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L'ONU et la démocratie

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par Salwa HAMROUNI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis - D.E.A. de droit public et financier 1996
  

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SECTION DEUXIÈME

LA LÉGITIMITÉ DÉMOCRATIQUE CIRCONSCRITE
PAR LA LÉGALITÉ INTERNATIONALE

Le principe est que l'Organisation des Nations Unies ne peut agir que conformément au droit international et notamment à sa Charte. Or, le droit international est fondé sur la volonté des États, sur leur égalité souveraine et sur le principe de l'autonomie constitutionnelle de ces États. Ce dernier principe suppose l'interdiction de toute ingérence dans les affaires intérieures des États tel que le choix de leur système politique, économique, social et culturel.

Toutefois, l'étude de la pratique de l'Organisation des Nations Unies en
Haïti nous permet de constater que l'O.N.U. n'a fermement agi pour

185 Voir Le Monde du 6 octobre 1995, p. 2.

rétablir la démocratie dans ce pays que parce qu'elle a trouvé dans le droit international les éléments qui lui ont permis une telle action.

En effet, l'étude du cas haïtien nous permet d'affirmer que l'action de l'O.N.U. en vue de rétablir la démocratie ne s'est pas totalement détachée des principes régissant le droit international.

Avant d'étudier la pratique contraignante de l'O.N.U. en Haïti (paragraphe II), nous essayerons de relever les fondements juridiques qui peuvent justifier cette action (paragraphe I).

PREMIER PARAGRAPHE

LES FONDEMENTS DE L'ACTION DE L'O.N.U.
EN VUE DE RÉTABLIR LA DÉMOCRATIE EN HAÏTI

A priori, nous pouvons affirmer que le principe de l'autonomie constitutionnelle reconnu aux États, fait obstacle à toute intervention visant à influencer les choix politiques, économiques, sociaux et culturels de ces États. Cependant, pendant longtemps une donnée fondamentale a été "refoulée" : l'État qui bénéficie de cette autonomie est sensé avoir l'approbation de son peuple. Le libre choix du système politique appartient à l'État, certes, mais dans la mesure où ce dernier exerce ce droit conformément au choix de son peuple186. Les conflits qui naissent entre les peuples et leur propre appareil d'État font surgir l'ambivalence du droit international qui reconnaît le libre choix du système politique tantôt au peuple, tantôt à l'État.

La pratique de l'O.N.U. en Haïti a fait prévaloir le droit du peuple sur celui de l'État. Cette attitude peut s'expliquer par l'idée qu'un coup d'État contre un gouvernement légal et légitime constitue une négation du droit du peuple au libre choix de son système politique et de ses gouvernants (A). Si ce peuple s'est prononcé pour le régime démocratique, le rétablissement de la démocratie constitue dans ce cas une consécration du droit de ce peuple au libre choix de son système politique (B).

186 Voir La résolution 3281 AG/O.N.U. (XXIX) du 12 décembre 1974, op. cit.

A. Le coup d'État contre un régime librement élu : une négation du droit du peuple à l'autodétermination

Depuis sa naissance, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a été frappé d'ambiguïté. Alors que Lénine présentait ce droit comme impliquant le droit à la décolonisation, Wilson déduisait de ce droit que les pouvoirs des gouvernements doivent être fondés sur le consentement du peuple187.

Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a été consacré par le droit international positif depuis 1945. En effet, l'article premier de la Charte de l'O.N.U. dispose que "Les buts des Nations Unies sont les suivants... - 2 - Développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes...". Un droit positif, le droit des peuples à disposer d'eux- mêmes n'a pu se développer et se concrétiser qu'avec le changement de l'équilibre politique au sein de l'Assemblée Générale de l'O.N.U. en faveur des pays du tiers monde assistés par les pays socialistes Ainsi "lorsqu'en 1945, les Nations Unies inscrivent dans leur Charte le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes au nombre des principes éthiques devant guider leur action et d'en faire un droit, il apparaît - alors que la guerre froide n'a pas encore commencé - que la décolonisation sera le grand problème, le plus aigu et le plus brûlant, qu'aura à régler la société internationale au lendemain de la guerre. Dès ce moment, le droit des peuples devient avant tout celui des populations colonisées à se constituer en États indépendants"188.

Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes a donc été à l'origine de l'action de l'O.N.U. afin de mettre fin à la décolonisation. C'est dans cette perspective que la résolution 1514 adoptée par l'A.G. de l'O.N.U. le 14 décembre 1960 dispose que "- 2 - Tous les peuples ont le droit de libre détermination, en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut

187 Voir CASSESE (A), Commentaire de l'article 1 (§ 2) de la Charte des Nations Unies, in. La Charte des Nations Unies, Commentaire article par article, dir. COT (J- P) et PELLET (A), Paris, Economica, Bruxelles, Bruylant, 1985, pp. 38-54.

188 ARDANT (Ph), "Que reste-t-il du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ?" Pouvoirs, 1991, N° 57, p. 45.

politique et poursuivre librement leur développement économique, social et culturel"189.

Pendant longtemps, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes n'a pu s'affirmer que contre la domination étrangère, la colonisation et le régime de l'apartheid. Aujourd'hui que la plupart des États ont acquis une égalité souveraine au niveau international "une question va alors se poser bientôt : Après son triomphe dans l'abolition des liens coloniaux le droit des peuples a-t-il encore un rôle à jouer ?"190.

Si nous admettons que le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est une "formule qui, lorsqu'elle est appliquée à un État, énonce, l'intention de respecter l'indépendance de celui-ci"191 nous devons alors dire que du moment où cette indépendance est acquise, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes n'aurait plus une raison d'être d'autant plus que "la souveraineté, c'est le droit des peuples à son stade de réalisation"192.

Seulement, inséré dans un document relatif aux droits de l'Homme, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes pourrait avoir une autre signification. En effet, l'article premier commun aux pactes des droits civils et politiques, économiques, sociaux et culturels dispose que "tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes, en vertu de ce droit ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel". Cet article, qui reprend les termes de la résolution 1514, s'est référé aux peuples, à tous les peuples. Il en découle que ce droit appartient même aux peuples déjà constitués en État.

"Après ce pas en avant un pas en arrière"193 est effectué par la résolution 2625 qui a prévu que " chaque État a le droit de choisir et de développer librement son système politique, social, économique et culturel". Bref, ambivalent depuis sa naissance, le droit des peuples à disposer d'eux-

189 Résolutions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa quinzième session, volume I, 20 septembre - 20 décembre 1960, documents officiels, supplément N° 16.

190 (Ph), art. cit., p. 46.

191 BASDEVANT (J), Dictionnaire de la terminologie du Droit International, op. cit., p. 233.

192 CHAUMONT (Ch), Cours Général de Droit International Public, R.C.A.D.I., 1970, p. 390.

193 JOUVE (E), Le droit des peuples, Paris, P.U.F., 1992, p. 82.

mêmes a été interprété par l'O.N.U. en faveur des États, les aspirations des peuples ou leurs conflits avec leur propre appareil d'État ne concernaient pas l'Organisation mondiale. Cette Organisation "issue des États, avait le choix entre deux solutions : ruser avec eux ou prendre leur défense. Elle paraît avoir retenu la première formule"194. Cela n'est plus tout à fait le cas aujourd'hui. Désormais, le droit des peuples au libre choix de leur système politique, économique, social et culturel pourrait s'exercer contre l'État en cas de sa méconnaissance par ce dernier.

Cette hypothèse s'est vérifiée dans le cas haïtien : par le moyen d'élections libres, le peuple haïtien a fait son choix qui a mené au pouvoir le Président Aristide. Le libre choix du peuple haïtien de son système politique a donné naissance à un régime bénéficiant d'une légitimité démocratique. Le coup d'État qui est survenu contre ce gouvernement issu de la volonté du peuple a donc constitué une négation des droits politiques de l'Homme consacrés par la D.U. D.H. et du droit du peuple haïtien au libre choix de son système politique et précisément de son droit à la démocratie. Par conséquent, le rétablissement de cette démocratie sera conforme au droit du peuple au libre choix de son système politique.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe