2. JUSTIFICATION DU CHOIX DU SUJET
Trois raisons justifient le choix de notre sujet
intitulé : « Dynamique urbaine et gestion foncière dans les
villages intégrés à la ville : le cas de Sapia, Tagoura et
Zakoua à Daloa (Côte d'Ivoire) ».
La première raison est d'ordre scientifique. En effet,
l'étude est portée sur le phénomène de
l'urbanisation et ses implications sur l'espace rural environnant. Il est
question dans ce mémoire connaître l'impact de
l'intégration des villages périurbains à la ville de
Daloa. Par ailleurs, l'institution Universitaire a pour vocation de promouvoir
le développement local et universel. D'où l'intérêt
accordé aux problèmes de développement que rencontre la
ville de Daloa qui abrite l'Université Jean Lorougnon
Guédé.
La deuxième raison est d'ordre social. Au plan social,
les problèmes que pose l'intégration des villages aux espaces
urbains sont considérables et perceptibles à tous les niveaux.
L'intégration des villages Sapia, Tagoura et Zakoua à la ville de
Daloa pose des problèmes d'aménagement et de gestion
foncière. Aussi, les populations sont-elles exposées à des
problèmes d'accès au foncier, au logement, aux équipements
et infrastructures et à des problèmes d'accès à un
cadre de vie salubre.
La recherche scientifique étant un outil d'aide
décisionnel pour les administrateurs des territoires, ce mémoire
pourrait servir de guide aux décideurs et aux gestionnaires des villes
ivoiriennes en général, ceux de la ville de Daloa en particulier.
En outre, cette étude pourrait constituer une base de données
pour l'aménagement et une meilleure gestion des villes ivoiriennes.
La troisième raison est d'ordre personnel. En effet,
c'est le rôle du chercheur de théoriser tout ce qui apparait comme
donnée empirique que l'on peut observer. Par conséquent, les
effets des mutations de l'espace rural sont perceptibles et
irréversibles. Ces mutations ont un impact sur le développement
socio-économique et spatio-environnemental, tant des espaces ruraux en
mutation que de la ville en croissance. Toutes choses qui ont animé
notre curiosité et aboutit à la formulation de ce sujet de
recherche.
3. REVUE DE LA LITTERATURE
A l'échelle du monde et plus particulièrement
dans les pays en développement, la relation entre l'étalement des
villes et la gestion foncière est une préoccupation majeure de
développement ; la question foncière étant au coeur de
tous processus de développement territorial. Pour appréhender
cette étude, nous avons passé en revue les écrits relatifs
aux
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thématiques suivantes : les facteurs de la dynamique
urbaine ; l'étalement urbain ; la gestion foncière ; la
transformation des espaces périurbains.
3.1. Les facteurs de la dynamique urbaine
La dynamique urbaine est un phénomène
étroitement lié à la croissance démographique.
Ainsi, HAERINGER P. (1977) affirme que : « l'extension d'Abidjan a
été rapide parce qu'il fallait assumer sans trop de mal plusieurs
doublements de la population ». De même CHALINE (2000, p. 21)
explique que les transformations des villes dépendent à la fois
des facteurs exogènes dont les courants migratoires traduisent bien
l'importance et d'une dynamique interne qui s'exprime notamment par la
mobilité résidentielle et par les changements progressifs dans
l'occupation sociale de l'espace intra-urbain.
Selon VÉRON J. (2008, p.14), « la ville s'agrandit
par l'arrivée de migrants désireux d'échapper à la
misère rurale, le poids démographique des villes augmente, les
décideurs qui y vivent tendent à favoriser les villes, lors de
l'attribution des ressources publiques, les villes deviennent encore un peu
plus attractives, de nouveaux migrants arrivent en ville, le pouvoir politique
des villes est renforcé ». Ainsi, DURREAU F. (2008) explique que
« la proportion de la population résidant en ville augmentera dans
les prochaines décennies, et même si les migrations depuis les
campagnes vers les villes diminuent, la jeunesse des structures par âges
des populations résidant déjà en ville entretiendra des
rythmes d'accroissement élevés, supérieurs à ceux
observés en milieu rural ».
Quant à VÉRON J. (2008, p. 4), il indique qu'
« un pays dans lequel la proportion des citadins est réduite est
aussi un pays peu avancé dans la transition de sa
fécondité. Cependant, la relation entre croissance de la
population totale et taux d'urbanisation pourrait être inverse : la
croissance démographique serait d'autant plus rapide que le degré
d'urbanisation d'un pays serait bas, la transition démographique
étant moins avancée dans un pays peu urbanisé ».
Cette pensée est corroborée par Miguel Villa
(1996) qui a distingué les pays d'Amérique latine en fonction de
leurs niveaux d'urbanisation pour voir quel lien pouvait être
établi avec le degré d'avancement de la transition
démographique. Les pays les plus urbanisés, comme l'Argentine, le
Chili et l'Uruguay, dont les taux étaient supérieurs à 85
% à la fin de la décennie 1980, étaient les plus
avancés dans la transition démographique. Les pays moins
urbanisés comme le Guatemala, Haïti et le Honduras (taux
inférieurs à 45
9
%) amorçaient alors seulement leur transition
démographique. Les pays ayant des niveaux d'urbanisation
intermédiaires présentaient quant à eux une certaine
diversité, leur degré d'avancement dans la transition
démographique ne correspondant pas à la hiérarchie des
taux d'urbanisation.
Selon l'agence européenne pour l'environnement (rapport
2006, p. 6), « la croissance démographique des
agglomérations n'explique désormais qu'une partie de
l'étalement urbain. L'étalement urbain intervient dans une zone
donnée lorsque le taux d'occupation des terres et la consommation de
celles-ci à des fins d'urbanisation sont plus rapides que la croissance
de la population sur une période donnée. Il est plus causé
par l'évolution des modes de vie et de consommation que par celle de la
population »
Par ailleurs, la dynamique urbaine est impactée par le
développement des activités économiques. C'est ce qui
justifie les propos d'ATTA K. (1978) qui indique que la ville résulte de
l'inscription sur le terrain de la croissance économique : « les
espaces urbains se sont toujours organisés à partir d'un seul ou
de deux grands axes routiers qui traversent la ville en largeur et en longueur
». Poursuivant, il affirme que « l'extension spatiale de la ville de
Bouaké s'est faite à partir de la gare qui a ravi le rôle
de centre de gravité de la ville au poste militaire. Cette extension
spatiale est aussi le fruit du fort attrait de la ville lié à son
rôle de centre administratif régional et d'une forte immigration
(ATTA K. 1984).
Selon KADET B. (1999), la dynamique de l'extension de Guiglo a
été possible grâce à la politique de
développement économique et social de l'Etat ivoirien. Guiglo a
bénéficié d'importants investissements à la fin des
années 1960 (FRAR, FIAU et plans quinquennaux). A ce propos, FUJITA et
THISSE (2003) indiquent que « l'agglomération serait la
contrepartie territoriale de la croissance économique ».
Quant à BEAUCIRE F. et al. (2007, p. 22), ils
soutiennent que « si dans le cadre du développement des
activités de service, les emplois ont tendance à se polariser
dans le centre de l'agglomération, les coûts du foncier
subséquents ont tendance à reléguer les activités
consommatrices d'espace dans le domaine périurbain ».
En revanche, POLESE M. (2010, p.5), explique que « la
relation positive entre taille urbaine et productivité ne se
vérifie qu'à l'intérieur d'un même pays, non pas
entre pays. L'effet positif de la taille urbaine disparait dès que l'on
fait entrer des différences nationales de développement. La
contribution de l'agglomération (par voie d'urbanisation ou de
croissance urbaine) aux hausses de productivité est statique par
l'intermédiaire de la répartition spatiale des ressources ».
De même, VÉRON J. (2008, p. 2) soutient que
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« l'accumulation de la population dans des cités
toujours plus grandes serait devenue un phénomène largement
autonome, voire "antiéconomique", particulièrement dans les pays
en développement ».
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