clientèle ne constituerait pas une vente du fonds de commerce100. Ainsi, la transmission de la clientèle entraîne inéluctablement le transfert du fonds de commerce même s'il

98 Art 103 AU.DCG.

99 GUYON (Y), op.cit., N° 690, p. 705.

100 JAUFFRET (A), MESTRE (J), Droit Commercial, 23 éd, L.G.D.J. 1997 N° 559, p 391.

est parfois difficile de déterminer si cette clientèle appartient au commerçant 101 Toutefois, la clientèle se rattache à des personnes et peut en principe être dépersonnalisée au point de constituer l'objet d'un bien102. Cependant, bien que constituant une collectivité concrète de personnes, elle est parfois détachée de la personne lorsque les rapports commerciaux s'élargissent. Les liens entre fournisseurs et clients dans ce cas n'apparaissent plus comme ceux d'une personne physique attirée par sa confiance en une autre. Ces rapports unissent plutôt les acheteurs à des habitudes, à des commodités, à une renommée, à des moyens de publicité, où s'efface la personne du vendeur103. Pour l'essentiel, il est unanime de reconnaître que la clientèle est l'essence même du fonds de commerce sans laquelle le fonds ne peut exister104. Elle ne peut d'ailleurs survivre en cas de disparition de ce fonds par suite d'une cessation d'exploitation105.

La clientèle ainsi appréhendée, n'a pas identiquement les mêmes caractères dans le secteur informel. Certes on y retrouve des individus qui disposent de moyens propres pour acheter et revendre dans le but de tirer un profit leur permettant de vivre ou survivre. Peut-on ainsi affirmer que ces moyens qui diffèrent d'un opérateur informel à l'autre (colporteur, sauveteur, etc...) leur permettent d'attirer et de maintenir la clientèle au sens de l'art 103 al 1 de l' AU.DCG ? L'inquiétude est d'autant plus poussée que des gens achètent de façon occasionnelle106, encore qu'une grande partie d'activités commerciales dans le secteur informel est par principe du commerce ambulant ou mobile. D'aucuns se demandent par exemple si la « bayam-sellam » a une clientèle au

101 En effet, dans un régime d'économie libérale ou de concurrence, la clientèle n'appartient pas véritablement au commerçant et est plutôt à qui sait la prendre, à moins d'être dans un cas de contrat d'approvisionnement. Les clients vont donc chez ceux qui sont assez habiles pour les attirer et assez diligents pour les conserver.

102 FONE (A.M), op.cit., p. 125.

103 Ibidem.

104 Com., 31 mai 1988, bull. civ. IV, N° 180.

105 Civ. 3e, 18 mai 1978, Rev. Trim. Dr. Com.., 1978, p. 559, obs. Derrupé. Com., 26 janvier 1993, Rev. Trim. Dr. Com., 1994, p. 40, obs. Derrupé.

106 FONE (A.M),op.cit., p. 126.

sens propre du terme ou si le vendeur de beignets dans un pousse-pousse107, en a une108 . Ils répondent à leurs inquiétudes par la négative dans la mesure où cette clientèle de passage se rapproche davantage de l'achalandage et ne semble pas être une véritable clientèle attachée au fonds de commerce109.

On pourrait objecter à cette position en pensant que la nature mobile de telles activités sous-tend l'existence d'une clientèle aussi mobile, qui n'est pas liée au fonds par la position géographique ou la connaissance personnelle du commerçant, mais par une relation psyco-sociale qui unit de manière fictive ces commerçants mobiles à des clients indéterminées. En effet combien de consommateurs de tabac s'approvisionnent chez des colporteurs qui, savent en retour q'ils ont des clients habitués à l'achat ambulant ? Qu'est ce qui justifierait donc l'existence pléthorique des commerçants ambulants dans nos cités si ces derniers n'étaient pas assurés de l'achat de leur marchandise par un public quelconque. La vendeuse ambulante de « bouillie »110 qui se promène dans les hôpitaux ne sait-elle pas que ces malades ont quotidiennement grand besoin de sa marchandise ? En retour ces malades savent qu'une telle ambulante passerait et qu'ils pourraient se servir. La situation est identique à celle des marchands ambulants de beignets, de bonbons et biscuits qui sillonnent les villes et les milieux scolaires. Il s'agirait donc dans tous ces cas de l'existence d'une clientèle particulière, caractérisée par une grande mobilité, une variabilité et un défaut de fixité car à la vérité, rien ne permet véritablement d'affirmer que de tels opérateurs du secteur informel soient capables de conserver une clientèle, ou du moins en dispose une au sens de l'AU.DCG.

107 Espèce de porte-tout à deux roues et sans moteur, fabriqué à l'archaïque et permettant de circuler presque partout avec les objets transportés. Une grande partie de jeunes au Cameroun communément dénommés " pousseurs" se servent de ce porte -tout pour se livrer soit à des commerces ambulants, soit à des prestations de service de transport de marchandises et d'effets mobiliers d'un point à un autre, moyennant rémunération.

108 FONE (A.M), op.cit., p. 126.

109 Ibid.

110 Préparation généralement faite à base de céréales de maïs dans de l'eau bouille et utilisée comme petit déjeuner.

Mais ces difficultés concernant la clientèle dans le secteur informel s'estompent lorsque l'activité commerciale informelle bénéficie d'une fixité, d'une organisation semblable à celle du commerce formel. Il en est ainsi des commerçants installés dans des comptoirs, ou des femmes qui sont installées de façon habituelle à un coin de la rue et se livrent à des activités de « braise » (poisson, poulet, porc...), ou de restauration. Ces dernières ont une clientèle semblable à celle définie à l'article 103 AU. DCG dans la mesure où elles développent des techniques et méthodes pour attirer et conserver les clients.111 Dans tous les cas, la clientèle est incontournable pour la survie du fonds car elle permet de le vivifier et de le revitaliser constamment. Mais bien qu'étant essentiel, elle n'est pas suffisante et s'accompagne d'autres éléments qui permettent d'identifier le commerçant à l'instar du nom commercial et de l'enseigne.

B - LE NOM COMMERCIAL ET L'ENSEIGNE

Le nom commercial et l'enseigne font partie des éléments obligatoires du fonds de commerce et servent de passerelle d'identification du commerçant. Le nom commercial est l'appellation sous laquelle le commerçant exerce son activité et la distingue des autres. Il peut s'agir d'un nom patronymique, d'un prénom, d'un pseudonyme ou d'une nomination fantaisiste. Le commerçant peut également choisir comme nom commercial une marque dont il est propriétaire. Il peut même arriver qu'une dénomination serve tout à la fois de marque, de nom commercial et d'enseigne. Le nom commercial du fonds ne se confond pas avec le propriétaire du fonds ; le nom patronymique en tant qu'il exprime l'état d'une personne physique, est soumis à un régime d'ordre public qui en interdit la cessibilité et plus généralement, la place hors du commerce 112; mais il devient cessible lorsqu'il est utilisé à des fins commerciales. En pareille hypothèse, il pourra être vendu à l'acquéreur du fonds en même temps que le

111 Au moins par le caractère appétissant des plats qu'elles offrent au public.

112 AKUETE (P) et YADO (J), op.cit., N°333, p. 205.

fonds lui-même. Le nom commercial se transmet non seulement au successeur immédiat, mais à tous les exploitants successifs, il assure le maintien de la clientèle existante et permet d'en acquérir une nouvelle, le cessionnaire du fonds devant toutefois procéder à des additions des mentions particulières pour éviter la confusion pouvant résulter de l'homonymie. Il s'agira des mentions « et successeurs », « anciennes maisons »113.

Quant à l'enseigne, il s'agit d'une dénomination, l'emblème choisi pour individualiser le fonds. Parfois, c'est le nom commercial qui sert d'enseigne, mais le plus souvent c'est une dénomination de fantaisie. Mais il ne doit pas être de mauvais goût, par exemple constituer une insulte à l'art, au bon sens, et à l'esthétique du lieu où s'exerce l'activité114. L'enseigne comme le nom commercial se transmettent avec le fonds. Leur protection est assurée par l'exercice de l'action en concurrence déloyale. Que dire de ces deux éléments d'identification du commerçant dans le secteur informel ?

Il est important de noter que le nom commercial et l'enseigne existent dans le secteur informel avec l'originalité de l'oralité115. On y retrouve des noms qui varient au gré de son utilisateur de telle sorte qu'un même opérateur peut en utiliser plusieurs à la fois116. Ces noms sont parfois attribués par les clients qui, généralement dans l'embarras, cherchent à retenir un élément de désignation de leur partenaire commerçant. Et quand bien même c'est le commerçant informel qui s'attribue un nom, surtout si son activité est fixe et stable, il lui arrive de le changer au gré des circonstances et ceci de façon habituelle. C'est donc dire que les éléments du fonds commercial tels qu'énoncés par le législateur OHADA, présente une très grande inconstance généralement accompagnée par la fragilité et la vulnérabilité de ces opérateurs informels, toute chose qui ne peut laisser

113 FONE (A.M), op.cit., p. 127.

114 AKUETE (P) et YADO (J), op.cit., N°333, p. 205.

115 FONE (A.M), op.cit., p. 127.

116 Au Cameroun, on dénombre une variété de ces noms tels que " maman gentille", "papa cadeau", "toujours prêt", "papa bonus", "gâteau chaud", "asso",...

sans affecter la consistance même des éléments corporels du fonds de commerce dans le secteur informel.

PARA II : L'INCONSISTANCE DES ELEMENTS CORPORELS DU FONDS DE COMMERCE DANS LE SECTEUR INFORMEL

S'il est vrai que les marchandises apparaissent comme l'élément corporel toujours existant dans le secteur informel (B), il n'en est pas de même avec les autres éléments corporels tels le matériel et l'outillage qui, à moins d'être quasiment inexistant, est généralement réduit et inconsistant. (A)

A - LE MATERIEL ET L'OUTILLAGE

Il s'agit de tous les objets corporels qui servent à l'exploitation du fonds de commerce notamment les machines et l'équipement117. L'AU.DCG retient de ces effets mobiliers servant à l'exploitation du fonds, les installations, les aménagements et les agencements, le matériel et le mobilier. Il apparaît ainsi un changement de vocabulaire en la matière qui traduit la volonté du législateur OHADA de ne pas se comporter en simple copiste plus ou moins fidèle de son homologue français, et d'engager de ce fait une nouvelle doctrine 118; car sur la question la loi du 17 mars 1909 ne parle que du matériel et de l'outillage. Quoi qu'il en soit et, malgré cet écart de terminologie, il est certain que dans l'un comme l'autre cas (France et espace OHADA), il s'agit d'effets mobiliers servant à l'exploitation du fonds.

Dans le secteur informel, ces objets mobiliers existent mais avec moins d'importance. En effet, l'activité informelle se caractérisant par son aspect non structuré et généralement de taille réduite, n'accorde pas grande importance à ces objets. Alors, contrairement aux commerçants du secteur formel qui

117 GUYON (Y), op.cit., N° 696, p 710.

118 AKUETE (P) et YADO (J), op.cit., N°345, p. 210.

s'investissent souvent dans le matériel nécessaire à l'exploitation du fonds, et ceci avec beaucoup de sérieux, ceux du secteur informel, plus animés par la recherche immédiate du pain quotidien, se passent grandement de l'implantation de ces objets mobiliers119, encore moins s'il est question d'un commerce ambulant et mobile. C'est dire que dans un tel secteur, ces objets mobiliers existent avec moins d'importance ou de consistance que dans le secteur formel, car les agents informels s'intéressent habituellement aux marchandises qu'ils achètent pour revendre.

B - LES MARCHANDISES

Les marchandises sont les meubles corporels destinés à être vendus, constituant l'objet du commerce. Elles constituent des stocks qui par hypothèse sont variables et fongibles. Ce que le langage comptable range dans la rubrique d'actif circulant.

Il faut entendre par marchandises autant les matières premières destinées à être travaillées, que les produits destinés à la vente. Il est important de distinguer les marchandises du matériel car le nantissement du fonds de commerce peut porter sur le matériel mais non sur les marchandises, en raison de leur instabilité. Ces dernières pouvant tout de même être données en gage, ce qui suppose en principe leur transfert matériel chez le créancier gagiste. Toutefois cette distinction marchandise et matériel devient difficile lorsque le commerçant utilise pour l'exploitation de son fonds des objets semblables à ceux qu'il met en vente120. Cette distinction est davantage plus complexe lorsqu'il faut prendre en compte les matières premières. Celles-ci sont incontestablement des marchandises lorsqu'elles sont destinées à être vendues

119 Certes, ces effets mobiliers existent dans le secteur informel, mais de façon artisanale et précaire ; c'est ainsi qu'on peut recenser des paniers servant aux colporteurs dans leurs activités, des tablettes faites en matériaux non durables servant aux activités commerciales de certaines femmes dans les abords de rues.

120 Ainsi une machine de reprographie ou à écrire, un ordinateur, tous des matériels dans certains cas deviendront des marchandises si le fonds vend du matériel de bureau.

en l'état ; par contre, elle doivent être traitées comme de l'outillage ou du matériel si elles servent à la fabrication de produits proposés à la vente mais sans entrer dans le processus de transformation de ces derniers121.

Les marchandises sont incontestablement les effets corporels toujours présents dans le secteur informel, au moins en ce qui concerne l'économie de la débrouille. L'opérateur y achète pour revendre, aux fins de survie, des choses corporelles pour la plupart122.

Le fonds de commerce dans le secteur informel présente donc en ce qui concerne les éléments corporels une non consistance qui vient aiguiser de ce fait son caractère particulier, surtout que le constat affiche en ce qui concerne les éléments incorporels dudit fonds, une quasi inexistence, du moins une vulnérabilité certaine.

SECTION II :

PARTICULARITE LIEE A LA FRAGILITE DES ELEMENTS

INCORPORELS DU FONDS DE COMMERCE INFORMEL

Le fonds de commerce informel continue à se distinguer par ses curieuses particularités lorsqu'il est question des éléments incorporels Ces derniers tiennent en principe une place importante dans l'ossature globale du fonds de commerce, ce qui a fait retenir sans doute par la doctrine la nature incorporelle du fonds, pour signifier la prépondérance ou l'importance des éléments incorporels sur ceux corporels. L'AU.DCG énumère ces éléments incorporels en faisant référence au droit au bail, aux licences d'exploitation et brevets d'invention, aux marques de fabrique et de commerce, aux dessins et modèles et à tout autre droit de propriété intellectuelle nécessaire à l'exploitation123. Il n'est pas exagéré de dire que le fonds de commerce informel ne dispose véritablement pas de ces biens incorporels nécessaires à l'exercice une activité structurée. Il s'agit là d'une situation qui ne peut qu'accentuer la

121 AKUETE (P) et YADO (J), Op. cit., n° 345, p. 210.

122 FONE (A.M), Op.cit P. 127

123 Art 105 AU.DC~

précarité d'un tel fonds de commerce en raison de la fragilité dont souffrent ses éléments incorporels comme on peut d'ailleurs le constater à travers la quasi-inexistence des droits de propriété industrielle (para I) et la vulnérabilité du bail commercial (Para II).

PARA I : LA QUASI INEXISTENCE DES DROITS DE PROPRIETE
INDUSTRIELLE

On définit généralement le droit de propriété industrielle comme des monopoles d'exploitation ou d'utilisation regroupant les brevets d'intentions, les marques de fabrique ou de commerce, les dessins et modèles124. Le terme propriété a été choisi pour souligner l'étendue des prérogatives du titulaire. Celui-ci peut opposer son droit à tous et en disposer librement. Cependant, la propriété industrielle n'est pas en tous points comparable à la propriété telle que définie par l' Art 544 du Code Civil. Elle porte sur une création intellectuelle et non sur une chose matérielle, elle n'a qu'une durée limitée alors que la propriété ordinaire est en principe perpétuelle125. On assimile aux propriétés industrielles le droit de propriété littéraire, les secrets de fabrication, le savoir faire et le droit de se prévaloir des récompenses officielles et médailles obtenues dans l'exercice du commerce126.

Les brevets d'invention sont des droits limités dans le temps, conférés par l'Etat à l'inventeur d'une création nouvelle. Les marques de fabrique ou de commerce sont des signes visibles utilisés ou que l'on se propose d'utiliser, pour désigner et distinguer les produits et les services d'une unité quelconque. Quant aux dessins, ils confèrent comme les brevets, un monopole d'exploitation, mais sur la forme nouvelle donnée à un produit existant et non sur une découverte.

124 AKUETE (P) et YADO (J), Op.cit n°337, p. 208

125 GUYON (Y), Op.cit., n° 717, p. 735

126 AKUETE (P) et YADO (J), Op.cit n°337, p. 208

Tous ces droits ne sont véritablement protégés au profit de leur titulaire que s'ils sont exploités car l'exploitation est essentielle dans le droit des propriétés industrielles. Il doit s'agir ici d'une exploitation régulière c'est-à-dire conforme aux dispositions légales, réglementaires et statutaires. De là, on peut bien se rendre compte qu'en raison de l'informalité qui caractérise le secteur informel, couplée par la précarité de ses opérateurs et leur organisation parfois résiduelle, les droits de propriété industrielle sont quasi inexistants. Même s'ils existent, la protection qui en est la manifestation fera défaut, car il n'est pas sans doute question de protéger les droits d'une personne qui ne respecte pas le droit. Certains auteurs sur la question, ont tout simplement conclu en l'absence de tels éléments dans le secteur informel127.

PARA II : LA VULNERABILITE DU BAIL COMMERCIAL

Habituellement, le commerçant n'est pas propriétaire de l'espace ou de l'immeuble utilisé pour l'exploitation de son fonds. Il occupe généralement cet espace en exécution d'un contrat de bail. Le législateur OHADA a entendu protéger la stabilité de ce contrat afin de garantir le locataire commerçant des évictions parfois fantaisistes du bailleur. Il est donc aménagé un droit de créance du locataire commerçant contre le propriétaire de l'immeuble abritant le fonds exploité. L'AU.DCG définit les règles du bail commercial dans les articles 69 à 102. Ces règles sont destinées à régir aussi bien les baux d'immeuble à usage commercial, industriel et artisanal que professionnel.

La réglementation sur les baux commerciaux est pleine d'avantages pour tout commerçant en ce qu'elle garantit la stabilité de la clientèle, élément vital pour le fonds de commerce. Il s'agit en réalité d'un privilège de la qualité de commerçant, et comme tel, il ne peut bénéficier qu'aux opérateurs commerçants régulièrement installés. Dès lors, le commerçant non immatriculé ne pourra pas bénéficier des dispositions de l'AU.DCG en ce qui concerne le régime

127 FONE (A.M), Op.cit., p. 127.

particulier des baux commerciaux. Il s'agit là d'un handicap certain puisque la constance dans la localisation de l'activité est un facteur essentiel pour la préservation de la clientèle. Les obligations qui pèsent normalement sur le bailleur se verront dégagés par cette informalité du commerçant informel. C'est ainsi que les exigences de renouvellement ne sont pas imposables à un tel bailleur. Il pourra donner congé à son locataire sans lui verser d'indemnité d'éviction. Les locataires commerçants de l'informel se trouvent dans une insécurité qui vient dénaturer fondamentalement le fonds de commerce qu'ils exploitent. Ils courent le risque de perdre régulièrement leur clientèle ou de changer fréquemment leur localisation en raison de la liberté du bailleur de renouveler ou pas le bail. Cet état des choses, bien que justifié par la nécessité du respect des normes, peut être source de débats dans notre société où l'on dénombre plusieurs petits commerçants animés par le sentiment de la débrouillardise et de la survie, qui occupent comme locataires des immeubles pour l'exploitation de leurs fonds. Leur fermer le bénéfice du régime des baux commerciaux apparaît comme la méconnaissance d'une classe sociale déjà marginale ; Toutefois, le droit étant établi pour se faire respecter, bon gré ou malgré, l'on peut comprendre que ce privilège commerçant ne soit pas accordé aux commerçants coupables de non immatriculation.

CONCLUSION DE LA IERE PARTIE

En guise de conclusion de cette partie, il faut noter que la désagrégation de l'économie a fait naître une grande ingéniosité de la part de la population d'Afrique au sud du Sahara, désireuse de trouver des moyens alternatifs pour réguler la crise sociale. C'est dans la mouvance de cette situation que le commerce parallèle ou encore le secteur informel, s'est développé au vu et au su de tous, mais surtout de l'Etat, très souvent impuissant de le comprendre et à le manipuler. Ceci est d'autant plus ambigu que le législateur OHADA ne s'est pas manifesté avec détail et clarté sur la question de l'informel. Le constat en est que les opérateurs commerçants d'un tel secteur sont d'un genre particulier, gérant ou possédant un fonds de commerce aussi singulier. C'est au grand mépris des exigences gouvernant l'exercice des professions commerciales que ces derniers se déploient dans les activités liée au commerce, tantôt par contournement volontaire de la législation, tantôt par négligence ou par simple volonté de survie, ou encore à cause des lourdeurs administratives et procédures onéreuses de la régularité juridique en la matière. Mais comme le droit OHADA est là pour diriger la vie des affaires et non l'observer passivement, il est évident que ce droit ait ambition et vocation de gouverner tout le monde des affaires, de telle manière que l'applicabilité de ses dispositions au commerçant de l'informel ne soit pas une simple hypothèse d'école.

~EUX7EME V1497E

L'APPLICABILITE DU DROIT DES AFFAIRES
OHADA AU COMMERCANT PERSONNE PHYSIQUE
DU SECTEUR INFORMEL

L'applicabilité du droit des affaires OHADA au secteur informel est sans nul doute une question qui soulève des intérêts pratiques et une importance certaine. En effet, il faut de prime abord relever que le législateur OHADA ne traite pas de façon claire et précise l'épineux problème de l'informel. Une lecture à doigt mouillé du traité OHADA, accompagné des huit actes uniformes déjà en vigueur ne permet véritablement pas de ressortir la prise en compte du secteur informel dans l'oeuvre de l'uniformisation. Ce n'est que par des études a contrario et de façon analogique qu'on peut faire ce relais entre le droit OHADA et le secteur informel. Toutefois, la certitude est que le droit des affaires OHADA a vocation à régir toutes les situations qui touchent aux affaires. Le législateur s'y est attelé et désormais, c'est sans grande gymnastique intellectuelle que l'on peut faire état de l'applicabilité du droit des affaires au secteur informel en raison de sa commercialité de fait (Chapitre I). Cependant, il est souhaitable que le législateur intervienne avec plus d'affirmation et que la problématique du secteur informel ne soit plus une question incidente ou encore qu'elle ne soit évoquée que pour la rigueur du droit des affaires ; car sa nécessaire prise en compte dans l'entreprise OHADA commanderait au législateur de rechercher le juste équilibre entre rigueur, protection et même normalisation du secteur informel. (Chapitre II)

CHAPITRE I

LA COMMERCIALITE DE FAIT DU SECTEUR INFORMEL
ET L'APPLICABILITE DU DROIT DES AFFAIRES

IL a été présenté que le droit des affaires opère systématiquement des rapprochements entre des situations de fait et celles de droit pour appliquer aux premières des règles régissant les secondes, afin que rien de ce qui touche à la vie des affaires ne passe à coté de son orbite. Il s'agit ainsi d'une interprétation extensive et souple du concept de la commercialité, mais plus pour imposer la rigueur que pour faire partager les faveurs du droit des affaires. Chaque opérateur du secteur informel se convainc qu'il échappe au droit et se complaît infiniment dans ce non droit, qui pourtant ne dépasse guère le stade d'une vue de l'esprit car rien n'échappe véritablement à l'empire tentaculaire du système juridique128. En effet, aux termes de l'article 39 AU.DCG, les personnes physiques assujetties à l'immatriculation au RCCM qui n'ont pas requis celle-ci dans les délais prévus, ne pourront se prévaloir de la qualité de commerçant et ne pourront également invoquer leur défaut d'inscription au RCCM pour échapper aux responsabilités et obligations inhérentes à cette qualité. Il s'agit assurément de ce qu'il est convenu d'appeler l'applicabilité discriminatoire du droit des affaires aux commerçants qui baignent dans l'informalité juridique. Cette discrimination repose sur le bon sens et la logique juridique qui voudraient que ceux qui s'adonnent aux activités informelles en échappant aux contraintes qui accablent les opérations du secteur structuré, ou tout simplement en violant les lois et règlements, soient sanctionnés par le droit qui, par essence, veille au respect des dispositions légales, règlementaires et statutaires. Pour faire la

128 MASAMBA MAKELA (R.), op.cit., p. 3.

lumière sur cette applicabilité discriminatoire, mieux rigoureuse, du droit des affaires OHADA au secteur informel, il serait judicieux d'observer le régime applicable aux commerçants d'un tel secteur selon qu'on est (section I) ou non (section II) dans un cadre contentieux.

SECTION I :

LE REGIME APPLICABLE HORS CONTENTIEUX: LA SOUMISSION AUX CONTRAINTES DE LA QUALITE DE

COMMERÇANT.

La qualité de commerçant est généralement tributaire d'un certain nombre d'obligations, notamment les exigences d'ordre fiscal, de compatibilité ou d'éthique commerciale. Intéressons-nous à ces deux dernières exigences129 car en réalité, il est sans doute problématique et délicat d'admettre avec effectivité et efficacité, la soumission du secteur informel aux obligations comptables du commerçant (Para1), la difficulté devenant de plus en plus sérieuse quand il est question du respect des règles d'éthique commerciale dans le secteur informel. (Para 2)

PARA I : LA PROBLEMATIQUE DE LA SOUMISSION DU SECTEUR INFORMEL AUX OBLIGATIONS COMPTABLES DU COMMERÇANT.

Le droit comptable étant un outil important pour toute activité commerciale sérieuse et ordonnée, il n'est pas surprenant de constater que l'article 2 du traité OHADA ait retenu cette matière dans son vaste chantier d'harmonisation. En effet, bien que l'obligation de tenir une comptabilité s'apparente comme une contrainte dans la mesure où elle permet aux tiers en général d'être informés sur le commerçant, et à l'Etat en particulier de mieux

129 Parce que en ce qui concerne la fiscalisation ou l'imposition de l'économie informelle, les pouvoirs publics trouvent toujours les moyens pour prélever les taxes de telle manière que les difficultés ne subsistent que pour la soumission aux obligations comptables et d'éthique commerciale.

l'assujettir à différents impôts et taxes, elle peut être aussi regardée comme un moyen permettant au commerçant de mieux gérer son affaire par une évaluation et un suivi normal de ses activités. Les obligations comptables du commerçant sont l'oeuvre des dispositions combinées de l' AU.DCG et de l'AU.OHCE130. Pour l'essentiel, le commerçant est tenu de disposer d'une comptabilité régulière qui peut servir de moyens de preuve en justice131. Dès lors, on est porté à s'interroger sur la tenue d'une compatibilité régulière et des documents comptables dans le secteur informel (A) ; mais surtout sur la valeur juridique de cette comptabilité dans le secteur informel. (B).

A - LA TENUE D'UNE COMPTABILITE ET DES LIVRESDE COMMERCE DANS LE SECTEUR INFORMEL.

Avant même de se présenter comme une obligation légale, la comptabilité a toujours été une nécessité pour le commerçant afin de connaître l'état de ses finances et pour conserver la mémoire de ses opérations132. La loi l'a par la suite imposée car elle est une source irremplaçable d'informations pour reconstituer l'histoire des activités du commerçant au cas où il viendrait à faire l'objet d'une procédure collective d'apurement du passif. Ainsi, l'art 13 l'AU.DCG oblige tout commerçant, personne physique ou morale à tenir un journal dans lequel sont enregistrées au jour le jour, ses opérations commerciales et un grand livre comportant une balance récapitulative ainsi qu'un livre d'inventaire. Ces livres comptables doivent être tenus conformément aux dispositions de l'AU.OHCE. l'Art 14 AU.DCG poursuit en précisant que le journal et le livre d'inventaire

130 Les règles qui gouvernent la tenue d'une comptabilité sont précisées d'une part par: l'Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation des Entreprises, entré en vigueur dans les Etats parties au Traité de l'OHADA depuis le 1er janvier 2001 pour les comptes "personnels des entreprises ", et à compter du 1er janvier 2002 pour leurs" comptes consolidés et combinés" ; On les nomme globalement " Système Comptable OHADA. Et d'autre part par le Chapitre III du livre I de l'Acte uniforme relatif au Droit Commercial Général.

131 En effet, aux termes de l'Art 15 de L'AU.DCG: « Les livres de commerce visés à l'article 13 cidessus et régulièrement tenus peuvent être admis par le Juge pour constituer une preuve entre commerçants ».

132 AKUETE (P.) et YADO (J.), op.cit., p 83.

doivent mentionner le numéro d'immatriculation au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier de la personne physique ou morale concernée et doivent être côtés et paraphés par le Président de la juridiction compétente, ou par le Juge délégué à cet effet. Ils doivent également être tenus sans blanc, ni altération d'aucune sorte. Alors, si le législateur a les moyens plus ou moins avérés pour veiller au respect de cette exigence liée à la comptabilité dans le secteur formel, dispose-t-il des mêmes moyens pour assujettir les opérateurs du secteur informel à cette contrainte comptable? La réponse n'est pas aisée lorsqu'on fait une fois de plus référence à l'Art 14 sus mentionné pour se rendre compte que le commerçant informel, se définissant par principe à travers l'absence d'immatriculation, ne peut véritablement faire l'objet d'un suivi administratif à travers le rôle du président de la juridiction compétente ou du juge délégué qui, par leur côtes et paraphes, assurent le suivi de la comptabilité dans leurs circonscriptions de compétence. Dès lors, cette contrainte liée à la tenue d'une comptabilité régulière est d'une applicabilité difficile dans le secteur informel, et cela peut d'ailleurs trouver une justification dans le fait que l'informalité juridique qui englobe les opérateurs d'un tel secteur, affecte inéluctablement leur comptabilité qui, rarement respectera les règles de l'art en la matière. On peut ainsi s'interroger sur les documents comptables tels que exigés par l'art 13 de l'AU.DCG et 19 al 1er de l'AU.OHCE et leur respect dans le secteur informel. Pour l'essentiel, le constat de la tenue de la comptabilité dans le secteur informel est loin de la situation de droit exigée, les opérateurs de ce monde tiennent leur comptabilité comme bon leur semble du moment où il y trouve satisfaction. Ils ne tiennent cette comptabilité pour autres personnes qu'eux-mêmes et sont dans la majorité des cas, les seuls à comprendre les écrits qui sont portés sur ce qui tient lieu de livre ou document comptable. Les principes de régularité, sincérité, transparence et tout autre gouvernant la tenue d'une comptabilité n'y sont que des vains mots, sans incidence majeure sur leurs comportements. Ceci se justifie parfois par la petite taille de ces commerces

informels, ou par la nature même de certaines de leurs activités (à l'instar du colportage), qui présentent pour ces derniers une difficulté de tenue régulière de la comptabilité, ou encore par la négligence, l'ignorance et parfois la volonté de troubler le fisc en matière de vérification et d'imposition. Quoiqu'il en soit, la tenue d'une comptabilité et des documents comptables demeure une obligation du commerçant, qui s'impose à tout opérateur économique. L'on est très vite tenté de se questionner sur la valeur juridique d'une telle comptabilité dans le secteur informel.

B - LA VALEUR JURIDIQUE DE LA COMPTABILITE

DANS LE SECTEUR INFORMEL.

Il est admis que la comptabilité sert à conserver la mémoire des opérations passées par le commerçant. Elle constitue donc l'essentiel des moyens de preuve dont la force probante est fonction de la régularité de sa tenue. En effet, aux termes de l'article 15 de l'AU.DCG, « Les livres de commerce visés à l'article 13 ci-dessus et régulièrement tenus peuvent être admis par le Juge pour constituer une preuve entre commerçants. » Quand à leur production en justice, en plus de cet article 15, il faut se référer aux articles 16 de l'AU.DCG et 68 de l'AU.OHCE. Pour le résumé de ces articles, il faut noter que la loi n'accorde aucune valeur probante aux livres de commerce irrégulièrement tenus133. Alors, les documents comptables dans le secteur informel, bien qu'exigés, ne présentent aucune force probante en raison de leur irrégularité naturelle, mais surtout de l'impossibilité pour un tel commerçant de se prévaloir de la qualité de commerçant même si sa comptabilité est bien tenue. L'on comprend très bien que les opérateurs dudit secteur ne puissent invoquer leur propre comptabilité qui pourrait même d'ailleurs être retournée contre eux ; car la preuve des actes juridiques en matière commerciale pouvant se faire par

133 Art 15 AU.DCG et 68 al 1er AU.OHCE

tous moyens et notamment par des présomptions de fait, des mentions peuvent être relevées de ces livres irréguliers pour être opposées aux commerçant informel afin que se manifeste l'application discriminatoire énoncée à l'article 39 AU.DCG.

Quid du respect de l'éthique commerciale dans le Secteur informel ?

PARA II: L'ETHIQUE COMMERCIALE ET SON RESPECT
DANS LE SECTEUR INFORMEL.

Il est peut-être surprenant de constater que les opérateurs informels doivent respecter une éthique commerciale alors même qu'ils transgressent les exigences de l'exercice d'une profession commerciale. Toutefois, en raison de la déloyauté dont font montre certains opérateurs, fussent-ils du secteur informel ou formel, il est important par souci de police et de protection, de soumettre avec exigence tous les opérateurs commerçants à cette éthique commerciale. Cette dernière suppose le respect des règles de la concurrence entre commerçants et la protection des consommateurs. Il serait donc judicieux d'observer ces règles de concurrence (A) et la protection des consommateurs (B) face au secteur informel.

A - LES REGLES DE CONCURRENCE ET LE SECTEUR

INFORMEL.

Les règles de la concurrence s'imposent à tous les commerçants dans un souci d'ordre public économique. Il y a déjà longtemps que l'on a admis que des limites doivent être apportées au principe de liberté du commerce et de l'industrie en général, et celui de la libre concurrence en particulier car, un certain nombre de pratiques tendent à en fausser le jeu. C'est cela qui constitue

la réglementation de la concurrence. Celle-ci doit être entendue dans deux sens car elle renvoie aussi bien à la concurrence déloyale qu'à la concurrence illicite.

- La concurrence déloyale encore appelée droit des concurrents ou "petite concurrence" est le droit qui protège les concurrents contre les fautes dommageables commises à leur encontre par d'autres concurrents.

- La concurrence dite illicite encore appelée « grande concurrence » comporte l'ensemble des règles qui gouvernent le bon fonctionnement de l'économie de marché et assure un certain ordre public économique. Elle sanctionne tous les actes contraires en matière de concurrence.

Le législateur OHADA n'ayant pas règlementé le droit de la concurrence, ce dernier reste régis au plan national par des lois nationales134, et au niveau régional par des dispositions d'ordre régional, si les agissements anticoncurrentiels sont de dimensions communautaires135. Les activités du secteur informel étant généralement de taille réduite, il va de soi qu'il est beaucoup plus question ici de la « petite concurrence » ou concurrence déloyale. En effet, certains auteurs ont vu dans le fait d'exercer le commerce en échappant aux obligations habituelles de commerçant, une concurrence déloyale à l'endroit des commerçants régulièrement installés dont les frais généraux sont plus lourds136. Ceci est encore plus grave si en plus de cette informalité d'exercice, ces commerçants procèdent à des agissements déloyaux. L'essentiel des règles de la concurrence déloyale tire son fondement des articles 1382 et ss du Code Civil. En effet, si l'opérateur du secteur informel se livre à des actes de déloyauté,

134 Au Cameroun par exemple, la concurrence fait l'objet de la loi N° 98/013 du 14 juillet 1998.

135 Sur un plan régional, on pourrait observer dans la zone CEMAC, le Règlement N° 1/99/UEAC/CM/639 du 25 juin 1999 portant réglementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles et le règlement N°4/99/UEAC/CM/639/ du 18 août 1999 portant réglementation des pratiques étatiques affectant le commerce entre Etats membres ; Et dans la zone UEMOA, le règlement N° 02/2002/CM/UEMOA relatif aux pratiques anti-concurrentielles à l'intérieur de l'union, le règlement N°03/2002/CM/UEMOA relatif aux procédures applicables aux ententes et abus de position dominantes dans l'union, le règlement 04/2002/CM/UEMOA relative à la transparence des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques et entes ces Etats et les organisations internationales ou étrangères.

136 GUYON (Y.), op.cit., N°73 ; p. 65.

(confusion, dénigrement, désorganisation, parasitisme...) en s'appropriant indûment des efforts ou de la renommée d'un autre à moindres frais, ou en jetant le discrédit sur un concurrent à travers la tenue des propos malveillants et la diffusion des renseignements inexacts , le droit de la concurrence par le truchement de la responsabilité civile doit s'en saisir et en tirer les conséquences juridiques, afin que de tels opérateurs soient sanctionnés pour leurs agissements au terme d'une action en concurrence déloyale. Les règles de concurrence se trouvent donc imposées aux opérateurs informels, qui ne peuvent se rétracter derrière leur informalité juridique pour se soustraire à cette exigence d'éthique commerciale. La situation devient plus délicate lorsqu'il est question de la protection du consommateur face au secteur informel.

B - LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS FACE

AU COMMERCE INFORMEL.

Il n'est pas maladroit de s'interroger sur la protection des consommateurs face au phénomène croissant du commerce informel dans l'aire OHADA. En effet, le consommateur peut être globalement appréhendé comme toute personne achetant des biens et services pour des usages habituels. Dans l'absence d'une législation communautaire sur le droit de la consommation, l'on peut se référer aux textes nationaux sur la question. Au Cameroun par exemple, la loi 90 /031 / du 10 Août 1990 régissant l'activité commerciale137 permet de faire une lumière sur la protection du consommateur. De là, l'on peut bien tirer des conséquences de droit en ce qui concerne les activités de l'informel. Pour s'en convaincre, il faut se remémorer des exigences (liées à l'information du consommateur, à la réglementation stricte et même à l'interdiction de certaines pratiques commerciales.) qui visent la protection des consommateurs dans cette loi. C'est ainsi que le législateur de 1990 fait reposer sur le commerçant une

137 Juridis Info, N° 5, 1991, p. 5 à 9.

obligation de renseignement. Cette obligation réside dans la publicité des conditions de vente de produits tant en ce qui concerne le prix, que les caractéristiques de la marchandise vendue et même à l'existence des garanties138. Il poursuit en réglementant de façon stricte certaines pratiques commerciales jugées dangereuses pour le consommateur. Ainsi en a été du démarchage qui consiste à proposer à des consommateurs à leur domicile ou dans un lieu non destiné à la commercialisation des biens et services, la vente, la location, la location-vente des biens autres que des produits de consommation courante, ainsi que la fourniture de services. Cette opération de démarchage doit faire l'objet d'un contrat écrit permettant notamment de bien identifier le vendeur, l'objet vendu, le prix, les modalités de payement, le lieu de livraison. Un exemplaire de ce contrat doit être remis au consommateur139. A coté de ces pratiques réglementées, existent d'autres qui sont purement et simplement interdites et qui concernent par exemple la publicité mensongère140, ou toute opération publicitaire présentant les caractéristiques d'une moquerie à moins qu'elle n'impose aux participants aucune obligation d'achat, et plus généralement aucune contrepartie financière de quelque nature que ce soit. Pour l'essentiel, la publicité, tant dans ses formes que son contenu, est réglementée dans un souci toujours de sauvegarde des droits du consommateur141.

Il est donc évident que tout commerçant doit s'incliner devant les exigences d'éthique liées à la protection des consommateurs, les opérateurs de l'informel y sont également soumis ; encore que leurs activités peuvent générer de grandes entorses aux droits de ces consommateurs. Le problème véritable ne sera pas tellement celui de l'exigence de cet assujettissement du secteur informel

138 Concernant le prix, l'Art 20 al 1er de la loi de 1990 prévoit que « Tout vendeur ou prestataire de service doit par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre moyen approprié, informer le consommateur sur le prix. »

139 Loi N°90/031 du 10 Août 1990régissant l'activité commerciale au Cameroun.

140 C'est le fait pour le commerçant de faire de fausses allégations, de donner des présentations ou indications inexactes de sa marchandise de nature à induire en erreur le consommateur.

141 Voir pour le cas du Cameroun, la loi N°2006/018 du 29 décembre 2006 régissant la publicité, Juridis Périodique, N° 69, p. 9 ss.

à ces prescriptions mais, beaucoup plus celui de l'efficacité et du contrôle du respect de l'éthique commerciale par le secteur informel.

Après avoir parcouru l'application du droit des affaires au secteur informel dans un cadre hors contentieux, il serait important d'observer cette même applicabilité dans un cadre contentieux, pour davantage observer la rigueur du droit OHADA aux opérateurs informels.

SECTION II :

LE REGIME APPLICABLE DANS UN CADRE CONTENTIEUX

La qualité de commerçant, bien que tributaire d'un vaste ensemble d'obligations, s'accompagne tout de même d'une gamme d'avantages ou de privilèges que la loi aménage en faveur des commerçants pour faciliter la conduite de leurs activités. Ces privilèges s'observent avec plus de clarté dans le cadre d'un contentieux avec un tiers. Le commerçant de l'informel se verra écarté du bénéfice de nombreuses dispositions qui lui auraient été fort utiles dans un quelconque contentieux (Para I) ; plus important sera la question de l'application du droit des procédures collectives à son égard (Para II).

PARA I : L'IMPOSSIBLE BENEFICE DES PRIVILEGES DE

PROCEDURE EN MATIERE COMMERCIALE.

Le régime procédural dans un contentieux en matière commerciale est spécifiquement déterminé en raison de la nature des professions commerciales, et surtout par souci d'efficacité et de célérité, dans un monde où délicatesse et temps coûtent cher. En effet, il est aménagé à l'égard du commerçant, des privilèges de procédure comme on peut le constater d'emblée par le droit pour lui d'être jugé devant un tribunal de commerce en principe composé de commerçants et de magistrats rompus à la pratique des affaires, et qui sont plus

au fait des pratiques commerciales que les juges civils. Malgré l'inexistence des tribunaux consulaires dans les Etats membres de l'OHADA, la théorie n'en perd grandement pas son importance puisque devant les juridictions de droit commun, s'appliquent des règles propres au droit commercial ; bien qu'on puisse douter du professionnalisme de ces magistrats de droit commun en ce qui concerne la matière commerciale. En toute hypothèse, le commerçant de l'informel perd ce droit d'être jugé selon les formes propres au droit commercial, il ne pourra l'être que si l'autre partie le désire afin d'y tirer des avantages qui joueront sans doute contre ce commerçant dans le déroulement et l'issu du procès.

De même, le commerçant de l'informel pourrait perdre le bénéfice des clauses compromissoires. Ce sont des stipulations obligeant les parties à soumettre leurs éventuels litiges à un arbitre prédéterminé et se distinguent du compromis en ce qu'elles préexistent au litige. Les clauses compromissoires n'étaient licites qu'entre commerçants, si l'un d'eux ne l'était que de fait, il ne pouvait donc se prévaloir de la clause et son adversaire avait le choix de l'invoquer ou non.142 En déclarant à l'article 1er de son AU.DA que ses dispositions s'appliquent à tout arbitrage, le législateur OHADA entend faire disparaître la distinction qui existait entre l'arbitrage commercial et l'arbitrage civil. Par conséquent, la clause compromissoire, naguère réservée en droit interne à l'arbitrage commercial, peut s'appliquer aussi bien en matière civile qu'en matière commerciale, ou tout simplement inciter l'application du droit de l'arbitrage OHADA, fut-elle une clause entre un commerçant régulier et un commerçant informel.

La perte de ces privilèges de procédure s'observe avec plus d'importance quand il est question des règles de preuve et de prescription (A) ou encore du régime des baux commerciaux. (B)

142 ELHOUEISS (J.L), « le commerçant de fait », op.cit., p. 5.

A - LES REGLES DE PREUVE ET DE PRESCRIPTION L'examen des règles de preuve (1) précèdera celui des exigences liées à la prescription (2)

1° Les règles de preuve.

Contrairement au droit civil où la preuve est réglementée, le droit commercial préconise la liberté de preuve des actes juridiques. Cette liberté de preuve est exprimée par l'article 5 AU.DCG qui dispose que : « Les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à l'égard des commerçants ». Le législateur OHADA fait une application singulière de cette règle en reconnaissant qu'en l'absence d'un écrit, le contrat de vente commerciale peut se prouver par tout moyen y compris par témoin143, le contrat d'intermédiaire de commerce aussi144. Le fondement juridique de la liberté de preuve repose sur la rapidité, la confiance et le caractère répétitif des opérations commerciales qui sont conclues souvent dans les mêmes conditions et entre les mêmes personnes, un écrit signé par les deux parties se présenterait comme une formalité inutile145. Alors la liberté de preuve facilite la rapidité des transactions car le commerçant n'aura pas à fournir uniquement un acte écrit pour prouver l'acte juridique. Il pourra en effet faire usage de tout moyen de preuve (témoignages, copies, livres de compte, usages...) et, les dispositions du Code Civil en la matière ne lui sont pas applicables. Toutefois, si le commerçant est de fait ou de l'informel, il perdra le bénéfice de cette liberté de preuve et sera soumis au formalisme de ce code civil en matière de règles de preuve. Ce qui pourra poser quelques problèmes puisque dans la majorité des cas, le commerçant n'aura pas de preuve préconstituée. Mais que faire ? Puisque ce dernier doit subir son état et se voir écarter des avantages qui accompagnent les professions commerciales comme c'est également le cas pour les règles liées à la prescription.

143 Art 208 AU.DCG.

144 Art 144 al 2 AU.DCG.

145 GUYON (Y.), op.cit., N°78 ; p. 71.

2° Les règles de prescription

La rapidité des opérations commerciales commande que le délai de la prescription extinctive ne soit pas en principe celui de droit commun qui est de 30 ans. En France, l'article 189 bis du Code de Commerce, introduit seulement en 1948 et qui préconisait la prescription décennale, harmonisait ainsi le délai de cette prescription avec le délai de conservation des livres de commerce qui est de 10ans146. L'idée de cette prescription plus courte part du fait qu'on ne peut pas demander au commerçant de conserver plus longtemps la preuve des actes qu'il accomplit alors qu'il ne lui est pas souvent exigé d'écrits. De plus la sécurité et la rapidité des transactions commerciales s'accommodent mal de la nécessité de faire peser indéfiniment la menace des poursuites judiciaires sur les débiteurs147. Il s'agit ainsi de mettre fin le plus rapidement possible à l'insécurité dans laquelle se retrouveraient les parties, anxieuses l'une et l'autre après la conclusion d'un contrat à l'effet de le voir invalidé par la suite. L'article 18 AU.DCG est venue réduire ce délai de prescription pour le ramener à 5 (cinq) ans. D'après cet article, « Les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants, ou entre commerçants et non commerçants, se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes. » Comme le laisse entrevoir cette disposition, il est des cas où l'obligation peut être éteinte avant le délai de 5 ans. C'est ainsi que l'article 274 du même acte uniforme prévoit que le délai de prescription en matière de vente commerciale est de 2 (deux) ans.

Cette prescription extinctive préférentielle s'applique aux obligations nées lors du commerce entre commerçant et non commerçant. Si le commerçant est de l'informel c'est à dire s'il n'est pas immatriculé, la sanction est le passage à la prescription trentenaire de droit commun148. Il perd donc en pareil cas, le

146 AKUETE (P.) et YADO (J.), op.cit., N° 125, p. 75

147 Ibid

148 Com 2 mars 1993, RTD-CIV., 1993, N° 283.

régime favorable de la prescription courte. La privation du bénéfice de la propriété commerciale accentue cette rigueur.

B - LA PRIVATION DU REGIME DES BAUX

COMMERCIAUX.

Le commerçant non immatriculé ne pourra pas bénéficier du régime de faveur de ce qu'il est convenu d'appeler improprement la propriété commerciale. Cette dernière désigne en effet, le droit reconnu au preneur d'un bail commercial, qui après avoir exploité après un certain nombre d'années son fonds de commerce, dans le lieu loué en respectant les obligations souscrites , a droit au renouvellement de son bail. A défaut et sauf dans les cas où il est reconnu au bailleur un droit de reprise, le locataire a une indemnité d'éviction. La perte du bénéfice des dispositions sur la propriété commerciale est un handicap certain pour ces commerçants informels puisque la constance dans la localisation de l'activité est un facteur essentiel pour la conservation de la clientèle149.

Qu'en est-il de l'applicabilité des procédures collectives aux commerçants du secteur informel ?

PARA II : L'APPLICATION DU DROIT DES PROCEDURES COLLECTIVES AUX COMMERÇANTS INFORMELS.

L'Acte Uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, publié au journal officiel de l'OHADA le 1er juillet 1988150 et entré en vigueur le 1er janvier 1999, vient reformer l'état du droit des procédures collectives dans les pays de la zone franc en substituant un droit uniforme aux législations nationales antérieures, généralement vétustes,

149 Voir supra, p. 52

150 Voir J.O., OHADA, N°7, 1er juillet 1998, p. 13.

incertaines et disparates151. Comme tous les autres actes uniformes de l'entreprise OHADA, celui sur les procédures collectives d'apurement du passif a été salué par les praticiens du droit, acclamé par les entreprises et félicité par toutes les parties prenantes à des opérations commerciales, en raison du compromis qu'il réalise entre le paiement des créanciers, le paiement des salariés et le sauvetage de l'entreprise. C'est sans doute dans la mêlée de cette appréciation positive que certains auteurs ont avancé que l'Acte Uniforme organisant les procédures collectives a été rédigé de telle sorte qu'il puisse « régler le maximum de questions ».152 Toutefois, cette exaltation de l'AU.PCAP ne doit en rien occulter les quelques critiques qui peuvent être dirigées à l'endroit des experts de l'oeuvre OHADA. En effet, l'Acte Uniforme est muet sur l'épineuse question du secteur informel si important en Afrique mais qui, pour l'essentiel, n'est pas à mesure de supporter le coup et la complexité de la procédure153. On est tenté d'objecter au législateur OHADA d'avoir manqué d'originalité et de réalisme sur cette question de l'informel, ou tout simplement de n'avoir pas saisi l'occasion pour manifester avec force détails, le caractère adapté du droit OHADA aux réalités africaines, comme le rappellent les juristes africains dans une formule aux allures génériques tirées de l'article 1er du traité OHADA154.

La question de l'application des procédures collectives aux opérateurs du secteur informel présente une complexité particulière, car dans les précédents cas, (concernant la perte des privilèges des procédures), il apparaissait nettement

151 SAWADOGO (F.M.) Présentation du Droit des procédures collectives, in " OHADA-Traité et Actes Uniformes commentés et annotés", juriscope, 2002, p. 811.

152 SAWADOGO (F.M), Présentation du Droit des procédures collectives, in " OHADA-Traité et Actes Uniformes commentés et annotés", juriscope, 1999, p. 877: Dans l'ensemble, on peut l'apprécier (l'Acte Uniforme) positivement du fait de l'effort fait pour résoudre le maximum de questions comme celles ayant trait aux procédures collectives internationales ou à l'ouverture d'une seconde procédure. ».

153 SAWADOGO (F.M), Présentation du Droit des procédures collectives, in " OHADA-Traité et Actes Uniformes commentés et annotés", juriscope, 2002, P. 818.

154 C'est à la lumière de l'article 1er du Traité que l'on peut observer chez la quasi-totalité des juristes africains l'affirmation selon laquelle, l'harmonisation du droit des affaires OHADA se traduit principalement par l'adoption des règles simples, modernes et adaptées aux économies nationales.

que la norme était éditée en faveur du commerçant. Il était dès lors évident que ces règles ne devaient pas bénéficier aux commerçants qui ne sont pas immatriculés au RCCM. En matière de procédures collectives, rien n'est aussi simple et clair car la jurisprudence en la matière fait état d'une application distributive des procédures collectives aux opérateurs de l'informel (A) ; ce qui peut conduire à discuter des incertitudes liées à cette application des procédures collectives au secteur informel, en raison de l'esprit général qui gouverne de telles procédures. (B).

A- UNE APPLICATION DISTRIBUTIVE DES PROCEDURES COLLECTIVES AUX OPERATEURS DE L'INFORMEL

Il s'agit de l'application sélective du droit des procédures collectives aux commerçants informels. A l'époque où la faillite était jugée infamante155, les tribunaux n'hésitaient pas à la prononcer à l'égard des commerçants de fait156. Il aurait été injuste que la personne négligente soit mieux traitée que le commerçant immatriculé, la logique de la théorie du commerçant de fait était fort respectée157. Actuellement cette raison n'est plus pertinente, le redressement n'est pas une sanction; il permet de bénéficier des reports d'échéance accordés par les créanciers et autorisés par le tribunal. Son application aux commerçants de fait ou de l'informel peut donc être tout autant un avantage qu'une contrainte.158 En France, cette position jurisprudentielle a été implicitement consacrée par la loi n°85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des biens. L'article 189 de cette loi accorde en effet au tribunal la faculté de prononcer la faillite personnelle de « toute personne ayant exercé une activité commerciale contrairement à une interdiction prévue par la

155 CHAPUT (Y.), La faillite, PUF, 1981, p. 9.

156 Com, 2 février. 1970, op.cit.

157 ELHOUEISS (J.L), op.cit., p. 6.

158 GUYON (Y.), Droit des Affaires, T 2, economica, 6e éd, 1997, N° 1097.

loi » 159, or puisque ce texte renvoie expressément à l'article 185160 de la même loi, son application suppose que l'intéressé ait préalablement été l'objet d'un redressement judiciaire. La position du législateur OHADA sur le sujet est bien semblable. En effet, l'article 196 de l'AU. PCAP accorde à la juridiction compétente de prononcer à toute époque de la procédure, la faillite personnelle des personnes qui ont commis des actes de mauvaise foi ou des imprudences inexcusables, ou qui ont enfreint gravement les règles et usages du commerce tels que définis par l'article 197. Il faut préciser que ce dernier article dispose que sont présumés actes de mauvaise foi, imprudences inexcusables ou infractions graves aux règles et usages du commerce, l'exercice d'une activité commerciale contrairement à une interdiction prévue par les actes uniformes ou par la loi de chaque Etat partie161.

Le problème est qu'une faillite ne concerne pas seulement le failli, il faut également tenir compte des intérêts d'autres parties principalement les créanciers et même les salariés. En effet l'exclusion du commerçant informel ou illicite du champ des procédures collectives priverait les premiers des procédures de concours et les seconds des dispositions des articles 95et 96

159 Cet Art 189 de la loi du 25 jan 1985 disposait en substance que: « A toute époque de la procédure, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article 185 contre laquelle a été relevé l'un des faits ci-après :

1. Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi :

2. Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

3. Avoir souscrit, pour le compte d'autrui, sans contre-partie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale ;

4. Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers ;

5. Avoir omis de faire, dans le délai de quinze jours la déclaration de cessation de paiement. ».

160 Cet Art dispose en effet que: « Lorsqu'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les dispositions du présent titre sont applicables:

1° Aux personnes physiques exerçant la profession de commerçant, d'artisan ou d'agriculteur ;

2° Aux personnes physiques, dirigeants de droit ou de fait de personnes morales ayant une activité économique ;

3° Aux personnes physiques, représentants permanents de personnes morales, dirigeants des personnes morales définies au 2° ci-dessus. ».

161 Art 197 al 1er AU.PCAP.

AU.PCAP qui aménagent le privilège des salariés162. Comment donc protéger les intérêts de ces personnes sans que le commerçant informel n'en tire avantage? Le problème est complexifié par le fait que le commerçant informel ne bénéficie pas des règles relatives aux baux commerciaux, plus que tout autre, il est donc exposé au risque de la perte de clientèle et par voie de conséquence à la faillite. Pour dissiper cette difficulté il faudrait sans doute prendre en renfort la solution jurisprudentielle française affirmée dans un arrêt de la chambre commerciale du 25 mai 1997163. Cet arrêt prend en compte le fait que l'ouverture d'une procédure peut être requise par quatre intervenants: le débiteur commerçant de fait, les créanciers, le procureur de la république ou le tribunal qui dispose en la matière d'une très rare capacité d'auto saisine164. Selon cet arrêt, seuls les trois derniers peuvent demander le redressement de fait, le débiteur ne pouvant plus selon la cour, réclamer lui-même le bénéfice du redressement judiciaire165. Il s'agit donc ici de ménager créanciers et salariés sans conférer d'avantages aux commerçants de fait. Ainsi, le débiteur commerçant informel ne pourra pas bénéficier du règlement préventif qui est une procédure destinée à éviter la cessation d'activité et à permettre l'apurement de son passif au moyen d'un concordat préventif166. Il ne se verra pas non plus appliquer les dispositions qui aménagent le redressement judiciaire car ce dernier à pour but principal de restructurer l'activité du commerçant, de le

162 En effet, les Articles 95 et 96 AU.PCAP précisent respectivement que: « Les créances résultant du contrat de travail ou du contrat d'apprentissage sont garanties, en cas de redressement judiciaire ou de liquidation des biens par le privilège des salaires établi pour les causes et le montant définis par la législation du Travail et les dispositions relatives aux sûretés. »

« Au plus tard, dans les dix jours qui suivent la décision d'ouverture et sur simple décision du Jugecommissaire, le syndic paie toutes les créances super privilégiées des travailleurs sous déduction des acomptes déjà perçus.

Au cas où il n'aurait pas les fonds nécessaires, ces créances doivent être acquittées sur les premières rentrées de fonds avant toute autre créance.

Au cas où lesdites créances sont payées grâce à une avance faite par le syndic ou toute autre personne, le prêteur est, par la même, subrogé dans les droits des travailleurs et doit être remboursé dès la rentrée des fonds nécessaires sans qu'aucune autre créance puisse y faire obstacle. ».

163 Rev. Soc., 1997, p. 601.

164 Ibid.

165 ELOUIESS (J.L), op.cit., p. 7.

166 Art 2 al 1 AU.PCAP.

sauver de ses difficultés afin qu'il retrouve meilleure fortune. Puisqu'il n'est pas question d'aider un commerçant informel à bénéficier des avantages d'une telle procédure, le droit des procédures collectives fera abstraction de ses dispositions pour lui appliquer uniquement celles qui s'apparentent comme des sanctions. A la fin, c'est la liquidation des biens qui est appliquée à de tels commerçants car cette procédure à pour seul objectif le désintéressement du ou des créanciers. Cette solution logique peut bien être exploitée dans le cadre de l'OHADA en ce qui concerne l'applicabilité des procédures collectives au secteur informel.

Toutefois une difficulté pourra se faire ressentir car l'article 26 AU. PCAP dans la continuité de l'article 25 AU.PCAP, dispose que le débiteur doit déposer le bilan dans les trente jours suivant la cessation des paiements. L'arrêt précité posera problème car il interdira au débiteur ce que la loi lui impose. En toute clarté, il s'agira de l'application des procédures collectives aux opérateurs informels à titre de sanction. D'où l'inquiétude de savoir si l'application de ces procédures à titre répressif ne serait pas incertaine parce que difficilement compatible avec l'esprit général des procédures collectives167.

B - LES ZONES D'OMBRE AUTOUR DE LA SOUMISSION DU SECTEUR INFORMEL AUX PROCEDURES COLLECTIVES

L'application des procédures collectives au secteur informel est troublante et complexifiée car, si l' application à titre répressive telle que susmentionnée, peut s'avérer plus ou moins justifiable et logique pour l'économie souterraine, elle demeure critiquable en ce qui concerne l'informel de la débrouille ou de la survie. N'aurait-il pas été nécessaire d'envisager des procédures propres aux opérateurs de ce dernier volet du secteur informel ? Ces

167 TCHEUMALIEU FANSI (M.R), L'application des procédures collectives aux personnes morales de droit privé non commerçants, Mémoire de D.E.A., Dschang, 2001, p. 8.

procédures ne serviraient-elles pas aussi à assainir ce milieu propre au secteur informel168.

Cette dernière interpellation est encore plus méditative quand on se rend compte de l'option prise par le législateur OHADA, et selon laquelle les procédures collectives ne sont pas ouvertes uniquement aux seuls commerçants, mais aussi aux groupements non commerçants169; Un raisonnement plus poussé lui aurait sans doute permis d'inclure dans cette extension le secteur informel. Omission législative ou prudence juridique? Il n'est pas aisé d'y répondre. En tout cas, cette situation du droit OHADA sur la question peut susciter des compréhensions:

D'abord un grand doute existerait sur l'aboutissement normal des procédures collectives dans le secteur informel dit de la survie car, les opérateurs d'un tel monde disposent des actifs souvent résiduels. A quoi servirait de déclencher une procédure collective pour un actif dérisoire170. Il serait donc inutile de poursuivre une procédure qui est source de frais supplémentaires171, et c'est à juste titre que l'article 173 AU. PCAP donne la possibilité au tribunal et, ou à la suite de la demande de toute personne, de prononcer la clôture de la procédure pour insuffisance de fonds172.

Ensuite, il y aurait d'énormes imprécisions sur le point de départ de la cessation des paiements, sans oublier les difficultés liées à la prévention des crises. En effet, l'intérêt d'une comptabilité régulière est certain et concourt à l'établissement de la transparence dans la conduite de toute activité commerciale ; or les opérateurs du secteur informel se détournent souvent de l'exigence de la tenue d'une comptabilité normale et sincère. Toute chose

168 (M.R) TCHEUMALIEU FANSI, op.cit., p. 6.

169 Article 2 AU.PCAP.

170 TCHEUMALIEU FANSI (M.R), op.cit., p. 21.

171 POUGOUE (P.G) et KALIEU (Y.), L'organisation de la procédure collective d'apurement du passif OHADA, PUA, 1999, p. 90.

172 C'est sans doute ce qui justifie que certaines législations Européennes exonèrent des procédures collectives, les petits commerçants pour ne les soumettre qu'a des procédures sommaires et accélérées. Voir TCHEUMALIEU FANSI (M.R), op.cit., p. 20.

nécessaire pour l'évaluation des risques qu'ils courent et même des éventuelles mesures adéquates à prendre pour anticiper sur ces difficultés. Il est certain que l'efficacité d'une procédure dépend du moment auquel les difficultés ont été dépistées. L'imprécision sur le point de départ de la cessation des paiements173 dans le secteur informel rendrait difficile l'application des inopposabilités de la période suspecte174.

Toutefois, ces difficultés et questionnements ne commanderaient pas au législateur OHADA d'être moins actif sur la question, il devrait prendre les devants afin de clarifier ces inquiétudes en ce qui concerne la problématique du secteur informel. Encore que ce dernier s'avère être incontournable dans les économies africaines, tant il est vrai qu'il se présente comme un régulateur de pauvreté et de crise. Il serait donc judicieux et nécessaire pour le législateur OHADA de prendre en compte le secteur informel dans son entreprise juridique à l'effet de rechercher le juste équilibre entre, rigueur, protection et même normalisation de ce secteur.

173 La cessation des paiements est une condition de l'ouverture des procédures collectives. Elle fait désormais l'objet d'une définition légale figurant à l' Art 25 AU.PCAP. C'est la situation où le débiteur ne peut faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Il n'est pas toujours aisé de distinguer cette cessation des paiements de la situation difficile mais non irrémédiablement compromise tant la frontière entre les deux n'est pas claire. Voir à ce sujet, MOHO FOPA (E.A), Réflexions critiques sur le système de prévention des difficultés des entreprises de L'OHADA, Mémoire de D.E.A., Dschang, 2006, p. 43.

174 La période suspecte est la période comprise entre la date de la cessation des paiements et la date du jugement d'ouverture. Il s'agit d'une période de crise qui rend tous les actes du débiteur passés en ce moment suspects de fraude. Cela s'explique par le fait que le débiteur « aux abois », a tenté de se livrer à des actes frauduleux dans les jours précédents le jugement d'ouverture. Les Art 67 à 71 AU.PCAP rappèlent les règles applicables à de tels actes en distinguant entre les inopposabilités de droit et les inopposabilités facultatives.

CHAPITRE II

LA NECESSAIRE PRISE EN COMPTE DU SECTEUR

INFORMEL PAR LE LEGISLATEUR OHADA : Vers la recherche d'un équilibre entre rigueur, protection, et normalisation du secteur informel.

Le secteur informel en Afrique Noire se présente dans la grande majorité des cas comme une stratégie de débrouillardise et de survie. Il n'est plus nécessairement considéré comme marginal car, au delà de la diversité des points de vue sur la question, les auteurs s'accordent pour affirmer la réalité des articulations de l'informel avec le secteur moderne dont il se nourrit, s'approvisionne, et dont il en dépend énormément. Face à l'accélération de la crise des modèles de développement dans les pays d'Afrique sub-saharienne, l'informel est apparu comme un ensemble dynamique peut-être le mieux à même d'assurer le plus grand nombre de créations d'activités et d'emplois. Ainsi, n'est-il pas un élément important peut-être essentiel pour l'avenir de l'Afrique ? Le fait que la nouvelle politique de développement de la Chine encourage l'émergence d'un secteur informel est une invite supplémentaire à réfléchir sur la question. C'est ce qui justifie sans doute le changement d'attitude des Etats et des Organisations Internationales qui s'interrogent désormais sur les potentialités créatrices de ces pratiques en matière d'emplois, de revenus et de biens et services, tous régulateurs de la pauvreté.

Le secteur informel serait à divers égards, un amortisseur de crise témoignant ainsi de grandes capacités d'ingéniosité et d'adaptation des africains face aux situations changeantes et déroutantes d'une société en constante

dégradation. Il constituerait même dans de nombreux cas, un préalable à l'efficience des grandes activités, organisations ou entreprises.

Bien que présentant certains atouts, il existe toutefois des difficultés pour les Etats à promouvoir la dynamique de l'informel : Comment résoudre la contradiction du refus du « laisser-faire » sans tuer « la poule aux oeufs d'or » dans un contexte où l'informel aide à survivre mais frôle en permanence l'illégalité ? Comment prendre en compte ce secteur informel sans faire prévaloir le non droit ? Cette interrogation interpelle également le législateur OHADA qui doit pouvoir en donner une réponse satisfaisante. En effet, la loi est un moyen permettant de réguler les rapports sociaux et les conflits d'intérêt, mais aussi un levier de protection pour les plus faibles. Le risque est certes grand de créer une administration à deux vitesses ou un système juridique d'apartheid s'opposant aux principes d'universalité du droit, mais l'on ne devrait pas perdre de vue cette réalité vivante de l'informel lorsqu'elle est animée par le besoin de survie, dans un contexte marqué par l'échec des plans de développement en Afrique au sud du sahara.

C'est peut-être vrai que le secteur informel ne mérite pas un excès d'honneur175, mais il ne doit pas pour autant souffrir d'une criarde indignité. Il est question de rechercher le juste milieu, et cela permettra sans doute au législateur OHADA de faire preuve de réalisme (section I), et même d'oeuvrer à la normalisation du secteur informel dans les Etats membres de l'organisation (section II).

175 HUGON (P), les politiques d'appui au secteur informel en Afrique in « Tiers monde:L'informel en question.» Op.cit., p. 61.

SECTION I :

L'APPEL AU REALISME DU DROIT DES AFFAIRES OHADA

Le réseau informel est le témoignage de la vitalité de l'Afrique d'aujourd'hui, de sa capacité à s'adapter à des situations nouvelles, à des situations jamais vues dans le monde176. Il est le plus souvent ignoré des gouvernements africains qui sont impuissants à le manipuler, et il est peu compris des occidentaux car il est difficile à saisir et à définir. Pourtant, il s'agit d'une réalité sociologique qu'il faut pouvoir ménager sans créer une frustration des plus faibles et des moins nantis. Il n'est plus question comme le souhaitent certains auteurs peu avertis, de combattre le secteur informel, de le détruire et de l'abattre à tout prix ; mais beaucoup plus de repenser un processus évolutif de ce secteur pour une intégration dans les stratégies de développement socioéconomique de l'Afrique. Les études sur la question ont conduit à relever les fonctions macro-économiques et sociales du secteur informel dans l'espace OHADA (Para I), toute chose qui devrait emmener le législateur OHADA à aménager un régime particulier pour les commerçants de l'économie de la survie.(Para II)

PARA I : FONCTIONS MACROECONOMIQUES ET SOCIALES DU SECTEUR INFORMEL DANS L'ESPACE OHADA.

L'échec des politiques publiques et des plans de développement a généré une dégradation accélérée de la situation économique des pays d'Afrique Noire. La population s'est trouvée obligée de concevoir des moyens alternatifs à cette crise. De là, le secteur informel est venu à leur rescousse en leur offrant des possibilités d'occupation, mais surtout des moyens pour satisfaire les besoins existentiels. Il est donc reconnu aujourd'hui au secteur informel un atout

176 GIRI (J), L'Afrique en panne. « Vingt cinq ans de «développement », ed Karthala, Paris, 1986, p. 115.

d'amortisseur de pauvreté (A) mais surtout sa qualité de palliatif au non emploi. (B)

A - LE SECTEUR INFORMEL COMME AMORTISSEUR

DE LA PAUVRETE.

Il y a longtemps que les indicateurs de croissance dans les pays d'Afrique Noire sont au rouge, signalant la dégradation d'une société et l'accélération de la pauvreté. Le constat alarmant en est que la grande partie de la population de cet espace vit avec moins de un (1) Euro par jour, dans un contexte où santé, éducation et nutrition coûtent de plus en plus cher. Les experts internationaux ont toujours été sidérés devant cette situation lorsqu'ils se posent la question de savoir comment cette population réussit à se nourrir, à se soigner, à se vêtir, bref à survivre. La réponse à cette inquiétude est donnée par le secteur informel. Ce dernier apparaît comme un régulateur de crise et de pauvreté permettant à la population d'initier différentes activités génératrices de revenus. C'est dans cet esprit, animé par le besoin profond d'assurer leur survie que des milliers de petits commerçants achètent et vendent tout ce qui peut être vendu et même apparemment ne peut l'être.

La société en général en bénéficie car ces commerçants choisissent le gagne pain quotidien à travers le travail et le labeur, ce qui permet de contribuer à l'efficience de l'économie toute entière. Le secteur informel s'est ancré dans nos habitudes et est devenu par là même une originalité permettant d'identifier les sociétés d'Afrique. Il faudrait pour s'en convaincre, imaginer la disparition de ces biens et services qu'on se voit régulièrement proposer aux moindres pas de la rue, soit par les colporteurs ou par des personnes installées et exerçant des activités quelconques. Une telle situation présenterait à n'en point douter un manque pour une société habituée à ces genres activités. Il est donc certain que le secteur informel occupe une place de choix dans le vécu quotidien des africains, encore qu'il se présente comme un important palliatif au non emploi.

B- LE SECTEUR INFORMEL COMME PALLIATIF AU

NON EMPLOI

Les chercheurs en sciences sociales ont de tout temps démontré qu'un homme qui croise les bras et qui n'exerce aucun emploi ou aucune activité, est un danger pour la société toute entière. Les économistes sont plus explicites sur la question car ils présentent le chômage comme une source de désagrégation de l'économie, et surtout un gaspillage des ressources humaines s'accompagnant d'une sous utilisation de la population active. Chaque société a donc le devoir d'assurer l'emploi à tout le monde, et, devant son incapacité à le faire, elle devrait se réjouir des solutions de rechange qui lui sont proposées en faveur de la création d'initiatives privées ; ceci étant une soupape de lutte à priori contre la prostitution, le banditisme, la consommation de drogue et toutes ces pratiques incommodes qui guettent l'être oisif en inactivité. Il est reconnu de nos jours que le secteur informel récupère presque tous ceux qui, pour une raison ou une autre, n'ont pas pu avoir une place dans le secteur dit structuré, ce qui fait de lui un espace offrant le pus grand nombre d'emplois. Les pouvoirs publics en ont pris conscience, les organisations internationales s'y sont ralliées dans le cadre d'une plus grande considération du secteur informel à travers des politiques d'appui ; toute chose qui devrait inciter le législateur OHADA à intervenir lui aussi dans le sens de l'aménagement d'un régime particulier pour ces opérateurs de l'économie de la survie.

PARA II : L'AMENAGEMENT D'UN REGIME PARTICULIER POUR LES COMMERÇANTS DE L'ECONOMIE DE LA SURVIE

Il ne serait pas exagéré de dire que les dispositions du droit OHADA, à moins d'être inadaptées, sont d'une application incertaine et malaisée en ce qui concerne l'économie informelle de la survie ; car à l'origine, le droit OHADA a ignoré cet aspect de la vie des affaires. On pourrait sans crainte conclure comme

certains auteurs, en l'inadaptation de ce droit à l'évolution économique en faveur de l'existence et de l'évolution accrue d'un secteur incontournable177. Le droit OHADA doit faire preuve non seulement de rigueur mais aussi et surtout d'humanisme. Les opérateurs du secteur informel de la survie sont en majorité des personnes d'un revenu très faible, vivant parfois en dessous du seuil de pauvreté et présentant de ce fait une fragilité et une vulnérabilité qui ne demande que la protection. Les constitutions des pays d'Afrique ne se sont-elles pas engagées à garantir la protection des minorités et des classes sociales défavorisées et vulnérables ? Il est donc question d'affronter avec beaucoup de management cette réalité sociologique consubstantielle à l'état même de nos cités. Le droit OHADA devrait ainsi en tenir compte et penser un moyen d'identification de ces derniers (A), mais surtout en aménageant une protection à leur égard. (B)

A - A TRAVERS UNE IDENTIFICATION

Lorsque l'adage Latin « Nemo auditur ignorarem legem » retentit d'un écho immense chez les juristes et les citoyens en rappelant par une formule de mise en garde que « nul n'est censé ignorer la loi », c'est sans doute parce que la loi elle-même n'est censée ignorer personne ; elle est faite pour tous et par tous, et doit servir tout le monde. C'est en cela qu'on dit de la loi qu'elle est générale et impersonnelle. Le système juridique devrait donc autant que faire se peut, avoir une idée de tous ceux qui vivent en société afin de ne pas être source de marginalisation ou accusé tout simplement d'ignorance coupable.

Il serait ainsi judicieux en ce qui concerne les opérateurs du secteur informel de la survie, de définir une politique pour leur identification, et ceci à travers des procédures simplifiées. Ceci permettrait d'avoir une idée de leur nombre, de leur comportement et activités dans le monde des affaires. Une

177 FONE (A.M), op.cit., P. 128.

difficulté pourrait se faire ressentir sur la détermination des critères

d'identification de l'économie de la survie. Il faudrait peut être prendre en renfort les dispositions du décret N° 93/720/PM du 22 novembre 1993 qui fixent les modalités d'application de la loi N° 90/031 du 10 août 1990 régissant l'activité commerciale au Cameroun, pour appréhender le commerce de la survie. En effet, ce décret avait opéré une répartition des commerçants en trois (3) groupes, sur la base du volume et de la nature des produits commercialisés, du lieu d'exercice de l'activité commerciale, de l'importance et la régularité de cette activité178. C'est ainsi que le groupe N° III a été réservé aux seuls nationaux qui exercent les « petits métiers », à savoir les commerçants ambulants, les vendeurs à la sauvette, les buyam-sellam et les exploitants de gargotes travaillants seul ou aidés par les membres de leur famille179. L'article 8 dudit décret poursuivait en exonérant ces commerçants du groupe III de la formalité d'immatriculation à l'ancien registre du commerce et au registre statistique, et en créant à leur égard une procédure simplifiée d'immatriculation sur un répertoire communal ouvert auprès de la commune du lieu d'exercice de leurs activités.

Le formalisme du RCCM étant rigoureux, on pourrait penser comme certains auteurs, à la suite dudit décret, à un recensement de ces commerçants de la survie dans un fichier spécial tenu au niveau de la commune du lieu où le courage d'entrer dans le monde difficile des affaires dans un contexte où la crise économique ne leur permet pas d'accéder à des crédits consistants pour s'établir comme commerçant du secteur formel. Ainsi ce ne serait que justice si le droit saisissait cet aspect de l'informel pour protéger ceux qui ont refusé la facilité par le vol, et choisi le dur labeur180. Cette protection consisterait donc à ne plus leur appliquer le droit des affaires seulement pour sa rigueur mais aussi et surtout

178 NYAMA (J.M.), « Décret N° 93/720/PM du 22 novembre 1993 fixant les modalités d'application de la loi N° 90/031 du 10 août 1990: De la raison à la démesure », Juridis Info, N° 18, 1994, p. 61.

179 Art 4-c du décret N° 93/720/PM du 22 novembre 1993 fixant les modalités d'application de la loi N° 90/031 du 10 août 1990. V Juridis Info N° 16, 1993, p. 9

180 FONE (A.M), op.cit., p. 129.

pour ses faveurs, par exemple en leur permettant de bénéficier dans le cadre d'un éventuel contentieux avec un tiers commerçant ou non commerçant, des règles de liberté de preuve et de courte prescription. Il faudrait également trouver un moyen pour assurer la protection des opérateurs en ce qui concerne les baux commerciaux car, l'assurance du renouvellement de leur bail renforcerait à coup sûr leur sécurité.

SECTION II %
VERS LA NORMALISATION DU SECTEUR INFORMEL DANS

L'ESPACE OHADA.

La tendance actuelle qui favorise la prise en compte du secteur informel dans la stratégie de développement socio-économique, milite pour une normalisation de toutes les activités du secteur informel dans un but d'une plus grande efficacité et cohérence des politiques gouvernementales. Le terme « normalisation » peut à priori prêter à confusion. Il ne s'agit pas en toute évidence de la réglementation complète du secteur informel, mais de l'établissement et de la mise en application d'un ensemble de techniques permettant une organisation des opérateurs de l'informel afin de traîner progressivement et en douce, le secteur informel dans le secteur structuré. La normalisation serait donc une oeuvre tant politique que juridique, appelant les opérateurs informels de la survie à une plus grande organisation et à une manifestation s'exerce l'activité181. Cependant, une inquiétude se fait ressentir. Ces dispositions suscitées ne sont-elles pas contradictoires à l' AU.DCG qui, sans opérer une telle classification des commerçants, assujettit toute personne ayant la qualité de commerçant à l'obligation d'immatriculation au RCCM182. Il faut dire que le législateur OHADA, en remodelant l'ancienne procédure

181 FONE (A.M.), op.cit., p. 128.

182 Art 25 AU.DCG.

d'immatriculation (dans une forme et une rigueur qui font d'ailleurs l'une des originalités du droit OHADA), a substitué l'immatriculation au RCCM à toutes les autres formes d'immatriculation qui existaient auparavant. Il est donc évident que les dispositions du décret précité sont contraires à la lettre et même à l'esprit du législateur OHADA. On peut toutefois regretter car, la réalité est que le formalisme rigoureux du RCCM ne peut en l'état être aisément appliqué à ces commerçants de la survie qui, doivent pourtant être identifiées et recensés. Les experts de l'OHADA devraient y penser et aménager une procédure simplifiée pour de tels commerçants. La procédure d'immatriculation ou de recensement communal susmentionnée serait une solution pour dissiper cette difficulté. Cette identification simplifiée permettrait d'aménager une protection pour ces commerçants informels de la survie car on ne protège pas celui qu'on ignore183.

B - A TRAVERS UNE PROTECTION CERTAINE.

Il est question de permettre aux opérateurs qui vendent pour la survie de bénéficier des aspects favorables du statut du commerçant ordinaire et de se voir également exonéré de certaines dispositions rigoureuses du droit des affaires lorsqu'elles peuvent aggraver leur fragilité. Ceci permettrait au droit de gagner d'un peu d'humanisme car il serait en effet inutile de déstabiliser davantage des personnes désoeuvrées qui ont coordonnée. Ce souci justifie l'érection des techniques de normalisation (ParaI), comme on peut le constater à travers quelques exemples nationaux (para II)

PARA I : L'ERECTION DES TECHNIQUES DE

NORMALISATION DU SECTEUR INFORMEL

Il est de plus en plus reconnu qu'il est nécessaire d'envisager des voies

et moyens pour drainer le secteur informel vers le secteur formel afin de mieux

183 FONE (A.M), op.cit., p. 128.

protéger les opérateurs du secteur informel d'une part, et d'autre part de pouvoir les soumettre à des normes qui tiennent compte de leur spécificité. La problématique du secteur informel qui a acquis droit de cité au seuil du 21ème siècle se ramène essentiellement à la question de savoir comment le rendre performant en termes de résultats macro-économiques et de promotion sociale des opérateurs de l'informel. Il est dès lors important d'aménager des techniques de récupération du secteur informel. Pour l'essentiel, ces techniques tournent autour de l'identification des opérateurs informels via des cellules de regroupement, mais surtout par la mise sur pied des programmes de formation en secteur informel pour améliorer leur rendement (A) et l'adaptation des mesures propres au secteur informel. (B)

A - LES PROGRAMMES DE FORMATION DANS LE

SECTEUR INFORMEL.

Les mesures visant à améliorer le capital humain par l'éducation, la formation ou le perfectionnement professionnel sont vitales pour tous les agents économiques particulièrement ceux du secteur informel qui sont souvent analphabètes ou, tout au plus faiblement scolarisés, ce qui limite leurs capacités à améliorer les méthodes de commercialisation ainsi que la qualité des produits et services. Pour acquérir de nouvelles compétences, la grande majorité des acteurs du secteur informel ne peuvent compter presque exclusivement que sur des processus ou programmes de formation et d'apprentissage. C'est ainsi que des opérateurs économiques du secteur informel pourront bénéficier des stages d'initiation aux techniques de gestion à la concurrence et de l'économie de marché afin d'améliorer leur rentabilité et efficience en tant qu'agents économiques. Il est donc question d'instruire ces opérateurs, ce qui pourrait d'ailleurs avoir un effet d'entraînement indirect de leurs activités dans le secteur structuré, surtout lorsque des mesures adaptées à leurs spécificités sont prises.

B - L'AMENAGEMENT DES MESURES ADAPTEES AU

SECTEUR INFORMEL.

Le souci de la prise en compte du secteur informel dans la stratégie de développement socio-économique conduit à définir des mesures qui lui sont adaptées parce que tenant compte de ces spécificités. Le manque de moyens financiers et les difficultés d'accès au crédit sont en bonne place parmi les principaux facteurs qui limitent et fragilisent les potentialités du secteur informel en Afrique subsaharienne francophone. Pour remédier à cela, de nombreuses initiatives ont été prises par les Etats, les bailleurs de fonds, les ONG et les opérateurs eux-mêmes dans le cadre des stratégies d'autofinancement de leurs activités. Plus révélateur est l'aménagement des conditions de micro crédits adaptées au secteur informel, afin que ces opérateurs puissent faire face aux problèmes de trésorerie et d'approvisionnement. Les commerçants informels pourraient ainsi bénéficier de ces micro-crédits pour mieux structurer leurs activités et améliorer considérablement leur rendement. De là, il n'est plus surprenant d'observer des chantiers de normalisation du secteur informel se construire dans les Etats membres de l'OHADA Comme on peut le constater avec le cas du Cameroun.

PARA II : LES CHANTIERS NATIONAUX DE NORMALISATION DU SECTEUR INFORMEL : LE CAS DU CAMEROUN.

L'Etat camerounais n'est pas resté indifférent à la mouvance qui accompagne le secteur informel dans un élan de normalisation. Ainsi, le Cameroun a initié depuis un moment, de vastes programmes de normalisation du secteur informel afin d'intégrer ce dernier dans la dynamique générale de développement. Ces programmes visent une amélioration des conditions

d'activité et de travail des opérateurs informels pour une plus grande efficacité dans leurs différentes actions. En effet, les pouvoirs publics et privés développent actuellement des initiatives convergentes pour envisager les perspectives d'évolution coordonnée du secteur informel.

Au rang de ces multiples initiatives, se situe le Programme Intégré d'Appui aux Acteurs du Secteur Informel (PIAASI), qui, apporte un appui varié et multiforme aux opérateurs de l'économie informelle à l'effet d'accroître leurs possibilités de production, de commercialisation, sans oublier la qualité de leurs biens et services. Créé depuis 2002, Le PIAASI est un projet éligible aux fonds PPTE dès 2003. Son objectif premier est le renforcement des capacités des acteurs du secteur informel au Cameroun. A cet effet, Il bénéficie depuis une période de quatre ans, d'un financement sur ressources PPTE de près de dix (10) milliards de F CFA, destinés à la création d'emplois productifs au profit des jeunes, sous la forme d'un appui au triple plan de la formation, de l'organisation et du financement. C'est ainsi que le PIAASI s'intéresse à l'encadrement, au financement et au suivi des opérateurs de l'informel. On note cependant que cet instrument de « lutte contre la pauvreté et le chômage » reste très peu connu. Pourtant, il est vieux de 5 ans déjà184.

De plus en plus, le PIAASI apporte du soutien à plusieurs opérateurs informels pour le renforcement de leurs activités et l'amélioration de leur rendement, les statistiques en la matière sont très indicatives185. Les bénéficiaires des crédits du PIAASI disposent d'un différé de onze (11) mois entre le moment

184 KOUETCHA (C), « Cameroun: PIAASI, projet louable mais ignoré », Le Messager, 17 Octobre 2008.

185 En 2007, le PIAASI a fait le tour des 10 provinces du Cameroun, pour remettre des micro-finances à quelques 1200 bénéficiaires. Ces derniers ont reçu un montant de 1,710 milliards de Fcfa pour environ 120 promoteurs par province. Cette opération était la 3ème qu'effectuait cette structure depuis 2005 (année de sa mise en activité avec un financement « expérimental » de 40 millions de Fcfa). Une autre opération de distribution a eu lieu en 2006, pour un montant de 760 millions. Les sommes allouées à chaque bénéficiaire varient entre 100.000 et 1.500.000 de Fcfa les bénéficiaires doivent simplement remplir des formulaires de demande d'appui disponibles dans les secrétariats techniques du PIAASI et composer un dossier qui diffère selon qu'il s'agisse d'une initiative individuelle ou d'un projet commun, le reste dépend de la somme prévue pour les micro-finances.

de la réception du crédit et celui du recouvrement. A cela, s'ajoute une période de quinze (15) mois pour s'acquitter totalement de leur dette. Le taux d'intérêt annuel est de à 6%186.

Les activités du PIAASI sont suivies par le ministère de l'Emploi et de la Formation Professionnelle (MINEFOP), qui oeuvre à la mise en place des structures de proximité, afin d'entrer en contact avec les différentes organisations, unités ou activités du secteur informel, et de leur apporter un appui conséquent.

186 KOUETCHA (C), « Cameroun: PIAASI, projet louable mais ignoré », Le Messager, 17 Octobre 2008.

CONCLUSION DE LA IIEME PARTIE

En guise de conclusion de cette partie, il faut rappeler que la commercialité de fait du commerçant informel incite l'application du droit des affaires qui se déploie pour affirmer sa rigueur et non pour partager ses faveurs. C'est ce que beaucoup d'auteurs ont qualifié d'application discriminatoire du droit des affaires à l'égard de ceux qui sont coupables de non immatriculation. Ces derniers ne pourront pas bénéficier, au regard de l'Art 39 AU.DCG, des avantages de la qualité de commerçant, mais ne pourront également se rétracter derrière leur informalité pour se défaire des obligations du commerçant. Il s'agit là d'une situation d'extrême rigueur car ces dispositions sacrifient une partie considérable des personnes qui se battent pour la survie, ce qui peut créer une double marginalisation à l'égard de ces derniers qui ne demandent qu'à être protégés et pris en compte.

Le changement d'attitude à l'égard du secteur informel conduit aujourd'hui à reconnaître sa présence inéluctable et incontournable, son expansion incessante et impressionnante, et surtout son importance en terme macro-économique et sociale. Il est donc de plus en plus question de repenser des techniques de prise en compte de ce secteur dans les stratégies de développement, d'où l'appel fait au législateur OHADA d'aménager un régime particulier pour ces opérateurs de la survie afin de tenir réellement compte des spécificités africaines dans l'oeuvre de l'harmonisation. Il rejoindrait de ce fait la tendance actuelle qui milite en faveur de la normalisation du secteur informel pour un grand réalisme et une plus grande cohérence de la société et du droit.

CONCLUSION GENERALE

Il serait difficile et même prétentieux d'envisager une conclusion au sens littéral du terme en ce qui concerne le secteur informel en général, et surtout le commerçant informel dans l'orbite du droit des affaires en particulier. En effet, le secteur informel, antérieurement considéré comme un « accident », transitoire du processus de construction d'une économie moderne dans les pays en voie de développement, a révélé par la suite un dynamisme d'expansion et de renforcement de son rayon d'action, qui fournit des raisons objectives de penser qu'il continuera durablement à occuper une place importante de la population active187. Nonobstant quelques particularismes nationaux, il existe des spécificités communes qui traversent les pays membres de l'OHADA aux plans géopolitique, économique, sociologique, et qui se présentent comme autant de facteurs d'extension et de consolidation de l'économie informelle.

Le lourd passif du legs de la colonisation, amplifié par les contre performances économiques du modèle étatique post colonial en vigueur un peu partout, et les résultats mitigés des politiques d'ajustement structurel qui leur sont consécutives, ont conjugué leurs effets pour consacrer la marginalisation et la paupérisation croissantes de la population qui initient tous azimuts des stratégies de survie faites d'activités précaires multiformes. C'est dans ce contexte et dans cette logique que se déploient des commerçants informels, moins soucieux de la régularité juridique que de la volonté d'assurer leur survie.

Le législateur OHADA a bien l'ambition de régir avec évidence toute la vie des affaires dans son espace de compétence. La problématique de l'application de ses dispositions aux commerçants du secteur informel, bien que

187 Cette tendance se vérifie particulièrement en Afrique subsaharienne où le secteur informel absorbe 61% de la main d'oeuvre active. V SOULEYE KANTE, Le secteur informel en Afrique Subsaharienne Francophone: Vers la promotion d'un travail décent, B.I.T, Genève, 2002, p. 17.

parfois emprunte de difficultés, présente un constat qui révèle une affirmation du droit des affaires dans sa rigueur à de tels commerçants. Le Droit OHADA se manifeste au secteur informel plus pour affirmer sa rigueur que pour partager ses faveurs. Si cette situation est justifiable pour les commerçants de l'économie souterraine, elle est tout de même critiquable pour ceux de l'économie de la débrouille et de la survie.

En effet, l'ampleur du secteur informel et la diversité qui le caractérise dans la plupart des pays, obligent l'Etat à faire un effort dans la définition des stratégies d'intervention qui tiennent compte à la fois du souci de promouvoir les acteurs de l'informel, de la nécessité de contenir la croissance du secteur informel et de l'impératif du respect des lois et règlements. L'attitude des gouvernements et des acteurs institutionnels à l'égard du secteur informel a évolué. La volonté primaire de freiner son expansion a fait place à une tolérance, voire à une envie de l'appuyer. Globalement, il existe un très large consensus sur la nécessité de prévenir l'arbitraire de la part des pouvoirs exécutifs africains et de créer les conditions de participation véritable des couches diminuées de la population à l'oeuvre de la construction nationale.

Le législateur OHADA ne doit pas rester étranger à toute cette dynamique qui se développe autour de lui, il ne se doit non plus de garder davantage de silence sur cette question de l'informel. Il est important qu'il s'affirme sur le sujet dans une logique semblable à celle initiée au plan politique, social et économique, à l'effet de rechercher le juste milieu entre rigueur, protection et normalisation du secteur informel. Une telle intervention ferait gagner le droit OHADA d'un peu de réalisme, mais aussi d'humanisme, pour la matérialisation du caractère adapté de ce droit harmonisé aux réalités africaines.

cBrcB Lr0gcRflcvJ-Cr9

I - OUVRAGES

1- ANOUKAHA (F.), CISSE (A.), DIOUF (N.), NGUEBOU TOUKAM (J.), POUGOUE (P.G.) et SAMB (M.), OHADA, Sociétés commerciales et GIE, coll. Droit uniforme africain, Bruylant, Bruxelles, 2002, 589 p.

2- COING (H.), LAMICQ (H.), MALDONADO (C.), MEUNIER (C.), Approches du secteur informel dans l'économie des villes du tiers monde, I.U.P, Paris, 1979, 157 p.

3- GIRI (J.), L'Afrique en panne. Vingt-cinq ans de « développement », éd Karthala, Paris, 1986, 201 p.

4- GATSI (J.), Droit des affaires- Droit commercial général- Droit des sociétés commerciales, 1ère éd, P.U.L., 2006, 208 P.

5- GILLIS (M.), PERKINS (D.H.), ROEMER (M.), SNODGRASS (D.R.), Economie du développement, éd Nouveaux Horizons, Bruxelles, 1995, 784 p.

6- GOMEZ (J.R.) , OHADA, Entreprises en difficultés, Lecture de l'Acte Uniforme de l'OHADA portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif à la lumière du Droit français, 8e éd, Bajag Meri, St Estève, 2003, 431 p.

7- GUYON (Y.), Droit des affaires, Droit commercial général et sociétés, T.2, Coll. Thémis, Paris, 1994, 1012 p.

8- GUYON (Y.), Droit des affaires, Entreprises en difficultés, Redressement judiciaire- faillite, Tome 2, 6e éd, Economica, Paris, 1997, 478 p.

9- HOUIN (R.) et PEDAMON (M.), Droit Commercial, Commerçants et entreprises commerciales, concurrence et contrats du commerce, 9eme éd, Dalloz, Paris, 1990, 944 p.

10- HUGON (P.) et DEBLE (I.), Vivre et survivre dans les villes africaines, P.U.F., Paris, 1982, 310 p.

11- JAUFFRET (A.) par MESTRE (J.), Droit commercial, 23eme éd, L.G.D.J, Paris, 1997, 813 P.

12- KENGNE FODOUP et METTON (A.) [dir.], Economie informelle et développement dans les pays du Sud à l'ère de la mondialisation, P.U.Y, 2000, 391 p.

14- KENGNE FODOUOP, Les petits métiers de la rue et l'emploi. Le cas de Yaoundé, Coll. Idées, SOPECAM, Yaoundé, 1999, 169 p.

15- LAUTIER (B.), L'économie informelle dans le tiers monde, coll. repères, éd la découverte, Paris, 1994, 197 p.

16- LESPES (J.C.), Les pratiques juridiques, économiques et sociales

informelles- Actes du colloques international de Nouackott, Universitéd'Orléans, P.U.F, 1991, 559 p.
MESTRE (J.), PUTMAN (E.), VIDAL (D.), Grands arrêts du droit des affaires, Dalloz, Paris, 1995, 790 p.

18-NGUEBOU TOUKAM (J.), Droit commercial général dans l'Acte Uniforme OHADA, coll. Droit uniforme africain, PUA, 1998, 249 p.

19-PEDAMON (M.), Droit Commercial, Commerçants et fonds de commerce, concurrence et contrats du commerce, Dalloz, Paris, 1994, 706 p.

20-POUGOUE (P.G.), ANOUKAHA (F.), NGUEBOU (J.), Le droit des sociétés commerciales et du Groupement d'Intérêt Economique OHADA, coll. Droit uniforme africain, P.U.A, 1998, 630 p.

21-POUGOUE (P.G.) et KALIEU (Y.), L'organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA, PUA, Yaoundé, 1999, 232 p.

22- RIPERT (G) et ROBLOT (R), Traité de Droit commercial, T1, 5e éd, LGDJ, Paris, 1997, 957 p.

II - THESES ET MEMOIRES

1- KONE (M.), Le nouveau droit commercial des pays de la zone OHADA - Comparaison avec le droit français, Thèse de doctorat, Paris, 2003.

2- MINKO M'OBAME (O.), L'uniformisation du droit des affaires en Afrique par le Traité OHADA, Mémoire de Maîtrise de Droit des Affaires, Université d'Auvergne, Faculté de Droit, Année Universitaire 1999-2000.

3- MOHO FOPA (E.A.), Réflexions critiques sur le système de prévention des difficultés des entreprises de L'OHADA, Mémoire de D.E.A., Dschang, 2006.

4- TCHEUMALIEU FANSI (M. R.), L'application des procédures collectives aux personnes morales de droit privé non commerçantes, Mémoire de D.E.A., Dschang, 2001.

III- ARTICLES, ETUDES ET NOTES DE DOCTRINE

1- ANOUKAHA (F.), « L'incompatibilité d'exercice d'une activité
commerciale dans l'espace OHADA: Le cas du Cameroun », An. F.S.J.P., T5, 2001, PUA, PP 5-24.

2- ANOUKAHA (F.), « L'OHADA en marche », An. F.S.J.P., T6, 2002, numéro spécial, page 7-24.

3- CISSE (A.), « L'harmonisation du droit des affaires en Afrique : L'expérience de L'OHADA à l'épreuve de sa première décennie », Revue Internationale de Droit Economique, 2004, pp197-225.

4- COGNEAU, RAZAFINDRAKOTO, ROUBAUD, « Secteur informel et ajustement au Cameroun », Revue d'économie du développement, 1996, P 17- 28.

5- DAN GALLIN, « Droits sociaux et Secteur informel », Intervention de à la Sixième Université d'été de l'Association Club Mohamed Ali de la Culture

Ouvrière (ACMACO), tenue à Gammarth (Tunisie) du 23 au 25 juillet 1999, http://www.global-labour.org/droitssociauxetsecteurinformel.htm

6- DIAKHATÉ (M.), « OHADA : un nouveau droit des affaires pour sécuriser l'investissement en Afrique », http:/// www. Oecd.org/dataoecd/19/14/23731286.pdf.

7- DIALLO (A.O.), « Le secteur informel en Afrique : Par quel bout domestiquer ce potentiel phénoménal ? », http://www.temoust.org/spip.php?article6939

8- ELHOUEISS (J.L.), « Le commerçant de fait », Frédéric FIRHOLTZ, 5 nov. 2004, http://sites.estvideo.net/fdm/doc/bqbrse/20042005/commfait.doc

9- Fondation Friedrich -Ebert, « Le secteur informel au Cameroun: Importance et perspectives », Yaoundé, p 13-20.

10-FONE (A.M.), « Le secteur informel camerounais au regard du droit commercial », An. F.S.J.P., T2, Dschang, P.U.A., 1998, P 119-134.

11- GAUFRYAU (B.) ET MALDONADO (C.), « Politique de l'Etat envers le secteur informel » - Burkina Faso, http://www.ilo.org/public/french/employment/skills/hrdr/init/bur6.htm

12- GAUFRYAU (B.) ET MALDONADO (C.), « Secteur informel. Fonctions macroéconomiques et politiques gouvernementales : le cas du Sénégal » Rapport de recherche de l'Organisation internationale du travail, 1997, http://www.ilo.org/public/french/employment/ent/papers/senegal.htm

13- GAUFRYAU (B.) ET MALDONADO (C.), « Secteur informel. Fonctions macro-économiques et politiques gouvernementales : le cas du Burkina - Faso » Rapport de recherche de l'Organisation internationale du travail, 1997, http://www.ilo.org/public/french/employment/ent/papers/burkina.htm

14- HUGON (P.), « Conceptualisation et évolution de l'économie informelle », http://archimede.bibl.ulaval.ca/archimede/files/363c06bd-0e17-4520-a00f-

cfdb3daf9abe/ch03.html

15-ISSA-SAYEGH (J.), « Aspects techniques de l'intégration juridique des
États africains de zone franc », communication à la session de formation du CFJ

de Dakar du 27 au 30 avril 1998, sur le thème : « L'OHADA, un droit régional en gestation ».

16- KEBA MBAYE, « Avant-propos sur l'OHADA », Numéro spécial sur l'OHADA, Recueil Penant, n°827, 1998, pp. 125-128.

17- KENGNE FODOUOP, « Le secteur informel en Afrique Sub-saharienne: Conditions d'émergence et possibilités, in la politique de développement à la croisée des chemins. Le facteur culturel » Goethe Institut, Editions CLE, Yaoundé, pp.193-213.

18- KIRSCH (M.), « Historique de l'OHADA », Recueil Penant, n°827, 1998, p. 129 ss.

19- KOFFIGAN (E. A.), « Comment rendre formel le secteur informel? » http://ipsinternational.org/fr/note.asp?idnews=5088

20- KUATE TAMEGHE (S.S.), « Sortie de la cour du roi Pétaud: A propos de l'interdiction d'exercer la profession commerciale dans l'Acte uniforme OHADA relatif au droit commercial général », Penant, No 861, octobre- décembre 2007, pp 492-515.

21- L'économie informelle en Afrique, in « Afrique: Histoire, économie, politique. », http://www.laconscience.com/article.php?idarticle=7879

22- LOHOUES-OBLE, « L'apparition d'un droit international des affaires en Afrique », Revue Internationale de Droit Comparé, 1999, p.543 ss.

23- MATOR (B.) et THOUVENOT (S.), « L'uniformisation du droit des affaires en Afrique par l'OHADA », in la semaine juridique, entreprise et affaires, No 5 du 28 octobre 2004, pp 5 - 11.

24- NGUIHE KANTE (P.), « Réflexions sur la notion d'entreprise en difficultés dans l'Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA », An. F.S.J.P., T5, 2001, PUA, pp87-104.

25- SAWADOGO (F.M.), « Les Actes uniformes de l'OHADA : aspects techniques généraux », Revue Burkinabé de Droit, n° 39-40, n° spécial, p. 37.

26 - SURESH MUNBODH «Mobile Unit for the Informal Sector», http://www.unevoc.unesco.org/southernafrica/workshop2003/papers/MAR-MunbodhInformal.doc

27- SOULEYE KANTE, « Le secteur informel en Afrique Subsaharienne Francophone: Vers la promotion d'un travail décent », B.I.T, Genève, 2002, 70 P.

28- TCHAKOUA (J.), « The role of the informal economies sector(ies) in African urban Economies during economic crisis and liberalisation: The case of Yaounde city »., http://www.iza.org/conferencefiles/worldb2006/vericks872.pdf

29- WALTER (R.), « La formation professionnelle en secteur informel - Cameroun », A.F.D, 2006, 45 P.

30 - (P) YOULOU, « Economies informelles et criminalités: La face cachée de la mondialisation: L'Afrique subsaharienne », Penant, No 861, octobre- décembre 2007, pp 465-475.

IV - LEGISLATION

- Acte uniforme OHADA, sur le droit de l'arbitrage.

- Acte uniforme OHADA, relatif droit commercial général.

- Acte uniforme OHADA, relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique.

- Acte uniforme OHADA, portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.

- Acte uniforme OHADA, portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises.

- Code Civil, LITEC, 1998-199.

- Code de Commerce, Dalloz, 1997-1998.

- Codes et Lois du Cameroun.

- Décret N° 73/720/ PM du 22 Novembre 1993 fixant les modalités d'application de la Loi N° 90/031 du 10 Août 1990 régissant l'activité économique au Cameroun

- Loi N° 90/031 du 10 Août 1990 régissant l'activité économique au Cameroun

- Ordonnance N°2 du 29 Juin 1981 portant organisation de l'Etat Civil et diverses dispositions relative à l'état des personnes physiques.

REMERCIEMENTS .ii

PRINCIPALES ABREVIATIONS .iii

SOMMAIRE ..vi

INTRODUCTION GENERALE ..1

Ière PARTIE : LA COMMERCIALITE DU SECTEUR INFORMEL 11

CHAPITRE I : LE COMMERCANT DU SECTEUR INFORMEL : UN COMMERCANT SUI GENERIS 12 SECTION I : L'IRRESP

ECT DES CONDITIONS LIEES A LA PERSONNE POUR L'EXERCICE DE LA PROFESSION COMMERCIALE DANS LE SECTEUR INFORMEL

12

PARA I : Le mépris de la capacité d'exercer le commerce 13

A : le mineur .14 Le mineur non émancipé et l'impossible rattachement à la qualité de commerçant du secteur informel ..14 Le mineur émancipé et la possibilité de rattachement au commerçant du

secteur informel 17

B : Les majeurs incapables .. 18

Le majeur représenté 19

Le majeur assisté .. 19

C : La femme mariée 20

PARA II : La méconnaissance des empêchements a l'exercice du commerce dans le secteur informel 22 A : l'indifférence de l'incompatibilité dans la qualification de

commerçant informel. 23

L'incompatibilité des professions commerciales avec certaines fonctions 24

Les sanctions de la violation des incompatibilités. 25

B : Les déchéances et la commerce informel . 26

Les cas de déchéance .26

Les sanctions de l'exercice du commerce par un déchu 28

SECTION II : L'ACTIVITE COMMERCIALE DANS LE SECTEUR INFOR-

MEL 29

PARA I : Les actes de commerce du secteur informel . 30

A : L'acte de commerce par nature : acte de commerce par excellence du

secteur informel 31

B : La commercialité par accessoire et le secteur informel .32

Les Actes de commerce accessoires à la profession commerciale. 32

Les actes de commerce accessoires à un acte de commerce à titre principal .34 PARA II : L'exercice habituel et indépendant du commerce et le secteur

informel 35

A : L'exercice habituel 35

B : L'exercice indépendant 38

CHAPITRE II : LE FONDS DE COMMERCE DU SECTEUR INFORMEL : UN BIEN PARTICULIER .. 39 SECTION I : PARTICULARITE LIEE A L'ALTERATION DE CERTAINS

ELEMENTS DU FONDS DE COMMERCE INFORMEL .41

PARA I : L'inconstance du fonds commercial dans le secteur informel 41

A : La clientèle . . 42

B : Le nom commercial et l'enseigne . 45
PARA II : L'inconsistance des éléments corporels du fonds de commerce

dans le secteur informel .... 47

A : Le matériel et l'outillage 47

B : Les marchandises .. 48

SECTION II : PARTICULARITE LIEE A LA FRAGILITE DES ELEMENTS

INCORPORELS DU FONDS DE COMMERCE INFORMEL 49

PARA I : La quasi inexistence des droits de propriété industrielle 50

PARA II : La vulnérabilité du bail commercial 51

CONCLUSION DE LA Ière PARTIE .. 53 IIème PARTIE : L'APPLICABILITE DU DROIT DES AFFAIRES OHADA AU COMMERCANT PERSONNE PHYSIQUE DU SECTEUR INFORMEL 54 CHAPITRE I : LA COMMERCIALITE DE FAIT DU SECTEUR INFORMEL ET L'APPLICABILITE DU DROIT DES AFFAIRES 55 SECTION I : LE REGIME APPLICABLE HORS CONTENTIEUX: LA SOU-MISSION AUX CONTRAINTES DE LA QUALITE DE COMMERÇANT 56 PARA I : la problématique de la soumission du secteur informel aux obligations comptables du commerçant 56

A : La tenue d'une comptabilité et des livres de commerce dans le secteur informel .. 57

B : La valeur juridique de la comptabilité dans le secteur informel ...... 59 PARA II: L'éthique commerciale et son respect dans le secteur informel..60

A : Les règles de concurrence et le secteur informel . 60

B : La protection des consommateurs face au commerce informel 62

SECTION II : LE REGIME APPLICABLE DANS UN CADRE CONTENTIEUX . 64 PARA I : L'impossible bénéfice des privilèges de procédure en matière

commerciale 64

A : Les règles de preuves et de prescription . 66

Les règles de preuve 66

Les règles de prescription 67

B : La privation du régime des baux commerciaux .. 68

PARA II : L'application du droit des procédures collectives aux commerçants informels . 68

A : Une application distributive des procédures collectives aux opérateurs de l'informel 70

B : Les zones d'ombre autour de la soumission du secteur informel aux

procédures collectives . 73 CHAPITRE II : LA NECESSAIRE PRISE COMPTE DU SECTEUR INFORMEL PAR LE LEGISLATEUR OHADA : vers la recherche d'un équilibre entre rigueur, protection, et normalisation du secteur informel. 76 SECTION I : L'APPEL AU REALISME DU DROIT DES AFFAIRES OHADA .. 78 PARA I : Fonctions macroéconomiques et sociales du secteur informel dans

l'espace OHADA ..78

A : Le secteur informel comme amortisseur de la pauvreté . 79

B : Le secteur informel comme palliatif au nom emploi 80

PARA II : L'aménagement d'un régime particulier pour les commerçants

de l'économie de la survie .. 80

A : A travers une reconnaissance juridique ... 81

B : A travers une protection certaine 83 SECTION II : VERS LA NORMALISATION DU SECTEUR INFORMEL DANS L'ESPACE OHADA .. 84 PARA I : L'érection des techniques de normalisation du secteur infor-

mel. 84

A : Les programmes de formation dans le secteur informel .. 85

B : L'aménagement des mesures adaptées au secteur informel 86

PARA II : Les chantiers nationaux de normalisation du secteur informel :

Le cas du Cameroun 86

CONCLUSION DE LA IIème PARTIE 89

CONCLUSION GENERALE 90

BIBLIOGRAPHIE 92






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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld