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Dépenses Militaires, Gouvernance et Efficience Economique: le cas de l'Afrique sub-Saharienne

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par Thérèse Félicitée AZENG
Université de Yaoundé 2-SOA - DEA 2008
  

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INTRODUCTION GENERALE

Depuis les origines de la science économique, les économistes se sont intéressés aux thèmes de la guerre et de la paix, lesquels ont un caractère crucial pour l'humanité. Mais curieusement, si guerre et paix ont retenu l'attention des grandes disciplines telles que la littérature, la philosophie, la sociologie, les sciences politiques ou encore les relations internationales, aucune contribution n'est reconnue au champ de l'économie1(*). Il faut dire que les théories économiques n'ont pas toujours eu la même conception de la défense, de la guerre et de la paix que les autres disciplines, de même, la distinction entre l'état de paix et celui de guerre n'est pas toujours claire. Cette distinction devrait être liée à celle faite, sur le plan méthodologique, entre la théorie économique « pure », qui présente la paix comme une situation normale et exclut la défense de l'analyse, et une approche plus « pragmatique » de l'économie appliquée qui inclut les situations de conflits dans son analyse (Coulomb, Fontanel, 2003).

L'analyse des dépenses militaires ramène souvent à traiter des aspects stratégiques, politiques et sécuritaires. Le volet économique n'y est pas relevé de prime abord. En effet, le caractère délicat du sujet en fait une pente critique où très peu d'économistes s'engagent, surtout dans les pays en développement, particulièrement en Afrique. Les informations qui y ont trait sont, la plupart du temps, classées dans le registre du « secret défense ». Pourtant, les dépenses militaires constituent une branche du budget national ayant des effets sur l'économie au même titre que les autres dépenses gouvernementales. Une lecture économique s'avère, de ce fait, utile pour en saisir les enjeux et les perspectives. D'après la définition de l'OTAN, les dépenses militaires comprennent les dépenses courantes et les dépenses en capital des forces armées, incluant les forces de maintien de la paix, le ministère de la défense et autres agences gouvernementales engagées dans les projets de défense, les forces paramilitaires, ainsi que les activités militaires dans l'espace2(*) (Banque Mondiale, 2005).

L'Economie de la défense s'est développée dès la fin de la seconde guerre mondiale, c'est une branche de l'analyse économique chargée de l'étude des dépenses militaires et leurs corrélations ou leurs interdépendances avec l'économie (MATELLY, 1998). Le thème des conséquences économiques des dépenses militaires demeure très étudié de nos jours. Ces études portent notamment sur la relation entre les dépenses de défense et la croissance économique, ou l'investissement, l'emploi, et autres paramètres sociaux. Les résultats obtenus dépendent souvent du choix du modèle utilisé (keynésien ou classique), ainsi que la longueur de la période utilisée (COULOMB, 2004). Quoi qu'il en soit, la plupart des économistes s'accordent sur le fait que des dépenses militaires excessives sont néfastes pour l'économie, quel que soit le niveau de développement du pays considéré. En particulier, on démontre que des dépenses militaires excessives compromettent l'avenir des pays en développement, car elles relèguent en général à l'arrière-plan les dépenses sociales et économiques plus propice à aider ces pays à sortir de leur état de sous-développement (BERTHELEMY et al, 1994).

La fin de la guerre froide et les changements dans la politique internationale ont été longtemps considérés comme le début d'une ère nouvelle pour l'économie de la défense, car il a été alors question de réduction généralisée des dépenses militaires mondiales. En effet, c'est la période où tous s'accordent à penser que la réduction des budgets de la défense des différents pays permettrait de maintenir une paix durable et d'aider les pays les moins avancés à se développer (BAYOUMI et al. 1993, BERTHELEMY et al. 1994, BLIN 1996, VIGNARD 2003). Cependant on observe de nos jours une résurgence et un développement des dépenses publiques, au sein desquelles le budget de la défense tient une place majeure.

Les dépenses militaires mondiales étaient évaluées à 950 milliards de dollars US en 1991, les pays en développement y contribuaient à hauteur de 150 milliards de dollars US3(*). En 1996, les dépenses mondiales s'élèvent à 747 milliards de dollars, pour atteindre 1001 milliards de dollars US en 2OO5, soit une variation de 47,7% en dix ans4(*). La contribution de l'Afrique dans les dépenses militaires mondiales s'est accrue régulièrement au cours de cette période. Elle est passée de 0,99% en 1988, à 1,15% en 1996, pour être de 1,27% en 2005. On constate de ce fait que de plus en plus de pays africains accroissent leurs dépenses de défense, ce qui constitue un fardeau économique lourd dans beaucoup de ces pays où les besoins sociaux concurrencent pour des ressources économiques rares (OMITOOGUN, 2000). Les dépenses militaires demeurent relativement élevées en Afrique. Elles sont évaluées à 2,3% du PIB en 1998, comparé aux 1,6% du PIB en Asie, et aux 1,3% du PIB dans l'hémisphère Ouest. Les dépenses militaires ont été plus élevées en Afrique que dans ces deux autres régions en tant que part du PIB tout au long des années 19905(*). Entre les économies en développement et en transition, l'Afrique dépense plus en part du PIB sur le militaire que toutes les autres régions, exception faite du Moyen-Orient6(*). Entre la fin des années 70 et le début de ce siècle, la part de l'Afrique dans les échanges mondiaux est tombée de 3 à 1,5 % et ce n'est donc pas un hasard si le nombre d'Africains vivant en dessous du seuil de pauvreté a été multiplié par deux. De nos jours, le continent africain abrite 13 % de la population mondiale mais ne compte à son actif que 1,6 % des échanges mondiaux et à peine 1 % de l'investissement mondial7(*).

C'est la part croissante des dépenses militaires de l'Afrique au sud du Sahara dans les dépenses militaires mondiales qui nous pousse à nous interroger sur l'efficacité et l'impact de celles-ci sur la croissance économique, le bien-être des populations et le développement de cette région.

Depuis les deux dernières décennies, la plupart des pays africains au Sud du Sahara sont traversés par une crise économique et sociale de grande ampleur, qui se manifeste par un accroissement de la pauvreté et du chômage, ce qui entraîne une forte dégradation des conditions de vie des populations. Les Etats sont alors amenés à réduire leurs dépenses gouvernementales, surtout celles considérées comme improductives, ceci dans l'optique d'assainir leurs finances publiques, objectif principal requis par les institutions financières internationales à travers le Consensus de Washington. Toutefois, malgré les réformes engagées au courant de cette période pour sortir de la crise, on constate que l'enveloppe budgétaire accordée à la défense représente toujours l'une des rubriques les plus lourdes au budget national. A titre d'illustration, au Cameroun en 1983, le budget des forces armées représente 6,71% du budget total, contre 9,72% pour l'éducation nationale, 1,83% pour l'agriculture et 3,36% pour la santé publique8(*). En 2003, la défense reçoit 7,26% du budget total, quand l'agriculture n'en reçoit qu'à peine 1,86% et la santé publique ne représente que 3,74% du budget national9(*). En moyenne, on estime que le Cameroun a consacré 6,623% de son budget national au budget de la défense. Les dépenses militaires au Cameroun étaient en moyenne de 1,4% du PIB national de 1988 à 2002, et ces dépenses représentaient environ 6,623% des dépenses du gouvernement central. Enfin le personnel militaire ne représente, entre 1989 et 1999, qu'environ 0,46% de la main-d'oeuvre totale10(*).

D'où l'intérêt porté à une étude de l'impact des dépenses militaires sur la croissance et le bien-être. En effet, il s'avère essentiel de connaître les répercussions que ce grand intérêt pour la défense, qui passe devant les dépenses sociales de base, pourrait avoir sur les conditions de vie des populations. Il est donc intéressant de connaître les effets de ces dépenses sur le développement économique du pays à travers leur impact sur la croissance économique. Car, même si l'objectif de sécurité des personnes et des biens assigné à l'Etat est une priorité majeure, il faut toutefois s'assurer que cela ne se fasse au détriment des autres objectifs de l'Etat, notamment l'objectif de réduction de facilitation de la croissance et de réduction de la pauvreté. Le défi serait alors de déterminer un niveau optimal de dépenses militaires, c'est-à-dire celui compatible avec la capacité du pays à fournir un environnement sécurisé, nécessaire à un développement économique et social ; avec la stabilité politique, l'amélioration des conditions de vie des populations, la cohésion sociale, la sécurité régionale et la lutte contre la pauvreté. D'où la question : les dépenses militaires satisfont-elles aux objectifs économiques auxquels elles sont assignées dans les pays africains ?

L'impact des dépenses militaires sur la croissance économique ne dépend pas uniquement du volume desdites dépenses, mais aussi du degré d'efficience des services rendus par ces dépenses. De ce fait, l'objectif de notre travail passe principalement par la réponse à la question globale posée, qui requiert l'évaluation de trois questions subsidiaires que sont :

1- ) Le financement des services publics de défense est-il efficient dans les pays africains ?

2- ) Quels sont les facteurs qui agissent sur l'efficience et quelles mesures de politique économique sont susceptibles de l'améliorer ?

En cette période où la plupart des pays africains recherchent la voie vers le développement, il est intéressant d'explorer les effets qu'ont les dépenses publiques, et notamment les dépenses militaires, sur les différentes variables économiques du pays. Plus spécifiquement, il est pour nous question de :

1) Déterminer le degré d'efficience des dépenses militaires en Afrique subsaharienne.

2) Apprécier le lien entre les dépenses militaires et la croissance économique du Cameroun.

Notamment, il s'agit de vérifier l'hypothèse selon laquelle les dépenses militaires ralentissent la croissance des pays en développement. En particulier, il est question de vérifier si :

H: Le financement des dépenses militaires n'est pas efficient en Afrique, par rapport aux objectifs économiques.

H: La bonne gouvernance détermine l'efficience des dépenses militaires et stimule la croissance économique.

Notre travail s'articulera en deux parties. La première sera consacrée au cadre théorique. Nous présenterons d'abord les grandes idées qui constituent l'économie de la défense, ensuite nous analyserons les indicateurs directs et indirects de l'efficience des dépenses publiques et exposons ensuite les principales conclusions de la littérature empirique traitant de cette question. Le deuxième chapitre contient les estimations des indices d'efficience de financement de ces services pour les différents pays de notre échantillon qui est composé principalement de pays africains. Ces estimations reposent sur la méthode « input/output » et sur des scores d'efficience qui y seront explicités.

Après s'être focalisé sur l'efficience des dépenses publiques et sur les objectifs de développement humain du millénaire des Nations Unies, il est utile d'en analyser l'incidence sur la croissance. Pour ce faire, les scores obtenus dans la deuxième section de la première partie seront utilisés dans une régression de croissance. En seconde partie, nous tenterons d'analyser les facteurs qui déterminent le niveau d'efficience des dépenses militaires, ce qui nous permettrait de cerner le rôle joué par chacune des composantes les plus importantes de la gouvernance. Cela nous mènera à dégager certaines recommandations de politique économique.

* 1 Exception faite à l'ouvrage « guerre et paix » de J. Proudhon, malgré le fait qu'il soit parfois considéré comme étant plus politique qu'économique ; ou encore « The Economic Consequences of Peace » de J.M. Keynes.

* 2De telles dépenses devraient aussi inclure le personnel militaire et civil, y compris des pensions de vieillesse du personnel militaire et des services sociaux pour le personnel; les opérations d'entretien, de fourniture; la recherche-développement (RD) militaire, et l'aide militaire (incluse dans les dépenses militaires du pays donateur). Toutefois, Les dépenses de défense civile et des dépenses courantes pour des activités militaires précédentes, telles que les avantages des vétérans, la démobilisation, la conversion et la destruction d'arme sont exclues de cette définition (SIPRI yearbook 2005).

* 3 Source : OCDE, 1994.

* 4 Source : SIPRI yearbook 2006.

* 5 Même si les pays en conflit sont exclus de notre analyse.

* 6 Source: FMI (1999), World Economic Outlook, October 1999: Box n° 6.1, pp 138-140.

* 7 Source : OMC.

* 8 Direction des impôts, Loi des finances 1983, MINEFI, Yaoundé.

* 9 Direction des impôts, Loi des finances 2003, MINEFI, Yaoundé.

* 10 Source : Banque Mondiale, 2006 World Development Indicators

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery