5.1.4. Le lotissement privé : la fin de
l'expropriation des terres
Notre enquête révèle que 64 % des
propriétaires terriens de Tagoura n'ont pas reçu de lot de
compensation lors des lotissements administratifs intervenus en 1974. En effet,
la Mairie procédait à l'ouverture d'un front de lotissement pour
satisfaire les demandes de terrain urbain. L'extension de la ville se faisait
sur les terres rurales environnantes. Les propriétaires terriens
étaient donc expropriés de leurs portions de terre qu'ils
exploitaient à des fins agricoles. Pour contenter les
propriétaires terriens dépossédés de leurs
parcelles, la mairie-lotisseur leur donnait des lots en « compensation
». En général, deux lots par hectare revenaient au
propriétaire terrien après le lotissement de sa parcelle.
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Avec les lotissements privés, les propriétaires
terriens ont l'initiative du lotissement de leurs parcelles et l'essentiel des
lots. Le chef de Tagoura indique que : « c'est mieux ainsi, au lieu
que ce soit l'Etat à travers la Mairie qui fasse le lotissement dans les
villages, sans même dédommager les propriétaires terriens
de fait, la plupart du temps ». Désormais, l'Etat reconnait et
consolide les droits coutumiers, annulant ainsi les effets négatifs des
lotissements administratifs. En effet, dans la plupart des cas, ce sont des
accords verbaux qui ont été conclus entre l'autorité
municipale et le propriétaire coutumier. L'absence de document
écrit empêche toute procédure légale pour
acquérir un lot de compensation `'promis». De l'avis des
propriétaires terriens, les lotissements privés présentent
naturellement de nombreux avantages. Le chef de Tagoura affirme que : «
l'Etat a vu juste pour donner à césar ce qui appartient
à césar. Il y a des gens qui sont sur leurs portions de terre
qu'ils gèrent depuis des millénaires. Aujourd'hui, l'Etat
reconnait que ces personnes sont les propriétaires de fait, quoi de plus
normal ».
Par ailleurs, les difficultés rencontrées avec
les lotissements privés seraient à mettre sur le compte d'un
début et d'une adaptation progressive. « Avec les
propriétaires terriens c'est nettement mieux. Les problèmes que
nous connaissons, comme c'est un début, c'est peut être
çà qui fait. Mais au fur à mesure on va avancer, ça
va aller. Parce que aujourd'hui, faites le tour des villages, tous les chefs de
villages pratiquement, c'est les gens qui exerçaient au niveau de la
fonction publique et au cours de leur retraite gèrent. Donc ils sauront
mettre en place des structures pour mieux diriger ces
problèmes-là, pour mieux régler et prendre des
précautions pour ne pas qu'il y ait des disputes, pour ne pas qu'il y
ait des conflits. Sinon, l'Etat n'a pas mal fait en demandant aux populations
de lotir elles-mêmes leurs parcelles », justifie le chef de
Tagoura. La gestion du foncier serait donc meilleure d'ici quelques
années grâce à l'encadrement de l'Etat à travers le
Ministère de la Construction et de l'Urbanisme et les structures mises
en place dans les villages.
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