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Storytelling et identité de marque : la place du storytelling dans la construction de l’identité de marque, apport théorique.


par Christelle Lecomte
IAE Bordeaux - Master Recherche en Gestion des Organisations  2016
  

Disponible en mode multipage

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Mémoire de recherche

Storytelling et Identité de marque :

La place du storytelling dans la construction de l'identité de marque,
apport théorique.

Sous la direction de Jean-François Trinquecoste, Professeur des Universités.

Etudiante : Christelle Lecomte Master 2 Recherche en Gestion des Organisations Année universitaire : 2015-2016

2

« Tout être humain a un besoin inné d'entendre et de raconter des histoires », Harvey Cox.

3

Remerciements

Une année riche et intense s'achève, celle d'une maman et d'une professionnelle, qui a choisi de reprendre ses études en suivant le Master 2 de Recherche en Gestion des Organisations à l'IAE de Bordeaux.

Ce mémoire marque la fin de cette année universitaire et mes premiers remerciements sincères sont adressés à mon directeur de mémoire, Monsieur Jean-François Trinquecoste, Professeur des Universités (IAE de Bordeaux et université Montesquieu Bordeaux IV) et Directeur de l'I.R.G.O. Je lui dois un véritable respect pour la distinction et la qualité de son enseignement et ses conseils précieux dans l'élaboration de ce travail.

Je tiens également à remercier l'ensemble du corps professoral du Master 2 RGO et tout particulièrement son directeur, le Professeur Gérard Hirigoyen, Professeur des Universités. Les enseignements et les recommandations que les professeurs nous ont apportés tout au long de l'année sont d'une grande qualité et forment l'exemplarité de ce Master.

Il me semble aussi important de remercier Pauline Chaveroux, Secrétaire du Directeur du Pôle Universitaire de Sciences de Gestion, qui a su m'encourager quand il le fallait.

Mon engagement envers les exigences du Master n'a été possible que par les conseils et encouragements de Grégory Bressolles, Enseignant Chercheur à Kedge Business School. Enfin, je souhaite également saluer Alexandra Vignolles, Enseignante Chercheur à Inseec Business School, qui au travers de nos fréquents échanges, m'a donné envie de me lancer dans cette aventure.

4

Sommaire

Introduction : « Aujourd'hui tout est marque » 7

Partie 1 : L'identité de marque dans la littérature 10

1.1. L'identité de marque définie par les auteurs 10

1.2. Distinctions entre personnalité, image, identité, expérience et capital

de marque 11

1.2.1. La personnalité de marque 11

1.2.2. L'image de marque 12

1.2.3. L'identité de marque 13

1.2.4. L'expérience de marque 13

1.2.5. Le capital de marque 14

1.3. Les éléments constitutifs de l'identité de marque 17

1.3.1. Le modèle d'identité de marque d'Aaker (1996) 18

1.3.2. Le prisme d'identité de marque de Kapferer (1997) 24

1.4. Les objectifs visés par l'identité de marque 27

1.4.1. Un outil créateur de sens 27

1.4.2. Un outil de communication 28

1.4.3. Un outil de reconnaissance et de différenciation 28

1.4.4. Au service d'une marque unique 28

1.4.5. Un facteur d'attachement 29

1.4.6. Au service d'une stratégie 29

Partie 2 : Le storytelling à travers la littérature 30

2.1. Le storytelling défini par les auteurs 30

2.2. Mythes ou histoires vraies 31

2.2.1. Les mythes 32

2.2.2. Les histoires vraies 32

2.2.3. Les différents types de récits selon Denning (2005)

et Simmons (2002) 32

2.3. Les composantes du storytelling 33

2.4. Les objectifs visés par le storytelling 35

2.4.1. Un outil créateur de sens 37

5

2.4.2. Un outil de communication 38

2.4.3. Un outil de reconnaissance et de différenciation 38

2.4.4. Au service d'une marque unique 39

2.4.5. Un facteur d'attachement 39

2.4.6. Au service d'une stratégie 40

Partie 3 : Conclusion du cadre théorique et formulation des propositions de

Recherche 42
3.1. L'identité de marque comme point de départ de la construction de la marque

avec le storytelling comme technique narrative au service de l'identité 42
3.2. Le storytelling, en tant qu'élément fondateur de l'entreprise, est antérieur à

l'identité de marque et vient l'enrichir 43

Conclusion 46

Références bibliographiques 48

6

Sommaire des encadrés, figures et tableaux

Encadré 1 : Personnalité, identité et image de marque, Eric Vernette (2002) 16

Encadré 2 : L'expérience de marque, Brakus, Schmitt et Zarantonello (2009) 16

Encadré 3 : Le capital de marque, Keller (1993) 16

Encadré 4 : Les cinq facteurs de la personnalité de marque, Sternberg (1995) 26

Tableau 1 : Brand Identity Models, Source : Petek et Konecnik Ruzzier (2013) 17

Tableau 2 : Les objectifs visés par l'identité de marque dans la littérature 27
Tableau 3 : Comparaison entre les différents types de récits selon Denning (2005)

et Simmons (2002) 33

Tableau 4 : Les objectifs visés par le storytelling dans la littérature 37

Figure 1 : Capital de marque (« Brand Equity »), Aaker (1996) 15

Figure 2 : Brand Identity Model, Aaker (1996) 19

Figure 3 : La marque dépasse le produit. Aaker (1996), Source Branding

Management (Lewi et Lacoeuilhe) 23

Figure 4 : Le « prisme d'identité », Kapferer (1997) 24

Figure 5 : The Story Model, Fog et al. (2010) 34

Figure 6 : Le storytelling en tant que technique narrative au service de l'identité

de marque 36
Figure 7 : L'effet du storytelling sur le capital de marque, Lunqvist et al. (2013) 44

Figure 8 : Le storytelling est antérieur à la création de l'identité 45

7

Introduction « Aujourd'hui, tout est marque »

« Aujourd'hui, tout est marque » souligne Jean-Noël Kapferer (2013) dans son ouvrage Ré-inventer les marques, la fin des marques telles que nous les connaissons, aux Editions Eyrolles. De Chernatony et Mc William (1989) rappellent la définition du terme « marque » par l'American Marketing Association (1960) : « un terme, un symbole ou design, une combinaison de ces éléments qui a pour objectif d'identifier les produits ou services d'un vendeur ou d'un groupe de vendeurs et de les différencier de ceux de leurs concurrents ». Cette définition met en avant les attributs du produit ou service et les éléments distinctifs qui vont permettre l'identification de la marque et la différenciation des ses produits par rapport à ses concurrents. Or dans un contexte où la concurrence est accrue et avec l'essor des prises de parole des marques via une multiplication des canaux de communication, il faut comprendre derrière l'affirmation de Kapferer « aujourd'hui tout est marque », qu' « elle soit produit, service, pays, ville, organisme, université, événement, célébrité, etc, la marque est devenue un repère de valeurs agrégeant le tangible et l'intangible pour un environnement en mouvance permanente. » (Kapferer, 1997).

Il s'agit là d'une vision opérationnelle du Marketing, et il est intéressant dans le cadre d'une recherche de se pencher du côté de la littérature scientifique pour comprendre l'importance de la construction d' identité de marque en marketing et le rôle que joue le storytelling dans cette construction, en raison notamment de la globalisation des produits et services, de l'essor des réseaux sociaux qui imposent aux marques de sans cesse prendre la parole pour construire leur identité et engager une relation pérenne avec leurs différents publics.

L'identité de marque est le reflet de ce que l'entreprise veut pour sa marque et sert de pilote pour tous les efforts menés dans la construction de la marque (Aaker et Joachimsthaler, 2000). Par conséquent, les chercheurs soulignent que l'identité de marque devrait représenter un point de départ pour toute construction de la marque (Kapferer, 1997 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000). Face à un marché banalisé et saturé, le produit physique ne suffit plus. Les consommateurs cherchent au-delà du produit des expériences qui renforceront leur expression de soi. Les histoires sont au coeur du processus logique des consommateurs (Ardley, 2006), comme les histoires aident les gens à relier ce qui se passe dans leur vie d'une manière orientée vers un but qui donne du sens à leur vie (Escalas, 1998). Lorsque les entreprises et les marques

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communiquent à travers des histoires, elles s'adressent directement aux émotions et aux valeurs des consommateurs. Les histoires de marque deviennent progressivement synonymes de la façon dont les consommateurs se définissent en tant qu'individus (Brouillard et al. 2010). Une entreprise peut raconteur sa propre histoire pour communiquer les valeurs de la marque et ce qu'elle représente (Fog et al., 2005). Elle peut aussi communiquer des histoires, basées sur des faits réels ou non. Que ce soit des histoires réelles ou fictives, les histoires donnent du sens aux marques (Halliday, 1998 ; Salzer-Morling et Strannegard, 2004 ; Simmons, 2006), l'essentiel étant pour l'entreprise de partager des histoires avec ses différentes cibles.

Raconter des histoires est un élément central d'une communication à succès auprès des consommateurs (Patterson & Brown, 2005) d'autant plus que Burch (2002) rappelle que l'histoire aide les forces de vente à réaliser des ventes.

Dans un objectif de construction de marque, l'histoire est un relai des valeurs dans laquelle l'entreprise véhicule ce qu'elle est et ce à quoi elle tend. La marque communique les avantages et les valeurs de ses produits ou services à travers des histoires attrayantes. Le storytelling permet aux entreprises d'inspirer et de motiver, d'éduquer ainsi que d'engager et diriger (Love, 2008). Aussi les bonnes histoires ont une façon d'inspirer, de divertir, d'expliquer et de convaincre, et peuvent simplifier les messages importants pour les consommateurs (Saarkoski, 2004).

Il convient alors d'essayer de cerner la place du storytelling dans la construction de l'identité de marque. Au travers de l'étude approfondie de la littérature scientifique, nous nous attacherons dans une première partie à définir et expliquer le concept d'identité de marque. Le champ de recherche s'efforce ici à explorer la littérature autour du concept d'identité mais aussi de concepts proches que sont la personnalité, l'image de marque, l'expérience de marque et le capital de marque. Après avoir exposé les éléments constitutifs de l'identité de marque, notamment au travers de 2 modèles, le système d'identité de marque d' Aaker (1996) et le prisme d'identité de Kapferer (1997), nous développerons les six principaux objectifs liés à la construction de l'identité qui ressortent dans la littérature.

Dans une second partie, nous développerons le concept de storytelling en le définissant et en expliquant, au travers de la littérature, ses différentes composantes. Comme pour l'identité de marque, les objectifs liés au storytelling sont abordés et mis en parallèle avec ceux liés à l'identité.

9

Une troisième partie est consacrée à la conclusion théorique sur la place du storytelling dans la construction de l'identité de marque et des propositions de recherche sont énoncées.

Avant cela attachons-nous à mieux cerner le concept d'identité de marque à travers la pensée de différents auteurs.

10

Partie 1 : L'identité de marque dans la littérature

Cette partie est consacrée aux apports théoriques autour de l'identité de marque. Deux approches majeures se font face dans la littérature, celle de la marque émettrice portée par Aaker (1996) et Kapferer (1997) et celle liée à l'interaction entre la marque et les consommateurs, soutenue principalement par Marie-Claude Sicard (2001).

1.1. L'identité de marque définie par les auteurs

Dans la stratégie de l'entreprise, la marque joue un rôle prépondérant pour affirmer une présence sur un marché. Face à la multiplication de l'offre, la marque est devenue plus qu'un nom et un logo, elle représente aujourd'hui un « outil puissant au service de l'entreprise, elle est un repère pour le consommateur » (Lewi & Lacoeuilhe, 2012). Prenons l'exemple récent de la marque Uber. Au-delà de l'approche disruptive que l'entreprise propose sur le marché des transports de la personne, la marque a vu sa notoriété s'envoler avec le néologisme « Ubérisation » proposé par le publicitaire Maurice Lévy, en parlant d'économie dans un entretien au Financial Times en décembre 2014. Aujourd'hui la marque occupe dans l'esprit des francophones, un territoire de conquérant qui grâce à l'utilisation des nouvelles technologies va mettre en contact direct de manière quasi-instantanée des professionnels et des clients. L'identité de la marque est ainsi un concept qui traduit à la fois un découplage entre le produit (ou le service) et la construction à travers le temps d'un ensemble durable de signes, de valeurs et de mémoire du passé de la marque (Michon, 2000).

A la lecture des différentes approches dans la littérature, des premières contributions sur l'identité de marque la placent comme la résultante d'une marque émettrice. L'identité de marque représente un ensemble de caractéristiques déterminées par l'entreprise qui permettent de fonder l'unicité de la marque et ce à long terme. G. Lewi et J. Lacoeuilhe, dans leur ouvrage Branding Management (2012) propose une définition large « L'identité de marque est l'ensemble des attributs proposés qui font que cette marque est bien la marque recherchée par la cible visée » et précisent que la difficulté résulte dans la définition des attributs. Kapferer (1997) fait une distinction entre la façon dont une marque est perçue et celle dont elle voudrait être perçue. L'identité selon l'auteur est un concept d'émission qui cherche à déterminer le sens, le projet de la marque, alors que l'image en est le résultat, c'est-à-dire une interprétation des signes reçus. Ces signes sont issus de l'identité formée autour de six facettes : le physique, la personnalité, l'univers culturel, la relation, le reflet et la

11

mentalisation. Plus loin dans cette partie (cf. 1.3.2.), nous étudierons plus en détails la position de Kapferer au travers du prisme d'identité.

Aaker (1996) envisage la marque comme un émetteur de signes mais aussi en tant qu'objet de consommation. Pour l'auteur, la construction de l'identité de marque va déterminer la place que la marque souhaite occuper dans l'esprit de ses clients ; développer une marque forte est une volonté stratégique. Le système d'identité de marque de Aaker (1996) est abordé plus loin (cf. 1.3.1).

D'autres auteurs parlent de territoire, c'est-à-dire un cadre délimité par des frontières. L'identité de la marque est le territoire occupé par la marque dans l'esprit des consommateurs et des prospects (Lewi & Lacoeuilhe, 2012). Quel que soit ce cadre, le lien avec le consommateur est omniprésent. L'identité nourrit la relation avec le consommateur en tissant des liens, notamment en lui servant de repère sur un marché encombré.

Sicard (2001) a réfuté la conception de Kapferer (1996) qui fait de l'identité de marque un concept d'émission. Pour elle, l'identité de marque doit définir « l'interaction complexe entre les entreprises et les consommateurs ». Elle préconise le développement d'un « système-marque », appelé « rosace de la marque ».

Dans le cadre de cette recherche sur la place du storytelling dans la construction de l'identité de marque, nous privilégierons le concept de marque émettrice proposé par Aaker (1996) et Kapferer (1997), du fait de son rôle aussi de marque émettrice lorsqu'elle choisit les histoires qu'elle souhaite raconter à ses différents publics.

Dans le cadre de ses travaux sur la personnalité de marque, Vernette (2008) rappelle les différences entre des notions voisines que sont la personnalité, l'identité et l'image de marque. Il nous semble utile des les rappeler ici en y ajoutant également une mise en perspective avec l'expérience de marque, une notion développée dans la littérature ainsi que le capital de marque.

1.2. Distinctions entre personnalité, image, identité, expérience et capital de

marque

1.2.1. La personnalité de marque

Plummer (1984) est considéré comme le premier chercheur qui propose le terme « personnalité de la marque ». Selon lui, chaque marque a des caractéristiques classées en trois groupes. Premièrement, ce sont les caractéristiques ou attributs physiques qui

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sont vérifiables, indépendamment. Un individu peut, selon lui, percevoir exactement les caractéristiques physiques d'une marque. Deuxièmement, les caractéristiques fonctionnelles (ou bénéfices) sont formulé(e)s par l'utilisation d'une marque. Ces caractéristiques, également vérifiables objectivement, comprennent les fonctions internes d'une marque et les perceptions de l'individu l'utilisant. En troisième lieu, c'est la personnalité d'une marque créée dans les activités de communication. La personnalité de la marque est créée par les traits de personnalité humaine attribués au produit ou au service. A la différence de l'image de marque, qui est l'ensemble des représentations que les consommateurs se font de la marque (Keller, 1993), la personnalité de la marque se présente uniquement à partir des traits de personnalité utilisés pour caractériser les marques. On peut alors définir la personnalité de la marque comme « l'ensemble des traits de personnalité humaine associés à une marque » (Ferrandi et Valette-Florence, 2002).

En plus de jouer le rôle de dispositif d'identification simple, les marques peuvent potentiellement développer une personnalité distincte (Aaker, 1997) et même un statut iconique (Holt, 2002, 2003). Pour Aaker (1997), la personnalité de la marque est définie comme « l'ensemble des caractéristiques humaines associées à une marque ». Pour Azoulay et Kapferer (2003), la personnalité de la marque se définit comme « l'ensemble des traits de personnalité humaine applicables et pertinents pour les marques ».

Alors qu'un positionnement fonctionnel mais unique peut effectivement différencier une marque dans un domaine concurrentiel, la personnification des attributs de la marque confère une personnalité à la marque (Aaker, 1997). Nombre de positionnements visent à donner des traits de caractère distincts à une marque pour favoriser la naissance d'émotions et l'attachement des consommateurs à la marque (Vernette, 2002)

1.2.2. L'image de marque

L'image de marque est définie comme l'ensemble des représentations mentales, tant affectives que cognitives, qu'un individu ou un groupe d'individus associent à une marque (Kapferer et Thoenig, 1989). C'est « tout ce qu'un consommateur peut associer à une marque » (Korchia, 2000), ou plus précisément, « les perceptions portant sur une marque reflétées par les associations à la marque détenues dans la mémoire du consommateur » (Keller, 1993). Aussi, l'image de marque est un

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ensemble complexe multidimensionnel de perceptions résultant d'une élaboration mentale de la part du consommateur (Keller, 1993 ; Aaker, 1994 ; Korchia, 2000).

Keller (2003b) propose de décomposer l'image de marque en 3 catégories d'associations à la marque : les attributs, les bénéfices et les attitudes. Selon lui, ses attributs représentent les traits descriptifs qui déterminent un produit ou un service, à savoir comment les consommateurs trouvent le produit ou service. Les bénéfices, quant à eux, sont les valeurs perçues par les consommateurs après utilisation du produit ou service. Enfin les attitudes définissent les évaluations globales du consommateur de la marque, divisées en deux groupes : les attributs liés au produit et les attributs non liés au produit. Les attributs non liés au produit comprennent : l'information de prix, l'information de packaging, l'image de l'utilisateur et l'image de situation d'utilisation. Keller propose en somme que l'image de l'utilisateur et l'image de situation d'utilisation puissent constituer la personnalité d'une marque.

Dans son ouvrage Building Strong Brands, Aaker (1996) affirme que la connaissance de l'image de marque - comment les clients et les prospects perçoivent la marque - procure des informations nécessaires et utiles pour développer l'identité de la marque.

1.2.3. L'identité de marque

Kapferer (2003) distingue image de marque et identité de marque. Selon lui, « l'image est un concept de réception, l'identité, un concept d'émission ». Il distingue l'identité de marque qui est la représentation que l'entreprise (émettrice) souhaite avoir sur un marché (domaine du « voulu ») de l'image de marque qui correspond aux interprétations que les consommateurs ou prospects (récepteurs) se font des signes qu'ils reçoivent (domaine du « perçu »).

1.2.4. L'expérience de marque

Padget et Allen (1997) rappellent que de nombreuses recherches sur les services abordent le terme d'expérience avec peu d'explications, sans doute partant du principe qu'il y a un accord commun entre chercheurs sur sa signification. Les auteurs précisent donc leur définition de l'expérience de marque pour éviter toute confusion. Une expérience dans le cadre des services représentent pour Padget et Allen (1997) « toutes réactions cognitives, affectives et comportementales associées à un service spécifique ». Brakus, Schmitt et Zarantonello (2009) ont développé une échelle de mesure de l'expérience de marque et l'ont conceptualisée comme étant « les

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sensations, les sentiments, les connaissances et les réponses comportementales évoqués par un stimuli de marque et qui font partie de l'identité et du design de la marque, de son environnement, son packaging, sa communication ».

1.2.5. Le capital de marque

Aaker (1991) est le premier chercheur à proposer un schéma (Figure 1) pour présenter les déterminants du capital de marque. Des chercheurs comme Keller (1993) ont également travaillé sur le capital de marque à partir des travaux de Aaker. Keller (1993) définit le capital de marque comme « l'effet différentiel de la connaissance de la marque sur la réponse du consommateur au marketing de la marque ». La définition la plus partagée par les chercheurs est cependant celle de Aaker (1994) « tous les éléments d'actif et de passif liés à une marque, à son nom ou à ses symboles et qui apportent quelque chose à l'entreprise et à ses clients parce qu'ils donnent une plus-value ou une moins-value aux produits et aux services ». Le capital-marque représente la valeur ajoutée qu'une marque apporte à un produit, et confère au produit une personnalité, des valeurs, une fonction, une stature, des éléments qui dépassent le cadre de la marque (Lacoeuilhe, 1997).

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Figure 1 : Capital de marque (« Brand Equity »)
Aaker (1996)

Pour synthétiser et différentier les différents concepts autour de la marque, Vernette (2008) reprend dans un tableau (Encadré 1) les différentes notions évoquées plus haut que nous complèterons en y ajoutant la notion d'expérience de marque (Encadré 2) et celle du capital de marque (Encadré 3).

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Encadré 1 : Personnalité, identité et image de marque
Eric Vernette (2002)

Encadré 2 : L'expérience de marque
Brakus, Schmitt et Zarantonello (2009)

Encadré 3 : Le capital de marque
Keller (1993)

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1.3. Les éléments constitutifs de l'identité de marque

Avant d'observer et de décrire les modèles d'identité de marque proposés par Aaker (1996) et de Kapferer (1997), il est intéressant de parcourir les différents modèles proposés par les chercheurs au travers du tableau ci-après. Le tableau 1 reprend les éléments constitutifs de l'identité de marque selon différents modèles proposés par divers auteurs.

Tableau 1 : Brand Identity Models

Source : Petek et Konecnik Ruzzier (2013)

Des dimensions communes apparaissent dans ces différentes approches :

- la vision (Melewar, 1993 avec le terme `strategy' ; Ind, 1997 ; de Chernatony, 1999 ; de Chernatony et Harris, 2000 ; Melewar et Karaosmanoglu, 2006 ; Balakrishnan, 2009 ; de Chernatony, 2010 ; Konecnik Ruzzier et de Chernatony, 2013)

18

- la personnalité (Van Riel et Balmer, 1997 ; Aaker, 1996 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000 ; Kapferer, 1997 ; de Chernatony, 1999 ; de Chernatony et Harris, 2000 ; de Chernatony, 2010 ; Konecnik Ruzzier et de Chernatony, 2013)

- la communication (Melewar, 1993 ; Van Riel et Balmer, 1997 ; Melewar et Jenkins, 2002 ; Melewar et Karaosmanoglu, 2006 ; Balakrishnan, 2009)

- le relation (Aaker, 1996 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000 ; Kapferer, 1997 ; de Chernatony et Harris, 2000 ; de Chernatony, 2010)

- la culture dans laquelle l'histoire de la marque y est intégrée (Melewar, 1993 ; Kapferer, 1997 ; Ind, 1997 ; de Chernatony, 1999 ; Melewar et Jenkins, 2002 ; Melewar et Karaosmanoglu, 2006 ; de Chernatony, 2010)

Pour mieux comprendre les éléments constitutifs de la marque, revenons sur deux modèles souvent explorés dans les recherches que sont le modèle d'Aaker (1996) et le prisme d'identité de marque de Kapferer (1997).

1.3.1. L'identité de marque selon Aaker (1996)

Aaker (1996) définit la marque comme une « mental box ». En effet pour l'auteur la marque est « comme une boîte mentale dans la tête de quelqu'un... Même après quelque temps, on peut retrouver la boîte, on sait si elle est lourde ou légère, dans quelle pièce elle est rangée, si c'est dans la pièce des bonnes boîtes ou celle des mauvaises boîtes, celle qui vous a laissé un bon ou un mauvais souvenir. » Aaker voit la marque comme une expérience de consommation qui va laisser des traces, des souvenirs dans la tête du client. C'est pourquoi, il est essentiel selon lui que la marque développe et renforce son « capital de marque » (« brand equity ») qui est constitué de 4 éléments : la notoriété, la fidélité, la qualité perçue et les associations spontanées (Figure 1). La marque est à la fois objet de consommation par ses produits et sujet agissant en émetteur de signe.

Selon Aaker (1996), l'identité de marque, est au centre de l'analyse stratégique de la marque. Elle donne la direction, le but et le sens que la marque doit prendre. D. Aaker (2003) note que l'identité de la marque est un ensemble d'associations liés à la marque qui doivent être développés et retenus pour une stratégie de marque. C'est un élément central de la vision stratégique de la marque et le conducteur d'une des 4 principales

19

dimensions du capital de marque, à savoir, toujours selon l'auteur, les associations qui forment le coeur et l'âme de la marque.

L'identité de marque est un ensemble unique d'associations que le marketeur aspire à créer ou maintenir pour déterminer une position que l'entreprise souhaite détenir dans l'esprit de ses clients. Elle doit contribuer à établir une relation entre la marque et ses consommateurs en générant une proposition de valeur impliquant des bénéfices fonctionnels, émotionnels et d'expression de soi.

Figure 2 : Brand Identity Model
Aaker (1996)

Le modèle d'identité de marque d'Aaker (Figure 2) repose sur douze dimensions organisées autour de quatre perspectives. Elles sont vraiment différentes et ont pour

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objectif commun d'aider le stratégiste à prendre en considération les différents éléments et modèles de la marque qui pourront clarifier, enrichir ou différencier une identité.

Une entreprise doit considérer la marque selon ces quatre perspectives : la marque en tant que produit, la marque en tant qu'organisation, la marque en tant que personne et la marque en tant que symbole.

- la marque en tant que produit :

o définition du produit (1) : à quel(s) produit(s) la marque est-elle associée ? Visa = carte de crédit, Apple = ordinateur, iPhone, iPad, Easyjet = lowcost, Uber = taxi...

Un lien fort entre la marque et une classe de produits signifie que la marque sera évoquée quand la classe de produits sera mentionnée. Une marque dominante (comme Kleenex = mouchoir en papier, TippEx = blanco, Ketchup = sauce tomate...) sera souvent la seule marque évoquée à l'appel de sa classe de produits.

o attributs du produit (2) : les attributs sont directement liés à l'achat ou à l'utilisation du produit qui procurent aux clients des avantages fonctionnels et parfois émotionnels. Un attribut lié au produit peut créer de la valeur en offrant quelque chose de plus (comme des fonctionnalités particulières ou des services inattendus) ou tout simplement en offrant quelque chose de plus. Les publicités TV de l'Apple Watch présentent plus qu'une montre, elles valorisent toutes les fonctionnalités et les bénéfices que procure la montre connectée.

o qualité/valeur (3) : la qualité est un attribut du produit suffisamment important pour être traité à part. Dans chaque secteur compétitif, la qualité perçue implique l'acceptation du prix (la marque doit délivrer un niveau de qualité minimum pour survivre) et sert de socle face à la concurrence (la marque avec le plus haut niveau de qualité gagne). La valeur est très proche de la qualité ; elle enrichit le concept de qualité en ajoutant la dimension de prix.

o usages (4) : certaines marques parviennent avec succès à définir une utilisation ou application particulière, obligeant leurs concurrents à travailler autour de cette réalité.

o

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utilisateurs (5) : une autre approche est le positionnement de la marque en fonction du type de ses utilisateurs. Certaines marques sont immédiatement associées à un type d'utilisateurs. Red Bull s'adresse aux gens en recherche d'adrénaline. Evian s'adresse aux personnes qui veulent rester jeunes...

o pays ou origine (6) : une option plus stratégique est d'associer la marque avec un pays ou une région qui va lui conférer de la crédibilité. Chanel fait référence au luxe à la française, Tipiak fait tout de suite penser à la Bretagne... Les produits allemands par exemple sont souvent associés à une haute qualité et à une plus grande performance mais à un prix élevé. De nombreuses recherches explorent les effets du pays d'origine. Nous citerons par exemple les travaux de Kapferer sur la marque France.

- La marque en tant qu'organisation :

o les attributs organisationnels (7) : cette perspective met l'accent sur les attributs liés à l'organisation plutôt qu'à ceux liés aux produits ou services. L'innovation, la conduite de la qualité, les préoccupations liées à l'environnement... sont le fruit du travail des collaborateurs de l'entreprise. Les attributs organisationnels sont plus résistants aux attaques concurrentielles que les attributs du produit/service. Premièrement il est plus facile de copier un produit que de dupliquer une organisation. Deuxièmement, les attributs organisationnels se retrouvent dans toutes les classes de produits adressées par l'entreprise rendant plus difficiles la compétition sur une classe unique de produits. Troisièmement, comme il est difficile d'évaluer les attributs organisationnels tels que l'innovation par exemple, les concurrents auront du mal à démontrer qu'ils ont rattrapé l'écart perçu. Il n'est pas facile de prouver qu'une entreprise est plus innovante qu'une autre.

o locale vs globale (8) : la marque doit-elle être globale, aves le prestige et la crédibilité que cela sous-entend ou au contraire viser et s'adapter à un marché local ? Il s'agit là d'une question de stratégie qui représente un choix fondamental pour la marque.

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- La marque en tant que personne :

o la personnalité de la marque (9) : la perspective de la marque en tant que personne engendre une identité de marque plus riche et plus intéressante que celle basée uniquement sur les attributs du produit. Comme une personne, la marque peut être perçue comme compétente, impressionnante, digne de confiance, drôle, active, humoristique, décontractée, formelle, jeune d'esprit ou intellectuelle. La personnalité de marque permet à ses clients de s'identifier à elle en exprimant leur propre personnalité. Un client Apple se sent décontracté, pointu, cool, créatif.

o les relations entre la marque et ses clients (10) : La personnalité de marque représente les bases de la relation entre la marque et ses clients et facilite la définition de la communication autour du produit.

- La marque en tant que symbole :

o l'imagerie visuelle et les métaphores (11) : un symbole fort apporte de la cohésion et de la structure à l'identité et rend plus facile l'identification et la mémorisation. Sa présence peut être un élément clé du développement de la marque et son absence peut engendrer un handicap substantiel. La virgule de Nike est sans doute le meilleur exemple de symbole fort. La simple virgule fait immédiatement référence à la marque et à ses attributs.

o l'héritage de la marque (12) : un héritage significatif peut aussi représenter l'essence même de la marque. L'histoire de Louis Vuitton et son passé de malletier, notamment pour le compte de l'impératrice Eugénie, a marqué à jamais l'identité de la marque de maroquinerie de luxe.

La structure d'identité de marque dans le modèle d'Aaker inclut une identité principale et une identité élargie. L'identité principale - centrale, l'essence intemporelle de la marque - est sensée restée constante tout au long de la vie de la marque, quels que soient les marchés qu'elle adresse ou les produits qu'elle propose. L'identité élargie intègre les éléments de l'identité organisés en groupes cohérents et significatifs qui apportent texture et exhaustivité.

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Aaker rappelle et illustre dans son modèle que l'approche stratégique de l'identité de marque n'est possible qu'après une analyse approfondie des clients (tendances de consommations, motivations, besoins insatisfaits, segmentation), des marchés et des concurrents (image/identité de marque, forces/stratégies, faiblesses). Il lui apparaît essentiel également de mener une analyse précise de la marque (quelle image actuelle ? Quel est son héritage ? Quelle est son histoire, son pays d'origine ? Ses « success stories » ? Qui sont ses fondateurs...- ? Quelles sont ses forces et possibilités, ses valeurs organisationnelles ?).

Figure 3 : La marque dépasse le produit. Aaker (1996)
Source Branding Management (Lewi et Lacoeuilhe)

Aaker (1996) complète son modèle de l'identité de marque en intégrant huit facettes liées à la marque et qui gravitent autour du produit (Figure 3). Les huit facettes Ð la personnalité de la marque Ð la symbolique de la marque Ð la relation avec les clients Ð les bénéfices émotionnels Ð la valorisation personnelle Ð l'identité des consommateurs Ð le pays d'origine Ð le rôle de l'entreprise - jouent un rôle prépondérant dans l'approche stratégique de l'identité de marque. Même si le produit est au centre de la stratégie, les huit dimensions qui gravitent autour sont source de création de valeur et forment un ensemble d'associations mentales qui vont aider à définir la place de la marque dans l'esprit des consommateurs et sur un marché, qui accompagneront la relation avec le client et détermineront les axes de communication et les investissements financiers, structurels et organisationnels à consacrer.

Au même titre qu'Aaker (1996) et son système d'identité de marque, Kapferer (1997) place l'identité dans une approche stratégique de marque émettrice et a développé un système d'identité autour de six factettes.

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1.3.2. Le prisme d'identité de Kapferer (1997)

La gestion de la marque a jusqu'à présent été gouvernée par les études d'image. La préoccupation est de savoir comment l'on est perçu. Le marketing au contraire, fait de l'identité le concept central de la gestion de marque : avant de savoir comment 1'on est reçu, il faut savoir qui 1'on est (Kapferer, 2007). Seule l'identité fournit un cadre de cohérence (multi-produits, multi-pays), et de continuité temporelle, source de capitalisation.

Alors qu' Aaker (1996) propose que l'identité de la marque soit au centre stratégique du positionnement de l'entreprise, Kapferer (1997) voit dans l'identité de la marque un outil fortement utile pour créer et conserver une bonne image de la marque dans l'esprit du consommateur par rapport à la stratégie de positionnement. Kapferer (1998) souligne en effet les limites du positionnement qui selon lui ne retranscrit pas toutes les potentialités ni toute la richesse de la marque. Aussi il observe que le positionnement ne définit pas la communication à adopter alors que l'identité de la marque peut guider les modes d'expression de la marque.

Figure 4 : Le « prisme d'identité »
Kapferer, 1997

Kapferer (1997) propose un outil pour façonner l'identité de marque, « le prisme d'identité » (Figure 4). Comme pour Aaker, la construction de l'identité de marque est

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pour Kapferer une volonté stratégique de l'entreprise. Elle ne s'arrête pas à l'identité visuelle (logo, charte graphique...) considérée pendant longtemps comme l'essentiel de l'identité de marque. Il souligne le rôle prépondérant que joue l'identité de marque pour orienter la communication de l'entreprise notamment dans cette époque de surabondance des messages diffusés. Comme la figure géométrique, le « prisme d'identité » de Kapferer se construit autour de six facettes.

Les six facettes du « prisme d'identité » s'organisent en deux groupes :

(1) les facettes sociales de la marque se trouvent dans la partie gauche de la figure et se composent du physique, de la relation et du reflet. Il s'agit des facettes qui font référence à l'extériorisation de la marque.

(2) à droite de la figure, on retrouve les facettes d'intériorisation de la marque qui sont : la personnalité, la culture et la mentalisation

Décrivons les facettes liées à l'extériorisation :

- Le physique : il renvoie à la catégorie de produit, au packaging et aux attributs tangibles du produit mis en avant dans la communication. Comme pour une personne, le physique est extérieur à la marque. C'est un ensemble de caractéristiques objectives saillantes ou au contraire latentes, émergées. La marque se construit d'abord un physique, un socle. Mais le physique n'est pas suffisant.

- La personnalité : il s'agit de l'ensemble des traits de la personnalité humaine qui définissent le caractère de la marque, son style, son attitude (Azoulay, Kapferer, 2003 ; Vernette, 2006). La personnalité de la marque est intérieure à la marque et comme pour un être humain, elle se caractérise par un certain nombre de traits de personnalité. Les consommateurs consomment les marques pour nourrir la personnalité à laquelle ils aspirent (Vernette, 2006). Pour décrire la personnalité humaine, on peut se référer comme de nombreux psychologues à l'approche des « Big Five » (modèle OCEAN - Encadré 4) de Sternberg, à savoir que les cinq facteurs principaux de la personnalité sont :

o la Stabilité émotionnelle (Neurotiscm),

o l'Extraversion (Extraversion),

o l'Ouverture (Openness),

o l'Agréabilité (Agreableness)

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o et le Caractère consciencieux (Conscioustness).

Encadré 4 : Les cinq facteurs de la personnalité de marque Sternberg, 1995.

- La culture : « par culture il faut entendre système de valeurs, source d'inspiration de la marque » (Kapferer, 2005). Une troisième facette est constituée par l'univers culturel dans laquelle la marque évolue et se développe. La culture représente un système de valeurs dans lequel la marque prend ses racines. La culture se ressent dans les produits et les communications de la marque. Louis Vuitton par exemple nourrit la culture du voyage à travers ses produits comme sa célèbre malle à la toile Monogramme ou dans ses campagnes publicitaires comme celle de 2013 intitulée «L'invitation au voyage» dans laquelle l'héroïne s'envole dans une montgolfière, survole la capitale française pour atterrir à Venise lors du Carnaval. La marque ancre son identité dans le voyage en éditant des guides touristiques de grandes villes. La marque Chanel par exemple puise ses racines dans l'imaginaire de sa créatrice Gabrielle Chanel et sa soif d'émancipation et de liberté.

Les facettes liées à l'intériorisation :

- La relation : la marque est une relation. L'aspect relationnel de la marque est essentiel pour comprendre les liens qui sont tissés entre une marque et ses clients. Dans les entreprises de service, cet axe est essentiel. Kapferer indique que « les marques sont souvent l'occasion d'une transaction, d'un échange entre les personnes ».

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- Le reflet : le reflet représente ce que la marque a souhaité montrer d'elle. Il prend le visage de la cible recherchée et se retrouve dans les communications de la marque. La marque doit renvoyer un reflet valorisant ses clients.

- La mentalisation : si le reflet est le miroir externe de la cible, la mentalisation en est le miroir interne. Grâce à certaines marques, nous entretenons un certain type de relations avec nous-mêmes. C'est l'idéal qu'aimerait atteindre le consommateur en devenant consommateur de cette marque.

En somme, pour construire une marque forte, cela passe par la construction d'une identité forte. Il s'agit d'une décision stratégique qui va guider la marque tout au long de sa vie. D'autres objectifs sont visés par la construction d'une identité de marque. Nous les explorons ci-après.

1.4. Les objectifs visés par l'identité de marque

Au travers de la littérature, on retiendra que l'identité de marque se construit autour de six objectifs principaux qui sont repris dans le tableau 2 et expliqués en suivant.

Tableau 2 : Les objectifs visés par l'identité de marque dans la littérature

1.4.1. Un outil créateur de sens (1)

Pour donner du sens à une marque, il est important de créer une identité de marque et d'établir ce qui caractérise la marque et ce qu'elle devrait représenter dans l'esprit des clients (Keller, 2001). Une identité bien construite aidera les managers de la marque à

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renforcer le sens de la marque pour les consommateurs (de Chernatony et Dall'Olmo Riley, 1998).

1.4.2. Un outil pour la communication (2)

Les marques doivent communiquer vers ou avec les consommateurs car c'est la condition pour rester présente sur un marché. L'identité de marque devrait influencer la communication marketing pour transmettre le bon message sur la marque aux clients par les biais des bons canaux (de Chernatony, 1999). Elle permet également de communiquer l'essence de la marque aux parties prenantes et encourage une approche plus stratégique (Diefenbach, 1992).

1.4.3. Un outil de reconnaissance et de différenciation (3)

L'identité comprend l'image morale, le but et les valeurs qui constitue ensemble l'individualité de la marque tout en la différenciant (de Chernatony, 2002). Le chercheur D. Grundey (2002) affirme que l'identité de la marque est l'étape la plus importante de l'identification d'un bien et de la qualité sur laquelle l'existence future du bien dépend. Par son nom, par son logo, ses produits mais aussi ses valeurs et ses prises de position (Sicard, 2001), une marque se crée une identité propre qui lui permettra de se faire connaître puis reconnaître. Plus ces éléments seront cohérents entre eux et plus la marque sera forte. L'identité de marque joue alors un rôle prépondérant dans la différenciation d'une entreprise sur un marché dès lors qu'elle possède le même positionnement que ses concurrents. Le concept d'identité vient rappeler que si, à sa naissance une marque n'est souvent que le nom d'un produit, elle acquiert avec le temps une autonomie, un sens propre. La marque délimite un champ de compétences, de potentialités, de légitimité (Kapferer, 1997). L'identité de l'entreprise est constituée par un sentiment qui aide l'entreprise à comprendre qu'elle existe réellement et que son existence est unique, avec son histoire et son lieu, en la distinguant des autres (Kapferer, 2003).

1.4.4. Au service d'une marque unique (4)

L'identité aide l'entreprise à comprendre qui elle est vraiment et ce qui la rend unique, et différente des autres comme son histoire et sa position (Kapferer, 2003). La conception de l'identité de marque inclut tous les éléments qui donnent du sens à la marque et la rendent unique (Janonis et al., 2007). Pour de Chernatony (2002),

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l'identité de marque renferme l'image morale, la raison d'être et les valeurs de la marque et qui ensemble constituent l'essence de ce qui rend la marque différente et unique.

1.4.5. Un facteur d'attachement (5)

L'identification à la marque, c'est-à-dire l'adhésion à l'identité de marque, peut être considéré comme un facteur qui favorise l'attachement et la reliance à la marque (Michon, 2000). Une identité ou un vision de marque est l'image aspirationnelle que vous voulez que votre marque renvoie. En se reconnaissant dans l'identité de marque, le consommateur s'identifie à elle.

1.4.6. Au service d'une stratégie (6)

Aaker (1996) rappelle que l'identité de marque est « un ensemble d'associations spécifiques que le manager aspire à créer ou à maintenir ». Il démontre ici le caractère stratégique de la démarche de création d'identité. Pour Aaker (1997), l'identité de la marque est au centre de l'analyse stratégique de la marque. L'identité de marque résulte d'une vraie volonté stratégique de l'entreprise. Construire une marque forte avec une grande équité offre une foule d'avantages à une entreprise, comme une plus grande fidélité des clients et moins de vulnérabilité face aux actions marketing, des marges plus importantes, plus d'acceptation de la part des clients des hausses et baisses de prix, plus d'échanges commerciaux et de soutiens, une communication marketing plus efficace, plus d'opportunités de licences et d'extensions de marque (Keller, 2001).

La surabondance des messages de communication impose aux marques de créer une identité forte. La décision de cette construction émane d'une décision stratégique que l'entreprise choisit d'adopter pour mieux appréhender un marché et pour maintenir un positionnement dans le temps. Nous avons pu définir l'identité à travers la littérature, et retiendrons principalement les six objectifs visés par l'identité. Afin d'assurer l'atteinte de ses objectifs, les marques peuvent faire appel au storytelling (« l'art de raconter des histoires », Salmon, 2007), un concept que nous allons développer dans la seconde partie de ce mémoire.

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Partie 2 : Le storytelling à travers la littérature

« La mémoire humaine est faite d'histoires » (Schank, 1999)

2.1. Le storytelling défini par les auteurs

De l'inefficacité des messages

La profusion des messages, la multiplication des canaux et des prises de parole, rend leur lisibilité et leur compréhension assez opaques, souvent sans atteindre leurs cibles et objectifs. « Trop souvent aujourd'hui, la profusion des messages dilue la clarté du sens », estime Jeanne Bordeau dans un article pour l'Express intitulé La véritable histoire du storytelling. Face à cette saturation des messages, les marques cherchent à capter l'attention d'une audience en lui racontant une ou des histoire(s), d'autant plus que les consommateurs ne choisissent pas les marques, ils choisissent des vies, des histoires (Fournier, 1998). Les individus veulent croire dans les mythes et les histoires (Jensen, 1999 ; Kelley et Littman, 2006). Les marques attribuent d'ailleurs un rôle important dans la vie des histoires des consommateurs (Fournier, 1998 ; Woodside et al., 2008). Les entreprises s'efforcent de rendre leur discours de marque plus clair et accessible en soignant leur récit et la qualité d'expression. Afin de rendre leur communication efficace, elles utilisent le langage pour créer de la cohérence et fonder une identité singulière (Bordeau, 2008).

L'art de raconter des histoires

Salmon (2007) voit le storytelling comme « l'art de raconter des histoires ». Pour l'essayiste, le storytelling a non seulement pour objectif de convaincre le consommateur, mais aussi il cherche à le plonger au coeur de l'histoire dont il devient le héros. Le consommateur, dans ce monde globalisé où règne la surabondance de l'information, est en manque de repères. Au même titre que la marque est un repère mental pour Lewi et Lacoeuilhe (2012), le récit est un moyen d'appréhender le réel (De Certeau, 1990).

Plus techniquement, Sole et Wilson (1999) définissent le storytelling comme « le partage des connaissances et des expériences à travers la narration et des anecdotes afin de communiquer des leçons, des idées complexes, les concepts et les liens de causalité ». Partant du principe que la narration est un des meilleurs outils pour comprendre le monde (Barthes, 1985), le storytelling joue un rôle prépondérant dans la communication des marques. Pour Jensen (1999), le storytelling est un outil que

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l'entreprise peut utiliser pour informer aussi bien ses clients que ses prospects. Le storytelling est également un des facteurs qui fait que les marques deviennent des icônes (Holt, 2003 ; Woodside et al, 2008).

Denning (2006) rappelle « qu'il n'y a pas une seule façon de raconter des histoires ». La marque peut choisir de tisser des histoires autour de mythes pour plonger l'audience dans un univers onirique ou se servir d'histoires réelles pour la motiver.

2.2. Mythes ou histoires vraies

2.2.1. Les mythes

Pour Woodside, Sool et Miller (2008), « un mythe est une histoire traditionnelle à propos de héros ou d'êtres surnaturels ». Les histoires présentent des personnages auxquels les individus peuvent d'identifier et qui donnent du sens à leur consommation. « Le mythe est un langage » écrit Roland Barthes (1957). Jean Baudrillard (1970), dans son ouvrage La société de consommation, ses mythes et ses structures - cité par Lewi et Lacoeuilhe (2014) - précise à propos des mythes, « c'est un système de communication et d'échange, un code de signes continuellement émis, reçus et réinventés comme langage ». Les mythes peuvent être considérés comme des cadres dans lesquels les marques peuvent être intégrées (Kozinets et al, 2010). Ces histoires représentent ainsi des idéaux et donnent une direction pour la consommation et la construction de l'identité (Cooper, Schembry et Miller, 2010). La mythologie regorge d'histoires, de contes et légendes, que les marques de luxe par exemple, en perpétuelle recherche d'inspiration, s'approprient en les modernisant. Pour présenter sa dernière collection automne-hiver 2016-17, la maison Gucci réinterprète, dans un court-métrage de 10 minutes, le mythe grec d'Orphée et d'Eurydice.(voir : https://www.youtube.com/watch?v=V5Mli5mEbx4). En développant un imaginaire autour de ce mythe, Gucci inscrit sa collection de prêt-à-porter dans un univers onirique en exploitant la richesse des illustrations et des métaphores. Le spectateur ne se rend plus compte qu'il assiste à la présentation de produits d'habillement mais se laisse porter dans une histoire revisitée. Salmon (2007) rappelle que « le storytelling n'invente pas un mythe ; il met au jour une part sensible qui a toujours existé dans l'univers des marques ».

Le storytelling de la marque peut aussi trouver sa source dans des histoires réelles ou personnelles.

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2.2.2. Les histoires vraies et personnelles

Raconter la vérité dans les narrations de la marque semble être une approche plus efficace pour rendre le message convaincant. Guber (2006) pointe le fait que les histoires vraies sont celles qui motivent le plus une audience quelle qu'elle soit à passer à l'action. L'auteur montre comment les vendeurs utilisent une histoire vraie sur un produit pour le vendre, comment les managers se servent des histoires à court terme pour un engagement à plus long terme ou comment un CEO pourra convaincre des investisseurs ou motiver des équipes au travers de son histoire. La clé de succès derrière ces histoires est le caractère authentique du narrateur que Gruber (2006) voit comme une « qualité cruciale ».

Sevin et White (2011) estiment que le storytelling est une méthode de communication qui sert à renforcer la pertinence et encourager l'engagement du public, et que les projets de marque devraient faire usage d'histoires réelles afin d'être plus pertinents et engageants que les campagnes de publicité traditionnelle. Les auteurs sont d'accord avec Herskovitz et Crystal (2010) qu'il est possible d'établir un lien émotionnel fort entre la marque et le public à travers des récits et des histoires personnels (Sevin et White 2011).

2.2.3. Les différents types de récits selon Denning (2005) et Simmons (2002)

Denning (2005) propose huit types d'histoires qui chacune va servir un objectif. Pour Simmons (2002), il existe six types d'histoires qui vont servir de base pour en créer d'autres et influencer une audience. Le tableau 3 reprend les types de récits proposés par les auteurs et les met en parallèle. Face à un premier type d'histoires pour Denning (2005) qui est celui qui décrit une action étincelante Ð à savoir le récit d'un changement qui a engendré un succès - ou encore un autre type de récits qui sont les histoires qui permettent de partager des connaissances, on peut mettre en parallèle la proposition de Simmons (2002) qui est de tirer des enseignements des histoires. Denning (2005) suggère aussi de partager des histoires qui permettent à l'entreprise de communiquer sur qui elle est. Simmons (2002) de la même façon parle `des histoires qui je suis'. Les deux auteurs sont également d'accord sur l'importance de partager des histoires qui transmettent les valeurs de la marque, communiquer sur qui est la marque dans une situation de branding (pour Denning). Pour les auteurs les marques doivent également tisser des histoires qui vont :

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- encourager la collaboration (« fostering stories » pour Denning et « why I am here stories » pour Simmons)

- apprivoiser l'audience (Denning) en montrant que l'on sait ce qu'elle pense (« I know what you are thinking stories » de Simmons)

- conduire les gens vers l'avenir (Denning), proposer une vision d'entreprise (« the vision story » de Simmons)

Tableau 3 : Comparaison entre les différents types de récits selon Denning et Simmons
Denning (2005) et Simmons (2002)

Source : Erkas E. & Baron J., Thesis in MBA Marketing Management, 2007

2.3. Les composantes du storytelling

Le défi pour les entreprises est de développer la bonne histoire (Rosen, 2000). Pour Esacalas (2004), les histoires se composent de 2 éléments : chronologie et causalité. Dans son ouvrage intitulé Poétique, Aristote explique que « toute histoire doit avoir un début, un milieu et une fin ». Les auteurs (Escalas, 2004 ; Holt, 2004 ; Fog et al., 2010) s'accordent sur cette notion de chronologie en 3 séquences : début, milieu, fin. Pour Herskovitz et Crystal (2010), chaque histoire a besoin d'un personnage central clairement défini avec lequel les gens peuvent s'identifier et créer un lien affectif durable. Selon Fog et al (2010) quatre éléments constituent la base essentielle du storytelling : le message, le conflit, les personnages, l'intrigue.

- Le message doit être unique et clairement défini. C'est le thème central de l'histoire. Il sert les objectifs stratégiques de la marque.

- Le conflit est le moteur d'une bonne histoire. S'il n'y a pas de conflit, il n'y a pas d'histoires. C'est ce qui incite à l'action afin de retrouver l'harmonie. Le

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conflit n'est pas forcément négatif, c'est en revanche une tension entre 2 pôles que l'auditeur va tenter de dissoudre.

- Les personnages sont obligatoires dans une histoire qui commence souvent par un objectif recherche par un personnage. On retrouve souvent un personnage principal et des personnages opposants. L'auditeur doit pouvoir s'identifier aux personnages.

- L'intrigue est au coeur de l'histoire et permet de gérer la tension.

Dans la figure 5, l'axe Y représente l'intensité du de l'intrigue ou conflit et l'axe X indique la chronologie de l'histoire. L'ouverture de l'histoire définit le ton de l'histoire. Le conflit (qui n'est pas forcément négatif) est introduit et attise l'attention du public. L'intensité augmente jusqu'à un point de non-retour et la tension ne retombe qu'à la fin de l'histoire, lorsque le conflit est résolu.

Figure 5 : The Story Model
Fog et al. (2010)

Chiu et al. (2012) ont étudié la littérature sur les éléments d'histoire de marque et ont identifié quatre caractéristiques qui contribuent à une bonne histoire de la marque. Ces éléments sont généralement utiles dans l'engagement du public dans l'évaluation d'un produit ou d'un service et renforcent leurs sentiments, afin de créer des corrélations positives avec la marque et l'intention d'achat. Les éléments sont les suivants :

1. l'authenticité, qui est associée à la sincérité, la véracité et l'originalité

2.

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la concision, qui réduit l'ennui de l'histoire en excluant les mots inutiles, des phrases ou des détails

3. l'inversion, qui aide les consommateurs à reconnaître les capacités de résolution de problèmes et implique des actions à prendre;

4. l'humour, qui augmente l'adhésion à la marque et peut-être la compréhension du message. (Chiu et al. 2012)

Pour Simmons (2002) « en fin de compte, c'est la meilleure histoire qui gagne. Pas la bonne histoire, ni même l'histoire la plus souvent racontée mais l'histoire qui a le plus de sens et ce, pour le plus grand nombre, l'histoire dont on se souvient ».

2.4. Les objectifs visés par le storytelling

Le storytelling de marque procure du plaisir aux gens car selon Bagozzi et Nataraajan (1999), les consommateurs ont besoin d'aide pour trouver ce qui les rend heureux, et c'est ce que fait le marketing. En leur racontant une histoire, la marque apporte du bonheur aux consommateurs (Bagozzi et Nataraajan, 1999). « L'histoire de marque et les séquences narratives ont aujourd'hui remplacé image de marque et campagnes publicitaires » démontre Christian Salmon dans son essai Storytelling, la machine à fabriquer des histoires et à formater des esprits.

Les marques deviennent importantes aux yeux des consommateurs au travers du storytelling (Esaclas, 2004b ; Holt, 2004) et les récits de la marque et les mythes caractéristiques dans la culture populaire renforcent cet effet. Les auditeurs peuvent se réapproprier les vues et positions racontées dans une histoire si celle-ci est une bonne narration (Lämsä et Sintonen, 2006). Et ils auront tendance à créer une nouvelle histoire en se l'appropriant (Denning, 2006).

Des objectifs communs entre storytelling et identité

Le storytelling est un outil puissant de communication (Cooper, Schembry et Miller, 2010). Dans la littérature académique, il y a une forte croyance dans les avantages du storytelling dans le marketing et l'image de marque (Marzec 2007; Amour 2008; Woodside et al 2008 ; Fog et al 2010). Wylie (1998) voit dans le storytelling un outil efficace pour vendre des produits, des services, des idées et pour construire une culture corporate.

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Dans la première partie de ce mémoire, nous avons expliqué les six principaux objectifs (tableau 2) visés par l'identité de marque. En effet les auteurs voient dans l'identité de marque un outil créateur de sens (1), au service d'une marque unique (2), un outil de communication (3), de reconnaissance et de différenciation (4), un facteur d'attachement (5), au service d'une stratégie (6).

Tableau 2 : Les objectifs visés par l'identité de marque dans la littérature

A la lecture de la littérature autour du storytelling, nous avons pu observer et attacher au storytelling les six mêmes objectifs principaux accordés à l'identité de marque par les auteurs. Ces objectifs sont repris dans le tableau 4 et expliqués ci-après.

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Tableau 4 : Les objectifs visés par le storytelling dans la littérature

2.4.1. Partager l'information et donner du sens (1)

Le cerveau a une capacité prodigieuse à percevoir l'information quand celle-ci lui est présentée sous une forme narrative (Bruner, 1996). Au même titre que les communications commerciales peuvent encore renforcer les significations de marque, cultuellement constituées par la consommation (Mc Cracken, 1986), l'histoire renforce la compréhension du message. Les histoires nous aident à comprendre qui nous sommes, d'où nous venons, et ce que nous souhaitons devenir (Soin et Sceytt, 2006). Les histoires créent du sens dans la vie des individus et les aident à mémoriser l'information plus facilement (Woodside, 2010). Pour Lundqvist et al. (2013), les histoires aident les consommateurs à comprendre les avantages d'une marque, et développent des associations favorables et uniques à une marque. Les histoires expliquent et donnent du sens aux actions menées par l'entreprise et à ses produits (Salzer Ð Morling et Stranneberg, 2004). Raconter une histoire influence la façon dont les auditeurs se sentent et considèrent la réalité, impactant les conclusions qu'ils font à propos de cette réalité et les actions qu'ils prennent (Simmons, 2007). Selon Fog et al. (2010), l'histoire emballe l'information dans un contexte significatif, ce qui rend l'information plus compréhensible par l'audience et lui donne plus de sens. Les scientifiques pensent que les histoires stimulent l'utilisation des deux parties du cerveau (l'hémisphère gauche, la logique et l'hémisphère droit, la créativité), ce qui signifie que le message est compris dans les faits ainsi que visuellement et

émotionnellement (Fog et al., 2010). La littérature sur le storytelling de marque apporte de nombreuses preuves de la création de sens par le storytelling (Escalas, 2004b, Padgett et Allen, 1997 ; Shankar, Elliott, et Goulding, 2001 ; Woodside, Sood et Miller, 2008). Les marques deviennent saillantes pour les consommateurs grâce au storytelling (Escalas, 2004b ; Holt, 2004).

2.4.2. Communiquer sur des émotions et des valeurs (2)

Kelly et Zak (1999) soulignent l'utilisation fréquente du storytelling dans le management des organisations et se posent la question de son utilisation peu fréquente dans d'autres fonctions, comme le marketing et la communication par exemple. Suchan (2006), à ce sujet, précise que les normes en communication de l'entreprise sont établies et difficiles à faire évoluer. Les histoires ont la capacité de stimuler les émotions et d'orienter les émotions des gens dans une certaine direction, en influençant leurs croyances subjectives et tout en communiquant des données objectives (Simmons, 2007). Ces données objectives sont guidées par l'identité de marque. Le storytelling comme l'identité de marque cherchent à communiquer sur des valeurs. Au travers de son identité la marque exprime les valeurs auxquelles elle croit et les raconte ou les transmet avec les histoires qu'elles tissent. Une histoire puissante communique les valeurs de la marque d'une manière compréhensible et parle à l'émotion des consommateurs (Brouillard et al. 2010) et ce peut-être parce que les histoires sont elles-mêmes chargées de valeurs renforçant ainsi la croyance et l'adhésion des membres d'une organisation (Cragen & Shields, 1998).

Selon Baker et Boyle (2009) les histoires parlent aux deux parties de l'esprit humain, la raison et l'émotion, mais quand il y a du ressenti, il est plus susceptible d'être partagé avec d'autres. D'un point de vue managérial, les histoires renforcent l'engagement des collaborateurs de l'entreprise envers la marque et ses valeurs (de Chernatony et al., 2006). Les histoires renferment et communiquent des traditions, des valeurs et des croyances culturelles (Cooper, Schembri et Miller, 2010). Les histoires et le storytelling assistent les individus à travers les âges, à comprendre l'expérience de la vie et le monde qui les entoure (Adaval et Wyer, 1998 ; Woodside et Chebat, 2001)

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2.4.3. Un outil de reconnaissance et de différenciation (3)

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Les histoires que la marque choisit de raconter lui sont propres et sont plus difficiles à copier par les concurrents qu'un produit ou service. Le storytelling sert entre autre une stratégie de différenciation. Pour Lewi, dans son ouvrage e-branding : Stratégies de marque sur Internet publié aux éditions Pearson en 2013 « c'est cette stratégie de différenciation qui va être à la base du storytelling. L'histoire, originelle, originale, `mythique' que va raconter l'e-brand à l'internaute va rapprocher la marque online de la marque offline. (É). Le brand content (l'histoire) va apporter une couleur, une sensorialité, un territoire d'expression spécifique à l'e-brand, qui va pouvoir faire communautés en complément de son nom et de son offre. »

2.4.4. Au service d'une marque unique, forte et durable (4)

Papadatos (1996) voit dans le storytelling une façon efficace et fiable de développer une marque forte et durable. L'attachement émotionnel que développe le storytelling est propre à la marque et lui confère ainsi un avantage concurrentiel. Holt (2004) va plus loin en affirmant que l'histoire de la marque est la clé pour créer une identité de marque précieuse et est nécessaire pour le développement d'une marque emblématique. Mark et Pearson (2001) suggèrent que la création des marques extraordinaires passe par la puissance des archétypes. Selon Mark et Pearson (2001), les histoires des marques fortes se construisent sur la base d'archétypes puissants. En combinant archétype mythique et médium puissant comme un film par exemple, le consommateur est davantage engagé et s'approprie les histoires de la marque.

Le storytelling est aussi un facteur qui permet à l'entreprise de devenir une icône (Holt, 2003 ; Woodside et al. 2008). En construisant l'activité d'une entreprise autour d'une histoire, et en suscitant ainsi les émotions du consommateur, l'entreprise peut gagner une position unique dans l'esprit du consommateur (Mossberg et Nissen Johansen, 2006).

2.4.5. Un facteur d'attachement (5)

Les psychologues reconnaissent dans le storytelling une clé pour développer le raisonnement cognitif (Polkinghorne, 1988), les échanges sociaux (Schank, 1990), la mémoire (Schank et Abelson, 1995). Les histoires aident également à façonner les opinions que les individus se font des uns et des autres (Gergen et Gergen, 1988 ; Mc Adams, 1993). Le storytelling permet d'atteindre les consommateurs de manière inconditionnelle en allant au-delà des faits et des informations à résonner en

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profondeur (Baker et Boyle 2009). Le storytelling est un outil puissant qui peut être utilisé pour donner vie à des messages marketing et à engager le public par le biais de son approche authentique (Love 2008).

Du point de vue de l'engagement interactionnel, l'histoire de la marque devient une partie de la propre histoire d'une personne (Sheehan & Morrison 2009). Selon Lindqvist et al. (2003), les consommateurs exposés à une histoire de marque sont plus susceptibles de réagir positivement à la marque. Les auteurs affirment qu'une histoire efficace facilite le bouche-à-oreille positif, incite aux recommandations positives et incite les consommateurs à devenir des ambassadeurs de la marque (Linqvist et al. 2003). Les histoires facilitent la co-création autour de la marque, le storytelling facilitant les échanges entre le narrateur et l'audience qui peut intervenir dans la création des histoires (Boje, 1991 ; Marzec, 2007). Grâce à une réaction émotionnelle efficace, une entreprise peut transformer les consommateurs en ambassadeurs de la marque (Guber 2007).

2.4.6. Au service d'une stratégie (6)

Dans une histoire, non seulement vous glissez beaucoup d'informations dans le récit mais vous suscitez aussi les émotions et l'énergie de votre auditeur (Mc Kee, 2003). Dans un article paru dans la célèbre revue managériale, Harvard Business Review, et consacré à la technique du storytelling au service du management, Stephen Denning (2004) relate une expérience vécue en management alors qu'il était Directeur du programme de gestion des connaissances de la Banque mondiale. Dans les années 90, lors d'une conférence auprès des équipes de management, au lieu de démarrer son intervention avec une `classique' présentation powerpoint à laquelle personne n'accorde d'intérêt, Stephen Denning raconte une histoire. Il raconte l'histoire d'un habitant de la Zambie travaillant dans la santé à la recherche d'informations sur le traitement de la Malaria. Il trouve ces informations sur le site Internet « Centers for Disease Control ». Denning fait alors remarquer à son assistance que le plus regrettable dans cette histoire, ce n'est pas la distance de 600 km qui séparent cette personne de la capitale et des centres de soin, c'est que pour une organisation comme la Banque mondiale qui détient toutes ces connaissances, ce ne soit pas cette même organisation qui ait pu informer des millions de gens concernés par la maladie. Il termine en les invitant à imaginer quelle organisation la Banque mondiale pourrait devenir. Cette simple histoire a non seulement réussi à capter l'attention de son

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audience mais à surtout convaincu les managers et les équipes de revoir leur vision de l'organisation et du partage des connaissances. Il explique plus loin dans son article qu'une histoire qui a pour objectif d'insuffler le changement a besoin d'évoquer le futur Ð d'indiquer la direction à prendre Ð mais sans être trop précise. Aussi ressort-il des études que le storytelling, quelle que soit sa forme, incite l'audience à passer à l'action (Adaval et Wyer, 1998 ; McKee, 2003 ; Wells, 1988). C'est un moyen de manipuler une audience en commençant par la convaincre d'agir. McKee (2003) remarque ainsi : « si vous pouvez exploiter l'imagination et les principes d'une histoire bien racontée, alors vous faites lever l'assistance dans un tonnerre d'applaudissements au lieu de les voir bailler et vous ignorer ».

Eriksson et Gianneschi (2004) établissent que le storytelling `corporate' est un outil de communication stratégique et que les entreprises utilisent des histoires (vraies ou fictives) pour atteindre un but. L'histoire n'est donc pas choisie au hasard et sert une finalité. Salmon (2007) démontre même, sans oublier d'en souligner les risques et dérives, que « l'histoire de marque et les séquences narratives ont aujourd'hui remplacé image de marque et campagnes publicitaires ».

Dans le storytelling marketing, le propriétaire de la marque, à savoir la société, est le conteur, et le marché est le public (Salzer-Morling et Strannegard, 2004). Les histoires peuvent aussi servir de cadre et de référence pour le développement de nouveaux produits pour un marché (Mossberg, Therkelsen, Huijbens, Björk et Olsson, 2010). Jensen (1999) affirme que les histoires sont des outils que l'entreprise utilise pour informer autant leurs prospects que leurs clients sur ce qu'elle représente.

Nous avons étudié les différentes approches de l'identité de marque au travers de divers travaux de chercheurs, et notamment constaté qu'il s'agit d'une décision stratégique de la marque qui se positionne en tant que marque émettrice (Aaker, 1996 ; Kapferer, 1997). Il nous est désormais possible d'envisager des propositions de recherche.

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Partie 3 : Conclusion du cadre théorique et formulation des propositions de recherche

Cette recherche à travers la littérature a fait émerger le lien entre l'identité de marque et le storytelling, notamment au regard des six mêmes objectifs visés. Aussi, qu'il s'agisse de la construction de l'identité de marque dans l'approche de Kapferer (1997) ou de Aaker (1996) ou du storytelling, la littérature évoque une décision stratégique de l'entreprise qui positionne sa marque en émetteur. Il ressort cependant de la part des chercheurs un manque de clarté sur la place du storytelling dans la construction de l'identité de marque.

3.1. L'identité de marque comme point de départ de la construction de la marque avec le storytelling comme technique narrative au service de l'identité. Dans la première partie de ce mémoire nous avons défini le concept d'identité de marque comme étant une approche stratégique qui va définir ce la marque doit représenter et servira de pilote pour les efforts menés dans la construction de la marque (Aaker et Joachimsthaler, 2000). Par conséquent les chercheurs rappellent que l'identité devrait être le point de départ de toute construction de marque (Kapferer, 1997 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000). L'identité de marque joue donc un rôle prépondérant dans une approche de branding et sert six objectifs principaux (créer du sens, communiquer des valeurs, favoriser la reconnaissance et la différenciation de la marque, rendre la marque unique, créer de l'engagement et de l'attachement, servir une stratégie). En développant l'analyse du concept de storytelling dans la littérature, il en ressort que « l'art de raconter des histoires » (Salmon, 2007) sert les mêmes six objectifs que l'identité de marque. En quelque sorte développer le storytelling dans la construction de l'identité de marque va renforcer celle-ci puisque orienté dans la même direction.

Dans le système d'identité de marque proposé par Aaker (1996), qui repose sur douze dimensions organisées autour de quatre perspectives (Figure 2), le storytelling en tant que technique narrative peut servir à renforcer la définition et la représentation de chaque dimension et perspective (Figure 6).

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Figure 6 : Le storytelling en tant que technique narrative au service de l'identité de marque
Proposition 1 : adaptation du modèle « Brand Identity Model » d'Aaker (1996)

Nous pouvons établir ainsi une première proposition de recherche.

Proposition 1 : l'identité est le point de départ de la construction de la marque, le storytelling est une technique narrative (« l'art de raconter des histoires », Salmon, 2007) au service de l'identité qui la vient renforcer.

3.2. Le storytelling, en tant qu'élément fondateur de l'entreprise, est antérieur à l'identité de marque et vient l'enrichir.

Dans leurs recherches Lundqvist et al. (2013) mettent en valeur l'importance de l'histoire dans la construction de la valeur de la marque. Comme représenté dans la figure 7, le lien émotionnel procuré par l'histoire renforce la différenciation de la marque vis-à-vis des concurrents, car plus difficiles à atteindre que les attributs du produit. L'histoire vient renforcer les attributs du produit et les lie directement à la marque. L'expérience de marque en est enrichie, impactant directement la valeur associée à la marque dans l'esprit du consommateur.

Figure 7 : L'effet du storytelling sur le capital de marque
Lunqvist et al. (2013)

Lunqvist et al. (2013) ont examiné dans leur recherche comment une histoire à l'origine de la création d'une entreprise influe sur l'expérience de la marque des consommateurs, en comparant les expériences de marque de deux groupes de consommateurs. Un groupe a été exposé à l'histoire et un groupe non. Une marque existante a été utilisée dans l'étude, qui n'a pas été lancée dans le pays visé. Des entrevues approfondies ont été menées avec des personnes dans les deux conditions expérimentales. La comparaison a révélé des différences notables entre les deux groupes. Les consommateurs qui ont été exposés à l'histoire décrivent la marque dans des termes nettement plus positifs et étaient prêts à payer plus pour le produit. Auparavant d'ailleurs, Padgett et Allen (1997) suggèrent que les annonces narratives sont plus convaincantes que les annonces argumentatives, pour lesquelles il est plus facile de construire des contre-arguments. La concurrence s'empare plus facilement des annonces argumentatives en copiant ou en cassant les attributs du produits. En revanche il est plus difficile de s'emparer d'une histoire et de la reproduire.

Au départ de la création d'une entreprise, il y a l'histoire, l'histoire de la marque, l'histoire du fondateur, l'histoire des collaborateurs, l'histoire d'une aventure... De nombreuses marques se sont créées avec une histoire forte et emblématique. La marque de confection Le Slip Français n'aurait pas vu le jour si l'histoire d'un défi de création d'entreprise lancé entre amis après leurs études n'avait pas existée. Le Camion qui fume , un des premiers `food-trucks' parisiens, n'aurait pas été créé et lancé la mode de la restauration gastronomique ambulante, si Kristin Fredericks, sa fondatrice, n'avait pas préféré la France aux Etats-Unis, son pays d'origine, pour lancer son entreprise. Uber, la fameuse marque qui fait trembler et gronder le secteur des taxis et des chauffeurs privés, n'aurait pas été lancée si ses fondateurs Travis Kalanic et Garrett Camp n'avaient pas eu « toutes les difficultés du monde à héler un taxi à Paris » comme cela est raconté sur le site Internet de la marque (voir https://www.uber.com/fr/our-story/). Trois exemples dans 3 secteurs d'activité

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différents qui montrent la puissance d'une histoire au départ d'une activité et qui influence la création de la marque. Dans un contexte de branding, Kotler et Pfoertsch (2008) incluent l'histoire de la marque dans les éléments qui composent la marque. Les autres éléments clés de la marque sont le nom, le logo, le slogan. Ces éléments servent à identifier et différencier un produit ou service, et ensemble ils forment un bloc crucial du capital de marque. Aussi, Holt (2004) rappelle que l'histoire de la marque est la clé pour créer une identité de marque précieuse et inhérente à la création d'une marque iconique. Ceci nous amène à une nouvelle proposition illustrée dans la figure 8.

Figure 8 : Le storytelling est antérieur à la création de l'identité

Proposition 2 : en tant que marque émettrice, le storytelling nourrit l'identité de la marque, il est antérieur à la construction de l'identité de marque et va servir à enrichir le capital de la marque.

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Conclusion

Si « aujourd'hui tout est marque » (Kapferer, 2003), les entreprises doivent s'efforcer de construire des marques fortes pour s'ancrer dans l'esprit des consommateurs et délimiter leur « mental box » (Aaker, 1996). La construction d'une identité de marque est non seulement une volonté stratégique de l'entreprise (Aaker, 1996 ; Kapferer, 1997) mais c'est aussi un moyen efficace pour renforcer la valeur de la marque. L'identité de marque, en temps que marque émettrice, nourrit six objectifs principaux, à savoir créer du sens, communiquer des valeurs, permettre la reconnaissance et la différenciation, rendre la marque unique, créer de l'attachement et de l'engagement et enfin comme évoquée être au service d'une stratégie d'entreprise.

A travers la littérature, nous avons pu observer l'ampleur des recherches autour du storytelling, une technique narrative mais aussi un outil efficace qui nourrit les mêmes objectifs que l'identité de marque, sans toutefois voire émerger de façon évidente et démontrée la place du storytelling dans la littérature. Des recherches comme celle de Lunqvist et al. (2013) ont rapporté l'impact positif du storytelling sur la valeur de la marque mais en se limitant à son intégration dans l'identité visuelle. Or l'identité de marque va au-delà de l'identité visuelle (Kapferer, 1997, 2003). Elle comprend plusieurs facettes, de six (Kapferer, 1997) à douze dimensions (Aaker, 1996) selon les chercheurs. L'histoire de la marque étant la clé pour construire une marque iconique (Holt, 2004), nous avançons la proposition qu'en tant que marque émettrice, le storytelling nourrit l'identité de la marque, il est antérieur à la construction de l'identité de marque et va servir à enrichir le capital de la marque. Afin de générer des hypothèses autour de cette proposition, il conviendrait de mener une étude qualitative avec des entretiens en profondeur auprès de deux échantillons de consommateurs pour comprendre l'impact de l'histoire dans la construction de l'identité de marque. Un premier groupe serait exposé à une identité construite sans histoire à sa base, le second groupe serait face à la même marque dont l'identité aurait été construite à partir d'une histoire.

Aussi l'identité doit-elle être le point de départ de toute construction de marque (Kapferer, 1997 ; Aaker et Joachimsthaler, 2000). Etant donné qu'ils répondent aux mêmes objectifs, l'intégration du storytelling comme technique narrative dans chaque dimension qui compose l'identité de marque peut amener à la sublimer. Notre proposition est en conséquence que l'identité est le point de départ de la construction

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de la marque, et le storytelling en tant que technique narrative (« l'art de raconter des histoires », Salmon, 2007) est au service de l'identité pour la renforcer. La méthodologie préconisée pour cette proposition serait de mener une étude qualitative auprès d'experts du marketing afin de comprendre la place du storytelling à chaque étape de la construction d'une identité de marque et suivre dans le temps la construction de l'identité de deux marques distinctes, l'une faisant appel au storytelling dans sa construction et l'autre non.

Force est de souligner ici les limites de ce mémoire qui certes apporte une contribution théorique afin de mieux cerner la place du storytelling dans la construction de l'identité de marque mais qui ne propose pas de recherches empiriques.

D'un point de vue managérial, du fait de « l'état de surconsommation dans lequel nous vivons et du marketing de la ressemblance lié à la multiplication des `me too' » (Kapferer, 2003), définir une identité est une nécessité. La marque peut utiliser le storytelling pour parfaire son identité et mieux la communiquer, pour engager ses publics dans une relation durable, voire même les transformer en ambassadeurs de marque. Des marques de luxe comme Louis Vuitton et son « Invitation au voyage » par exemple se servent déjà du storytelling pour renforcer l'adhésion à la marque. D'autres encore, comme Chanel, construisent au fil du temps toute son identité sur l'histoire de sa créatrice Gabrielle Chanel et augmentent ainsi le capital de la marque.

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