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L'histoire universelle, conscience de la liberté. Une lecture de la raison dans l'histoire de G. W. F. Hegel

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par Vincent Ferrier KISHALI Masumbuko
Faculté de philosophie St Pierre Canisius de Kimwenza Kinshasa - Bachelier en philosophie 2008
  

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I. 1. La finalité de l'histoire universelle

En tant que celui qui demeure dans son propre élément, l'Esprit est libre. La liberté est sa substance même : « La nature de l'esprit se connaît par son opposé exact. Nous opposons l'Esprit à la matière. De même que la substance de la matière est la pesanteur, de même la substance de l'Esprit est la liberté16(*) ». La liberté n'est pas pour l'Esprit une propriété à côté d'autres propriétés. Mais, elle est plutôt celle à partir de laquelle toutes les autres propriétés trouvent leurs sens. La matière, en tant que juxtaposition d'éléments, n'a pas son unité en elle-même. Celle-ci est plutôt pour elle un idéal à atteindre. Mais l'Esprit, quant à lui, est lui-même l'idéal vers lequel il tend, il a son centre en lui-même, il est l'Unité même. La liberté de l'Esprit n'est pas une existence immobile, mais plutôt une activité constante qui consiste à prendre conscience de soi-même et à devenir ainsi libre : « Se produire, se faire objet de soi-même : voilà l'activité de l'Esprit17(*) ».

Cependant, l'Esprit tel qu'apparaissant sous la forme de l'individu humain n'est pas encore libre, parce que ce dernier est un être vivant, c'est-à-dire, un être sentant, ayant des désirs. Mais, l'homme se distingue de l'animal par le fait qu'il est un être pensant, un être pouvant prendre conscience de lui-même. Contrairement à l'homme, chez qui le désir existe indépendamment de sa satisfaction, l'animal, qui est privé de la pensée, ne peut séparer le désir de sa satisfaction. Ainsi, l'homme « cesse d'être un simple être naturel, livré à ses perceptions et désirs immédiats, à leur satisfaction et leur création. Il en est conscient c'est pourquoi il refoule ses désirs et met la pensée, l'idéel, entre la poussée du désir et sa satisfaction18(*) ». Dès lors, Il devient capable d'agir selon les fins et de se déterminer selon l'universel, capable de freiner le mouvement de ses désirs et de briser son immédiateté et sa naturalité.

En outre, la conscience que l'Esprit a de lui-même doit se donner une forme concrète dans le monde. Partant du principe selon lequel l'universel vaut plus que le particulier, cette forme concrète de l'Esprit ne s'est réalisée dans l'histoire qu'à travers Volksgeist19(*) et non à travers des individus dans leur singularité.

La différence entre les esprits des peuples dépend de « la représentation qu'ils se font d'eux-mêmes, selon la superficialité ou la profondeur avec laquelle ils ont saisi l'Esprit20(*) ». La conscience que le peuple a de l'Esprit, c'est elle qui oriente tous ses buts et intérêts, « et même si les individus n'en sont pas conscients, elle demeure comme leur présupposition21(*) ». Un individu, aussi intelligent qu'il pense l'être, ne peut surpasser l'Esprit d'un peuple et empêcher qu'arrive ce qui doit arriver. D'ailleurs ne sont intelligents que ceux qui ont pris conscience de l'esprit de leur peuple et s'y conforment.

Les esprits des peuples sont particuliers à l'égard de l'Esprit du monde, qui est l'Esprit de l'univers tout entier tel que manifesté dans la conscience humaine. Ainsi, ils peuvent décliner, disparaître, parce qu'ils ne constituent qu'une étape dans l'accomplissement général de l'Esprit du monde. Mais ils sont aussi uniques parce qu'ils ont une conscience spécifique de l'Esprit. C'est ainsi que nous pouvons dire que tel peuple a telles moeurs, telle religion, tel art, telle culture, etc. Dans l'accomplissement de l'histoire, le peuple qui caractérise une époque est celui qui a saisi le plus haut concept de l'Esprit. D'autres peuples, qui n'ont pas ainsi saisi l'Esprit, subsistent mais sont mis à l'écart de l'histoire.

Chaque peuple a un but et un objectif à atteindre dans l'histoire. Une fois ceux-ci atteints, il n'a plus un rôle à jouer et est donc appelé à disparaître, laissant ainsi la place à un autre peuple en qui l'Esprit continue l'exercice de son activité. L'Esprit devient et se réalise chaque fois qu'un peuple disparaît, car « c'est lui qui se manifeste dans toutes les actions et les aspirations du peuple. C'est lui qui se réalise, jouit de lui-même et se connaît lui-même22(*) ». Ainsi, le rôle de l'histoire philosophique est de monter comment se réalise ce mouvement de grandeur et de décadence des peuples. La question qui se pose actuellement est celle de savoir comment s'effectue donc ce mouvement.

Comme Hegel part toujours de sa dialectique, il distingue trois moments : le moment de la culture (Bildung), de l'excès de culture (Uberbildung) et de la perversion de la culture (Verbildung).

Pour ce qui est du premier moment, celui de la culture, il s'agit de l'étape où il n'y a pas encore de réflexion dans l'individu : l'Esprit du peuple est là et lui n'a qu'à s'en inspirer et s'y conformer. Alors « nous disons qu'il est moral, vertueux, vigoureux parce qu'il fait ce qu'exige la volonté intérieure de son esprit et aussi parce que, dans le travail de son objectivation, il défend son oeuvre contre la violence externe. A ce stade, l'individu n'est pas encore séparé de l'ensemble23(*) ».

Ensuite vient le deuxième moment, celui de l'excès de culture. C'est l'étape de la réflexion où l'essence du peuple, ce qu'il est en soi, est confondue avec ce qu'il est dans la réalité, où l'idéel devient réel. L'abîme qui existe entre ce qu'il est en soi, c'est-à-dire son essence, et ce qu'il est dans la réalité est supprimé. L'Esprit s'épanouit et se satisfait dans un pareil univers où il s'identifie à l'esprit du peuple.

Le troisième moment est celui de la perversion de la culture, celui de la décadence. Ici, il est question du moment où l'Esprit a exaucé ses désirs ; où le peuple a réalisé son destin ; où il s'est pleinement formé. Il n'a plus de but, plus d'intérêt. Alors, il disparaît, il libère l'Esprit satisfait pour réaliser ses plus hauts intérêts. Ce moment au courant duquel l'Esprit du peuple se corrompt est caractérisé par l'habitude qui « est une activité qui ne rencontre pas d'opposition, une activité qui se déploie dans une durée formelle et où la plénitude et la profondeur du but ne sont plus senties24(*) ». Le peuple s'étant satisfait du but accompli tombe dans la routine et éteint en lui toute vitalité, et ainsi se conduit progressivement vers sa ruine. La mort d'un peuple n'est pas causée par l'emprise sur lui d'une force étrangère : « aucune puissance étrangère ne peut détruire l'Esprit d'un peuple soit du dehors soit du dedans, s'il n'est déjà en lui-même sans vie, s'il n'a déjà dépéri25(*) ». Elle provient généralement du dedans et est caractérisé par le particularisme. Les individus qui poursuivaient l'intérêt commun se retournent désormais vers leurs propres fins. Ainsi, l'Esprit étant un principe n'opérant que sur l'universel devient inactif et tombe en ruine.

La fin ultime de l'Esprit dans l'histoire n'est que son propre accomplissement parce qu'il est son propre objet. Et, dit Hegel, c'est dans l'objectivité qu'il prend conscience de sa félicité. Là où l'objectivité conduit les actions des hommes, c'est-à-dire là où il devient une exigence intérieure, là aussi réside la liberté. Le but de l'Esprit est de rendre le monde adéquat à lui-même. Et comme il se produit sous certaines formes déterminées que sont les peuples, cette adéquation dépend de la capacité d'un peuple à prendre conscience de sa liberté.

En outre, si nous nous permettons de poser la fin ultime comme un idéal, alors celui-ci doit être nécessairement un idéal universel, car l'Esprit, pour se réaliser véritablement, ne se sert que de ce qui est universel (peuple, Etat, nation...) et non de ce qui est particulier (individus singuliers).Cette fin ultime qui est universelle n'est pas à confondre avec des idéaux individuels qui sont particuliers : « Car ce que l'individu s'imagine dans son individualité ne peut faire loi pour l'universelle réalité, de même que la loi universelle ne s'adresse pas exclusivement aux simples individus lesquels pourraient fort bien ne pas trop y trouver leur compte26(*) ».

En outre, si nous affirmons que l'Esprit se réalise dans l'histoire, nous devons considérer celle-ci dans son universalité et non dans ses faits particuliers. Car, « lorsqu'on voit des faits particuliers, on peut se dire qu'il y a bien des choses injustes dans le monde27(*) ». Ainsi, tout l'effort de la philosophie est d'arriver à réaliser que le monde est ce qu'il doit être, que l'histoire universelle n'est rien d'autre que le plan de la Providence. Elle doit nous permettre, en outre, de connaître la réalité de l'Idée divine et de justifier la réalité historique tant méprisée.

Bref, avec Hegel, la finalité de l'histoire c'est la prise de conscience de l'Esprit en tant que liberté, et par là même la reconnaissance de la liberté du sujet humain :

C'est la liberté du sujet, afin que celui-ci acquière une conscience morale, afin qu'il se donne des fins universelles, qu'il les mette en valeur ; c'est la liberté du sujet, afin que celui-ci acquière une valeur infinie et parvienne au point extrême de lui-même. C'est là la substance du but que poursuit l'Esprit du monde et elle est atteinte par la liberté de chacun28(*).

* 16 Ibid.

* 17 Ibid., p.76.

* 18 G. W. F. HEGEL, Op. cit., p. 77.

* 19 A comprendre comme Esprit d'un peuple.

* 20 G. W. F. HEGEL, Op. cit., p. 80.

* 21 Ibid., p. 81.

* 22 G. W. F. HEGEL, Op. cit., p. 86.

* 23 Ibid., p. 89.

* 24 Ibid., p. 91.

* 25 Ibid., p. 92.

* 26 G. W. F. HEGEL, Op. cit., p. 98.

* 27 Ibid., p. 99.

* 28 Ibid., p. 85.

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