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Le travail précaire des aides à  domicile. Quel accompagnement pour les personnes àgées ?


par InàƒÂ¨s Lafkir
Université de Bordeaux - Licence de sociologie 2020
  

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PARTIE III : PÉNURIE DE SALARIÉES DANS LE

SECTEUR DE L'AIDE A DOMICILE

A) Un recrutement à la va-vite

Le travail précaire et le manque de reconnaissance professionnel des salariées rendent le secteur de l'aide à domicile peu attractif. Les centres de formation ont des difficultés à attirer les jeunes. Depuis 2002, le diplôme d'État d'auxiliaire de vie sociale (DEAVS) est créé, il est accessible dans plusieurs établissements de formation notamment dans les instituts régionaux des travailleurs sociaux (IRTS). En 2016, ce diplôme est remplacé par le diplôme d'Etat d'accompagnement éducatif et social (DEAES). Ce changement a pour objectif de rassembler trois professions : auxiliaire de vie sociale, aide médico-psychologique(AMP), et englober la profession d'Auxiliaire de Vie Scolaire. Ce rassemblement de formations permet aux titulaires de ce diplôme « d'attester des compétences requises pour exercer des activités visant à accompagner les personnes au quotidien, que ce soit à domicile, en structure ou dans le milieu scolaire »24. Par conséquent, selon l'économiste François-Xavier Devetter, « les jeunes issus de ces formations initiales ou en alternance vont plus volontiers vers les métiers de la petite enfance ou le travail en structure d'hébergement »25. En effet, travailler dans un établissement (Centre médico psychopédagogique CMPP, crèche, école,...) permet d'avoir des horaires plus stables et de limiter les déplacements. De plus, il faut préciser que les auxiliaires de vie sociales diplômées dans le secteur de l'aide à domicile ont un salaire légèrement supérieur aux autres salariées. Ainsi, certains conseils départementaux recommandent aux organismes d'aide à la personne de ne pas avoir plus de 30 % du personnel qualifiés (Trabut, 2014).

Dans cette perspective, il y a l'idée que l'accompagnement des personnes âgées n'exige pas de formations spécifiques. « On propose toujours à des personnes sans qualification, fragiles, d'occuper cette même fonction, assimilée alors à un «petit boulot» »26.Ce constat alarmant a d'importantes répercussions dans les prestations réalisées auprès des personnes dépendantes. Les structures d'aides à domicile en recherche permanente et urgentes de personnel, sont prêtes

24 «AMP, AVS DEAES : quelles différences ? », ADRAR Formation, Web. 15 avril 2020.

25 Langlois Géraldine, « L'aide à domicile en recherche d'attractivité », La Gazette Santé Social, 29 janvier 2019.

26 Bonnet Magalie, « Le métier de l'aide à domicile : travail invisible et professionnalisation », Nouvelle revue de psychosociologie, vol. 1, no. 1, 2006, pp. 73-85.

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à embaucher régulièrement des individus sans aucune expérience et sans aucun intérêt particulier pour travailler auprès d'un public âgé. Durant cette enquête, 3 personnes âgées sur 5 ont témoigné de situations dramatiques pendant leur prise en charge à domicile.

« Y'a des cas, on peut recevoir n'importe qui. L'APF nous trouve n'importe qui. Avant de trouver des auxiliaires de vie compétentes. Y'a eu des cas avant. [...] Elles sont gentilles, mais bon il y en a qui arrivait ivres (rires). »

(Personne âgée, 72 ans, bénéficiaire de l'APF)

« Ah oui ! Y'en a une qui a essayé de me taper et elle mangeait dans mon frigo ! Je pense que l'association embauche n'importe qui. Je me le demande bien. Mon mari l'a vue se servir ! »

(Personne âgée, 70 ans, bénéficiaire de l'APF)

« Non c'est parce qu'elle ne rangeait pas bien les affaires. Comme je n'étais pas très très bien. Je pouvais pas surveiller. Alors, elles ne faisaient pas le ménage. Elles fumaient et buvaient mes jus de fruit. Oui des choses comme ça. Jusqu'à que mes enfants rouspettent. Et voilà, elles ne devaient plus venir celles-là. Et là avec celles que j'ai tout va bien. Ca c'est bien mis en place.[...] Elles arrivaient les casseroles étaient encore dans levier. Ou tout un tas de choses comme ça. Le linge n'était pas accroché. »

(Personne âgée, 77ans, bénéficiaire de l'ADHM)

Outre ces situations d'une extrême gravité, le manque de formation des aides à domiciles engendre de nombreux risques dans la prise en charge des bénéficiaires. Avec le vieillissement de la population et la mise en place de différentes allocations pour l'autonomie, les missions des auxiliaires de vie sociales se sont complexifiées. Les salariées peuvent avoir à s'occuper d'un public avec de lourdes pathologies (Parkinson, Alzheimer...) et des handicaps (paralysie) qui demandent des compétences particulières. Aujourd'hui, la vision du secteur de l'aide à domicile ne peut plus partir « du principe qu'il n'est nul besoin d'avoir des compétences spécifiques pour exercer ces activités »27. En effet, le manque de formation est à l'origine de multiples accidents au travail. Les 3 auxiliaires de vie sociales interrogées sur 6 n'étant titulaires d'aucun diplôme et ayant une légère expérience auprès des personnes âgées avant d'exercer, ont chacune raconté une situation où leur manque de savoir a eu un impact dans leur travail.

27 André, Lætitia. « Évolution des métiers du prendre soin à domicile : enjeux professionnels ? enjeux de société ? », Gérontologie et société, vol. vol. 35 / 142, no. 3, 2012, pp. 157-167.

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« AVS .
· Elle était tétraplégique. Donc la deuxième fois, elle veut uriner, je lui mets son urinoir. Ce que je n'avais jamais mis avant. Et c'était pas du tout facile à mettre. La dame ne m'expliquait pas du tout comment le mettre. Elle été agacée. Pourtant je lui avais averti que c'était la première fois que je faisais ça. Donc c'est son compagnon qui a dû m'expliquer.

Question .
· Ah oui donc dans cette situation c'est ton manque d'expérience qui a fait une grosse histoire.

AVS .
· Complètement, mon manque d'expérience a fait que pour beaucoup d'actes à réaliser j'étais perdue. »

(AVS, 26 ans, APF)

« Ah beh moi elle a failli tomber, en plus je me suis fait mal au dos et tout. On m'a dit vous la levez et vous la tournez. Mais comme j'ai pas été formé sûrement aux bons gestes et aux bonnes techniques. J'ai d'importantes douleurs au dos à 22ans. C'est fou. J'ai des douleurs aux dos toujours pendant les transferts. »

(AVS, 23 ans, ADHM)

« Oui oui, c'est arrivé. Il y a un mois, on m'a contacté pour intervenir chez une personne qui était à Pessac. C'est une personne qui est sourde, qui est tétraplégique. Donc, il fallait la soulever. Et c'est un homme ! Un homme qui ne parle pas, qui ne comprends pas ce que tu dis et en plus de ça... il y avait sa mère qui était à côté de lui, sachant que c'est un homme qui à la soixantaine. [...] Je leurs ai dit .
· c'est pas possible ! C'est pas possible ! et en plus il fallait que je fasse encore une fois la toilette au monsieur. En plus ça peut être très dangereux très dangereux de soulever à moi toute seule une personne de la cinquantaine, un monsieur, sans que je connaisse la méthode appropriée. »

(AVS, 21 ans, APF)

Ainsi, ces témoignages montrent combien le manque de formation a un impact négatif sur la qualité de l'accompagnement de la personne dépendante. En effet, il engendre de nombreux risques d'accident pour l'employée (épuisement professionnel, troubles musculo-squelettiques) et pour l'usager (risque de chute). Le secteur de l'aide à domicile est le secteur qui connaît un nombre impressionnant d'arrêts maladie et de salariées qui partent en raison d'incapacités permanentes de travail (Trabut, 2014). Le métier est difficile, les organismes de l'aide à la personne sont en pénurie de personnel et n'arrivent plus à répondre à la demande du nombre de personnes dépendantes croissant.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault