Accords politiques en RDC. Enjeux, acteurs et défis sur l'accord de la saint Sylvestre.par Djodjo Mayele mutanda Université de Kinshasa - Licence 2019 |
1.2. PolitiqueLa notion du mot politique est effectivement ambigüe. L'analyse étymologique devait permettre d'en clarifier le sens. « Politique » vient du grec polis qui signifie la « cité », au sens où l'entendaient les grecs, c'est-à-dire ce qui constituait l'unité étatique : La «cité » fait référence à un ensemble des relations organisées, entre des personnes disposant d'un certain statut, des citoyens. Dans cette acception, la politique consiste donc dans l'art de gérer l'Etat ; mais ramener la politique à l'Etat est loin d'épuiser le sens de ce mot. Quant au mot politeia qui est également à l'origine de politique, il signifiait l'ensemble des lois et des institutions qui formaient la constitution d'une cité. Il apparait donc que le mot politique signifie ce qui est relatif à l'organisation du pouvoir politique dans l'Etat, ce qui touche à son organisation et à l'action qui est menée dans ce cadre ou à son propos. Toutefois, en dehors de cet encrage, le mot politique véhicule des significations diverses, sans même parler de ses connotations qui, selon les contextes, peuvent être très dévalorisantes ou, au contraire, très idéalisatrices. Pour tenter de sérier ses nombreux emplois, il convient de distinguer entre les deux genres du mot. Mot androgyne, qui plus est, c'est-à-dire dont l'usage, tantôt au féminin masculin tantôt (et le plus souvent) au féminin vient 19 ajouter à l'équivocité. Comme nom féminin, la politique ferait davantage référence au concret, à l'histoire des hommes, à leurs conflits, divisions et compromissions. Elle est une activité : soit celle qui déploie les gouvernants, soit celle qui se déroule, dans le groupe, en vue d'occuper les fonctions de direction. Par conséquent, la politique englobe les phénomènes politiques sous leur aspect dynamique. Dès lors, on peut dire que la politique englobe tous les phénomènes sociaux dans la mesure où ils sont impliqués par l'activité qui vise, soit à la conquête du pouvoir, soit à son exercice ou à sa conservation. Pour P. BRAUD, la politique c'est la scène où s'affrontent des individus et des groupes en compétition pour l'exercice du pouvoir. Concrètement, cela rend compte, pour l'essentiel de la concurrence entre partis et personnalités politiques pour accéder au contrôle de l'Etat, des collectivités locales, voire d'organisations internationales. Cette définition renvoie à des expressions courantes comme faire de la politique ou encore effectuer un choix politique, par opposition à un choix purement technique. La politique peut aussi revêtir toute autre signification dans des expressions telles que « la politique gouvernementale », « la politique de santé », « les politiques publiques », etc. il s'agit alors d'identifier un ensemble, réputé cohérent, d'intentions et de décisions, attribuables à des dirigeants agissant dans le cadre de leurs compétences institutionnelles. Enfin, la politique peut être considérée, dans une troisième acception, comme l'art de gouverner les hommes vivant en société. Il s'agit d'un usage fréquent dans la littérature philosophique19. 19 P. BRAUD, La science politique, PUF (coll. Que sais-je ?), Paris, 2011, pp6-7 20 P. BRAUD, idem, p.7. 20 Comme mot masculin, cet emploi du mot permet d'approcher de manière plus compréhensive l'objet de la science politique. Le politique semble être un discours dégagé des contingences, une réflexion qui prend pour objet du monde des essences, en somme, une abstraction. On peut en effet, comme le note P. BRAUD, désigner sous le terme du politique un champ social d'intérêts collectifs contradictoires ou d'aspirations collectives antagonistes que régule un pouvoir détenteur de la coercition légitime20 . Comme on peut s'en rendre compte, le politique s'associe à l'idée d'un impératif transcendant, à l'idéal d'un ordre indispensable et, par cela même imposé aux volontés humaines. L'idée d'un ordre se dégage de la manière d'être de la société, de la nature des relations d'autorité, du sens que l'individu donne à certains de ses actes. En un mot, le politique se réfère aux phénomènes politiques sous leur aspect statique et concerne tout ce qui se rapporte au pouvoir. En fait, le politique ne peut ignorer le contingent ; et la politique ne peut se limiter à une lutte, ou à une gestion au jour le jour, mais doit au contraire être une réflexion sur elle-même. Il convient de nuancer l'opposition entre l'utilisation du politique au masculin ou au féminin. On admettra cependant que, pour l'essentiel, la distinction est d'ordre purement grammatical. En effet, entre le politique et la politique, il n'existe pas d'opposition concrète. 21 Le choix du genre dépend de la manière dont on considère le même ensemble des phénomènes. Ainsi, est politique ce qui relève de la politique comme la politique est constituée de l'ensemble de ce qui est politique21. En effet, l'essence même de la politique, sa nature propre, sa véritable signification, c'est qu'elle est toujours et partout ambivalente. L'image de Janus, le dieu à double face, est la véritable représentation de la politique. M. DUVERGER22 pose que cette ambivalence du pouvoir et de la politique est le fondement même de la politique. La politique est toujours et partout à la fois l'instrument de la domination de certaines classes sur d'autres, et partant génératrice de la lutte de la part des opprimés, et un moyen d'assurer un certain ordre social, une certaine intégration de tous dans la communauté pour le bien commun et de créer ainsi la cité juste dont parlait Aristote. Mais le fondement philosophique de la politique demeure le sens du bien commun. La propension à servir le bien commun, ce qui suppose un certain nombre de qualité, un certain nombre de vertu et un certain nombre de valeur. Il convient de rappeler que le phénomène de lutte et d'intégration varie suivant les époques, les circonstances et les pays, mais les deux coexistent toujours. Le poids de l'un ou de l'autre (lutte et intégration) est fonction du développement historique de ce pays. 21 J.M DENQUIM, Science Politique, PUF, 4 ème édition, Paris, 1990, p.30. 22 Bwana N'sefu LUMANU MULENDA et IPAYA IKOKO, droit constitutionnelle et institutions politiques, G2 spa, UNIKIN, p.29. 22 |
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