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L'ONU et la démocratie

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par Salwa HAMROUNI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis - D.E.A. de droit public et financier 1996
  

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PARAGRAPHE DEUXIÈME

LA LÉGITIMITÉ DÉMOCRATIQUE :
UNE NOUVELLE REVENDICATION DE L'O.N.U.

L'idée d'une légitimité démocratique n'est pas tout à fait étrangère à la pratique internationale des États. En effet, le principe de l'autonomie constitutionnelle et donc la liberté du choix du système politique, économique, social et culturel a subi quelques atteintes doctrinales depuis le début de ce siècle. Ainsi, en 1907, le Docteur Tobar a élaboré une doctrine qui exige la non reconnaissance d'un gouvernement issu d'un coup de force et dont la légitimité n'a pas été établie par les élections. De même, la doctrine de la souveraineté limitée de Brejnev prévoit la primauté de l'internationalisme prolétarien sur la souveraineté des États.

Malgré ces atteintes, l'O.N.U. n'a jamais expressément manifesté une préférence pour un régime politique quelconque143. Cette attitude s'explique par l'idée que "Le droit de la coexistence pacifique a même fait de l'absence d'un modèle politique universel une condition sine-qua-non de l'établissement de la paix de la sécurité internationales"144.

143 Nous utilisons le mot expressément parce que l'attitude de l'O.N.U. vis-à-vis de la question espagnole prouve que l'article 4 de la Charte a été utilisé pour refuser la candidature de l'Espagne à devenir Membre de l'O.N.U. en 1946 alors qu'en 1955 cet État a été admis non pas parce qu'il devient pacifique mais parce qu'il est avant tout doté d'un régime anticommuniste.

144 BEN ACHOUR (R), "Égalité souveraine des États, Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et liberté de choix du système politique, économique, culturel et social", in. Solidarité, Égalité, Liberté, (Le livre d'hommage offert à Federico MAYOR), Bruxelles, Bruylant, 1995, p. 786.

Cet état des choses a manifestement changé lorsque l'O.N.U. a adopté un discours politique faisant du respect de la légalité constitutionnelle et de la démocratie un impératif dans les relations internationales (A). Ce discours s'est traduit en action du moment que l'O.N.U. mène une pratique revendiquant le respect de la légalité constitutionnelle et de la légitimité démocratique (B).

A. Le discours politique de l'O.N.U.

Nonobstant l'affirmation continue des organes de l'O.N.U. du principe de l'égalité souveraine et de celui de l'autonomie constitutionnelle des États, le discours politique de l'Organisation mondiale n'est plus indifférent aux systèmes politiques des États. La préférence qu'a l'O.N.U. pour la démocratie libérale a coïncidé avec le changement de l'ordre politique international en faveur de ce modèle.

Le Secrétaire Général de l'O.N.U., principal auteur de ce discours, semble mettre entre parenthèse le principe de l'autonomie constitutionnelle des États en affirmant que "l'impératif de démocratisation est l'enjeu fondamental de cette fin de siècle. Seule la démocratie, à l'intérieur des États et à l'intérieur de la communauté des États, est le véritable garant des droits de l'Homme. C'est par la démocratie que se réconcilient les droits individuels et les droits collectifs, les droits des peuples et les droits des personnes. C'est par la démocratie que se réconcilient les droits des États et les droits de la communauté des États "145. La démocratie apparaît alors comme la seule valeur politique capable de résoudre les contradictions du droit international. Ce discours a fait écho dans les écrits de certains auteurs qui vont jusqu'à parler d'une "conversion à la démocratie"146. "L'impératif démocratique" a toujours été présenté comme un moyen réalisant les buts des Nations Unies. Ainsi, "les droits de l'Homme sont intimement liés à la manière dont ils gouvernent leurs

145 BOUTROS-GHALI (B), "Déclaration liminaire", in. Conférence Mondiale sur les droits de l'Homme, Nations Unies, 1993, pp. 10-11.

146 Cf BEIGBEDER (Y), "Le contrôle international des élections" op. cit.

peuples, c'est-à-dire encore, au caractère plus ou moins démocratique de leur régime politique"147.

Le Secrétaire Général de l'O.N.U. a, en outre, fait de la démocratie le corollaire du développement. En effet, "La démocratie et le développement sont liés pour diverses raisons fondamentales. Tout d'abord, la démocratie offre la seule solution permettant de concilier, à long terme des intérêts ethniques, religieux et culturels antagonistes tout en minimisant le risque de conflits internes violents. De plus, la démocratie est par définition, un mode de fonctionnement de l'État, qui lui même influe sur tous les aspects des efforts de développement"148.

Devant cette association démocratie - droit de l'Homme et développement, nous ne pouvons que confirmer l'idée que "pour ce qui est de leur mise en oeuvre tout au moins, cet ensemble de valeurs se trouve en situation de contrariété avec les principes les plus avérés de l'ordre politique et de l'ordre juridique internationaux actuels (..) Le trait fondamental et contradictoire à la fois, de l'idéologie "droits de l'Homme - démocratie - développement" est d'un côté, leur vocation à l'universalité, sans laquelle ils perdraient une grande partie de leurs valeurs et de leur signification mais d'un autre côté, le fait que ces valeurs ne peuvent se réaliser qu'à l'échelle de l'État, dans le cadre de l'État et avec la bonne volonté de 1 'État"149.

Le Secrétaire Général de l'O.N.U. n'a pas seulement associé démocratie, droits de l'Homme et développement "Désormais l'exigence démocratique investit le domaine du maintien de la paix en assignant aux opérations des Nations Unies une double mission : La réconciliation nationale et la consolidation démocratique"150. Dans le même sens, Monsieur BoutrosGhali a estimé que "seule la démocratie permet tout à la fois d'arbitrer et de régler, de façon durable, les nombreuses tensions politiques, sociales,

147 BOUTROS-GHALI (B), "Déclaration liminaire", op. cit., p. 9.

148 BOUTROS-GHALI (B), "Agenda pour le développement" mai 1994, p. 24.

149 BELAID (S), "Rapport de synthèse" in. Les nouveaux aspects du Droit International, op. cit., pp. 301-302.

150 (B), "L'O.N.U. et les opérations de maintien de la paix à la

croisée des chemins", in. Relations Internationales et Stratégiques, 1993, N° 11, p. 11.

économiques et ethniques qui menacent sans cesse de déchirer les sociétés et de détruire les États"151.

En conclusion, nous pouvons affirmer que la démocratie constitue aujourd'hui une nouvelle idéologie de l'Organisation mondiale. Une idéologie qui se veut universelle, certes, mais aussi et ce qui est à notre sens frappant, une idéologie qui tend à être ce que le S. G. de l'O.N.U. voudrait appeler "Un droit international de la démocratie"152. Cette dernière idée suscite deux remarques : primo, au plan strictement juridique, l'intégration de la démocratie comme une norme en droit international ne peut se réaliser sans heurter certains principes fortement ancrés en droit tel que le principe de l'autonomie constitutionnelle. Par conséquent, cette intégration "supposerait qu'au préalable, un réajustement profond ait été effectué au niveau des principes de droit international les plus solidement ancrés dans la société internationale"153. Secundo, ce discours comprend la possibilité d'une dérive : la démocratie, comme toute idéologie, risque en effet de se transformer en un nouveau dogme Du reste, "si on ne peut que se féliciter des progrès de l'idée de démocratie dans le monde, dans le sens d'une participation des peuples à la gestion de leurs affaires, (..), on ne doit pas perdre de vue que chaque société élabore son expérience historique à son rythme avec ses erreurs, des hésitations et des adaptations progressives. Il n'existe pas en la matière de normes ou de critères universels, et encore moins un droit des puissances extérieures ou d'un pouvoir hégémonique de les apprécier et d'imposer leur respect"154.

Seulement, il est clair que le discours politique de l'O.N.U. témoigne d'un recul du principe du libre choix du système politique, économique, social et culturel. Ce discours qui a voulu s'adapter à "l'accélération de l'histoire" et aux profondes mutations qu'a connu l'ordre politique international n'est

151 BOUTROS-GHALI (B), "Agenda pour le développement", mai 1994, p. 24.

152 Voir le message adressé par le Secrétaire Général de l'O.N.U. à l'occasion du colloque international organisé par la Faculté des Sciences Juridiques, Politiques et Sociales de Tunis du 11 au 13 avril 1996, ayant pour thème "Harmonie et contradictions en droit international".

153 BELAID (S), "Rapport de synthèse", in. Les nouveaux aspects..., op. cit., p. 303.

154 BENNOUNA (M), "L'obligation juridique dans le monde de l'après-guerre froide", A.F.D.I., 1993, pp. 44-45.

pas resté sans influence sur la nouvelle pratique de l'organisation des Nations Unies.

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