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La politique chinoise de l'administration Bush après la répression place Tiananmen : l'interdépendance peut-elle apaiser les tensions politiques ? 1989-1993

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par Nicolas Le Guillou
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 1 Science Politique - Relations Internationales spécialité Sécurité & Défense 2014
  

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Chapitre 1 : La manipulation politique de l'interdépendance sino-américaine

En effet, avec la fin de la Guerre froide et le leadership américain s'installant, le Congrès, en réponse à la répression Place Tiananmen, résolut de profiter de cette suprématie pour sanctionner Pékin.

319 Ibid. p. 163.

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Section 1 : Le premier débat sur le Statut de la Nation la plus Favorisée

Lorsque le Statut de la Nation la Plus Favorisée320 est conféré à un pays, celui-ci n'est pas sujet à des discriminations d'ordre tarifaire à l'encontre de ses exportations aux Etats-Unis321. Chaque année de 1990 à 1992 le Congrès et le Président se déchirèrent sur les conditions d'application du statut MFN à la Chine322. En 1951, le Congrès vota le Trade Agreements Extension Act (les Accords sur l'extension du Commerce) qui stipulait qu'il revenait au Président de suspendre le statut MFN pour l'Union soviétique et tous les pays du bloc communiste, ce qui incluait autrefois la RPC323. En 1974, le Congrès émit un amendement à cette loi via le Trade Act qui conditionna la procédure de délivrance du statut MFN aux économies planifiées, si bien qu'en 1979 J. Carter décida d'attribuer le statut MFN à Pékin324. Après Juin 1989 et malgré l'impact émotionnel des images de la répression aux Etats-Unis, le retrait du statut MFN ne fut pas inclus dans le lot de sanctions. Mais en 1990, au moment de renouveler le statut à la RPC, Bush subit des pressions intenses du Congrès, des avocats des Droits de l'Homme, des éditorialistes et des représentants d'étudiants et d'universitaires chinois aux Etats-Unis325. On reprocha à sa politique chinoise trop de concessions sans finalement de réelles avancées sur la situation des droits humains en Chine326. La question du traitement des dissidents demeurait une pierre d'achoppement des associations de défense et les ventes d'armes chinoises à la Libye, au Moyen-Orient continuait d'alimenter l'idée d'un retrait du statut MFN. La classe politique se fractura donc sur l'éventuel retrait du statut MFN, certain le percevant comme un levier potentiel pour obtenir de la Chine plus de compromis, d'autre comme l'unique moyen d'envenimer la situation327. Face au débat qui s'ouvrit au Congrès, un compromis entre les pros et les antis MFN émergea prudemment : on conditionnerait l'extension du MFN c'est-à-dire qu'on renouvellerait le statut MFN en 1990 en imposant des normes plus strictes à Pékin pour l'année suivante. Là aussi, deux approches, une modérée, une autre plus radicale328. Les trois propositions, retrait, conditionnement avec les deux approches, furent soumises au vote à la chambre basse en Octobre 1990. L'administration Bush s'opposa à chacune d'entre elles, préférant maintenir le cap de son engagement constructif : depuis

320 Most Favoured Nation Status, désormais désignée sous le nom de Statut de Relations Commerciales Normales Permanentes, Permanent Normal Trade Relations Status.

321 SUETTINGER Robert L., Beyond Tiananmen: the politics of US-China relations 1989-2000, op. cit. p. 107.

322 GATES William, SKIDMORE David, « After Tiananmen: the Struggle Over U.S. Policy Toward China in the Bush Administration », art. cit., pp. 514-539.

323 SUETTINGER Robert L., Beyond Tiananmen: the politics of US-China relations 1989-2000, op. cit. p. 107.

324 WANG Yangmin, « The Politics of U.S.-China Economic Relations: MFN, Constructive Engagement, and the Trade Issue Proper », Asian Survey, Vol. 33, n°5 (May, 1993), p. 442. URL : http://www.jstor.org/stable/2645312. Consulté le : 26/02/2015

325 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, op. cit. p. 265.

326 Ibid., p. 265.

327 Ibid., p. 267.

328 Ibid., p. 268.

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les années 1970 rappelle le sinologue Michel Oksenberg, la garantie MFN avait largement contribué à la normalisation des rapports329. Dès lors que le veto présidentiel était appliqué, le vote devait obtenir une majorité aux deux-tiers dans chacune des deux chambres du Congrès330. Le retrait fut votée à la Chambre basse (247 voix contre, 174 pour) mais la majorité ne fut pas suffisante pour l'emporter sur le veto Présidentiel331. Alors que la session parlementaire prit fin en Décembre, le vote concernant le renouvellement du statut MFN n'eut pas le temps d'être soumis au Sénat et par conséquent, le statut MFN fut maintenu, au moins temporairement.

Section 2 : Le deuxième débat sur le statut de la nation la plus favorisée

Dès la fin de l'année 1990 la majorité favorable à une révocation ou au moins à un conditionnement du statut MFN attribué à Pékin s'était dessiné. Bien que maintenu, l'administration savait son renouvellement l'année suivante en danger. Le débat reprit donc à la mi-1991 avec une intensité encore plus forte que l'année précédente compte tenu du renforcement des liens bilatéraux332. Les inquiétudes demeuraient à l'égard de la situation interne chinoise : l'ampleur des réformes n'était pas celle du début des années 1980, l'autorité de l'Etat se maintenait sur les universités, les médias, les institutions de recherche et les ventes d'armes, de missiles et de technologies continuaient d'inquiéter les Américains. Les missiles M-9 de moyenne portée prévoyaient d'être délivrés à la Syrie. Plus alarmant encore pour les Etats-Unis, la Chine aidait l'Algérie à construire un réacteur nucléaire333. Une infime partie des exportations de biens chinois étaient produits par des prisonniers ce qui constituait aux yeux des Américains une violation évidente des Droits de l'Homme334. Tous ces éléments amenèrent l'administration à envisager que le Congrès déciderait de monnayer le statut MFN pour contraindre Pékin à plus de souplesse. Le retrait n'était plus à l'ordre du jour mais on décida de le conditionner une fois de plus.

329 OKSENBERG Michel, « The China Problem », Foreign Affairs, Vol. 70, n°3 (Summer, 1991), p. 3, URL: http://www.jstor.org.ezscd.univ-lyon3.fr/stable/20044815, consulté le 07/05/2015. Une note du département d'Etat de Juin 1991 rappelle également qu'en cas d'interruption du statut MFN à la Chine, celle-ci aurait mis en place des tarifs douaniers plus contraignants. L'inquiétude des Américains dans ce cas-là mentionne le mémorandum, n'était pas l'arrêt des exportations américaines (seulement 4 milliards en 1990) mais le fait qu'un retrait américain donnerait l'avantage à l'Europe et au Japon pour reprendre des parts de marché en RPC : cf U.S. DEPARTMENT OF STATE, « President's Report on MFN Status for China - 17th of June 1991 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 4p.

330 LAMPTON M. David, Same Bed, Different Dreams: Managing U.S.-China Relations, 1989-2000, op. cit. p. 26.

331 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, op. cit. p. 268.

332 WANG Yangmin, « The Politics of U.S.-China Economic Relations: MFN, Constructive Engagement, and the Trade Issue Proper », art. cit. p. 443.URL : http://www.jstor.org/stable/2645312. Consulté le : 26/02/2015

333 U.S. DEPARTMENT OF STATE, « Algeria and China - Nuclear Reactor Cooperation - 10th of June 1992», Digital National Security Archive, China and the U.S., 3p.

334 U.S. DEPARTMENT OF STATE, « Chinese Prisons and Forced Labor - 25th of April 1991 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 6p.

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L'administration Bush s'y opposa vivement, le Président accusant ses opposants au Congrès d'adopter une position isolationniste et de réduire de fait, les chances de promouvoir la paix et la stabilité en Asie. Une fois de plus les votes ne suffirent pas à contrer le veto présidentiel. Les effets du lobbying pro-MFN de la part d'organisations et d'entreprises du secteur privé avaient produit ses effets. Sans surestimer le rôle du business pro-Pékin, celui-ci contribua, par son effet marginal à contrer une éventuelle compensation du veto présidentiel335.

Section 3 : Les concessions chinoises à l'engagement constructif du Président Bush

Si les volontés de l'administration Bush de maintenir le statut MFN eut des échos dans l'opinion de Deng Xiaoping, au sein de la classe politique chinoise, ces débats les obligèrent à faire des concessions. S'agissant de la Chine, cela rima de fait comme une ingérence étrangère intolérable. En effet, cependant que les débats animaient le Congrès américain, à Pékin, l'éventualité d'un retrait apparaissait comme une fatalité à éviter impérativement. La RPC chercha donc à donner des gages de bonne volonté au dépend de son autonomie politique. Le 10 Janvier 1990, la Chine annonça le retrait de la loi martiale à Pékin336. Le 18, les leaders annoncèrent la libération de 573 manifestants de Tiananmen337. En Mai 1990, de nouveau Pékin libéra 211 dissidents338, afin de témoigner d'un retour à la normal sur le plan politique interne. Début Juin, 97 dissidents furent à nouveau libérés. Dans la foulée, Pékin promis l'acquisition de Boeing 747 à hauteur de 2 milliards de dollar avec une option d'achat de même ampleur à court terme. A la fin du mois, Fang Lizhi quitta l'ambassade américaine à Pékin pour rejoindre la Grande-Bretagne339. A l'occasion du deuxième débat, Deng Xiaoping décida que la RPC devait à nouveau se préparer à conserver le statut MFN américain en faisant de nouvelles concessions340. Au printemps 1991, Pékin annonça l'arrêt de la production de biens chinois par les prisonniers ainsi que le transport illégal de produit textile aux Etats-Unis341. De même, la RPC s'engagea à placer la construction du réacteur nucléaire algérien sous contrôle de l'AIEA et à signer le TNP l'année d'après. En Juin

335 GATES William, SKIDMORE David, « After Tiananmen: the Struggle Over U.S. Policy Toward China in the Bush

Administration », art. cit. pp. 514-539.

336 SUETTINGER Robert L., Beyond Tiananmen: the politics of US-China relations 1989-2000, op. cit. p. 101.

337 Ibid.

338 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, op. cit. p. 264.

339 Ibid., p. 265.

340 Ibid., p. 279.

341 U.S. DEPARTMENT OF STATE, « Measures Taken and To Be Taken by the Chinese Government to Prohibit Illegal Transshipment of Textiles - 4th of June 1992 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 8p.

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1991, le Premier ministre chinois Li Peng déclara que la Chine ne pouvait pas donner davantage de concessions342.

Ainsi, bien qu'en apparence les deux Etats semblassent s'orienter sur la voie de l'ouverture, de la « renormalisation » et de l'interdépendance harmonieuse, ces mouvements accentuaient simultanément le caractère de plus en plus asymétrique de la relation.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius