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Décentralisation et gestion durable des ressources forestières au Cameroun

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par Fernande Abanda Ngono
Université de Yaoundé2-Soa/Cameroun - Diplome d'études approfondies 2009
  

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Section II : LES MECANISMES OPERATIONNELS DE LA GESTION DECENTRALISEE DES FORETS.

Les mécanismes opérationnels de la gestion décentralisée des forêts en vigueur au Cameroun depuis la loi de janvier 1994, s'articulent au tour de trois notions essentielles : la forêt communale, la forêt communautaire et la redevance forestière. Elles recouvrent donc une double réalité91(*) : une dimension politique relative à la décentralisation de la gestion de l'espace (paragraphe I), et une dimension économique et fiscale relative à la consécration de la fiscalité forestière décentralisée (paragraphe II).

Paragraphe I : LA DECENTRALISATION DE LA GESTION DE L'ESPACE.

A l'analyse de la législation forestière, on se rend compte que le législateur camerounais bien que partisan de l'intérêt général dans la gestion de l'environnement et d'un intérêt particulier dans la gestion du domaine forestier, a usé en filigrane de la théorie des choses communes92(*) en accordant le droit d'usage de la ressource à ceux qui en font un usage normal. La loi de janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche, consacre une répartition du domaine forestier au profit des collectivités locales et communautés villageoises. En réalité, cette répartition se fait sous le prisme de la reconnaissance d'un domaine privé propre à la commune par la forêt communale (A), et d'un droit de propriété encadré dans la forêt communautaire (B).

A) Les forêts communales.

La loi considère comme forêt communale, « toute forêt ayant fait l'objet d'un acte de classement pour le compte de la commune concernée ou qui a été plantée par celle-ci93(*) ». En fait, elle relève du domaine privé de la commune concernée, mais son exploitation tout comme son aménagement, sont approuvés par l'administration en charge des forêts. La création et l'institutionnalisation des forêts communales au Cameroun participent d'une démarche globale de mutation de l'Etat central, qui consiste notamment à renforcer et à accroitre les patrimoines assez faibles de ces types de gouvernements de proximité94(*). Dans le cas des ressources forestières, il s'est agi d'allouer des espaces forestiers du domaine permanent de l'Etat vers les patrimoines de communes par des actes de classement. Les massifs forestiers ainsi transférés passent du macro-patrimoine étatique vers les micros-patrimoines des collectivités territoriales décentralisées95(*). De facto et de jure, lesdites communes deviennent ainsi les nouveaux propriétaires des espaces alloués par l'Etat central ce qui induit la propriété des produits qui y sont tirés96(*). Il faut toutefois rappeler que l'acquisition d'une forêt communale est conditionnée par un ensemble de formalités. Ce qui revient à dire qu'il n'existe pas matériellement de forêt communale sans actes de classement. En effet la commune doit mettre en oeuvre sur la base d'objectifs et d'un plan arrêtés au préalable, un certains nombre d'activités et d'investissements en vue de la protection soutenue de produits forestiers et de service sans porter atteinte à la valeur intrinsèque, ni compromettre la productivité future de ladite forêt, et sans susciter d'effets indésirables sur l'environnement physique et social97(*), la loi spécifie d'ailleurs que l'exécution du plan d'aménagement d'une forêt communale relève de la commune concernée et celle-ci doit enclencher le processus d'immatriculation pour obtenir un titre foncier sur ces espaces. L'article 33 de la loi forestière impose également aux communautés urbaines un taux de boisement au moins égale à 800m2 d'espaces boisés pour 1000 habitants.

Un certain nombre d'observations méritent d'être apposées à ces dispositions. Surtout s'il faut se placer du coté de la rigueur du droit, la forêt communale ne serait alors propriété privée de la commune que de nom. En effet s'il est possible de la déclasser à nouveau, ou la mettre en défens, on pourrait dire que la commune est propriétaire de l'arbre et non de la terre qui porte l'arbre. A coté de la forêt communale, les populations locales peuvent avoir accès au domaine forestier non permanent à travers l'institutionnalisation de la forêt communautaire.

B) La forêt communautaire.

Le décret fixant les modalités d'application du régime des forêts définit la forêt communautaire comme, «  une forêt du domaine forestier non permanent faisant l'objet d'une convention de gestion entre une communauté villageoise et l'administration chargée des forêts (....) et ayant une superficie maximale de 5000 hectares en zone forestière 98(*)». Précisément, Les forêts communautaires sont des espaces du domaine forestier non permanent, attribués par convention entre l'administration en charge des forêts et les communautés villageoises qui en manifestent l'intérêt. Ainsi, elles ne seraient que de simples délégations de pouvoirs de gestion sur un espace forestier précis, conférées par l'administration forestière à une communauté villageoise. Ceci étant, avec les forêts communautaires, l'Etat confie pour une durée de vingt cinq ans la gestion forestière à la communauté villageoise la plus proche99(*) . Les forêts communautaires ne constitueraient donc pas la propriété des communautés villageoises mais plutôt des dépendances du domaine national gérées sous le contrôle de l'Etat, la loi100(*) affirme d'ailleurs que « l'exploitation d'une forêt communautaire se fait pour le compte de la communauté, en régie, par vente de coupe, par autorisation personnelle de coupe, ou par permis, conformément au plan de gestion approuvé par l'administration chargée des forêts ».

SAMUEL ASSEMBE MVONDO101(*) y voit une sorte de compensation forestière allouée aux communautés locales, en vue de la réparation d'une injustice environnementale, causée historiquement par l'appropriation étatique coloniale. En effet, de fait, les conventions relatives aux forêts communautaires ne confèrent pas le droit de propriété aux communautés villageoises mais valident légalement leur droit d'usage et d'usufruit historiques. La loi précise d'ailleurs que, les produits forestiers résultant de l'exploitation de ces forêts appartiennent aux communautés villageoises concernées qui peuvent attribuer des titres d'exploitation ou des autorisations personnelles de coupes102(*). Tout comme les forêts communales, un certains nombre de formalités conditionnent l'octroie de ces espaces aux communautés villageoises. Tout d'abord la communauté villageoise intéressée doit avoir la personnalité morale, sous forme d'une entité prévue par la législation et la réglementation en vigueur103(*). De plus elle doit exécuter un ensemble de formalités pour l'attribution prévue par la loi.

Les formalités qui entourent l'attribution d'espace du domaine forestier national démontrent encore plus le caractère de chose commune affecté à la forêt au Cameroun. En ce sens, JEAN YVES CHEROT précise que, «  la chose commune n'est pas un bien commun dont la régulation ne dépendrait que de l'arrangement éventuel entre les usagers de la chose. Par définition ce n'est pas une propriété et les relations sur l'usage de la chose ne sont pas réglées par convention entre les propriétaires agissant collectivement. Les titulaires d'un droit sur la chose commune n'ont pas de droit de propriété. Ils ne peuvent disposer de leurs droits à l'usage sur la chose. Le régime d'utilisation de la chose commune ne passe donc pas par les arrangements entre les usagers. La réglementation de l'usage de la chose doit être établie par les autorités de police104(*). »

Les statistiques actuelles font état de plus d'une vingtaine de forêts communautaires attribuées, et quatre forêts communales existantes depuis 1994105(*). La décentralisation s'appréciant véritablement par l'octroie de moyens financiers pour la mise en oeuvre des politiques locales de développement, la fiscalité forestière décentralisée apparait dès lors comme le moyen de la compétence conférée aux collectivités locales.

* 91 BIGOMBE LOGO ( P), « les élites et la gestion décentralisée des forêts au Cameroun : essai d'analyse politiste de la gestion néo patrimoniale de la rente forestière en contexte de décentralisation » ; Arbres, Forêt et Communautés Rurales, bulletin FTPP. P 5

* 92 CHEROT (J-Y), Droit et Environnement : propos pluridisciplinaire sur un droit en construction. UPAM, Aix 1995 p7-21.

* 93 Article 30 de la loi de 1994 portant régime des forêts.

* 94 ASSEMBE MVONDO (S) « Décentralisation des ressources forestières et justice environnementale : analyse des évidences empiriques du SUD- Cameroun » in 1/1 LEAD, Law, environnement and Development journal. 2005, p 35.

* 95 Idem

* 96 Sauf ceux qui sont déterminés par l'Etat

* 97 Selon les dispositions de l'article 23 de la loi du 20 janvier 2004

* 98 Art 3a 11, et art 27a4 du décret

* 99 L'article 2 de l'arrêté N°0518/MINEF/CAB fixant les modalités d'attribution en priorité au communauté villageoise riveraines de toute foret susceptible d'être érigé en forêt communautaire.

* 100 Article 54 de la loi portant régime des forêts, de la faune et de la pêche du 20 janvier 1994 ;

* 101 ASSEMBE MVONDO (S), op.cit. P 37.

* 102 Article 60 de l'ordonnance N°99/001 du 31 aout 1999 complétant certaines dispositions de la du 20 janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche.

* 103 Article 4 du de l'arrêté MINEF du 09 avril 2001 fixant les modalités d'attribution en priorité aux communautés villageoises riveraines de toute forêts susceptible d'être érigée en forêt communautaire.

* 104 CHEROT (J-Y), op cit P 10

* 105 D'après la Direction Des forêts du MINFOF

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe