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Le concept d'Ontologie Sociale

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par Jules Donzelot
Université de Provence - Master 1 - Maà®trise de philosophie 2004
  

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Le savoir commun - common knowledge

Gilbert emprunte le concept de savoir commun à David Lewis. Dans son livre Convention36(*), ce dernier essaye de résoudre les problèmes de coordination en décrivant les conventions sociales en termes de régularités. Considérant toutes les activités humaines comme autant de jeux renvoyant aux intérêts des individus participants, il identifie une classe d'activités comme la classe paradigmatique des activités humaines. Il s'agit des jeux où les intérêts des participants divergent (cette classe se distingue des jeux de coordination pure et des jeux de pur conflit, où les intérêts soit coïncident parfaitement soit sont radicalement opposés). Dans ces jeux là, des conventions sont nécessaires afin de régler les activités. Les conventions se présentent alors comme le mode principal de résolution du jeu des volontés. Avant de présenter sa théorie des conventions, voyons d'abord de quelle façon il définit les problèmes de coordination qu'elles sont censées résoudre : « Les problèmes de coordination sont les situations qui mettent en jeu les décisions interdépendantes de deux ou plusieurs agents, où le souci de la coïncidence des intérêts prédomine et dans lesquelles plusieurs coordinations appropriées sont possibles. »37(*) Les problèmes de coordination se caractérisent surtout en ceci que chacun étant susceptible d'envisager une solution fonctionnelle indépendamment des autres, une convention est nécessaire pour que le comportement des individus s'accorde. Deux exemples types de ce genre de situation sont les suivants :

b. Deux personnes se téléphonent. La ligne est coupée. Qui rappelle ?

c. On vient de construire la première route du pays : il est nécessaire de décider si les voitures doivent rouler à gauche ou à droite.

Voici maintenant la définition que David Lewis procure de la notion de convention :

« Une régularité R dans le comportement des membres d'une population P lorsqu'ils sont les agents d'une situation récurrente S est une convention si et seulement si, dans n'importe quelle occurrence de S au sein des membres de P,

1) Chacun se conforme à R ;

2) Chacun attend de tous les autres qu'ils se conforment à R ;

3) Chacun préfère se conformer à R à la condition que les autres le fassent aussi, dans la mesure où S est un problème de coordination et où R consiste en une coordination appropriée dans S. »38(*)

La définition ci-dessus rend compte des conditions sous lesquelles un phénomène de coordination est identifiable en tant que tel. Mais elle n'indique pas comment la convention fonctionne. Les individus étant considérés comme des agents rationnels, leur comportement doit être décrit en termes de raisons d'agir. Nous devons alors demander : Qu'est-ce qui fait que les gens agissent selon la convention et non autrement ? Quelles sont leurs raisons de maintenir telle convention plutôt que telle autre ? La réponse à ces questions se trouve dans le concept de savoir commun [common knowledge]. Le savoir commun désigne le socle de croyances sur lequel repose l'action coordonnée des individus. Les croyances en question renvoient à leur tour à des raisons de croire. Par exemple, si je constate que la plupart des voitures que je croise sur la route roulent effectivement à droite, j'ai des raisons de croire que les prochaines voitures que je croiserai rouleront aussi à droite. Tous les comportements des humains dans la situation paradigmatique des problèmes de coordination renvoient, selon Lewis, aux croyances sur lesquelles s'appuient les individus afin de maintenir la régularité de leur comportement. On dira par exemple : les voitures continuent de rouler à droite car il est de savoir commun que l'ensemble des usagers des routes roule effectivement à droite. Considérons maintenant la définition que Lewis procure de la notion de savoir commun :

« Il est de savoir commun dans une population P que ___ si et seulement si un certain état de choses A se maintient de sorte que :

1) Chaque membre de P a raison de croire que A se maintient.

2) A manifeste à chaque membre de P que chacun a raison de croire que A se maintient.

3) A indique à chaque membre de P que ___ . »39(*)

Malgré sa cohérence apparente, la notion de savoir commun ne va pas sans poser de difficultés. Pour que la régularité se maintienne, en effet, il est nécessaire que chacun continue de croire que les autres vont continuer à la respecter. C'est-à-dire qu'il est nécessaire que chacun croie que les autres croient qu'il est toujours bénéfique de la respecter. C'est-à-dire aussi qu'il est nécessaire que chacun croie que les autres croient que chacun croit que les autres croient qu'il est toujours bénéfique de la respecter. Et ainsi de suite, à l'infini. Le socle de la régularité des comportements humains, au lieu d'être bien solide, est constitué, in fine, de poussières. L'esprit évidemment ne passe pas son temps à se demander ce que les autres croient qu'il croit qu'ils croient etc. Pourtant, c'est bien ce que le raisonnement de Lewis, qui tient les humains pour des agents strictement rationnels, affirme.

* 36 David Lewis, Convention, 1969.

* 37 Convention, p. 24.

* 38 Convention, p. 42

* 39 Convention, p. 56.

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