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Bis Repetita Placent : la collection comme mode de construction de la cinéphile

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par Stéphanie POURQUIER
Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse - Master Sciences de l'Information et de la Communication 2007
  

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3 - Un processus d'assimilation ?

«(...) On se reconnaît dans ce film ! » Caroline, 27 ans

« ... Tu te dis... Enfin, on se dit... Tu vois, Je veux être elle ! Si elle, elle peut le faire, moi je peux le faire ! j'ai envie de faire comme elle ! Bon, bien sûr aujourd'hui je te dirai pas que c'est le cas, encore mais... C'était plutôt l'état d'esprit dans lequel j'ai été... Vers 13 ou 14 ans... À l'époque c'était possible (...) » Virginie, 22 ans

45 Fame est une série télévisée américaine, créée par Christopher Gore. Elle a été diffusée entre 1982 et 1987 sur les écrans. Cette série racontée le quotidien d'élèves d'une école d'art du spectacle, leur évolution, et leur volonté de réussir. La série s'inspirait du film d'Alan Parker (Fame, 1980).

« (...) arrive à tout avoir... alors que. .euh...à la base elle a strictement rien pour elle...que c'est la petite fille qui...euh...voilà quoi, elle est pas tellement jolie, elle est pas spécialement douée ...elle sait pas faire faire trois pas sans se casser la geu... la tronche, et puis tout d'un coup, ça devient la reine du quartier quoi...c'est le coté « je voudrais être comme elle, je voudrais être comme elle...je voudrais que ça m'arrive à moi aussi ! » Mélanie, 28 ans

« On s'identifiait vachement au personnage, donc forcément, tu t'imagines toi... Et tu extrapoles vachement... Et puis surtout, chacune apporte son petit grain de sel par rapport à son histoire du moment... Ou quoi ou qu'est-ce... Vraiment, on s'identifie à la nana... Parce qu'on était toutes un peu comme elle... Avec nos jupes plissées, et nos serre-têtes ! Et nos petits cols Claudine ! On se disait : « nous aussi, un jour on va tomber amoureuse d'un avec... Et nous aussi on va le faire changer ! Au début il va être rebelle, et pour nous, bien sûr, ce sera le plus formidable des princes charmants ! »

Hélène, 23 ans

À travers ces quatre extraits, et ce malgré l'emploi de mots différents, nous pouvons observer des similitudes de réaction46 parmi les quatre spectatrices interrogées. Si certaines parlent concrètement d'« identification », d'autres se remémorent ce qu'elles ont pu penser à 12-14 ans : « Je veux être-elle, je veux être comme elle ». Ces réactions vont nous force à nous interroger sur le mode de réception, et notamment sur le concept d'« assimilation » au sens psychologique du terme. On parle d'assimilation quand on évoque le processus de rapprochement entre un individu et des connaissances antérieures et extérieures. En réalité, il s'agit d'adapter ses nouvelles connaissances au réel et non pas à les copier. Il nous faut accepter d'ores et déjà que le public de notre étude a vu plusieurs fois47 -- plus d'une dizaine de fois -- Dirty Dancing. C'est pour elles un objet de jeunesse telle que nous l'avons déjà défini. De fait, elles admettent que Dirty Dancing fait partie de leur bagage culturel. Influencées par les circonstances d'un

46 Nous pouvons constater que plus les personnes rencontrées sont dans la subjectivité, moins elles communiquent leur enthousiasme, à l'instar d'Hélène. Hélène, étudiante et clerc d'huissier, a l'habitude des travaux universitaires, et de fait, elle est sensible au dérouler de l'entretien. Elle tient à la cohérence de ses propos, et tente d'analyser au fur et à mesure ce qu'elle dit. Virginie et Mélanie sont davantage dans un rapport spontané, elles veulent exprimer l'enthousiasme qui les animait à l'époque et ne sont pas dans une performance intellectuelle.

47 Le nombre de visionnages de Dirty Dancing par spectatrice figure dans le tableau récapitulatif, dans le volume « annexes ».

entretien sociologique, elles sont dans le recul et l'analyse de leur propre comportement. Ainsi, elles analysent à la fois avec leurs mots d'hier (vers 13-14 ans) et ceux d'aujourd'hui (à l'instant de l'entretien) ce qu'elles ont aimé et ce qui les a particulièrement marquées dans les films. Il y a donc bien une analyse subjective, « sauvage », effectuée par les spectatrices.

Nous avons vu que bon nombre d'éléments et de valeurs mises en exergue dans le film ont participé à sa véracité, ce qui vraisemblablement pouvait contribuer à l'implication du film à la réalité de l'adolescente. De fait, il y a une réelle différence entre les termes « je veux être-elle » et « je veux être comme elle ».Dans le cadre de l'entretien, face à nous, en situation de recherche, les interviewés s'en rendent compte, et à l'instar de Virginie, elles se corrigent. On ne peut pas parler de projection dans la mesure où les adolescentes ne se projettent pas dans le film c'est-à-dire n'appliquent pas leur propre réalité à ce qu'elles voient à l'écran. Et c'est grâce à ce qu'elles ont vu à l'écran que nous pouvons observer chez elles une volonté de pénétrer dans l'imagerie ; imagerie qui renvoie à un imaginaire plus ou moins convaincant, mais toujours rassurant. L'héroïne du film de « jeunesse »a été perçue comme un « exemple à suivre », ou un « facteur de l'imaginaire ». La consommation domestique individuelle ou collective, la réception de ce film devient un temps d'apprentissage, dans la mesure où les jeunes femmes participant à notre enquête admettent que cela leur a apporté quelque chose dans leur quotidien.

Certains éléments du film apparaissent représenter les étapes essentielles de l'adolescence, et, de fait, pose comme des balises dans le cheminement vers l'âge adulte : moments anthropologiques ou ceux de l'hypothèse freudienne du complexe d'OEdipe, perte de la virginité48, premier amour, apprentissage de la vie49. Allez pas du premier visionnage, la dimension corporelle de l'apprentissage de la vie était occultée par les spectatrices50. La dimension sensuelle des corps qui se touchent, exacerbé par la

48 La perte de la virginité fait référence à un gain des attributs de la féminité ; c'est rituel par essence avec un avant/ après dans la vie de la jeune femme Il y a une rupture, si on se rappelle les premières phrases du film : « Jamais je ne trouverai d'homme aussi merveilleux que mon père ». En trouvant l'homme auquel elle se « donne », elle se donne à elle-même : elle ne sera plus jamais « que » la fille de son père mais une jeune femme à part entière.

49 Au début du film, l'héroïne croit en la paix dans le monde, elle semble naïve. Au fil du film elle se rendra compte que les conflits sociaux et la ségrégation font également partie de son quotidien. Son père, prônant la tolérance et le respect, se braque à l'évocation de son histoire avec Johnny. Le fait de découvrir la frontière entre les valeurs et les réactions humaines est aussi une rupture, mais c'est ce qui la fera grandir.

50 Nous pouvons supposer que ceux-ci étaient dus à leur jeune âge, la moyenne du premier visionnage étant 12 ans ( cf. tableaux récapitulatifs).

danse et surtout rappeler dans les entretiens réalisés auprès des spectatrices les plus âgés (Valérie et Stéphanie).

Hormis ceci, les étapes de l'apprentissage de l'héroïne sont également partagées, et reconnues par nos spectatrices :

« (... )Par contre, il y a vachement d'identification par rapport au père... Ça, je le comprenais d'autant plus que moi, j'ai exactement la même relation que l'héroïne avec son père... Avec mon père aussi quoi, carrément, et même toujours aujourd'hui... Tu vois, en fait c'est plus ça que je retiendrai du film maintenant si je le regardais à nouveau... » Hélène, 23 ans

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo