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Quelle législation foncière, comme outil de cohésion sociale et de développement économique, adaptée aux réalités socio-culturelles du Burkina?

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par W. Paul DABONE
Ecole Nationale des Régies Financières du Burkina - Inspecteur des Impôts 2008
  

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CHAPITRE 2 : LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE

La législation foncière règlementaire a été introduite dans les colonies d'Afrique noire par le colonisateur français. Après l'accession à l'indépendance, les législations foncières instituées par les régimes politiques post-coloniaux ont été inspirées de celle coloniale. Ensuite, la Réorganisation Agraire et Foncière (RAF) a introduit une nouvelle approche de la gestion foncière. Les différentes autorités politiques qui ont présidé aux destinées du pays, de la Haute Volta au Burkina Faso, ont ainsi institué à tour de rôle, la législation foncière qui leur semblait la mieux adaptée aux objectifs de la politique de développement qu'elles mettaient en place.

Nous présenterons l'évolution (section 1) et les caractéristiques (section 2) de la législation foncière réglementaire. Ensuite nous relèverons quelques unes de ses forces et faiblesses (section 3).

SECTION 1- L'EVOLUTION DE LA LEGISLATION FONCIERE

REGLEM ENTAI RE
I - LE REGIME FONCIER COLONIAL

Le colonisateur français a introduit dans les colonies de l'Afrique Occidentale Française (A.O.F), la notion de propriété privée des terres. Il a institué un régime foncier dont les principes proviennent du droit civil et des lois françaises et administré les terres africaines sur la base de la distinction « domaine public - domaine privé ».

I-1 - LA DISTINCTION DOMAINE PUBLIC - DOMAINE PRIVE

I-1-1- Le domaine public

C'est le décret du 23 octobre 1904 qui institue le domaine public en énumérant les biens qui en font partie.

Le domaine public comprend des biens qui, en raison de leur nature ou de leur destination, ne peuvent faire l'objet d'appropriation par des personnes de droit privé.

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Ils sont donc grevés d'indisponibilité du fait de leur domanialité.1 Pour ce faire la législation leur a conféré les caractères leur permettant d'échapper aux différents modes d'appropriation privée des biens : ils sont inaliénables, imprescriptibles et insaisissables.

I- I-2 : Le domaine privé

Il est constitué de biens pouvant faire l'objet d'appropriation par des personnes physiques ou morales de droit privé. Il comprend les « terres vacantes et sans maître » 2 , mais aussi tous les autres biens pouvant faire l'objet d'appropriation privée.

L'importance de la distinction domaine public - domaine privé réside dans la nature des droits pouvant être acquis sur les biens appartenant à l'un ou l'autre domaine. En effet le colonisateur français a introduit avec ces notions, celle de propriété privée. Ainsi, à l'inverse des biens du domaine public qui ne peuvent faire l'objet d'appropriation par des particuliers, ceux du domaine privé peuvent être acquis en pleine propriété.

I-2- LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER COLONIAL

Le régime foncier colonial est caractérisé par la personne habilitée à gérer les terres et par la nature des droits fonciers règlementaires.

I-2-1 - La personne habilitée à gérer les droits fonciers : le conservateur de la
propriété foncière

Les bureaux de la conservation sont gérés par des préposés qui portent le titre de « conservateur de la propriété foncière » et qui sont désignés par arrêté du Gouverneur général3. Ils sont chargés :

- de la suite à donner aux demandes d'immatriculation et de la formalité de l'immatriculation sur les livres fonciers ;

1 Décret du 23/1 0/1 904, article 1

2 Décret du 23/1 0/1 904, article 10

3 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 9

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- de l'inscription, à la suite des titres fonciers et des copies de ces titres, des droits réels constitués sur les immeubles immatriculés ;

- de la conservation des actes et plans relatifs aux immeubles immatriculés et de la communication au public des renseignements contenus dans leurs archives et relatifs aux propriétés immatriculées.1

I-3 : LES DIFFERENTS DROITS DU REGIME FONCIER COLONIAL

Le régime foncier colonial reconnaît :

- a) Les droits réels immobiliers suivants : la propriété des biens immeubles, l'usufruit des mêmes biens, les droits d'usage et d'habitation, l'emphytéose, le droit de superficie, les servitudes et services fonciers, l'antichrèse, les privilèges et hypothèques ;

- b) Toutes les actions qui tendent à revendiquer ces mêmes droits. 2

I-4-LES MODES DE CONSTITUTION DES DROITS REELS IMMOBILIERS DU

REGIME FONCIER COLONIAL

Dans le but d'imposer sa conception des droits devant être exercés sur la terre, le colonisateur mettra en place le régime de l'immatriculation qui reconnaît uniquement les droits acquis selon le code civil, comme porteur d'effets juridiques et opposables aux tiers. Mais qui reconnaît cependant l'existence de prérogatives foncières aux autorités coutumières et l'existence de droits détenus en vertu de la coutume. Devant le peu d'adhésion des populations africaines à ce concept, il assouplira sa position en instituant successivement les régimes du titre foncier indigène et du livret foncier qui reconnaissaient les droits acquis selon le régime foncier coutumier comme ressemblant au droit de propriété civiliste et opposables aux tiers.

I-4-1 : Le régime de l'immatriculation

Il permet de désigner un terrain par un numéro au registre foncier. Il comporte une procédure et une formalité d'immatriculation.

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 10

2 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 20

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La procédure d'immatriculation

Elle commence à l'initiative d'une personne détenant un droit réel immobilier et est conduite par le conservateur de la propriété foncière. Elle porte sur les fonds de terre bâtis ou non bâtis et se déroule selon les étapes suivantes :

1) La procédure d'immatriculation est enclenchée par une demande spéciale du propriétaire de l'immeuble. Après avoir clôturé l'immeuble, celui-ci établit une déclaration en langue française, signée et contenant :

- les informations sur son identité (nom, prénoms, qualités, domicile, état civil) et une élection de domicile dans une localité du ressort judiciaire où se trouve l'immeuble à immatriculer ; domicile auquel seront effectués, par la suite, toute notifications, significations et actes divers de procédure ...1

-la description de l'immeuble et de tous les investissements qui s'y trouvent ainsi que l'indication de sa valeur locative et vénale ;

- le détail des droits réels et des baux de plus de trois années afférents à l'immeuble avec mention de l'identité des ayants droits ;

- la réquisition au conservateur de la propriété foncière de procéder à l'immatriculation de l'immeuble décrit.2

A l'appui de sa déclaration (la réquisition), le requérrant dépose :

- tous les contrats et actes publics ou privés constitutifs des différents droits réels énumérés ou un état des transcriptions et inscriptions afférentes à l'immeuble ;

- un plan de l'immeuble à l'échelle, établi conformément aux instructions du service topographique ;

- une provision égale au montant présumé des frais de la procédure.3

2) Le conservateur vérifie la régularité de la réquisition avant de l'accepter. Il s'assure pour cela que les titres produits ou invoqués sont établis dans les formes prescrites par la législation applicable au propriétaire et à la propriété.

3) Le conservateur fait insérer un extrait de la réquisition au Journal Officiel (J.O) de la colonie. Cet avis d'insertion est affiché pendant trois (3) mois dans les

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 90

2 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 90

3 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 93

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lieux d'usage pour faire une large publicité afin de permettre aux éventuels détenteurs de droits portant sur l'immeuble à immatriculer de se faire connaître, et de préciser la nature, la valeur et l'étendue desdits droits : soit par voie d'opposition en cas de contestation sur l'existence ou l'étendue du droit de propriété du requérant ; ou par demande d'inscription en cas de prétentions à l'exercice d'un droit réel susceptible de figurer au titre à établir et non énumérés par le requérant dans sa déclaration. Ces déclarations sont faites oralement ou par écrit et reçues par le conservateur qui les transcrit dans un registre spécial.1 Elles doivent être faites pendant le délai d'affichage de l'avis d'insertion. Aucune opposition ou demande d'inscription n'est recevable après l'expiration de ce délai, sauf pour les cas de délais supplémentaires accordés spécialement aux absents.

4) Les droits fonciers coutumiers révélés sont purgés par voie amiable ou par voie d'exécution forcée. Si le registre spécial fait ressortir l'existence d'oppositions ou de demandes d'inscription, l'immatriculation de l'immeuble n'est accordée au requérant qu'après que celui-ci ait apporté la mainlevée de toutes les oppositions et demandes ou son acceptation des droits des personnes ayant formulé ces requêtes. Pendant la période d'affichage, un bornage contradictoire du terrain est fait avec établissement d'un procès-verbal qui indique exactement les limites de l'immeuble et qui est signé par le géomètre et tous les assistants lettrés.

5) A l'expiration du délai d'affichage et à la réception du procès verbal après le bornage, le conservateur vérifie encore la régularité de la réquisition et des titres, l'accomplissement de toutes les prescriptions et l'absence ou la levée de toutes les oppositions. Il procède ensuite à l'immatriculation de l'immeuble sur les livres fonciers.

La formalité d'immatriculation

Elle consiste à :

- l'inscription au registre des dépôts d'une mention constatant l'achèvement de la procédure ;

- l'établissement du titre foncier sur les livres fonciers ;

- la rédaction de bordereaux analytiques pour chacun des droits réels soumis à la publicité et reconnus au cours de la procédure ;

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 97

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- la mention sommaire de ces divers droits à la suite du titre foncier ;

- l'annulation des anciens titres de propriété remplacés par le titre foncier ;

- l'établissement d'une copie du titre foncier à remettre au propriétaire et de

certificats d'inscription à délivrer aux titulaires de droits réels susceptibles de

cession .1

La procédure et la formalité d'immatriculation aboutissent à la création du droit de propriété et des autres droits accessoires. Le droit de propriété est le plus absolu dont les personnes peuvent disposer sur un bien. Il est composé de trois éléments : l'abusus, l'usus et le fructus.

- L'abusus : c'est la faculté reconnue au propriétaire d'une chose, d'en `'abuser,» c'est-à-dire de disposer de la chose tel qu'il l'entend. C'est le caractère absolu du droit de propriété.

- L'usus : c'est la faculté reconnue au propriétaire d'user de la chose, c'est-à- dire d'en tirer utilité.

- Le fructus : c'est la faculté reconnue au propriétaire d'user de la chose et d'en tirer profit. Il englobe donc l'usus en ce sens qu'en plus d'user de la chose, la loi reconnaît au propriétaire la faculté de faire fructifier la chose.

Parmi ces trois éléments, l'usus est l'aspect contrôlé du droit de propriété, qui peut affaiblir ou anéantir ce droit. En effet la seule limite que la loi reconnaît au droit de propriété, c'est l'usage contraire à la loi.

LES CARACTERES DU DROIT DE PROPRIETE

Le droit de propriété comporte un caractère exclusif, absolu et perpétuel. - Exclusif, parce qu'il confère au propriétaire seul la faculté d'utiliser et de jouir de la chose.

- Absolu, parce qu'il confère au propriétaire la totalité de la faculté de faire de la chose ce qu'il veut.

- Perpétuel, parce que le droit reconnu au propriétaire ne s'éteint pas du fait de sa non utilisation par celui-ci. La prescription extinctive n'atteint pas le droit du propriétaire. En plus, le caractère perpétuel vient du fait que le droit de propriété peut être transmis intégralement à une autre personne.

1 Décret du 26/07/1 932, article 119.

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La législation foncière coloniale confère donc sur la terre un droit personnel, absolu et perpétuel.

I-4-2 : Le régime du titre foncier indigène

C'est un décret du 8 octobre 1925 qui instaure le régime du titre foncier indigène, encore appelé certificat administratif. Il a été mis en place pour tenir compte des raisons qui expliquaient le manque d'adhésion des populations africaines au régime de l'immatriculation afin d'inciter celles-ci à déclarer leurs droits immobiliers.

En effet, le coût élevé de l'immatriculation, la complexité et la longueur de la procédure et la méfiance des populations vis-à-vis de ces instances étrangères chargées d'administrer leur terre, ont été relevés comme raisons essentielles de l'échec du régime de l'immatriculation après près de vingt (20) ans d'application. Le colonisateur a alors institué le régime du titre foncier indigène afin de permettre aux populations africaines de faire connaître leurs droits fonciers à l'issue d'une procédure courte, simple et peu coûteuse. Pour cela :

- le détenteur de terre régie par le régime foncier coutumier qui désire faire reconnaître ses droits afin de les rendre opposables à toute autre personne, adresse une demande écrite au représentant de l'administration coloniale comportant indication de son identité complète ainsi qu'une description sommaire de son immeuble.

- à la réception de la demande, un récépissé est délivré au requérant qui peut dès lors délimiter son terrain par tout moyen de repère. Le représentant de l'administration inscrit ensuite la demande sur un registre ad hoc avec un numéro d'ordre.

- une palabre est ensuite organisée. Si dans les trois mois suivant aucune opposition n'est formulée et si l'état ne revendique pas le terrain, les pièces établies sont numérotées et réunies pour former un livret auquel un plan des lieux est joint.

- Les différentes inscriptions du livret sont transcrites sur un registre spécial dont copie est délivrée au requérant à sa demande.

Le titre ainsi obtenu par le requérant confirme celui-ci dans ses droits. Il est opposable aux tiers qui se prévalent de droits coutumiers et reste valable tant que celui-ci ou ses ayants droits occupent effectivement l'immeuble.

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I-4-3 : Le régime du livret foncier

L'un des objectifs de la politique coloniale était l'exploitation des terres fertiles pour une bonne production agricole. Le colonisateur a mis en place dans ce but, un important programme de production agricole avec l'espoir que les agriculteurs africains en y adhérant, produisent en grande quantité. Pour pérenniser ce programme en intéressant vraiment les populations africaines et après avoir constaté l'échec des régimes précédents, le colonisateur entreprit une nouvelle organisation du régime foncier afin de pouvoir introduire la notion de propriété privée dans le régime foncier coutumier. Il espérait un meilleur succès de ce nouveau régime pour les raisons suivantes :

- la profonde évolution des mentalités africaines ;

- le désir des populations africaines d'accéder à la propriété privée afin de pouvoir utiliser la terre à des fins économiques.

Il institua le livret foncier qui permettait de faire constater les droits fonciers coutumiers et de les exercer librement, dans les limites prévues par la loi. Les populations africaines avaient aussi la possibilité de convertir leurs droits fonciers coutumiers en droit de propriété, par la formalité de l'immatriculation.

Pour obtenir le livret foncier, le détenteur de droits fonciers coutumiers qui avait réalisé une mise en valeur de la terre avec emprise permanente sur le sol, devait la faire constater par l'autorité compétente. A la suite d'une procédure légère, le livret foncier lui était délivré. Il lui permettait de disposer de son droit foncier coutumier de la même manière qu'un détenteur de droits fonciers règlementaires.

Pendant la période coloniale, le colonisateur français a instauré plusieurs régimes fonciers afin de faire entrer dans les colonies d'Afrique occidentale et équatoriale, la notion de propriété privée. La législation foncière coloniale a cependant reconnu l'existence de droits fonciers coutumiers et essayé d'amener les populations africaines à convertir ces droits en celui de propriété. Le décret n°55- 580 du 20 mai 1955 qui institue le livret foncier constitue la dernière tentative coloniale de convertir les droits fonciers des populations africaines. L'accession à l'indépendance des états de l'Afrique Occidentale Française marquera la fin du

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régime foncier colonial et la mise en place, par les nouvelles autorités des pays africains de nouveaux régimes fonciers. La Haute Volta ne fera pas exception à cette nouvelle tendance et instituera aussi son régime foncier.

II- LE REGIME FONCIER POST COLONIAL

Les autorités politiques qui ont administré la Haute Volta indépendante ont reconduit l'essentiel des notions et principes introduits par le colonisateur. Il s'agit de la domanialité des terres et des différents modes de constitution ou d'acquisition des droits fonciers, à travers la procédure de l'immatriculation. Il s'agit également de la reconnaissance de prérogatives foncières aux autorités coutumières et partant, de droits fonciers coutumiers.

Les services chargés des domaines et les chefs de circonscriptions administratives ont été investis des missions de gestion des terres et des droits fonciers.

Les autorités post-coloniales ont néanmoins adapté la législation héritée du colonisateur en introduisant la concession comme mode d'acquisition des droits fonciers.

LA CONCESSION

Elle a été le mode d'aliénation des terres du domaine privé de l'Etat. Elle comporte deux étapes :

- la concession provisoire qui fixe les conditions de jouissance et d'aliénation des terres du domaine privé de l'Etat. Elle est accordée par un arrêté de concession provisoire et un cahier de charge contenant les conditions à remplir par le concessionnaire pour pouvoir demander l'aliénation définitive des terres.

- la concession définitive, obtenue après parfaite réalisation des obligations imposées par celle provisoire et avis favorable de la commission de constat de mise en valeur. Elle est octroyée par un arrêté de concession définitive. Le titre foncier est obtenu ensuite, après paiement du prix ainsi que des différents droits et taxes requis pour la mutation, l'immatriculation et l'inscription du terrain.

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III- LE REGIME FONCIER REVOLUTIONNAIRE ET POST- REVOLUTIONNAIRE

La Révolution Démocratique et Populaire (RDP) et les régimes politiques qui lui ont succédé ont introduit une nouvelle conception de la gestion foncière basée sur la notion de Domaine Foncier National (DFN).

Cette nouvelle approche de la gestion foncière est différente des précédentes d'abord par la suppression de la notion de domanialité des terres qui prévalait jusque-là, l'institution d'un DFN unique et par la nature des droits dont peuvent disposer les personnes de droit privé.

Elle est ensuite différente par la non reconnaissance de prérogatives de gestion foncière aux autorités coutumières et l'annulation des droits fonciers coutumiers.

III-I- LE DOMAINE FONCIER NATIONAL (DFN)

Il comprend « toutes les terres situées dans les limites du territoire national, et celles acquises par l'Etat et les collectivités publiques secondaires à l'étranger.»1 Il s'agit :

- des terres précédemment définies ou classées dans le domaine public de l'Etat et des collectivités publiques secondaires ;

- des terres du domaine privé de l'Etat et des collectivités publiques secondaires affectées ou non affectées, concédées ou non concédées ;

- des terres faisant l'objet de titres de propriété (titres fonciers) au nom des personnes physiques ou morales de droit privé ;

- des terres détenues en vertu des coutumes ;

- des terres appartenant à l'Etat et aux collectivités publiques secondaires à l'étranger.

Le DFN remplace ainsi les domaines public et privé précédemment constitués.

1 Décret n° 85-404/CNR/PRES du 04 août 1984 portant RAF, article 1

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III-1 -1- La constitution du DFN et la propriété de l'Etat

La proclamation par la loi de la création du DFN et de son appartenance à l'Etat, constitue le DFN et confère à l'Etat sa propriété de plein droit, sans une autre formalité. En effet, l'article 2 de la loi 014/96/APD du 23 mai 1996 portant RAF stipule : « il est crée un domaine foncier national du Burkina Faso. » Quand à l'article 4 il affirme que « le domaine foncier national est de plein droit propriété de l'Etat. »

La propriété proclamée de plein droit de l'Etat sur le DFN découlerait de sa souveraineté et de la volonté du législateur d'affirmer cette souveraineté sur les terres du territoire national et les biens immeubles ou assimilés acquis à l'extérieur.1

III-I-2- Les caractéristiques des biens du DFN

Elles sont différentes selon que le bien est disponible ou non.

- Les biens indisponibles : Il s'agit des biens précédemment classés dans le domaine public de l'Etat. Ils conservent leurs caractères d'inaliénabilité, d'imprescriptibilité et d'insaisissabilité.

- Les biens disponibles : Il s'agit des biens précédemment classés dans le domaine privé de l'Etat, à l'exception des terres du domaine privé affecté. La détention de la propriété de ces biens a connu des évolutions qui ont déterminé des droits de natures différentes pour les personnes.

III - 2- LE DFN ET LA PROPRIETE DE L'ETAT

III-2-1- Le D.F.N est de plein droit propriété exclusive de l'Etat.2

En déclarant l'Etat propriétaire unique et exclusif des terres burkinabè, le législateur de la RAF de 1984 a conféré à l'ensemble des biens composant le DFN, les caractères de ceux précédemment classés dans le domaine public de l'Etat. Toutes les terres burkinabè sont ainsi devenues inaliénables, imprescriptibles et

1 DARGA Basile, cours de 2em année du cycle B de l'ENAREF, année scolaire 2006-2007-, page 33.

2 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984 portant RAF, article 3

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insaisissables.1 Pour atteindre la totalité des terres, il a annulé les titres de propriété (les titres fonciers) jusque-là détenus par les particuliers et décrété que « les terres détenues en vertu des coutumes » devenaient elles aussi propriété exclusive de l'Etat. Quand aux détenteurs de titres fonciers, il leur a offert la possibilité d'obtenir des titres de jouissance en remplacement.2

Pendant l'application de la première version de la RAF, les personnes de droit privé ne pouvaient donc obtenir qu'un droit d'usage sur les terres burkinabè. Le droit de propriété était détenu par l'Etat.

III-2-2- Le D.F.N. est de plein droit propriété de l'Etat.

En supprimant l'exclusivité de la propriété de l'Etat, les législateurs des deux autres versions de la RAF (1991 et 1996) ont enlevé à certains biens du DFN les caractères d'inaliénabilité, d'imprescriptibilité et d'insaisissabilité. En effet, la RAF de 1991 stipule à son article 3 que « les terres du Domaine Foncier National peuvent être cédées à titre de propriété privée aux personnes physiques ou morales... » Quant à celle de 1996, elle précise que « certaines terres du domaine foncier national peuvent être cédées à des particuliers à titre de propriété privée... »3

Sans revenir à la notion de domanialité, les législateurs burkinabè de la deuxième et troisième version de la RAF, ont conféré à nouveau aux biens précédemment classés dans le domaine privé de l'Etat leur caractère de biens économiques pouvant êtres possédés en pleine propriété par des particuliers.

Ils ont réintégré le titre foncier comme titre de propriété et réhabilité les titres annulés par la première version de la RAF.

III-3 - LE MODE DE CONSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE :

L'IMMATRICULATION

L'immatriculation selon la RAF consiste aussi à désigner un terrain par un numéro au livre foncier. Ce numéro permet de particulariser le terrain car à chaque

1 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984 portant RAF, article 5

2 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984 portant RAF, article 4

3 Loi 014/96/ADP du 23/05/1 996 portant RAF, article 5

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parcelle correspond un numéro unique qui n'est plus attribué à une autre. Chaque numéro correspond aussi à un feuillet du livre foncier, qui constitue le titre foncier.

Mais l'immatriculation telle que définie par la RAF revêt une portée différente de celle qu'elle avait jusque-là. En effet avant la RAF, elle permettait de révéler les droits fonciers existants sur la parcelle et de purger les droits fonciers coutumiers. Depuis l'institution de la RAF, les terres détenues en vertu des coutumes faisant partie de la propriété de l'Etat, l'immatriculation ne consiste plus à la révélation et la purge des droits fonciers coutumiers. Elle comporte néanmoins toujours deux étapes :

1) la procédure d'immatriculation qui permet de borner le terrain.

2) La formalité d'immatriculation qui consiste à inscrire l'immeuble dans le livre foncier en lui affectant un feuillet dudit livre, à inscrire les différents droits réels détenus sur l'immeuble à la suite de celui de propriété.

- La publication des droits réels. La publication des droits réels détenus sur l'immeuble permet de les rendre opposables aux tiers.1

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault