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La question technologique à  la genèse du discours éthique de Hans Jonas. Une lecture du principe responsabilité

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par Bertin NKENGELE
Faculté de philosophie Saint Pierre Canisius de Kimwenza en RDC - Bachelier en philosophie 2013
  

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2.4.11. 1.4. ÉTHIQUE CLASSIQUE VERSUS ÉTHIQUE DE LA RESPONSABILITÉ

2.4.12. 1.4.1. De l'éthique traditionnelle ou classique48(*)

L'éthique traditionnelle, qualifiée par Jonas de muette ou d'inefficace dans la mesure où elle ne prend pas en charge des nouvelles questions posées par le progrès technoscientifique, est caractérisée par :

(i). La neutralité face au monde extrahumain.

(ii). La prédominance de l'anthropocentrisme.

(iii). La stabilité du monde et l'immuabilité de l'identité humaine.

(iv). L'action et sa dimension d'immédiateté.49(*)

Dans l'éthique du passé, « la répercussion sur les objets non humains ne formait pas un domaine de la signification éthique »50(*). En d'autres termes, tout ce qui avait commerce avec le monde extrahumain n'était pas pris en charge par l'éthique ou ne pouvait pas faire objet d'éthique. Jonas se focalise sur le « domaine entier de la technè (art) »51(*). Il sied de signaler que tout ce qui établissait un rapport avec la technè était neutre sur le plan éthique, la médecine exceptée. En d'autres mots, nous dirons que l'homme, par sa technique pouvait beau manipuler, maîtriser la nature comme bon lui semble. Cela ne posait pas problème et « n'entrait pas dans les préoccupations des théories éthiques »52(*), dans la mesure où la technique ne pouvait causer des dommages à la nature extrahumaine et n'était pas, par ailleurs, la vocation de l'homme. La nature était, dans ce cas, conçue comme quelque chose sujette à l'auto-préservation, c'est-à-dire la nature pouvait se protéger contre toute sorte de menace.

Dans le paragraphe précédent, nous avons montré que pour Jonas, le monde extrahumain était neutre sur le plan éthique. Cependant, le monde humain n'était pas neutre ; il faisait partie des préoccupations éthiques. C'est pourquoi Jonas qualifie l'éthique classique d'anthropocentrique, dans la mesure où elle met l'homme au centre de ses réflexions : « la signification éthique faisait partie du commerce direct de l'homme avec l'homme, y compris le commerce avec soi-même »53(*). Les éthiques du passé, même si elles ont été différentes au niveau de leurs principes et représentations, elles se focalisent sur l'homme : nous avons la crainte de Dieu chez les juifs, l'éros chez Platon, l'eudémonisme chez Aristote (hédonisme chez Aristippe de Cyrène), la charité chez les chrétiens, le amor dei intellectualis chez Benedictus de Spinoza, le respect chez Kant, l'intérêt chez Kierkegaard, la jouissance de la volonté chez Nietzsche, sont des doctrines ayant en commun la gravitation autour de l'intersubjectivité.54(*)

Dans l'éthique antérieure, on estimait que le monde était stable et que l'identité humaine était inchangeable. Étant donné l'anthropocentrisme dans cette éthique, l'homme était caractérisé par la permanence et la constance dans son essence et son agir. En d'autres termes, l'homme « reste le même à travers le temps et l'espace. Il vit dans la conviction selon laquelle « ce qu'il a fait hier, peut se répéter encore aujourd'hui et demain et que les moyens pour y arriver demeurent et demeureront identiques» »55(*). Avec cette inchangeabilité ou cette constance, il n'y a pas de créativité ou d'inventivité et par conséquent le monde va demeurer stable et statique.

« Le bien-être et le mal-être dont l'agir devait s'occuper étaient proches de l'action, soit dans la praxis elle-même, soit dans sa portée immédiate et ils n'étaient pas affaire de planification à long terme »56(*). L'éthique traditionnelle était une éthique d'immédiateté, de proximité et de simultanéité. Elle s'occupait de ce qui était proche dans le temps comme dans l'espace, et aucune prévision d'une action à long terme n'était envisagée. Les conséquences d'une action présente ou immédiate dans un avenir lointain n'étaient pas envisagées et étaient souvent une affaire des divinités et du hasard. Les générations futures se trouvent sacrifiées dans cette éthique. Jonas, à ce propos, affirme :

L'éthique avait affaire à l'ici et au maintenant, aux occasions telles qu'elles se présentent entre les hommes, aux situations répétitives et typiques de la vie privée et publique(...). Tous les commandements et toutes les maximes de l'éthique traditionnelle, quelle que soit la différence de leurs contenus, présentent cette restriction à l'environnement immédiat de l'action. (...) ce sont les vivants actuels et qui, d'une façon ou d'une autre, ont commerce avec moi qui ont droit à mon comportement pour autant qu'il les affecte par le faire ou par l'omission. L'univers moral se compose de contemporains et son horizon d'avenir se limite à leur durée de vie prévisible.57(*)

* 48 L'éthique traditionnelle (classique, antérieure, du passé) est cette réflexion éthique qui a eu lieu depuis l'antiquité jusqu'à Kant ou à l'idéalisme allemand ou très probablement jusqu'à la publication du Principe Responsabilité. (Cf. J., MBUNGU Mutu, Éthique écologique et Principe de la responsabilité, p. 227.

* 49 J., MBUNGU Mutu, Éthique écologique et Principe de la responsabilité, pp. 228-230.

* 50 H., JONAS, Le Principe responsabilité, p. 22.

* 51 Ibid., p. 21.

* 52 J., MBUNGU Mutu, Op. cit., p. 228.

* 53 H., JONAS, Le Principe responsabilité, p. 22.

* 54 Cf. J., MBUNGU Mutu, Op. cit., p. 227 (Notes infrapaginales). Lire à ce sujet H., JONAS, Le Principe responsabilité, p. 22. Ici Jonas présente de manière succincte les commandements ou les maximes de l'éthique traditionnelle. C'est à nous de deviner qui en sont les auteurs. C'est le travail que le Prof. Mbungu a essayé de faire dans sa dissertation doctorale. A titre d'exemple, Jonas critique ce commandement : « Ne traites jamais ton prochain comme un simple moyen, mais toujours également comme une fin en elle-même ». Nous voyons bien que ceci vient de la morale kantienne. Donc, quand Jonas parle de l'éthique traditionnelle, la morale kantienne s'y trouve contenue.

* 55 J., MBUNGU Mutu, Op. cit., p. 229.

* 56 H., JONAS, Le Principe responsabilité, p. 22.

* 57 Ibid.

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