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Le Samusocial Mali et la prise en charge médico-psycho-sociale des enfants de la rue en situation d'urgence sociale. Quelles problématiques pour quelles prises en charge?

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par Jean Douba KONE
Institut national de formation des travailleurs sociaux - Diplôme supérieur en travail social 2010
  

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b) Le rapport aux territoires des enfants de la rue

La notion de territoire

Il existe des lieux qui sont spécifiques aux enfants des rues. Lorsqu'on les cherche il faut se rendre à des endroits spécifiques. On appellera ces lieux les territoires des enfants. Un territoire est une zone occupée, délimitée d'une certaine manière et défendue contre l'accès des congénères.

La logique de territoire

La logique de territoire développée par les enfants de la rue s'inscrit dans le processus général de la construction de la représentation spatiale des enfants.

Eu, égard à la problématique spécifique des enfants de la rue, cette construction s'articule autour de quatre paramètres psychologiques majeurs : la notion de réversibilité, le temps de la clôture, le temps de l'arrachement et le temps de l'éclatement.

- La notion de réversibilité

La logique de territoire des enfants de la rue est liée à la représentation de l'espace de l'enfant. Jusqu'à l'âge de douze ans, l'enfant ne dispose pas d'une capacité d'abstraction suffisante pour intégrer l'idée de réversibilité absolue du trajet. L'enfant ne connaît, en effet, qu'une réversibilité relative fondée sur la mémorisation des trajets expérimentés. En dehors de ces trajets identifiés par l'enfant comme réversibles, l'enfant pense que tout trajet abolit le point de départ.

A B

Construction adulte de la notion de réversibilité

Compte tenu de leurs conditions de vie, les enfants de la rue ne connaissant que deux repères territoriaux : le lieu où ils vivent en groupe et le lieu où ils sont éventuellement pris en charge (centre d'accueil, etc.). En revanche, l'espace entre ces deux lieux se présente pour eux comme un espace inconnu et, s'ils n'ont pas déjà expérimenté la réversibilité du trajet entre ces deux lieux, les enfants imaginent qu'une fois qu'ils ont quitté un lieu, ils ne pourront jamais y revenir.

Construction des enfants de la rue

La clôture L'arrachement L'éclatement

(Temps 1) (Temps 2) (Temps 3)

Pour les enfants, tout ce qui est hors de leur territoire est hors de leur monde. Dans cette optique, ils ne quittent pas un lieu pour un autre lieu mais leur territoire pour le vide. Cette conception de l'espace explique notamment le changement de comportement de certains enfants qui, lorsqu'ils sont amenés à s'éloigner un peu de leur territoire se retrouvent en grande difficulté, alors même qu'ils semblaient aller parfaitement bien sur leur lieu de vie.

- Temps 1 : la clôture

Contrairement à l'image traditionnelle de l'enfant de la rue, caractérisé par son extrême mobilité et son aisance à se déplacer dans la ville, la logique de territoire témoigne précisément des difficultés parfois insurmontables, des enfants de la rue à quitter leur lieu de vie. Le territoire sur lequel vit le groupe d'enfants fonctionne, en effet, comme un périmètre de sécurité constitué de repères précis. Paradoxalement, ce territoire est généralement un angle de rue qui représente, dans la construction adulte de l'espace, davantage un lieu de passage (croisement entre deux rues) qu'un lieu de clôture. Pourtant, pour l'enfant, l'angle de rue incarne précisément un lieu de refuge par excellence dès lors qu'il constitue la fin de la rue, c'est à dire la clôture imaginaire de son territoire.

Le besoin vital de l'enfant d'une clôture spatiale se justifie au regard de sa représentation corporelle. Pour tout enfant, le lieu de vie incarne une partie de son corps et grandir, c'est précisément apprendre à détacher son corps de l'environnement grâce à l'évolution de sa capacité d'abstraction. Déplacer brutalement un enfant de son territoire de vie s'avère analogue, dans cette perspective, à détacher un membre du corps suscitant un profond sentiment d'angoisse et de perdition.

- Temps 2 : l'arrachement

Le temps de l'arrachement correspond au déplacement de l'enfant qui quitte son territoire pour un autre lieu, par exemple un centre d'accueil. Non seulement l'enfant n'a peut être pas encore intégré la notion de réversibilité du trajet mais il n'a également peut être pas encore opéré le détachement psychique de son corps avec son environnement. Pour cet enfant, quitter son territoire signifie en d'autres termes, ne plus pouvoir y revenir et se sentir « amputé » d'une partie de son corps.

- Temps 3 : l'éclatement

Le temps de l'éclatement correspond notamment à l'arrivée de l'enfant dans un centre d'accueil et d'hébergement. Contrairement au regard adulte porté sur un centre, espace clos par définition, l'enfant considère cet espace comme un lieu dangereusement ouvert dans la mesure où ses repères spatiaux sont bouleversés. Le temps de l'éclatement, c'est le temps nécessaire à l'enfant pour s'adapter à ce nouvel espace en recréant des repères de clôture.

Cette période de profonde angoisse est de nature à provoquer le repli de l'enfant sur son corps dès lors qu'il incarne le seul territoire connu. Ce temps de l'éclatement s'avère tout aussi problématique dans la situation du retour de l'enfant dans sa famille.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld