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Le Conflit au Darfour

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par Mawuse Vormawor
Université Mohammed V, Soussi, Rabat - Licence 2008
  

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1. LES GUERRES CIVILES SUCCESSIVES AU SOUDAN ET LEURS RETOMBEES SUR LE CONFLIT ACTUEL

Les raisons principales qui ont été les plus souvent à l'origine des nombreux conflits qui ont au fil des années jalonné l'histoire du soudan peuvent être regroupées autours de deux axes principaux. Il s'agit d'une part des facteurs naturels liés à des raisons environnementales et écologiques et d'autre part des facteurs artificiels à savoir la prolifération des armes légères, les guerres d'indépendance (ou de sécession) et l'instabilité politique général du pays.

Rattaché au Soudan en 1916 après une relative autonomie à l'ère colonial, le Darfour a tout au long de son histoire connu des nombreux conflits pour des raisons qui sont majoritairement liés à la concurrence sur les ressources naturels de la région. La compétition croissante pour la terre et l'eau, dans une région touchée depuis les années soixante-dix par des sécheresses récurrentes, est une des sources de la crise du Darfour. Cette concurrence féroce a mis à mal le fragile équilibre entre les groupes, entraînant la multiplication des conflits entre les communautés d'agriculteurs noirs (ethnies Fur, Massalit et Zaghawa) et les groupes de pasteurs nomades, majoritairement arabes. Comme dans toute la bande sahélienne, la cohabitation entre nomades et sédentaires au Darfour a été mise à mal depuis le milieu des années soixante-dix par la dégradation de l'environnement. Autrefois, la terre appartenait aux sédentaires, essentiellement Four et Massalit, mais les nomades y disposaient d'un droit de passage pour leurs troupeaux. La sécheresse, l'avancée du désert couplé avec l'accroissement des populations ont rendu bien plus difficile l'application des anciennes règles de partage des terres. Les nomades ont dû descendre leurs troupeaux de plus en plus bas et de plus en plus tôt, les routes de transhumance ont été de plus en plus rendues impraticables par l'extension des cultures, générant ces tensions croissantes intercommunautaire.

Des confrontations ont souvent surgis entre les pasteurs, soucieux de sauver leur bétail et les sédentaires pour protéger leurs cultures lors de la migration saisonnière entre le Nord et le Sud. Mais, il convient de signaler qu'il autrefois existait un mécanisme traditionnel séculaire entre tribus permettant de contenir les conflits et maintenir la cohésion ethnique de la région. Les chefs de tribus et de communautés jouaient un rôle de premier plan en ce qui concerne la résolution de ces conflits. Force est de constater cependant que, si ces mécanismes traditionnels encouragés par les forces coloniales anglo-égyptiens7(*)ont souvent porté des fruits symboliques dans la résolution pacifique de nombreux conflits, il n'en demeure pas moins vrai qu'un nombre important de ces tentatives ont souvent dégénérés en des calamités désastreuses.

L'histoire du Darfour à partir des années 50, a été jalonnée par ces conflits armés intertribaux entre les communautés pasteurs et sédentaires. Nous pouvons citer à ce titre un certain nombre de ces conflits qui ont ravagé le Darfour à savoir « le conflit entre les Meidobs et Kababish en 1957 déclenché par le vol mutuel des chameaux et des disputes sur le droit de passage pour leurs troupeaux, le conflit entre les Rezeigats et les Ma'aliyah, aussi causé par le vol des bétails et les disputes sur l'accès aux zones de pâturage en 1968, les Zaghawa contre les Rezeigats du Nord en 1969 pour le vol des bétails et les disputes sur l'accès à l'eau, les Zaghawas contre les Birgid en 1974, les Beni Helba contre les Rezeigats du Nord en 1976 déclenché par pour le vol des bétails et les disputes sur l'accès à l'eau, les Taisha contre les Salamats déclenché par le vol des bétails et les disputes sur l'accès à l'eau en 1980, les Kababish et les Khawabeer contre les Meidobs, les Berti contre les Zeiyadiva déclenché par le vol des bétails et les disputes sur l'accès à l'eau et le droit de passage pour leurs troupeaux en 1980, les Missairiya contre les Rezeigats déclenché par le vol des bétails et les disputes sur l'accès à l'eau et le droit de passage pour leurs troupeaux en 1982, les Gimirs et les Mararit contre les Fellata déclenché par le vol des bétails et les disputes sur l'accès à l'eau et le droit de passage pour leurs troupeaux en 1987, les Fours de Kabkabiya contre les Zaghawas déclenché par le vol des bétails et les disputes le droit de passage pour leurs troupeaux en 1989, Les Fours contre des tribus arabes causé par des disputes sur le droit de passage pour leurs troupeaux et par des raisons politiques en 1989 »8(*). La plupart de ces conflits armés ont non seulement entrainé la mort des milliers d'hommes et la destruction des maisons et propriétés mais aussi ils ont eu des implications transfrontalières importantes sur les pays voisins en particulier le Tchad.

Les tensions que connaît la région du Darfour vont à partir de la grande famine de 1984-1985 dégénérer de plus en plus affrontements armés, notamment en 1987 et 19899(*). La ligne de fracture n'est pas entre Arabes et Noirs, mais entre nomades et sédentaires, opposant des groupes comme les Zaghawa et les Four, se trouvant aujourd'hui dans le même camp.

Un autre facteur important qui a impulsé les conflits peut aussi s'expliquer par l'introduction progressive des armes légères dans les communautés pastorales et sédentaires. Si par le passé, les armes présentes dans ces régions n'étaient que des épées, des machettes et des flèches, le nombre de ces armes légères au Darfour était estimé à 50000 en Janvier 198810(*) soit une arme par chaque seize homme. Tar Usman11(*) estime que la prolifération des armes légères va prendre de l'ampleur durant les années 86 et 89 sous le gouvernement de Sadiq Al Mahdi qui avait commencé à armer des milices muraheleen dans les régions de Darfour et Kordofan. Un article disponible sur le site web de l'Amnesty International12(*) se force d'identifier les différents types d'armes et les transferts d'armement vers le Soudan. Selon cette article, « les gouvernements ont sciemment ou à leur insu permis la livraison vers le Soudan d'armes et de matériels militaires connexes »

Aujourd'hui certains jugent quasiment impossible de désarmer les protagonistes du conflit. Le 27 aout 2007 le représentant spécial des Nations unies au Darfour, Jan Pronk a vu entasser devant lui des armes par les Janjaweeds à El Geneina mais toutefois certains membres de groupes sédentaires aussi bien que nomades ont fait remarquer que la plupart des Janjaweeds possédaient non pas un mais six ou sept fusils et que le fait d'en avoir perdu un ne changerait rien.

Le danger que représente la présence de ces armes a déjà commencé à se faire ressentir. La désertification accéléré par les problèmes de sécheresse ont augmenté ou du moins maintenir la pression sur les sources d'eau, les conflits sur les puits et les zones de pâturage qui étaient autrefois réglé par des épées vont devenir insoluble dans une ère inondée des armes légères. Il n'est donc pas étonnant de voir des diplomates onusiens qualifier le conflit actuel au Darfour comme étant la plus importante crise humanitaire.

Le drame humanitaire que connaît la région de Darfour actuellement peut aussi avoir comme racines les nombreux coups d'état et guerres civiles qui ont été les traites de l'état post coloniale soudanais. La première guerre civile qu'a connue le soudan était en juillet 1955, soit six mois avant son accession à l'indépendance. Les raisons en sont multiples; le sud-soudan qui avait plus d'un quart de la population du pays ne peut élire que 13 députés sur 95 pour l'assemblée législative de 1948. Aussi le sud ne fut véritablement pas associé à la préparation de l'indépendance du 1er Janvier 1956.

Administrés au départ comme des régions différentes, le Sud et le Nord vont être fusionnés en une seule région administrative par l'empire Britannique qui occupait à l'époque le Soudan. Après l'accord de février 1953 entre Le Royaume-Unis et l'Egypte reconnaissant l'indépendance au Soudan, les tensions internes entre le Sud animiste et chrétien (qui craignait une domination politique des nordistes) et le Nord majoritairement musulmans qui se considérait de culture arabe vont commencer à s'aggraver.

Dès juillet 1956, une mutinerie menée dans le Sud marqua le début d'une guérilla qui durera 17ans. Les groupes insurgeant composé des mutinés et des étudiants a su évoluer au fil de ces années pour devenir une véritable armée de sécession appelée Anyanya ou Anyanya 1. De 1956 à 1969 les dictatures militaires et régimes parlementaires se succèdent mais aucun d'eux ne sut ni arrêter la guerre du Sud, ni assurer son développement. Après le putsch du 25 Mai 1969, un groupe d'officiers avec à sa tête le colonel Djarfar al-Nimeiry parvient au pouvoir avec l'aide des communistes13(*).

En 1971, un ancien lieutenant Joseph Lagu arrive à unifier toutes les bandes guérilla sous son Southern Sudan Liberation Movement (SSLM). Ceci fut la première fois dans l'histoire de la guerre que le mouvement séparatiste se dota d'une structure unifiée dans sa quête pour obtenir une sécession ou la formation d'un Etat indépendant Sud-soudanais. C'était aussi la première organisation qui pouvait prétendre parler ou négocier au nom de tous le Sud-soudan. En 1972 l'accord d'Addis-Abeba signé entre le gouvernement de Nimeiry et le SSLM qui prévoyait

«  - l'autonomie régionale du Sud ;

- un développement ;

- une représentation équitable au gouvernement central ;

- une constitution et un droit laïques pour le pays14(*) » signala la fin de la guerre civile.

Malheureusement onze ans après la signature de cet accord, Nimeiry réélu pour un troisième mandat en I982 le cassa et tente d'islamiser le pays. Le sud où l'investissement affluent depuis le cessez feu de 1972 va être divisé en trois. Les Sudistes se rebellent de nouveau, refusant ce découpage géographique et l'entrée en vigueur de la charia. L'armé populaire de libération du Soudan dirigé par le colonel John Garang rassemble désormais les sudistes. Ce mouvement se revendiquait non-arabe et chrétien mais surtout, contre l'instauration de la sharia. L'armé populaire de libération avait pour but avoué l'établissement d'un Soudan démocratique.

En avril 1985, le colonel Nimeiry fut renversé lors d'un soulèvement populaire dirigé par le General Al-Dahad qui restaura un gouvernement civil mené par le premier ministre Sadeq El-MAHDI. En 1989 Le général El-Béchir arrive au pouvoir grâce à un énième coup d'Etat et il va mettre en place un régime totalitaire avec des services de sécurité qui enlèvent, torturent voire tuent tout opposant supposé dans tout le pays. La guerre au Sud-Soudan va alors finalement se poursuivre 16 années supplémentaires, 16 années marquées par de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité.

La guerre continue pendant treize années de pourparlers de paix ; en 1992/1993 les pourparlers de paix reprennent avec les négociations d'Addis-Abeba I et Addis-Abeba II qui échouent. A l'initiative de l'Érythrée, de l'Éthiopie, du Kenya et de l'Ouganda, regroupés au sein de l'IGAD (Intergovernmental Authority for Development), des négociations de paix reprennent entre le gouvernement de Khartoum et les ALPS. Le 20 Mai, une « Déclaration de principes » de l'IGAD, considère que la solution du problème soudanais réside dans « l'unité du pays dans la démocratie et la laïcité de l'Etat ».15(*)

Les accords de Machakos16(*) signé en 2002 et l'accord de paix signé à Nairobi Le 9 janvier 2005, mettent fin à vingt et un ans de guerre civile et trois millions de morts, entre John Garang (SPLM) et le vice-président du gouvernement soudanais, Ali Osmane Taha. Cet accord prévoit notamment la création d'un poste pour les anciens rebelles,  « le poste de vice-président », afin que le Sud Soudan soit lui aussi représenté dans un gouvernement d'Union nationale. Il prévoit aussi un régime d'autonomie pour le Sud Soudan de six années, période à l'issue de laquelle un référendum d'autodétermination sera organisé.

Bien que ces accords aient joué un rôle très important dans la résolution pacifique de la guerre civile qui a ravagé l'ensemble du pays pendant environ deux décennies, ne peut-on pas remettre en cause l'influence éventuelle que peut avoir ces accords sur une région aussi fragile qu'on vient de démontrer ? Nous pouvons ainsi avancé que les accords de Machakos et de Nairobi sont quelque part les principales raisons de la crise au Darfour et des prochaines à venir dans la mesure où c'était un accord entre 2 parties uniquement, le SPLA (qui ne représente pas tout le Sud) et le gouvernement (qui ne représente que le Nord arabo-musulman). Ils se sont mis plus ou moins d'accord sur la cohabitation entre un système laïc au Sud et islamique au Nord. Mais ces accords ont exclus tous les autres parties du Soudan. De plus, seuls ceux qui prennent les armes se sont vus ouvrir les négociations. Ceci pourrait constituer un précédent pour les autres mouvements.

* 7 Voir TAR A Usman. Old conflict, new emergency: An Analysis of Darfur crises, Western Sudan. Nordic Journal of African Studies 15(3): page 413, 2006

* 8 HOILE David. Darfur in perspective. Disponible sur << http://darfurinformation.com/darfur-in-perspective/default.asp>> Format PDF. p. 6, Consulté le 15.03.2008

* 9 «  Une guerre meurtrière avait opposé, en 1985-1988, les Fours aux tribus arabes lancées à l'assaut de leurs villages, sur fond d'allées et venues entre le Tchad et le Darfour, d'interventions de la Légion islamique libyenne et de jeux de pouvoir du parti Oumma de M. Sadeq El Mahdi. Elle avait pu sembler un moment de paroxysme, lié à la période de sécheresse. Avec le recul, elle apparaît comme une prémisse. Les Arabes Rezeigats du Sud y avaient obtenu confirmation d'un « dar » (pays) à eux dans la région d'Ed Duein, mais l'impression de trêve, plutôt que de paix, prévalait lors de la « conférence de paix » en novembre 1989.L'instauration d'un régime militaro-islamiste au Soudan, en 1989, ne régla pas le problème de l'insécurité. Au contraire, la bienveillance plus marquée des autorités envers les « tribus arabes » encouragea les plus belliqueuses d'entre elles. Plusieurs des leurs figuraient parmi les dignitaires du nouveau régime. Il y eut tout au long des années 1990 plusieurs guerres locales, le plus souvent ignorées à l'étranger : en 1990, entre Fours en faveur de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS) du colonel John Garang et l'armée soutenue par les « Arabes » benis halbas. En 1996, dans le sud, entre Rezeigats et Zaghawas. En 1997-1999, dans l'Ouest, entre paysans massalits et arabes um julluls. Le plus souvent, l'initiative des hostilités revient aux tribus « arabes » » Voir PENINOU Jean-Louis. Désolation au Darfour. Le Monde Diplomatique. Edition imprimée -pages 16 et 17.mai 2004

* 10 Tar, op.cit., p.415

* 11 Ibid. p. 415

* 12 Voir SOUDAN Qui arme les auteurs de graves violations au Darfour ? Publié le 16.11.2007. Disponible sur << http://www.amnesty.org/fr/library >>

* 13 Le parti communiste Soudanais etait le plus puissant parti communiste d'Afrique

* 14 Hassan Al- Tom, Il ne faut pas trop vite se réjouir. Disponible sur<< www.vigilsd.org>> Format PDF. Edition no 129 Mars /Avril 2005. Consulté le 15.03.2008

* 15 Id.

* 16Trois problèmes sont traités en détail par l'accord. La liberté de culte existe dans tout le Soudan, et toutes les libertés bafouées par Khartoum sont citées dans une liste interminable, sans dire bien sûr qu'elles furent bafouées. L'autonomie du Sud est établie dès la conclusion de l'accord de paix. Un référendum d'autodétermination du Sud sera tenu 6 ans 1/2 après la signature de l'accord de paix. Ce référendum donnera le choix entre l'unité, avec la continuation indéfinie du système d'autonomie du Sud, et l'indépendance. Des principes sont émis, la charia dans le Nord [les gens du Nord ont beaucoup dit que cela ne regardait pas les Sudistes qui l'ont signé..] ;

L'ALPS fera tout son possible pour que le référendum soit favorable à l'unité.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo