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La communication politique dans les élections au Sénégal: l'exemple du PS(Parti Socialiste) et de l'AFP(Alliance des Forces de Progrès) en l'an 2000

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par Hamad Jean Stanislas Ndiaye
Université Gaston Berger de Saint-Louis (Senegal) - Maitrise de Sciences Politiques 2004
  

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Déconstruire le régime socialiste.

« Je suis prêt »...tel était le cri de schisme définitivement consommé entre Moustapha

NIASSE et le pouvoir socialiste. En choisissant cet espoir et en l'affichant au grand jour, il s'exposait au piège d'assumer ce passé politique, qu'il `reniait' pour porter l'AFP sur les fonds baptismaux.

Le leader progressiste dira ne rien regretter, pour avoir « servi avec loyauté (...), fierté » , ne

rien renier de ce passé qu'il a choisi et qu'il assume pleinement. Il se dira même décidé à s'engager « avec la même volonté et la même détermination » et à se mettre à la disposition de son pays.

Dès lors, s'inscrivant dans une dynamique d'opposition 'antidiouf', le discours de l'AFP et des compagnons de Moustapha NIASSE ne sera pas tendre à l'endroit du régime socialiste, qui se retrouve entre le marteau de la traditionnelle opposition et l'enclume de la nouvelle, incarnée par les deux dissidents du PS.

Pour cet ancien membre du système socialiste, l'objectif logique se résume en une déconstruction du PS, idéologiquement, politiquement et structurellement parce qu'étant une formation jugée corruptrice des masses et usée par l'exercice du pouvoir.

Et le ton est vite donné, lorsque le 16 juin 1999 soit deux jours après la reconnaissance

officielle du parti, retentit l'appel du leader de l'AFP, un appel par lequel le leader se dit prêt et avoir choisi l'espoir. NIASSE y dresse un réquisitoire particulièrement virulent contre « la mainmise de groupes d'intérêts mafieux sur le pays, le clientélisme archaïque et étriqué, la manipulation de la Constitution et des institutions, l'absence totale de projet de société... » et pour celui qui se présentera comme le plus redoutable adversaire d'Abdou DIOUF, « changer

le Sénégal est un impératif absolu ». Convaincu que « des ruptures sont parfois nécessaires quand vient le temps du destin », il se dit « prêt ».

Même s'il ne manque pas d'être l'objet de diatribes acerbes et d'une rare violence, en tout cas dans le contexte qui a toujours été celui du Sénégal jusquelà, il campe, dans un réquisitoire empreint d'un grand courage politique, les maux dont souffrent, selon lui, ses compatriotes sénégalais et dit sa décision de se démarquer du régime socialiste. Dans sa déclaration de

rupture, NIASSE constate que « ...les raisons d'espérer qui étaient pour chaque sénégalais une source de confiance, semblent inexorablement se dérober ».

Quelques temps plus tard, devant les Sénégalais de l'étranger, à Paris, il n'hésitera pas à prendre des accents populistes car « Pendant que les bouches pleines mentent, inventent et manipulent,

les ventres creux meurent (...) les vieilles mamans (...) vont acheter des os au marché pour

donner le goût de la viande au riz ».

Evoluant dans une logique de déconstruction du régime socialiste, le diagnostic auquel il se livre est significatif car provenant d'un homme qui fut, de tout temps, un acteur du système et qui a toujours assumé de hautes responsabilités dans les organes du pouvoir de l'Etat comme

du PS.

Au moment où il tourne le dos à la famille socialiste, le leader progressiste s'estime guidé par

« la conviction de ce que le PS, miné de l'intérieur par des luttes intestines, usé par l'exercice

du pouvoir surtout dans les 10 dernières années du magistère de DIOUF, traduisait l'usure du pouvoir lassé, épuisé mais imbu de sa force et du monopole qu'il exerçait presque dans tous les domaines, sans limites et sans contraintes ». Ce que le leader de l'AFP qualifie

d' « immobilisme dévastateur du fait de la conscience de l'esprit impérial » ou encore

de « reflex impérial du pouvoir usé (...) à l'image de cet Empereur qui, tant qu'il vit, reste

Empereur ».

Il demeure néanmoins que combattre le régime socialiste implique sans nul doute le départ de

cet « Empereur » qui dira, dès les débuts de la campagne électorale, ne pas connaître « l'usure

du pouvoir ».

Et même s'il le réclame ardemment parce que souhaitable et préférable pour le peuple sénégalais en cet instant précis de son histoire et dans ce contexte particulier de l'an 2000, Moustapha NIASSE ne considère pas le départ de DIOUF comme une fin en soi. « Parce que cela aurait été vain, irresponsable, personnellement vindicatif et sans signification » aussi

« parce que dans la vie politique, la focalisation sur un individu devient vaine quand on

considère cette focalisation comme une fin en soi ». Pour lui, « le départ de DIOUF n'était qu'un point ou un aspect de la vision globale de l'AFP et de son idéal politique (...) son départ était juste une voie obligée pour provoquer les changements».

Dans cette visée, le leader de l'AFP soutenue par huit autres partis dans le cadre de la CODE

2000 (Coalition De l'Espoir 2000) mettra l'accent sur l'impératif que constitue la reconstruction de l'Etat démocratique à un moment où « le système politique, depuis longtemps, est conçu au travers d'un pouvoir politique personnalisé qui sur concentre autour d'un pouvoir présidentiel aux contours indéfinis, la quasi totalité des pouvoirs y compris Législatif et Judiciaire »30 .

En effet, « jamais dans l'histoire de ce pays, les interrogations n'ont été aussi nombreuses sur tout ce qui touche à l'avenir et aux perspectives d'une nation qui, jusquelà, avait su faire face

à toutes les incertitudes politiques, économiques et sociales, quelles qu'en fussent les causes,

les manifestations et les effets ».

Le tableau que dresse le candidat de la CODE 2000, est donc des plus noirs et accablants pour

le régime socialiste. Mais le discours ne peut prospérer que conjugué et mis en perspective face

à la réalité que vit le peuple. Et « les événements, parfois douloureux, survenus au cours des deux dernières décennies, ont montré que le peuple sénégalais, fidèle à son histoire, a, chaque fois, pris délibérément le parti de ne pas céder au découragement, de ne pas reculer devant l'adversité, de surmonter les épreuves et d'afficher une foi en Dieu et une fierté enracinées dans sa culture ».

Le diplomate devenu homme politique et sachant que la tâche de liquidation d'un système

auquel il aura appartenu de tout temps, ne sera pas aisée, se livre donc à une plaidoirie dans laquelle la condition de ses concitoyens est rappelée. Ce discours, à dessein, remarque qu' « Après tant de promesses non tenues, tant de rendezvous manqués et tant d'occasions ratées,

les sénégalais en sont arrivés, hélas, à osciller devant l'impossible choix entre la résignation et

la révolte ».

Mais comme face au dilemme auquel se trouvait confronté 'l'âne de Buridan', qui tant assoiffé

qu'affamé, se tenait à équidistance d'une nourriture et d'une boisson et ne pouvait se résoudre

à choisir entre l'une et l'autre, le peuple doit opter pour sa survie. Ce que le leader de l'AFP préconise, c'est donc le rejet du régime en place car « jamais, sans doute, depuis 1960, le fossé n'a été aussi grand entre ceux qui sont censés assurer la direction du pays et nos populations ». S'installe alors le débat sur la crise de la représentation et de la représentativité, ravivé par « le discrédit et la méfiance(...) forts à l'égard des dirigeants » et « là où, précisément, la recherche

30 Quotidien Le Matin du lundi 24 janvier 2000 p.3

de l'intérêt général devait constituer l'unique finalité de l'action politique, l'on ne rencontre, le plus souvent, qu'une succession de manipulations d'appareils, que de démarches marquées du sceau d'un clientélisme archaïque et étriqué ou encore des luttes d'influences synonymes de courses acharnées et de dérives sapant, gravement, le moral des sénégalais. Ces courses et dérives, érigées en système de gouvernement, ont débouché sur (...) un affaissement de l'Etat

et une dépréciation continue de son autorité quand celleci ne se manifeste pas des réflexes de violences au détriment du citoyen ».

Devant pareil constat, il invite à l'adhésion du peuple pour changer le régime socialiste. Pour Moustapha NIASSE, devant ce constat d'irresponsabilité « l'urgence est à un véritable sursaut » qui redonnera ses lettres de noblesses à la politique et qui permettra à tous ses concitoyens d'être, après Dieu, enfin maîtres de leur propre destin, car pour peu que le peuple dise non aux artifices politiques et juridiques, « la route menant à un tel objectif est accessible

et personne (...) n'a le droit de se taire, malgré les menaces et les provocations ».

Néanmoins, il faudra attendre la campagne électorale de la présidentielle, pour voir le discours

de l'AFP et du leader de la CODE 2000 monter d'un cran et se faire plus virulent. Le combat s'annonçait donc difficile pour un ancien socialiste, même ayant choisi avec beaucoup de courage politique de rejoindre l'opposition, car il était épié et attendu sur de nombreux terrains

à la fois. Le leader progressiste le reconnaîtra en avouant que l'écueil qui se devait d'être surmonté était d' « éviter la confusion naturelle entre le PS...» qu'il venait de quitter « ...et un

PS bis que serait l'AFP ».

En ce sens, le dilemme progressiste aura pesé telle une épée de Damoclès au dessus de la

CODE 2000.

Le premier jet devait donc logiquement consister pour NIASSE à discréditer le pouvoir de DIOUF par une remise en cause de tout un système politique, tout un mode de gouvernance dans un parti qu'il considérait comme « ayant vieilli et ayant volontairement tourné le dos à tout effort d'innovation, de rénovation, de rajeunissement et d'adaptation aux circonstances et demandes du peuple sénégalais ». Et lorsque à Kédougou, le candidat socialiste sollicite « un nouveau mandat pour un avenir en rose », le leader de l'AFP prédit à Bignona dans le sud, casamançais, que « le 27, le peuple déracinera le pouvoir qui l'appauvrit »31 . Comme pour dire

31 Quotidien Le Matin du mardi 8 février 2000

que « l'Etat ne doit pas être une abstraction au service d'une ambition ou d'ambitions limitées

à un c ercle restreint »32).

Tout au long de la campagne électorale, le discours de NIASSE va se résumer à une invitation

au peuple afin de faire advenir le changement au sommet de l'Etat et de libérer les énergies pour un « Sénégal, autrement géré ». Si pour lui, « Rufisque a été sacrifié par l'égocentrisme », il rappelle aux paysans de la Vallée qu'ils ont l'avenir du Sénégal entre leurs mains et invite les populations de Bakel à prendre leurs responsabilités le 27 février 2000. Dans la 'mythique cité du rail', Thiès, capitale du chemin de fer, le leader progressiste martèle encore qu' « il faut choisir entre la récession économique et le progrès »33 . Et lorsque, depuis Fatick, le candidat du PS annonce « la chronique de la défaite de l'opposition », le dissident socialiste rappelle au peuple que « DIOUF a mené le pays à l a déroute ».

Et lors du Congrès d'investiture de l'AFP à Kaolack le 15 janvier 2000, Madieyna DIOUF, par

ailleurs numéro 2 du parti, en dressant le « bilan catastrophique de DIOUF » constatera à

l'endroit de l'électorat juvénile que « ...les jeunes sont fatigués de la politique sans envergure

du PS... ».

On aura pu le comprendre : le combat pour la déconstruction du régime socialiste a été délicat pour le leader de l'AFP et de la CODE 2000. Mais n'étant pas « une fin en soi » pour Moustapha NIASSE, le départ du président Abdou DIOUF et de son régime ne constituait qu' « un aspect de la vision globale de l'AFP et de son idéal politique ».

Après avoir confirmé le schisme, il fallait l'assumer et tenter de s'imposer comme une force dans le paysage politique sénégalais. Ce qui devait constituer le prix à payer « pour un Sénégal autrement géré ».

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus