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Les obstacles à la bonne qualité de l'eau dans les rivières péri-urbaines. L'exemple du bassin versant de l'Azergues (Rhône)

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par Nicolas Talaska
Université Lumière Lyon 2 - Maîtirise de géographie 2007
  

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3.2 Les perceptions divergentes de l'évolution de la qualité

Pour tous les élus rencontrés, la qualité de l'eau de l'Azergues est meilleure aujourd'hui qu'avant. Cette perception est donc toute à l'opposé du sentiment dominant chez les usagers. Elle est aussi contraire aux résultats de Brun. Rappelons que sur les 53 « acteurs locaux » se prononçant sur la question de l'évolution de la qualité de l'eau d'hier à aujourd'hui, dans le bassin de la Saône, 41 optaient pour une dégradation96(*). A. Brun soulignait que ce sentiment portait en lui la mise en cause d'activités polluantes ne relevant pas de la responsabilité des personnes interrogées. Il citait, par exemple, les remarques d'interviewés dénonçant le rôle de l'administration ou d'un pollueur bien identifié dans la dégradation des cours d'eau, alors même que des actions à la portée des personnes interrogées ne faisaient pas vraiment l'objet de priorité (assainissement des communes rurales, par exemple). Dans notre cas c'est plutôt l'inverse, mais ce constat n'est pas sans ambiguïté.

Les élus justifient leur perception de l'amélioration de la qualité de la rivière par les efforts qu'ils consentent à faire pour traiter les rejets domestiques (construction de réseaux et de stations d'épuration, perfectionnement des systèmes de traitement, mise en oeuvre des SPANC97(*)). Pour appuyer leur vision, ils citaient tous la présence de la fameuse Ecrevisse à pattes blanches et parfois le retour du Brochet dans la Basse-Azergues. Selon eux, la mise en place dans la plupart des communautés de communes de filières de collectes des déchets (construction de déchetterie, mise en place du tri sélectif) a également permis de réduire les décharges sauvages en bords de cours d'eau, et donc d'améliorer la qualité des rivières. Par ces discours les élus assument bien leurs responsabilités, mais le feraient-ils s'ils n'avaient pas engagé les actions précitées ?

Il est indéniable que les travaux d'assainissement ou de traitement des déchets ménagers participent à l'amélioration de la qualité de l'Azergues et de ses paysages. Ces actions, aujourd'hui bien identifiées par les citoyens comme bénéfiques à l'amélioration de la qualité de la rivière, permettent aussi aux élus de montrer leur engagement dans la démarche, désormais dogmatique, du « développement durable »98(*). Dans cette logique, les élus rencontrés se montrent très optimistes sur l'évolution future de la qualité. « On va de l'avant donc ça ne peut que s'améliorer » disait ainsi un élu de la Basse-Azergues à propos des travaux d'assainissement. De même la sensibilisation croissante des jeunes générations aux problèmes environnementaux serait un facteur positif. Un élu faisait référence aux actions dans le milieu scolaire,  « On leur apprend ce qu'est la nature ». Sur ce sujet on pourrait d'ailleurs s'interroger sur la conception de la nature sous-jacente à l'éducation à l'environnement99(*).

Toutefois le discours des élus sur la qualité de l'eau est restreint aux seules problématiques d'assainissement. Les perturbations physiques de la rivière et de ses affluents ont toujours été absentes des entretiens. Ce que dénonce le président et un technicien de la Fédération de Pêche qui soulignent que l'Azergues est très impactée par les perturbations physiques, et notamment la Basse-Azergues. Selon eux, les travaux d'assainissement sont nécessaires mais pas suffisants pour atteindre les objectifs de la DCE. Les seuls points qui avaient trait aux problématiques de l'hydromorphologie concernaient les atterrissements. Il en était question car ils posent des problèmes d'érosions de berges avec parfois des risques de déstabilisation d'ouvrages, et peuvent accroître les risques d'inondations dans les secteurs urbanisés. Les atterrissements ne sont perçus que comme des problèmes mais leurs enlèvements sont à l'origine de conflits récurrents avec la Police de l'eau. D'un côté, les élus veulent pouvoir intervenir vite en rivière pour enlever les atterrissements afin de limiter les risques qu'il font peser sur les biens publics et privés mais aussi sur la responsabilité juridique des élus100(*), de l'autre, les agents de la DDAF demandent la construction de dossiers administratifs lourds exigeants une perturbation minimale de la rivière conformément à la réglementation en vigueur. Ce point sera approfondi dans le chapitre suivant.

A l'optimisme des élus, s'oppose le pessimisme des divers techniciens (Fédération de pêche, Chargé de mission contrat de rivière Azergues et Brévenne-Turdine, chargé de mission du Programme Qualité des Eaux dans le Beaujolais Viticole) sur l'évolution de la qualité des eaux de l'Azergues. A titre d'exemple, alors que les élus parlent d'une amélioration depuis une dizaine d'année, les acteurs de la pêche constatent plutôt l'inverse.

Sur l'évolution future l'optimisme des élus est partagé par la majorité des usagers enquêtés, mais les techniciens rencontrés font part de leurs inquiétudes. Les raisons ne sont pas les mêmes, toutefois le réchauffement climatique est cité comme un des facteurs fondamentaux de la non atteinte du « bon état écologique » par le technicien de la Fédération de pêche et par la chargée de mission du contrat de rivière Brévenne-Turdine. Pour la chargée de mission du programme QEBV, c'est plutôt la crise économique du vignoble du Beaujolais qui est avancée comme facteur limitant la réduction de la contamination des eaux par les pesticides. De la même manière le chargé de mission du contrat de rivière Azergues fait part de nombreuses interrogations sur les possibilités d'atteindre le bon état pour 2015.

Enfin, on peut souligner des représentations divergentes entre les analyses de la qualité menées par le Conseil Général et les récentes études pour définir les potentialités d'atteinte du « bon état » des eaux dans le cadre de la DCE. Alors que les analyses du Conseil Général donnent une image de la qualité de l'Azergues plutôt bonne dans son ensemble, l'état des lieux DCE identifie, sur les cinq masses d'eau du bassin versant de l'Azergues, deux masses d'eau présentant un risque fort de non atteinte du « bon état », et une autre masse d'eau pour laquelle il existe des doutes. Cette divergence n'est-elle pas liée à une conception différente de la qualité ? Les analyses du Conseil Général sont historiquement orientées vers des problématiques d'assainissement, elles privilégient donc la qualité physico-chimique de l'eau. A l'inverse la DCE pointe son attention sur la biologie. Or, la considération des indicateurs biologiques rend bien mieux compte des dégradations de l'eau car elles n'enregistrent pas des situations ponctuelles (comme les analyses physico-chimique) mais elles révèlent des situations sur des temps longs enregistrés par les êtres vivants. Généralement, la considération des indicateurs biologiques révèle des situations de qualité moins bonnes que les seuls indicateurs physico-chimiques.

* 96  BRUN (A), op. cit. pp. 329-330

* 97 Service Public d'Assainissement Non Collectif.

* 98 Un élu « multi-casquettes » de la Moyenne Azergues fait même de ce thème une obligation en faisant référence à l'ampleur médiatique qu'il a pris au début de la campagne présidentielle de 2007 : « Nous devons faire du développement durable ».

* 99 Pour ne citer qu'un exemple, ce sujet fait l'objet d'une recherche par Caroline LEININGER-FRÉZAL (thèse en cours de géographie sous la direction de Isabelle LEFORT) L'éducation à l'environnement et au développement durable : analyse de discours, de pratiques et des stratégies d'acteurs, Université Lyon 2.

* 100 Les maires sont responsables de la sécurité de leurs administrés

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand