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Enfant naturel en droit tchadien, étude à  la lumière du projet de code des personnes et de la famille


par Modeste BESBA
Université de Ngaoundéré. - Master 2016
  

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Section deuxième : L'exclusion de la possession d'état comme mode d'établissement de la filiation naturelle

Refusée par la jurisprudence classique au motif que c'est ouvrir un moyen de contourner la prohibition qui existait alors de rechercher en justice une paternité naturelle113(*), la possession d'état fut admise par la loi française du 25 juin 1982. La possession d'état est définie par le lexique des termes juridiques comme l'apparence d'un état donné servant, notamment, de preuve du mariage, de filiation ou de nationalité. Contrairement à la reconnaissance qui est une filiation volontairement déclarée, la possession d'état est une filiation tacitement vécue. Posséder un état c'est jouir en fait d'un titre et des avantages qui lui sont attachés et en supporter corrélativement les charges114(*). Il faut une fois les éléments constitutifs de la possession d'état réunis (paragraphe premier), dire que l'établissement de la paternité naturelle par cette voie est tacitement interdit au Tchad (paragraphe deuxième).

Paragraphe premier : Les éléments constitutifs de la possession d'état

Pour qu'il y ait possession d'état, la réunion d'un bon nombre d'éléments est exigée. C'est dans cette optique que l'article 321 du Code civil dispose : « La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation et de parenté entre un individu et la famille à laquelle il prétend appartenir. Les principaux de ces faits sont : que l'individu a porté le nom du père auquel il prétend appartenir ; que le père l'a traité comme son enfant, et a pourvu, en cette qualité, à son éducation, à son entretien et à son établissement ; qu'il a été reconnu constamment pour tel dans la société ; qu'il a été reconnu pour tel par la famille ». L'article 312 du PCPFT reprend la même définition en ajoutant que la possession d'état est prouvée et constatée par témoins. De ces deux articles, il ressort trois éléments constitutifs de la possession d'état qui sont : le nomen(A), le tractatus et la fama(B).

A- Le Nomen

Désigné par les textes comme le premier fait de la possession d'état, le nomen signifie le nom. Ainsi, posséder un état, c'est d'abord porter le nom correspondant à l'état dont on prétend avoir. Le nom est l'appellation servant à la désignation d'une personne dans la vie sociale et juridique115(*). C'est un élément qui facilite l'identification d'une personne. Etant un moyen d'individualisation de l'être humain, le nom se compose de plusieurs éléments dont le premier est le nom patronymique ou nom de famille. Le nom patronymique quant à lui est attribué en raison de la filiation et porté par les membres d'une même famille116(*). C'est par la mention du nom du père ou de la mère dans l'acte de naissance d'un enfant qu'on peut en conclure que ce dernier est son fils. Ce qui revient à dire qu'il serait difficile d'affirmer qu'un enfant portant le nom de monsieurX est le fils de monsieur Y.

Bien que le nom patronymique serve à désigner les enfants d'une même personne ou famille, il est précédé par un ou plusieurs prénoms qui permettent de différencier chacun des membres de la famille. A côté de ces éléments normaux peuvent s'ajouter des accessoires comme le surnom, le pseudonyme, voire un titre nobiliaire117(*).

Le surnom est un vocable de fantaisie donné à une personne par un tiers. Le pseudonyme est quant à lui défini par le lexique des termes juridiques comme un vocable de fantaisie qu'une personne utilise pour se désigner dans l'exercice d'une activité, généralement littéraire ou artistique. C'est aussi un nom d'emprunt, choisi par celui qui le porte afin de dissimuler son nom véritable118(*). Néanmoins l'utilisation du pseudonyme est limitée119(*).

Le droit de l'enfant à un nom dès sa naissance est consacré par la Convention Internationale des Droits de l'Enfant (CIDE) adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies le 20 novembre 1989 et ratifiée par le Tchad le 2 octobre 1990. L'article 7-1 de cette Convention dispose : « L'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaitre ses parents et d'être élevé par eux ». En dehors du cas de maternité de substitution, l'enfant est dès sa naissance enregistré sous le nom de ceux dont il est issu. Il est de principe que le nom patronymique d'une personne déterminée est celui de la famille à laquelle elle est attachée par la filiation ou par le mariage120(*). Exceptionnellement, le nom peut s'acquérir par une décision de l'autorité administrative ou judiciaire121(*). Seule la détermination du nom par l'effet de la filiation importe ici. Cette attribution du nom varie selon que l'enfant est légitime ou naturel.

Lorsqu'il s'agit d'un enfant légitime, aucune difficulté ne surgit puisqu'il prend directement et incontestablement le nom de son père ou du prétendu mari de sa mère en application de la présomption de paternité. Les rédacteurs du PCPFT ont repris cette position. Selon l'article 314 de ce Projet, la possession d'état à l'égard du père légitime est établie en prouvant que l'enfant a constamment porté le nom du père dont il prétend descendre. Mais en cas de désaveu, il prend le nom patronymique de sa mère122(*). Ce qui est difficile dans la société africaine et tchadienne en particulier, puisqu'il est très rare qu'une personne rejette un enfant né de sa femme.

La détermination du nom de l'enfant naturel a, au contraire, suscité de difficultés tranchées aujourd'hui par la loi française du 25 juillet 1952123(*). Cette loi a envisagé plusieurs situations pour résoudre ces difficultés. D'abord, la règle voudrait que soit attribué à l'enfant, le nom de celui qui l'a reconnu. Mais, l'enfant naturel dont seule la mère a reconnu acquerra le matronyme124(*) de celle-ci. Ensuite, si les deux parents l'ont reconnu simultanément, l'enfant acquiert le nom de son père. Par contre, lorsque la filiation de l'enfant a été établie successivement à l'égard de l'un et de l'autre parent, l'enfant prend le nom de celui vis-à-vis duquel, la filiation est établie en premier. Ce cas a soulevé jadis de difficultés : non pas cependant si la filiation est établie à l'égard du père, puisqu'on a toujours admis que l'enfant gardait définitivement le nom de son père ; mais dans l'hypothèse inverse, on s'est demandé si l'enfant, qui avait eu le nom de sa mère, ne devait pas changer le nom pour prendre celui de son père125(*). Enfin, lorsque la filiation de l'enfant n'est établie à l'égard d'aucun de ses parents, il est possible que, le nom de la mère soit indiqué dans l'acte de naissance126(*).

Le nom patronymique, bien qu'immuable supporte certaines exceptions. Ce qui veut dire qu'on peut le changer. Des changements du nom sont possibles dans deux séries de cas127(*) : d'abord s'il y a changement d'état ; ensuite si l'individu est autorisé à modifier son nom par décision administrative ou judiciaire. En plus de son caractère d'immuabilité affirmé par la loi du 6 fructidor an II, le nom est aussi indisponible et imprescriptible. Le nomen n'est pas l'unique élément constitutif de la possession d'état ; le tractatus et la fama en sont aussi.

* 113BENABENT (A.), Droit civil, La famille, op.cit., n°511, p.416.

* 114 TERRE (F.) et FENOUILLET (D.), Droit civil, Les personnes, La famille, Les incapacités, op.cit., n°744, p.616.

* 115 WEILL (A.), Droit civil, Précis Dalloz, Tome1, 1968, n°462, p.340.

* 116Mlle Ayo Alvine A. ORE LAWIN, La discrimination à l'égard des enfants incestueux dans le Code des Personnes et de la Famille du Benin, op.cit., p.19.

* 117 WEILL (A.), Droit civil,op.cit., n°462, p.340.

* 118 WEILL (A.), Droit civil, op.cit., n°475, p.349.

* 119 Sauf dérogation spéciale, les étrangers ne peuvent pas utiliser un pseudonyme. Puisque le pseudonyme n'est licite que dans le domaine artistique ou littéraire, il ne saurait être utilisé dans les professions médicales ou paramédicales ; de telles professions ne pouvant s'exercer que sous un patronyme. Le titulaire du pseudonyme peut s'opposer à l'utilisation du même nom par un tiers à titre de pseudonyme dès lors que cet emploi risque de créer une confusion préjudiciable. Voir aussi WEILL (A.), Droit civil, op.cit., n°475, p.349.

* 120 WEILL (A.), Droit civil, op.cit., n°463, pp.340-341.

* 121WEILL (A.), Droit civil,op.cit., n°463, p.341.

* 122 Art.16 APCPFT : « L'enfant né dans le mariage porte son nom et le nom de son père. En cas de désaveu, il prend le nom patronymique de sa mère ».

* 123 WEILL (A.), Droit civil,op.cit., n°465, p.341.

* 124 Le matronyme est le nom de famille transmis par la mère.

* 125 La Cour de cassation s'était prononcée sur cette question en faveur du nom du père, pour éviter de révéler trop nettement le caractère irrégulier de la filiation. Cette solution, motivée par l'intérêt de l'enfant, était trop absolue : elle pouvait, bien au contraire, nuire à l'enfant qui, après avoir porté un nom pendant un bon temps, en porterait un autre du jour au lendemain. La loi française du 25 juillet 1952 a changé la solution : elle pose en principe que l'enfant dont la filiation est d'abord établie vis-à-vis de sa mère conserve le nom de celle-ci ; toutefois, si la filiation est ensuite établie par le tribunal de grande instance de son domicile statuant en chambre du conseil, à prendre le nom de ce père, soit par addition au nom de la mère, soit par substitution à ce nom, surtout en considération de l'intérêt de l'enfant.

* 126WEILL (A.), Droit civil,op.cit., n°465, p.342.

* 127WEILL (A.), Droit civil,op.cit., n°469, p.345.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote