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La prise en charge des mineurs non accompagnés marocains.


par Nadia Violain
Université Paris Est Creteil - Master expertise ingénierie et projets internationaux 2019
  

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PARTIES VII : ANALYSE

Le passage à la majorité et les modalités de régularisation.

A travers cette thématique, on observe tout d'abord une différence flagrante entre la Suède et la France. Il apparaît à travers les entretiens que la question de la régularisation est surtout abordée par les acteurs suédois. En Suède, l'asile est devenu la seule entrée pour les migrants mineurs cherchant à obtenir une régularisation. En effet, l'évolution du climat socio-économique va provoquer en 2015 un tournant dans les politiques d'accueil. Le gouvernement suédois va chercher à limiter les flux migratoires par différents moyens comme par exemple : le rétablissement des frontières, contrôle d'identité systématiques, le passage d'un titre de séjour permanent à un permis de résidence temporaire (LMA), comme le stipule Suzanne de l'association Habibi dans cet extrait « « Il ne donne pas la nationalité, mais juste un titre de séjour. ». On retrouve dans les entretiens le durcissement du processus de régularisation. « Oui l'ancien protocole, après trois refus successifs de demande d'asile continuait le versement d'allocation et l'attribution du logement le temps de trouver une solution. Actuellement, à partir du troisième refus la prise en charge est arrêté automatiquement et le jeune majeur reçoit une obligation de quitter le territoire Suédois. La seule solution possible pour le jeune, est de prouver sa minorité avec des papiers d'identité marocain " nous rapporte Suzanne, en charge de l'accompagnement juridique des Jeunes Majeurs (association HABIBI).

Nous avons cet autre témoignage de Mustapha, psychothérapeute chargé du suivi des famille d'accueil (FRAMTIDSTAGET) « il ne faut pas oublier que ces jeunes, ils savent dès le départ qu'ils n'ont pas d'avenir ici. Ils viennent ici et ont déjà en tête qu'ils n'auront aucun papier. " ou encore celui de Sooi HABIBI « Oui mais lorsque le jeune atteint 18 ans ça devient problématique, toute la prise en charge s'arrête, on les retrouve à la rue de plus en plus délinquante. » Sooi

Le fonctionnement des procédures d'asiles ne semble pas être adapté aux mineurs non accompagnés, « Le négatif est que la prise en charge est longue, très longue, pour qu'à la fin le jeune n'obtienne aucune régularisation. » Tobias (HABIBI) « Le problème c'est que la demande d'asile est très très longue, il y a une autre solution : celle de trouver un contrat de

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travail, celle-ci est beaucoup plus simple. » Suzanne « Vraiment, le temps est un problème pour tout demandeur d'asile mais surtout pour ces jeunes-là, attendre cinq ans c'est impossible » Sooi-HABIBI

Rappelons qu'en droit suédois et en droit européen, un « réfugié » est défini comme un individu fuyant une persécution ciblée pour des raisons de race, de religion, de nationalité, de convictions politiques, d'orientation sexuelle, de sexe ou d'appartenance à un groupe. De ce fait, cette politique de régularisation par une procédure d'asile n'est pas véritablement adaptée aux marocains, dont le pays n'est pas considéré sur le plan international comme un pays non sûr. «Cependant, la solution se situe au niveau politique du Maroc ne justifie par le statut de réfugié. Même s'il existe des problèmes majeurs qui poussent les enfants à fuir. L'Europe doit ensuite assumer la responsabilité de répondre à leurs besoins mieux que maintenant. Par exemple, donner aux enfants un permis de résidence, quand ils espèrent en l'avenir et qu'ils ne finiront pas dans la criminalité » Sitapha FRAMTIDSTAGET. Cette politique a juste pour objectif de réduire les candidats à l'immigration.

Cette absence d'horizon est une source de découragement pour les MNA marocains qui sont alors peu incités à investir leur parcours d'intégration et se projeter dans leur avenir. L'absence de titre de séjour provisoire rend ces enfants «invisibles» aux yeux de la société et donc vulnérables à la discrimination et à l'exclusion puisque les enfants sans titre de séjour n'ont en outre droit qu'à des soins médicaux d'urgence et ont rarement la possibilité d'étudier, ce qui retarde leur développement et leur intégration. En Suède, à partir du moment où un migrant demande l'asile il obtient une carte spécifique : la carte LMA qui ouvre des droits d'hébergement, de scolarisation ou encore de soins.

Selon le cadre légal suédois le fait d'être mineur ne dispense pas de titre de séjour contrairement à la France où le mineur n'a pas à justifier d'un titre de séjour puisqu'il ne peut être considéré en situation irrégulière au vu de son statut de mineur et ne peut donc pas faire l'objet d'une reconduite à la frontière ou d'un placement en rétention. « Oui comme une réglementation probatoire, ce qui n'existe pas en France, du moment que tu es régularisé c'est que tu es passé par les foyers de l'ASE et même si tu as commis des petits délits on te régularise quand même si tu as un bon dossier ASE, si tu es assidu au niveau formation. » Abdel - DASES.

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En France, l'absence de titre de séjour provisoire pour les MNA n'est cependant pas sans poser problème dans la mesure où leur accès aux différentes institutions publiques est freiné par l'impossibilité de présenter une carte officielle reconnaissant leur présence sur leur territoire.

La loi suédoise sur les étrangers établit que toute procédure qui implique un enfant doit être traitée en priorité et que l'intérêt supérieur des enfants doit être respecté. À leur arrivée, les mineurs passent des entretiens à l'office national des migrations, en présence d'interprètes. On les interroge sur leur origine, leur situation familiale, leur parcours jusqu'en Suède, leur santé, leurs éventuelles attaches avec un autre pays vers lequel ils pourraient être renvoyés si leur demande était rejetée.

Pour l'aider dans ses démarches de régularisation en tant que demandeur d'asile, chaque mineur isolé reçoit l'aide d'un représentant temporaire «Godman» nommé par un responsable des tutelles.

L'adolescent est transféré vers un centre de transit, puis vers un logement ou vers une famille d'accueil s'il est très jeune. La procédure est depuis 2006 gérée par les communes suédoises. Lorsqu'un mineur voit sa demande d'asile rejetée, il est considéré comme étant en situation irrégulière. Il doit quitter le territoire. Le bureau suédois des migrations est censé accompagner cette démarche en recherchant la famille du mineur concerné dans son pays d'origine. Les enfants qui choisissent de rester clandestinement en Suède sont désignés par les termes « d'enfants cachés », avec le risque de devenir la cible de réseaux criminels. Pendant de nombreuses années, les personnes affirmant être des mineurs non accompagnés pouvaient s'attendre à un permis de séjour en Suède. Il n'y avait aucun examen médical pour vérifier leur âge. Durant la procédure d'asile, les mineurs étaient logés, soit dans des foyers avec un encadrement professionnel, soit dans des familles suédoises, et ils étaient scolarisés dans les mêmes écoles que les enfants suédois.

En réalité, l'étranger en tant qu'individu n'ayant pas la nationalité du pays dans lequel il réside est soumis à une série de restrictions dans l'exercice de ses droits civils, sociaux et politiques par rapport aux nationaux. En règle générale, les droits des personnes non nationales sont limités au niveau législatif ou soumis à condition d'exercice, en particulier en ce qui concerne

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repéré à https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/7244687/3-02052016-AP-

FR.pdf/270f3b41-2f43-48c1-ba6d-c465cd7f5c0c

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la possibilité d'accéder, de séjourner et de s'établir sur le territoire, l'accès libre au travail, l'accès aux soins de santé, l'éducation, l'hébergement, etc. « Il faut, comme en Espagne, donner la possibilité au jeune de bénéficier d'un titre de séjour de courte durée à son arrivée, pour lui donner accès aux principaux services publics : hôpitaux, école, transports. Ceux qui ne veulent pas donner leur identité devraient quand même bénéficier d'un titre de circulation officiel qui montre qu'ils sont suivis. Fatiha-ACDLP ».

C'est pourquoi le Conseil de l'Europe recommande que « lorsqu'un mineur engagé dans la réalisation de son projet de vie atteint la majorité et lorsque celui-ci fait preuve de sérieux dans son parcours scolaire ou professionnel et témoigne de la volonté de s'intégrer dans le pays d'accueil, un permis de séjour temporaire devrait lui être délivré pour le temps nécessaire à l'accomplissement de son projet »

La situation administrative des jeunes lorsqu'ils atteignent leur majorité constitue également un enjeu important.

Rappelons que selon les statistiques d'Eurostat51 la Suède en 2015 à enregistré le nombre le plus élevé de demandeurs d'asile considérés comme mineurs non accompagnés.

En France, les MNA marocains à Paris ont souffert d'un problème particulier : ils ont été stigmatisés et perçus comme des dangers pour la société. Les institutions hésitent encore à les régulariser, même s'ils sortent de la rue et entrent dans le dispositif de droit

«Pour l'instant tout ce que j'ai vu de cette politique se résume à une fermeté vis-à-vis des migrants : toujours plus de police, aucun jeune n'a été régularisé, y compris ceux installés dans un processus de formation. Fatiha, ACDLP «.

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Les difficultés liées à la régularisation, en France et en Suède, créent un fort sentiment d'insécurité et un stress important chez le public des MNA marocains déjà fragilisés par une histoire marquée par des traumatismes.

« Donc au contraire ils faut que les investissements soient pérennes et permette aux personnes de se projeter sur la durée , parce que effectivement ce que vivent les jeunes marocains qui même quand ils ont accès à un minimum de prise en charge ça ne dure pas, c'est tous nos jeunes qui sont ici, c'est à dire tous les jeunes qui sont demandeurs, prêt à tout faire , prêt à se livrer entièrement et à faire tout ce qu'on leur dit au mépris de leur propre envie notamment dans l'éducation beaucoup par exemple veulent faire un cursus classique nous leur disons non tu vas faire un métier plombier , électricien puis c'est tout, eh bien ces jeunes s'adaptent à tout et pourtant ils ont une épée de Damoclès en permanence au-dessus de la tête donc grandir sereinement et s'épanouir dans ce contexte c'est compliqué d'autant plus si on est carencé comme le sont les jeunes marocains » Mathilde - HORS-LA-RUE

L'absence de régularisation administrative empêche ce public de se fixer sur un territoire donné et d'adopter un réel projet d'insertion. Se sentant exclus du pays dans lequel ils se trouvent, ils vont chercher à se déplacer dans un autre pays d'Europe. Toutefois, hormis l'Espagne, aucun autre pays européen ne facilite leur régularisation. Cette stratégie de mobilité au sein des pays européens met ces enfants dans une situation de danger permanent. Ils arrivent aux frontières des différents pays européens sans représentant légal, fréquemment sans point de chute, sans relais familial. De nombreux dangers les guettent, liés à l'errance dans la rue, et à leur exploitation par des réseaux criminels.

C'est pourquoi, pour ces publics, les acteurs n'envisagent pas d'autre solution que la régularisation afin de faciliter leur intégration et sécuriser leurs parcours de migration.

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Le fonctionnement global des institutions

En France, la mission d'accueil, d'orientation et d'accompagnement des MNA Marocain en situation d'errance a été confié par les pouvoirs publics à une seule association, le CASP qui travaille avec les institutions publiques en chargent de la protection de l'enfance : ASE, PJJ, et organisme d'évaluation sociale des nouveaux arrivants se déclarant mineur et en recherche de protection sur le territoire français.

Auparavant, durant une phase expérimentale, deux autres intervenants avaient été mandaté pour aller sur le terrain des MNA Marocain : l'association Hors la rue, et l'entreprise d'intérim à caractère sociale TAGA.

Une association indépendante s'est positionné sur la problématique des MNA Marocain : l'association au coeur de la précarité.

Partant du constat que l'ensemble des institutions classique, de protection de l'enfance était inadapté au public des mna marocains, l'état français à chercher au début de son intervention à comprendre le phénomène en vue de faire émerger un projet spécifique pour eux. « C'est pour cela que des réunions multi partenariales se sont mis en place par la mairie de Paris parce que ces jeunes échappent complètement aux propositions proposées par la ville de Paris». Il apparaît que l'association ACDLP, présente sur terrain n'était pas convié à ses réunions comme le stipule Mathilde d'hors la rue « la Mairie de Paris a mis en place des réunions bimensuelles auxquelles on aurait souhaité que vous soyez présent parce que ce sont tous les acteurs en interaction avec les jeunes qui devrait être accueillis.».

Nous savons aussi que d'autres acteurs associatifs ainsi que des riverains ont cherché à apporter des solutions pour promouvoir leur insertion par le biais d'activités culturelles et sportives mais ils ont été écartés par les autorités municipales, comme le décrit Fatiha d'ACDLP «Pourtant, le quartier de la Goutte d'Or est un quartier qui est classé sensible et est une zone prioritaire en matière de politique de la ville. De nombreuses associations y sont installés dans de nombreux domaines : sport, culture, alphabétisation, ...L'axe de la prévention n'a pas été assez travaillé. J'ai vu des jeunes se radicaliser dans la délinquance, poussés par des mauvaises fréquentations dans le quartier ou s'enfoncer dans la toxicomanie. De nombreuses portes leur ont été fermées au motif qu'ils étaient étrangers. Des éducateurs de TAGA très expérimentés ont activé leur

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réseau pour demander l'accès à des structures parisiennes de loisirs et de sport mais leurs démarches ont été bloqués. Ils ont d'ailleurs fini par démissionner».

On peut regretter, l'exclusion d'acteurs ayant développé une expertise auprès de public aux caractéristiques similaires des MNA Marocains, c'est le cas de Hors la rue avec les jeunes Roms. Cela représente à notre sens, une forme de hiérarchie.

Contenu de la complexité du public, il apparaît difficile voire impossible de travailler seul, même si comme le précise le chef de projet de la DASES Abdel, le CASP travaille en réseau et coordination avec les autres acteurs officiels de la protection de l'enfance. «le CASP, a été désigné pour mettre en place déjà une mise à l'abri, nous avons l'espoir que cela fonctionne , nous voulions travailler avec eux, on estimait que notre travail de rue fonctionnait et ce que nous avions pu mettre en place aussi, comme l'équipe de la croix rouge avec un pédopsychiatre et des infirmiers en rue» , « on aurait aimé être partie prenante comme l'ensemble des partenaire, je pense que sur ce type de public c'est impossible de travailler seul, une structure avec ses solutions ne peut pas avoir la solution pour ce public, donc les échanges sont indispensables, la collaboration aussi et c'est ce qu'il manque à ce programme » Mathilde Hors la rue.

La dimension « plaidoyer et critique des institutions » des associations Hors la rue et ACDLP semblent être à l'origine de leur exclusion du dispositif global d'accueil des MNA Marocain. On sent qu'en France, les autorités ne sont pas prêtes à ouvrir des structures adaptées pour ces jeunes. La proposition d'un centre d'accueil de jour réclamer par l'association Hors la rue n'a pas été retenu. L'Etat, cherche absolument à faire entrer les migrants marocains dans les dispositifs du droit commun. « Il fallait un programme spécifique, on aurait voulu un programme, beaucoup plus souple, beaucoup plus expérimental qui innove un petit peu plus, »Mathilde de Hors la rue.

En Suède, on relève davantage de collaboration impliquant tous les acteurs, qu'il soit public ou issus de la société civile. Comme on a pu le voir plus haut dans la description des politiques d'accueil et de prise en charge « La différence est qu'en Suède tous les services en liens avec ces mineurs travaillent ensemble pour intervenir le plus rapidement possible et trouver une solution, la justice le service de migration, les associations. C'est pour cela qu'à Stockholm il

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n'y a pas d'enfant à la rue», « Ce qui définit le système Suédois est vraiment la coordination, par exemple si un mineur ne rentre pas dans son foyer ou sa famille d'accueil, celle-ci prévient le kontaktperson qui lui contacte le social qui lui prévient la police lui envoie la photo du jeune pour qu'il le recherche sur le territoire et le ramène.» Sooi de l'association Habibi.

On relève en Suède, une continuité dans la chaîne d'information et de prise en charge.

Même si le jeune est transféré vers des structures spécialisés, il a la possibilité de rester en lien avec ses personnes ressources « Non, nous nous ne sommes plus mandatés si le jeune est transféré vers ces centres. Nous travaillons que dans la première étape, notre lien est lié aux familles d'accueil. Le reste c'est le service social. Les jeunes continuent de nous contacté, mais nous ne sommes plus mandatés. Bien sûr nous ne stoppons pas la relation. Certains continuent à venir dans notre association, à faire des activités. Parce à FramtidstOEget nous avons mis en place des activités pour ce groupe de jeunes, des repas «culturels tous les jeudis, des match et cours de foot & boxes, des ateliers de réparations de téléphones et des ateliers de langues. Donc nous continuons à les aider et à les voir.» Samir FramtidstOEget.

Dans les deux pays, on observe des pratiques racistes et discriminatoires à l'égard des jeunes marocains dans de grandes institutions étatiques comme la police et les hôpitaux. Néanmoins, le problème du racisme institutionnel semble tabou en France. Seul un acteur en parle, l'association ACDLP. L'association Hors la rue quant à elle parle de maltraitance institutionnelle «nous avons pu avoir des échanges avec des policiers complètement excédé, violent et complètement maltraitant à l'égard de ces jeunes», « Nous avons saisis le défenseur des droits sur les maltraitances dont ont pu être victimes les jeunes au commissariat, un jeune a pu témoigner. Cela fait partie de notre travail de constater les violences dont les jeunes ont été victime «, «Nous avons saisis le défenseur des droits sur les maltraitances dont ont pu être victimes les jeunes au commissariat, un jeune a pu témoigner. Cela fait partie de notre travail de constater les violences dont les jeunes ont été victime «.

On constate ici que même si l'Etat cherche à faire preuve de souplesse, vis à vis du public des MNA Marocain, il maintient des pratiques qui posent de réels problèmes. Tel que le fait de passer obligatoirement par les commissariats de police pour trouver un accueil d'urgence la nuit. On retrouve les mêmes problèmes de maltraitance policière en Suède, même si comme le dit Sooi de l'association Habibi, la police travaille davantage en étroite coordination avec les services sociaux dans l'intérêt supérieur de l'enfant. «ils se font souvent tapés par la sécurité ou

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ont des altercations avec la police. Parce que ces jeunes n'ont pas peur et ne se laisse pas faire. Donc eux font la différence, ce groupe se font identifié juste par leur vêtement. Et directement ils se font contrôler par exemple. On essaie de leur faire comprendre ça aussi, que la tenue vestimentaire joue beaucoup sur l'image qu'ils renvoient.», «j'ai déjà eu des discussions avec des personnes des services sociaux qui dénoncent que ces jeunes n'étaient pas traités comme les autres sur tous les droits. Dès que le mineur est fiché comme marocain.» Samir et Mustapha de l'association FramtidstOEget.

Le problème des discriminations institutionnels pose la question de la représentation juridique des MNA marocains et la défense de leur intérêt. Hors, il apparait que les jeunes sont mal défendus par les avocats mis à leur disposition gratuitement par l'état car ils n'ont pas connaissance de ce public. « Oui, ou sinon ce sont de nouveaux avocats donc souvent il n'est pas bien défendu. Souvent ils ne connaissent pas du tout le phénomène et les problématiques des jeunes Marocains mais plutôt celles des afghans.» Suzanne de l'association Habibi. Dans ce contexte, des associations s'organisent pour faire entendre et respecter les droits de ses mineurs. «J'aide toujours les jeunes mais j'essaie vraiment de faire en sorte que l'État comprenne ces jeunes et que tous leurs droits soient respectés.» Sooi Habibi.

Pour résumer, on peut que la France et suède sont doté de système de protection où l'intérêt supérieur de l'enfant est au centre des préoccupations. Mais les capacités d'adaptation des institutions dans leur ensemble sont encore trop limitées. La France et la Suède ont grand interet à échanger, sur la problématique spécifique. D'une part, parce que les publics se déplacent régulièrement entre les deux pays et d'autres part dans un objectif d'optimisation des prises en charge. Afin de mieux mesurer les effets de leur politiques, les états doivent exiger plus de transparence de la part des institutions en charge des MNA marocains. En l'occurrence, on déplore le refus de diffuser le rapport d'activité de l'association CASP mandaté par les pouvoirs publics.

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Comme on a pu le voir politique d'intégration === question territoriale

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Comme on a pu le voir au-dessus, à travers les grandes dates de l'histoire du monde associatif français, au cours des années les associations ont conquis une légitimité et une reconnaissance. Il apparaît que le développement associatif est lié aux grandes périodes historiques. Dans la première partie du XXe siècle il se spécialise dans les grandes lois sociales, au cours de la période du Front populaire on observe un essor du monde associatif se développer dans le domaine de l'éducation, de la culture et des loisirs. Tandis qu'à la libération de la seconde guerre mondiale, l'instauration de l'Etat-providence favorise un essor dans les domaines du sanitaire et social. Incluant une guerre de position entres acteurs selon leur légitimité, leur proximité avec les pouvoirs publics. « Les capacités ne possèdent pas les mêmes atouts dans leurs rapports avec le pouvoir et avec le public. »

On observe alors la construction d'une professionnalisation, une hiérarchisation des associations. Néanmoins, une fonction commune, partant nécessairement d'une dynamique commune, représentation des valeurs de l'institution. Ici, on l'observe des pratiques communes d'intervention : Allers vers ; plaidoyer ; accompagnement ; information.

Tous les entretiens abordent la question de la collaboration entre les différentes organisations.

Une institution doit son statut à une influence politique et économique. Une influence qu'elle s'exerce en «bannissant» les acteurs du même secteur, en les décourageant ou en essayant de la soumettre à sa vision pour installer la position. Une fois établit par les institutions politiques, elle développe sa propre dynamique avec un discours commun à l'institution dominante = travail accompli différent de ce que l'on attend. Il est donc nécessaire que l'institution dominante reste persuadée de l'utilité et de la valeur des actions de celle qu'elle protège. On observe beaucoup de similitude entre elles.

Se donne un statut professionnel/

Une autonomie toujours partielle, son existence dépend de la tolérance de l'état différent du pays. Par exemple ne France les mineurs dépendent des départements et en Suède les communes. Une autonomie dans la régulation de ses propres activités

Aucune propriété institutionnelle stable garantissant l'autonomie. (Public surtout

L'autonomie dépend de négociation et de persuasion. Mise en valeur d'attributs

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Les modalités de la prise en charge et des pratiques d'accueil

Les dispositifs d'accueil, et de mise à l'abri de la prise en charge des mineurs non accompagnés relève des conseils départementaux, dans le cadre de leur compétence en matière de protection de l'enfance. Néanmoins, face à l'ampleur prise par la problématique, les pouvoirs publics ont été amenés à organiser des circuits et des modalités d'accueil spécifiques aux MNA Marocain.

La période d'évaluation et de mise à l'abri, première phase de cette prise en charge, cristallise l'essentiel des difficultés rencontrées par les départements.

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La coordination et les échanges intereuropéens.

La mobilité comme point centrale des échanges européen,

Une meilleure connaissance des prises en charge européenne par les suédois, avec des visites dans les institutions identiques.

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Une uniformisation vue par les moyens de régularisation mais pas dans les prises en charge.

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Les spécificités du public

Le public des mineurs non accompagnés présente des caractéristiques particulièrement. Ils ont été identifiés par les pouvoirs publics, les institutions et la presse comme un public marginal, requérant une approche spécifique. En France, on observe chez l'ensemble des intervenants une absence d'expérience avec ce type de public.

Chansia, directrice au CASP nous parle d'un « on parlait d'un public qui semblait ne correspondre à rien du tout en termes de dispositif existant pour une prise en charge spécifique donc on était avec des jeunes très jeunes qui refusaient la prise en charge ASE qui refusait la prise en charge», «pour la première fois j'étais en face d'un public qui était super jeune et qui cumulé des difficultés qui rendaient une prise en charge et une approche un petit peu difficile.». Mathilde, responsable éducative de Hors la rue rapporte : «voir des enfants si jeunes de 12/13 ans nous en avions jamais vu, pourtant je travaille avec des enfants en errance depuis longtemps et essentiellement des jeunes roumains tous en situation de travail quotidien, certains en situation de TEH52 mais ça n'atteint pas des niveaux de misère humaines tel que les marocains, psychologiquement c'était extrêmement difficile».

Le chef de projet de la DASES de la mairie de Paris précise : « jeunes errants sur le quartier de la goutte d'or, qui avait un profil poly toxicomanes, délinquants sachant que de jeune errant comme cela nous n'en avions pas vu depuis la seconde guerre mondiale. En fait, il n'y avait aucune accroche avec les dispositifs disons « banales » de protection de l'enfance.» et « «Disons que personne ne savait faire dans ce public-là, c'est un phénomène que nous n'avions pas vu depuis la seconde guerre mondiale, des enfants errants qui refusent tout.».

La première caractéristique de ce public est leur ancrage dans la rue, et leur inadaptation aux structures classiques de prise en charge prévu pour les MNA. Je cite Fatiha, responsable du pôle MNA à ACDLP « La première caractéristique commune chez le public des mineurs marocains est l'absence totale de liens avec les institutions françaises et leur marginalisation «. L'ensemble des acteurs interrogés en France parlent de refus de prise en charge, Chansia du CASP déclare

52 Traite des êtres humains

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« Quand un mineur étranger arrive sur le territoire français il se déclare à une association d'une mairie ou autre pour déclarer qu'il est seul isolé et qu'il est mineur isolé étranger. Ces jeunes ne font pas cette démarche-là, il reste dans une espèce de no man's land où finalement ils s'autogèrent eux même sur un territoire», « En fait, il n'y avait aucune accroche avec les dispositifs disons « banales » de protection de l'enfance.» nous dit Abdel de la DASES.

Il s'agit d'un public qui vit constamment dans la rue, et doit être compris et accrochés comme tel. « au bout d'un mois nous avions compris que la problématique était d'abord essentiellement celle des enfants des rues «, « pour les marocains je trouve que l'on avait un profil très désaffilié. Il y avait vraiment la rue, la rue et les copains de rues», « il faut que l'on s'adapte à leur errance et leur envie de liberté» Mathilde, Hors la rue.

Leur inadaptation sociale est aggravé en partie par leur poly toxicomanie, beaucoup de jeunes marocains sont des consommateurs réguliers ou irréguliers de drogue, y compris les plus jeunes, comme le dit Mathilde de Hors la rue « Nous avons rencontrés cinq très jeunes enfants ayant visiblement entre 12 et 14 ans effectivement défoncé, il consommait de la colle dans rue», « tous les jeunes avaient une problématique addictive très forte, et nous étions sur des consommations de colle , Rivotril, alcool, cannabis, ça a changé après puis c'était périodique . La vraiment, le moment où l'on a monté le programme nous étions sur colle et Benzodiazépine». C'est aussi le constat de Fatiha d'ACDLP « Pour certains elle s'ajoute à la prise d'autres substances telles que psychotropes, alcool, ecstasy, cocaïne, crack. Du fait de leur addiction aux drogues, leur placement dans un foyer est difficile. Ils sont donc amenés à vivre directement dans la rue, dans des squats, ou des connaissances.»

La deuxième caractéristique commune aux MNA Marocains, est que l'argent est au centre de leur préoccupation comme nous l'explique Fatiha d'ACDLP. « la plupart ont pour projet de gagner de l'argent, soit dans un objectif de survie, soit dans le but d'aider un membre de leur famille, le plus souvent leur mère ou les deux» ainsi que Mustapha de l'organisation suédoise FramtidstOEget « comme je disais la première difficulté c'est la confiance, puis aussi l'argent qu'il place en priorité, il a besoin d'envoyer de l'argent à sa famille et du coup le reste passe au second plan».

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La difficulté d'accrocher les jeunes revient dans tous les entretiens, les mineurs ne se laissent pas approcher facilement. Ils ont développé une méfiance vis à vis des institutions, ou tout ce qui rapporte à une institution. «Je pense que les jeunes n'ont jamais eu réellement confiance en nous.» Mathilde de Hors la rue. Mustapha de FramtidstOEget, témoigne également dans ce sens « comme je disais la première difficulté c'est la confiance, puis aussi l'argent qu'il place en priorité, il a besoin d'envoyer de l'argent à sa famille et du coup le reste passe au second plan.». Cette défiance se traduit par le rejet de toute solution institutionnelle. «Puis ces jeunes la moindre erreur il ne pardonne pas, après nous sommes une institution donc nous avons un mur, un cadre et ces jeunes sortent du cadre tout le temps «, « l'ASE a mis en place des hébergements hôtels pour les marocains, ce qui n'était pas adapté, même l'hôtel il finissait par détruire complètement la chambre et s'en aller. Ils étaient beaucoup dans la destruction des solutions qui leurs a été proposé. « Mathilde Hors la rue. Samir de FramtidstOEget fait la même observation «Non des fois il loupe une étape, en général ces jeunes n'ont pas l'habitude d'un cadre structuré avec des limites. Dès que quelqu'un les resserre ils fuient «.

Malgré leur situation sanitaire, médicale et psychologique très dégradées, beaucoup de jeunes ne laissent même pas accompagnés à l'hôpital. «Ce qui était très dure aussi, de voir des jeunes se scarifier sous nos yeux, pas juste des scarifications de poignet et qui refusait l'accompagnement d'urgence, avec des questionnements incroyables comme est-ce qu'on appelle les pompiers ou pas»,

Néanmoins tisser un lien de confiance avec ce public n'est pas chose impossible. On remarque que plusieurs choses doivent être réunis pour créer un lien de confiance :

- L'identification d'une personne ressource. La multiplicité des acteurs peut s'avérer troublante pour ce type de public. «Nous déjà je pense qu'on était trop de tête, tous les jours ce n'est pas les mêmes éducateurs sur le centre, forcément tisser du lien c'est plus long quand tu n'as pas identifié une personne ressource.» Mathilde de Hors la rue., Samir FramtidstOEget « quand ils arrivent ils sont confrontés à une multitude de structure, d'acteurs, un système complexe.».

- La régularité et la disponibilité

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- La langue, le partage d'une culture commune avec les jeunes facilitent les relations. « Il y a beaucoup de jeunes qui, dès le départ, ne me font pas confiance à cause de la barrière de la langue.» Fatiha ACDLP

- La souplesse du cadre de la structure

Le public des MNA Marocain, présentent des caractéristiques propres aux enfants des rues. Ils développent des mécanismes d'adaptation aux dangers de la rue. Comme le fait, par exemple, de rester constamment en groupe. Cette dimension collective est indispensable à prendre en compte. Comme le rapporte Chansia « ils s'autogèrent eux même sur un territoire».

Il s'agit aussi d'un public très mobile, ce qui rend difficile l'élaboration de projet à long terme « on avait souvent des fins de non-recevoir parce que les jeunes n'étaient pas demandeurs de protections, ce qui légalement n'étaient pas un critère pour un mineur demander une protection n'est pas lié à son adhésion au projet mais le fait qu'il soit sans domicile fixe avec une identité non vérifier non déclaré, ça mettait beaucoup en péril l'exécution de ses dispositifs « Mathilde Hors la rue.

Ainsi, contenu de l'ensemble de ces caractéristiques, les états sont obligés d'inventer de nouvelles formes de prise en charge. Comme l'indique Mathilde de Hors la rue. « qu'il y a eu de la part de la ville de Paris un effort hallucinant de mettre en place quelque chose spécifique à ces jeunes».

Il est manifeste que les causes qui poussent les individus, ici des enfants à ce mode de vie sont tout à fait particulières. Les chiffres et les données ne pourraient expliquer la complexité et l'ampleur du phénomène. Cependant, l'expérience de terrain des différentes organisations non gouvernementales, ainsi que notre expérience d'intervention permettent cependant de dégager quelques tendances concernant le profil des mineurs non accompagnés marocain.

Comme le signifiait Marcel Mauss et Paul Fauconnet dans la sociologie : objet et méthode, « il faut admettre l'existence de certains états sociaux tout à fait différent des états purement

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individuels. ». Ici on se questionne sur un groupe interdépendant, on observe une dimension collective primant sur la dimension individuelle. A travers des tendances collectives, des comportements collectifs, une pensée collective. Je cite Mathilde responsable éducative de HORS-LA-RUE « pour les marocains je trouve que l'on avait un profil très désaffilié. Il y avait vraiment la rue, la rue et les copains de rues ».

Cependant, comme le stipule Fatiha de l'ACDLP «Le public des migrants marocains en situation d'errance présente des particularités mais ne constitue pas pour autant un public homogène. (...)», le groupe étudié est repéré par les institutions d'état.

Mais aussi des manières sociales les laissant agir selon leurs propres codes moraux, leur propre règle. Et cela à l'encontre des lois sociétales obligatoires, même si celle-ci leur rappelle sans cesse par une multitude de sanction. Ces sanctions quelle qu'elle soient prison, mépris social, invisibilité. Ne font qu'augmenter leur envie d'aller à l'encontre, et de mettre en échec ce qu'on leur propose. Rappelons que selon Marcel Mauss et Paul Fauconnet « une règle à laquelle l'individu se considère comme soumis, ne peut être l'oeuvre de cet individu : car toute obligation implique une autorité supérieure au sujet obligé, et qui lui inspire le respect, élément essentiel du sentiment d'obligation. ».

La séparation, l'éloignement des différents établissements fermés s'impose avec force, en reprenant les termes de Charles Suaud dans le petit séminaire « la sanction rituelle vient s'ajouter à la sanction disciplinaire », d'autant plus qu'il se retrouve dans l'extrême contraire de leur mode de vie habitué à la rue. -> incorporation (langue).

Vengeance sociale

PARTIES VIII : CONCLUSION

Les politiques sociales et de protection de l'enfance ne sont pas les seuls déterminants de la prise en charge des MNA. Même si, dans l'esprit des lois, tout enfant a droit à la même protection quel que soit son pays de naissance. Comme le rappelle la Commission européenne

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dans son Plan d'action pour les mineurs non accompagnés, « il est fondamental de veiller à ce (É) que, indépendamment de leur statut d'immigré, de leur nationalité ou de leurs antécédents, tous les enfants soient, avant toute chose, traités comme tels ».

Les politiques migratoires ont également un impact sur la condition des MNA. On entend par politique migratoire tout mécanisme institutionnel mis en place par un État pour gérer ses flux migratoires. Tout pays cherche à maîtriser ou influencer les flux d'immigration en provenance des pays externes à l'Union Européenne. D'ailleurs, à chaque campagne électorale, la question de la politique migratoire est toujours au centre des débats, comme on le constate par exemple à l'heure actuelle en France avec la tenue du débat parlementaire sur l'immigration, et ceci dans la perspective des élections municipales de 2020. Il est important de souligner tout d'abord que les décisions en matière d'immigration appartiennent à chaque État souverain.

Néanmoins, avec l'ouverture des frontières au sein de l'union européenne et la création de l'espace Schengen, les États cherchent à coordonner, du moins à inscrire la question des flux migratoires extra-européens dans l'agenda politique européen. Les MNA font partie du débat sur les politiques migratoires dans la mesure où se pose la question de leur intégration durable sur le territoire qu'ils ont choisi, ainsi que sur leur régularisation administrative.

Or, les problèmes d'intégration et les décisions en matière de régularisation administrative sont spécifiques à chaque État, et sont fonction des stratégies d'accueil (ou à l'inverse de rejet) des étrangers. Il est donc loin d'être évident d'harmoniser les législations et les pratiques européennes en matière de prise en charge des MNA. Les phénomènes migratoires se caractérisent par le fait que des individus, pour des raisons diverses, traversent des frontières.

Tout d'abord, il paraît important de rappeler que les système mis en place dans les différents pays résultent d'une histoire longue et propre à chacun en rapport avec leur caractéristique idéologiques. Le processus d'intégration s'inscrit de plus en plus dans une approche dynamique à double sens, engageant l'ensemble de la société, à travers les politiques publiques. Dans un contexte global, nationale et européen les politiques d'intégration convergent vers les conditions d'accueil et d'intégration. Comme, la place essentielle de l'apprentissage de la langue du pays d'accueil. Les directions différentes dans l'historique des politiques

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d'intégration, influent les politiques d'accueil et la prise en charge du public des jeunes migrants.

Par exemple, on a pu observer à travers l'histoire des politiques d'intégration Suédoise. La volonté d'inclure au coeur de la société les différences culturelles. Elles se veut préserver et entretenir l'héritage culturel des personnes immigrés. A travers des réformes telles que celles des langues maternelles. Les langues de l'immigration font partie intégrante de l'institution scolaire à travers des cours d'apprentissages de la langue maternelle. « L'héritage culturel et linguistique de l'immigré sont des données indissociables de sa personnalité et doivent être en conséquence préservé et respecté «. Selon le gouvernement, la société suédoise se doit de faire un effort de s'adapter à l'immigré et de lui reconnaître ses droits humains et culturels. La société suédoise est reconnue à travers sa politique d'accueil ainsi que sa protection sociale dites généreuses. Elle s'est construite à travers une pluralité de mode d'expression culturelles et une politique de minorité. Elle se veut respecter l'identité culturel et surtout permettre son maintien. « Tend à donner aux groupes linguistiques minoritaires les moyens de maintenir et de faire respecter leur langue et leur identité culturelle dans le cadre d'un intérêt commun, représenté par l'ensemble de la société suédoise. Riksdag 1986 «. De plus, en Suède la réflexion des politiques d'intégration a été précoce.

Tandis qu'en France, les politiques d'intégration font l'objet d'un débat plutôt récent, puisque rappelons que pendant très longtemps les étrangers étaient imaginés comme amené à repartir, «les étrangers étaient perçu comme une main d'oeuvre n'ayant pas vocation à s'installer». Au cours des années, la politique d'intégration à beaucoup évolué. D'abord elle se dessine autour d'une politique d'insertion et d'interculturalité, ensuite vers un développement social des quartiers à travers des questions territoriales. Pour arriver à la politique d'intégration actuelle, lié aux respects des valeurs de la République et à la lutte contre la discrimination. A l'opposé de la politique d'intégration suédoise, on observe une obligation pour le migrant d'adhérer à celles-ci. Ainsi, qu'une obligation de formation civique portant sur les institutions française, et «les valeurs de la République», ou encore d'une formation linguistique.

A travers ces données historiques, il est évident que la différence de la base même des politiques d'accueil et de la prise en charge des migrants, ici le mineur non accompagné rend difficile leur

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harmonisation. On peut même ajouter que la gestion européenne des politiques d'intégration et d'accueil, avec la variation des législations et des pratiques institutionnelles d'un pays à un autre au sein de l'espace Schengen, rend difficile la prise en charge et la compréhension de cette prise en charge par les mineurs non accompagné.

La gestion des flux migratoire à l'échelle européenne à entraîner une modification des pratiques politiques et administrative d'accueil des primo-arrivants le contrôle accru aux frontières, les dispositifs mis en place pour réguler l'accès à la nationalité. Mais aussi, des dispositifs protégeant les mineurs et leur arrivée sur le territoire européen. Tel que l'article 37 de la CIDE « l'arrestation, la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit être en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort et être d'une durée aussi brève que possible », ou encore l'article 2 qui insiste sur le fait qu'il est nécessaire de permettre l'accès au territoire ou se trouve le mineur, et que le retour dans le pays d'origine ne peut être envisagée qu'après une évaluation complète des risques et de sa situation par des personnes compétentes qui conviendrait que le retour serait dans l'intérêt de l'enfant, et que celui-ci est bien renvoyé vers sa famille, ou dans un cadre sécurisant. La problématique de l'accès au territoire ne fait pas l'objet de la même attention selon les pays. La Suède comme la France ont ratifié la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant pour les libertés de circulation, pourtant on observe des pratiques différenciés. Tel que la problématique des «zones d'attente» en France, ou certains mineurs se retrouvent interpellés et placer en « zone d'attente » pendant une période plus ou moins longue, 20jours maximum pour les mineurs isolés avant le rapatriement de celui-ci vers son pays d'origine.

L'évolution de la situation socio-économique nationale et européenne dans un contexte de restructuration des dépenses publiques, influe les politiques d'intégration des différents pays membres. D'une part, à travers les modifications des pratiques politiques et administratives d'accueil des primo-arrivants, qui peut s'avérer, précariser le monde associatif en le détournant de ses fonctions premières. En se retrouvant, avec une augmentation importante du temps consacré à la dimension administrative et juridique. Et donc, en délaissant les dimensions d'intégrations, éducative, culturelle... nécessaire au processus d'autonomie du jeune migrant.

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Le critère de répartition est aussi une condition importante dans la prise en charge, puisque comme nous avons pu le démontrer tout au long de la recherche, la répartition des mineurs non accompagnés sur le territoire de l'union européenne est particulièrement inégale. D'autant plus, les divergences concernant la définition de la notion se répercutent sur les statistiques ainsi que l'orientation prioritaire de certains pays européens comme la Suède des mineurs vers la demande d'asile.

En effet, d'une part les divergences dans les définitions constituent un obstacle à toute tentative d'harmonisation sur cette problématique. La mise en oeuvre d'une politique commune cohérente implique en effet de s'accorder préalablement sur l'étendue du domaine traité et sur

les termes utilisés.
D'autre part, il apparaît très difficile d'estimer le nombre de mineurs non accompagnés présents sur le territoire des États de l'Union européenne. Même si le module de détection européen du Comité italien pour les mineurs étrangers a été créer dans l'objectif de repérer les mineurs. Ce module contient en particulier des données relatives à l'identification du jeune (âge, nationalité, présence de proches en Italie, lieu de repérage du jeune...), sa prise en charge sociale (lieu de résidence, permis de séjour, représentant légal...) et la recherche de sa famille (numéro de téléphone des parents etc.). Inversement, les mineurs demandeurs d'asile et les victimes de traite ne sont pas répertoriés dans le système de recueil de données mis en place en Italie et font l'objet d'un recensement distinct. Il exclut les demandeurs d'asile, les victimes de traite et les citoyens de l'UE, ainsi que les mineurs non accompagnés non pris en charge par une institution publique.

D'autant plus, dans notre cas les mineurs non accompagnés d'origine Marocaine ont la particularité d'avoir une mobilité européenne. Mais aussi, se pose la problématique du changement d'identité en fonction du pays (nom, prénom, origine, âge). Ou encore, leur errance qui les éloigne du droit commun dans certains pays comme la France, ou ils vivent à la rue. Ces spécificités rendent presque impossible l'évaluation quantitative du phénomène. Quant à l'identification, on a pu voir que la France comme la Suède avait créer une coordination internationale exceptionnelle avec le royaume Marocain. Les données officielles nationales ou européennes ne permettent pas de prendre conscience de l'ampleur du phénomène car elles ne

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fournissent aucune estimation sur les jeunes en errance ou encore ceux refoulés avant leur accès sur le territoire. Même si, en Suède on peut avoir une estimation du phénomène de par son orientation des mineurs vers une demande d'asile.

Ainsi, il semble aujourd'hui très difficile d'appréhender le phénomène des mineurs non accompagnés au sein même de chacun des pays et a fortiori à l'échelle de l'Union Européenne. Face à la dispersion des sources et des interlocuteurs, il apparaît donc nécessaire de mettre en place des institutions de référence dans ce domaine dans chaque pays et

d'assurer une coordination au niveau européen. Pourtant, on fait face à un hyper visibilisation de la question de l'enfance migrante marocaine.

Cette grande disparité entre les pratiques nationales s'explique aussi par l'absence de prise en compte spécifique de cette problématique des acteurs sociaux intervenants. Comme on a pu l'observer très peu s'intéresse aux prises en charge des institutions des autres pays européens, travaillant pourtant sur le même public. De plus, comme on a pu le voir au-dessus, les associations ont conquis une légitimité et une reconnaissance. On observe alors la construction d'une professionnalisation, une hiérarchisation des associations. Incluant une guerre de position entres acteurs selon leur légitimité, leur proximité avec les pouvoirs publics. « Les capacités ne possèdent pas les mêmes atouts dans leurs rapports avec le pouvoir et avec le public. », se répercutant souvent sur le public pris en charge. A travers notre recherche, tous les acteurs ont mis en évidence la problématique de l'accroche avec les mineurs marocains liés au manque de confiance envers les institutions. On peut comprendre, qu'un public aussi désaffilié, et éloigné du droit commun ne comprenne pas la multitude d'acteur ainsi que la différence des rôles institutionnels.

Les procédures de détermination d'âge, les conditions d'accueil, les formalités auxquelles ils sont confrontés et le traitement de leur dossier varient d'un État membre à un autre. Concernant, le cas de la France et de la Suède on observe un cadre législatif très semblable pourtant la mise en place et l'application de ces procédures sont différentes. En France, la prise en charge est assurée par les services départementaux de protection de l'enfance, suite à une décision judiciaire dans le cadre de l'enfance en danger. Sur le territoire, l'accès à la protection et les dispositifs mis en place sont très variables selon les départements. En suède les mineurs non

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accompagnés bénéficient d'une protection de droit commun composée d'un premier accueil suivi d'une prise en charge durable. Les centres de premier accueil sont spécifiquement dédiés aux mineurs non accompagnés. La responsabilité de l'accueil des mineurs non accompagnés repose sur les municipalités qui elles aussi relèvent des disparités d'une commune à une autre.

La situation administrative des jeunes lors de leur passage à la majorité constitue également un enjeu important. Le conseil de l'Europe recommande « lorsqu'un mineur engagé dans la réalisation de son projet de vie atteint la majorité et lorsque celui-ci fait preuve de sérieux dans son parcours scolaire ou professionnel et témoigne de la volonté de s'intégrer dans le pays d'accueil, un permis de séjour temporaire devrait lui être délivré pour le temps nécessaire à l'accomplissement de son projet », pourtant là aussi on retrouve des disparités. En Suède, les politiques d'accueil des mineurs non accompagnés orienté vers une procédure d'asile mettent en échec toute possibilité de régularisation pour les jeunes Marocains. En France, c'est plutôt leur désaffiliation, l'éloignement du droit commun et par conséquent leur profil délinquant qui empêche la régularisation. Cependant, le statut de mineur rend automatiquement régulier le séjour du jeune jusqu'à majorité, ils ne sont pas soumis à l'obligatoire de détenir un titre de séjour. Tandis, qu'en Suède les mineurs ne demandant pas l'asile ou ayant essuyé un refus de statut se voit comme étant en situation irrégulière.

Gérard Noiriel, dans « la tyrannie du national »53 explique l'imposition d'une nationalisation des sociétés. A travers la formation des États nation et l'affirmation d'une citoyenneté nationale et une société divisée entre nationaux et étrangers. Ce statut d'étranger demeure prépondérant dans les domaines de l'accès au territoire, du droit au séjour et de l'éloignement, où les politiques migratoires des États peuvent parfois mettre à mal l'impératif de prise en compte primordiale de l'intérêt supérieur de l'enfant. L'état des lieux de plusieurs associations54, organisation non gouvernementale françaises travaillant avec ce public, ainsi que l'analyse

53 Bonnafous Simone. Gérard Noiriel, La tyrannie du National, le droit d'asile en Europe (1793-1993).

54 France Terre D'asile.Mineurs isolés étrangers : l'essentiel. Repéré à http://www.france-terre-asile.org/images/stories/mineurs-isoles-etrangers/MIE_web.compressed1.pdf

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Daniel Senovilla hernandez55, met en évidence que « l'application directe de la CIDE ou la mise en adéquation des législations internes et des pratiques administratives à son contenu est excessivement limitée ou très partielle », est limitée ou très partielle sur trois points principaux « l'exclusion de certaines catégories de mineurs, la restriction de l'accès au territoire et, enfin, une application instrumentalisée et arbitraire des droits énoncés dans la convention. ». Alors que la Convention relative aux droits de l'enfant dispose que « tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciale de l'État »56. Nous savons également que l'exclusion n'est pas un état de fait mais qu'il représente plutôt « un processus dont les causes sont multifactorielles »57, nous pouvons même, pour le cas des mineurs isolés, reprendre l'analyse de Serge Paugam58, c'est à dire employer le terme de « disqualification sociale » plutôt qu'exclusion. A travers ce terme, il définit plusieurs phases qui s'appliquent totalement aux mineurs isolés non accompagnés qui se voient refuser leur droit de prise en charge.

Enfin, il est question ici d'un public aux caractéristiques spécifique, catégorisés d'enfant des rues. Une problématique nouvelle en Europe. La prise en charge de ses jeunes, nous amène à repenser les politiques d'accueils et de prise en charge globale face à un public désaffilier très jeunes, avec un profil de délinquant, poly consommateur, porteur de signe traumatique...

En France, les problématiques globales des MNA sont souvent liés à la première étape, c'est à dire l'évaluation sociale. Les MNA Marocains au vu de leur profil ne passe pas cette étape, soit par manque d'information, soit par l'engrenage du jeune dans un réseau délinquant, mais la

55 « Mineurs étrangers non accompagnés et séparé en Europe : une analyse comparative de l'application de la Convention internationale des droits de l'enfant dans six pays », Daniel Senovilla hernandez, Migrations et société, n°131, pp.99-114, 2010

56 Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, op. cit., (note 161), art. 20

57 Emmanuelli, X. Frémontier, C. (2004) La fracture sociale, PUF

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58 Paugam, S.(1991). La disqualification sociale, Essai sur la nouvelle pauvreté, PU

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raison est plutôt liée aux maltraitances institutionnelles. Il reste donc dans une situation de rue pendant la durée de leur séjour qui peut être relativement long. En Suède, cette question de rue est quasi inexistante, les jeunes sont repérés sur le territoire dès leur arrivé et accompagner par la police, des acteurs sociaux ou de simple citoyen vers la structure d'urgence social ce qui enclenche une prise en charge direct. Néanmoins, la problématique se centre, sur l'orientation du mineur vers une procédure d'asile qui pour la grande majorité n'aboutira pas. Je pense que sur des problématiques aussi complexes que celles des jeunes marocains, la question n'est pas tant de se s'interroger sur l'uniformisation des prises en charges. Mais plutôt, sur la capacité des institutions à se former sur ces nouveaux phénomènes dans l'objectif de d'adapter leur fonctionnement.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille