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Résumé d'ouvrages et travaux suivi de: Evaluation des risques sanitaires liés aux mélanges chimiques contenus dans l'eau destinée à la consommation urbaine

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par Evens EMMANUEL
INSA de Lyon - Habilitation à Diriger des Recherches 2008
  

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II.4.3.4. Contexte et objectifs de l'évaluation quantitative des risques biologiques

Le risque biologique présente de nombreuses spécificités qui empêchent une simple transposition de la méthodologie général d'évaluation des risques chimiques au domaine biologique (Bonnard, 2001). En effet, la transmission d'un agent infectieux impose la co-existence de trois éléments indispensables à la réalisation de cette « chaîne » : (i) une source de l'agent pathogène ou d'agents pathogènes opportunistes touchant des sujets fragilisés, (ii) un mode de transmission, et (iii) un sujet réceptif (Hartemann, 1996). L'agent infectieux est l'espèce capable de se multiplier dans l'organisme hôte (Bonnard, 2001). Cette caractéristique des agents infectieux oblige, au moment de l'application de la démarche générale d'évaluation des risques sanitaires liés à l'exposition aux organismes pathogènes, de prendre en compte certaines particularités spécifiques aux microorganismes.

Les particularités du risque microbiologique par rapport au risque chimique proviennent du caractère vivant de l'agent pathogène (croissance, acquisition de caractères nouveaux, adaptabilité). L'existence de réservoirs humains, animaux et environnementaux difficilement maîtrisables peut être également considérée comme une de ses particularités (Hartemann, 1996). La différence, sur le plan méthodologique entre l'estimation du risque chimique et celle du risque microbiologique ou infectieux, réside dans l'identification des fonctions dose-réponse, et plus particulièrement dans le choix du modèle de la relation dose-réponse. En effet, ce choix est fondamental pour l'estimation du risque microbiologique puisqu'il fournit la probabilité d'infection à partir d'un niveau d'exposition, ou inversement, qu'il estime l'exposition à partir du taux d'attaque dans la population.

Pour les dangers microbiologiques, les modèles les plus fréquemment utilisés sont le modèle « exponentiel » et celui de « Bêta-Poisson ». Les données expérimentales disponibles dans la littérature (Dupont et al, 1995 ; Haas et al, 1999 ; Yang et al, 2000) sont utilisées pour traiter le module dose-réponse.

Le modèle exponentiel :

Pr = 1 - exp (-rD) Eq. 1

Où :

P : Probabilité d'infection d'un individu exposé à une dose d de microorganismes,

r: constante correspondant à la probabilité de survie du germe ingéré dans l'hôte (= définition de l'infection),

d : dose ingérée

Le modèle de distribution Bêta-Poisson (Haas et al, 1999):

Eq. 2

d  : dose d'exposition

N50 : dose infectante moyenne égale à 8.60x107 pour E. coli

  : paramètre de la fonction de probabilité égale à 0,1778 pour la Escherichia coli.

II.4.3.5. Travaux réalisés et en cours

A partir d'une méthodologie élaborée pour l'évaluation des risques sanitaires (biologique et chimique) liés aux effluents hospitaliers, j'ai procédé dans le cadre de ma thèse de doctorat, à l'évaluation quantitative des risques biologiques d'Escherichia coli dénombrée dans l'eau d'une nappe de Port-au-Prince.

J'ai initié en 2005 ce thème dans l'axe de recherche du LAQUE. En effet, les travaux du PFE de Anie BRAS (2005) ont permis de mettre en évidence le risque biologique dû à Cryptosporidium sp. encouru par la population de la Communauté Urbaine de Port-au-Prince (CUPP) à partir de l'eau de boisson distribuée par le réseau d'approvisionnement public. Les résultats de ces travaux ont débouché sur une publication, deux communications orales et un poster.

En septembre 2007, en collaboration avec MM. Christian Raccurt et Patrice Agnamey (Université de Picardie Jules Verne), M. Philippe Brasseur (Unité de recherche 077 de l'IRD à Dakar), j'ai lancé un programme de recherche portant sur l'analyse des facteurs de risque de contamination par les oocystes de cryptosporidies et les kystes de Giardia présents dans les ressources en eau de la ville des Cayes, Haïti. Un article et une communication orale sont tirés des premiers résultats de cette étude. Les premiers travaux de ce programme ont été financés par la région de Normandie, le Service de Coopération et d'Action Culturelle de l'Ambassade de France en Haïti et le rectorat de l'Université Quisqueya.

Par dérogation du Conseil Scientifique de l'Université de Picardie Jules Verne, je suis co-directeur de thèse de Madame K. Balthazard-Accou, boursière de l'Ambassade de France en Haïti (EGIDE), avec M. C. Raccurt. Démarrée en septembre 2007, cette thèse se réalise dans le cadre d'une cotutelle entre l'ED Société et Environnement de l'Université Quisqueya, et l'ED en Sciences et Santé ED 368 de l'Université de Picardie Jules Verne. Elle porte sur la mise en place d'un observatoire sur la qualité microbiologique des ressources en eau douce de la Communauté Urbaine de Port-au-Prince (CUPP).

En Haïti, la chloration est le seul traitement accordé par les services publics à l'eau brute captée avant sa distribution à la population. Cette désinfection chimique est très efficiente dans l'élimination des bactéries et des virus. Cependant, elle est inefficace pour certains protozoaires, notamment les cryptosporidies.

Cryptosporidium sp. est un parasite unicellulaire (protozoaire) appartenant à l'ordre des coccidies, phylum Apicomplexa. Le cycle de multiplication comprend des stades asexués et sexués et se déroule dans la cellule parasitée en localisation extra cytoplasmique. De plus, ce cycle est caractérisé par des phénomènes d'auto-infection (schizogonies multiples) et par des rétros infections (reproduction sexuée avec production d'oocystes se recyclant directement dans l'intestin sans passer par le milieu extérieur) induisant une prolificité importante du parasite (figure 12). Les différents stades intracellulaires se développent dans la bordure en brosse des cellules épithéliales intestinales, au sein de vacuoles parasitophores et peuvent parfois atteindre les épithéliums des voies biliaires ou respiratoires. La multiplication asexuée conduit à la contamination de proche en proche de l'épithélium digestif et à son altération. La multiplication sexuée conduit, pour sa part, à la formation d'oocystes matures mesurant de 4,8 ìm à 5 ìm qui sont éliminés dans les selles et sont directement infectants (AFSSA, 2002).

Figure 12 : Développement apical de Cryptosporidium parvum dans les entérocytes (Microscopie électronique) (gauche : microvillosités de la bordure en brosse entourant les parasites ; droite : schizonte : coupe avec plusieurs mérozoïtes) A. Bonnin, J.F. Dubremetz (Source : ANOFEL ; AFSSA, 2002)

Environ 20 espèces de Cryptosporidium ont été décrites chez plus de 117 espèces de mammifères dans le monde (Dumoulin et al. 2000). La principale d'entre elle est Cryptosporidium parvum, avec, à ce jour, 10 génotypes identifiés chez de nombreux mammifères domestiques et sauvages (Perz et Le Blancq, 2001) dont au moins 4 sont infectants pour l'Homme (génotypes I et II principalement, et génotypes du porc et du chien). Des cas de contamination humaine (Perz et Le Blancq, 2001), ont, par ailleurs, été rapportés par Cryptosporidium felis (cryptosporidie du chat), Cryptosporidium meleagridis (cryptosporidie des oiseaux) et Cryptosporidium muris (cryptosporidie des rongeurs et des bovins adultes) (Guyot et al. 2001). La fréquence des contaminations humaines par des espèces de cryptosporidies animales ou des génotypes de Cryptosporidium parvum autres que les génotypes I et II est mal connue en raison de la difficulté d'identification de ces espèces. A ce jour, un projet de séquençage du génome, composé de 5 bandes chromosomiennes de Cryptosporidium sp. est en cours, portant sur les génotypes I et II.

Les cryptosporidies, coccidies mondialement répandues, sont éliminées avec les selles sous forme d'oocystes résistants à la désinfection chimique standard par chloration. Ceux-ci présentent un haut pouvoir infectant et peuvent survivre pendant plusieurs mois dans le milieu extérieur à une température de 30°C (Fayer et al. 1998). Entre 1980 et 1995, une vingtaine d'épidémies de crypstoridiose intestinale ont été rapportées dans le monde (Rose et al. 1997). La plus spectaculaire a été celle survenue à Milwaukee, aux Etats-Unis en 1993, avec 403.000 personnes contaminées dont 4.400 hospitalisées et 69 décédées par suite du passage d'oocystes de cryptosporidies dans l'eau de distribution de la ville (Mac Kenzie et al. 1994). La cause de cet événement était due à l'insuffisance des capacités de traitement de l'eau de distribution urbaine du fait de conditions météorologiques exceptionnelles ayant entraîné une contamination massive de la ressource.

En Haïti, la cryptosporidiose est responsable de 17% des diarrhées aiguës, observées chez les enfants de moins de 2 ans (Pape et al. 1987) et de 30% des diarrhées chroniques chez les patients infectés par le VIH (Pape et al. 1983). A Port-au-Prince, la présence d'oocytes de cryptosporidies a été décelée dans les eaux de surface et dans les eaux destinées à la consommation humaine distribuées par le réseau public (Brasseur et al. 2002).

Pour des raisons liées à la capacité analytique actuelle du LAQUE, nous avons décidé dans un premier temps, d'utiliser les données disponibles dans la littérature sur la caractérisation de l'exposition au Cryptosporidium sp. dans l'eau destinée à la consommation humaine à Port-au-Prince. Dans un deuxième, nous avons élaboré la démarche permettant d'estimer les risques avec le moins d'incertitudes possibles.

Du fait du degré de pathogénicité des cryptosporidies variable en fonction de l'âge (enfant de moins de 5 ans) et de l'état immunitaire du sujet infecté (sujets VIH+), la population de l'agglomération de Port-au-Prince exposée au risque a été divisée en quatre catégories :

· sujets immunocompétents âgés de 5 ans et plus, pour lesquels les risques de la contamination entraînent un risque de maladie faible ;

· sujets immunodéprimés âgés de 5 ans et plus, pour lesquels les risques de la contamination entraînent un risque de maladie fort en relation avec le degré de la dépression immunitaire liée à l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), le risque étant majeur en dessous du seuil de 150 lymphocytes CD4 par mm3 ;

· enfants âgés de moins de 5 ans immunocompétents pour lesquels le risque de la contamination entraîne un risque important de maladie ;

· enfants immunodéprimés âges de moins de 5 ans pour lesquels le risque de la contamination entraîne un risque majeur de maladie avec un pronostic très défavorable.

Le modèle adopté dans le cadre de cette étude pour l'évaluation quantitative des risques microbiologiques liés à la présence d'oocystes de Cryptosporidium dans l'eau de distribution publique et dans l'eau de réservoirs utilisés par la population s'articule autour de 4 modules (AFSSA, 2002):

· un module d'émission (ou contamination) : résultats des analyses (nombre d'oocystes trouvés dans 100 L d'eau filtrés) caractérisant la contamination de l'eau ;

· un module d'exposition : prise en compte de la proportion d'oocystes viables, seuls susceptibles d'entraîner une infection ;

· un module de consommation aboutissant à la caractérisation de l'ingestion d'eau pour quatre types de populations donnés.

· un module d'effet aboutissant, à l'aide d'une relation dose-réponse, à la caractérisation du risque d'infection et, à l'aide d'une relation infection-maladie, à celle du risque de maladie pour la population immunodéprimée.

La répartition géographique des points d'eau testés dans l'aire métropolitaine et la concentration moyenne en oocystes dans l'eau pour chaque zone sont montrées dans la figure 13. Dans les quartiers où l'eau contenait des oocystes de Cryptosporidium sp, le niveau de risque d'infection calculé s'établissait entre 1x102 et 5x102 pour la population immunocompétente ; pour la population immunodéprimée ce niveau de risque calculé variait de 1x102 à 97x102 selon la charge en oocystes des eaux consommées (Bras et al. 2007).

Figure 13 : Représentation graphique de la contamination des points d'eau de consommation étudiés dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince (nombre d'oocystes de Cryptosporidium sp pour 100 litres d'eau filtrée)

Les résultats obtenus pour les risques biologiques au Cryptosporidium sp dans l'eau de boisson justifient la poursuite de travaux sur ce thème. Nous avons décidé d'introduire ce thème dans l'axe 1 du LAQUE. Nos études d'évaluation des risques liés à Cryptosporidium sp. présentent un important intérêt pour la santé de la population haïtienne. Ces infections, qui ont occasionné, sur un fond endémique, des épisodes épidémiques au sein de populations immunocompétentes, se sont développées parallèlement à l'extension de l'infection par le VIH. C'est ainsi que depuis le début des années 1980, une vingtaine d'épidémies à Cryptosporidium parvum ont été rapportées dans le monde, tout statut immunitaire confondu. Elles auraient touché environ 430 000 personnes (Smith et Rose, 1998 ; AFSSA, 2002).

Sur 15 échantillons d'eau analysés, dans le cadre de ce programme de recherche, 8 (53%) ont été retrouvés positifs avec des oocystes de Cryptosporidium sp et/ou des kystes de Giardia sp. Les 6 sites contaminés par Cryptosporidium sp contenaient un nombre d'oocystes compris entre 5 à 100 pour 100 litres, soit une moyenne de 29. Les 4 sites contaminés par Giardia sp contenaient un nombre de kystes compris entre 5 à 960, soit une moyenne de 277 kystes pour 100 litres.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery