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Justice transitionnelle au Burkina Faso, originalité ou pis-aller?

( Télécharger le fichier original )
par Lamoussa Windpingré Pascal ZOMBRE
Université de Genève - Certificat en droits de l'homme 2006
  

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§ 1 - Un besoin individuel

L'article 8 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et l'article 7 de la Charte Africaine des Droits de L'Homme et des Peuples réaffirment le principe du recours effectif devant les juridictions nationales compétentes, pour toute personne, contre les actes qui violent les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi. L'article 4 alinéa 1 de la Constitution burkinabé18(*) consacre ce même principe et reconnaît, à tous les burkinabés, le droit à ce que leur cause soit entendue par la juridiction compétente.

Dans l'analyse des principales causes de la crise de Sapouy, le Collège des Sages a stigmatisé entre autres :

- l'absence de justice sociale se traduisant par l'inégalité dans la répartition des ressources nationales et des revenus en même temps qu'une concentration de plus en plus croissante des richesses entre les mains d'une minorité ;

- les frustrations et les rancoeurs dues à l'accumulation des problèmes non résolus (disparitions, assassinats non élucidés, tortures, carrières arbitrairement brisées, caractère unilatéral des décisions de ceux qui assument le pouvoir, même pour des questions d'intérêt national) ;

- la limitation des réhabilitations à leur dimension purement administrative et financière, de surcroît parfois incomplètes et pour lesquelles, personne n'assume la faute de la sanction arbitraire, ni ne demande pardon ;

- la non satisfaction des exigences socioculturelles à l'endroit de certaines victimes des violences politiques (morts dont on ignore jusqu'à la tombe et disparus dont la mort n'a jamais été officiellement reconnue) ;

- la précarité de la sécurité des personnes et des biens (coupeurs de route, grand banditisme, vandalisme, milices privées, abus de pouvoir et d'autorité) ;

- l'injustice (justice à deux vitesses et inégalité des citoyens devant la loi) et la culture de l'impunité (transgression consciente des lois avec le sentiment qu'on ne sera pas sanctionné).

Cette analyse du Collège des Sages laisse donc percevoir qu'au Burkina Faso, le citoyen n'a pas toujours jouit du droit d'ester en justice à lui reconnus par la Constitution et par les instruments internationaux pour la satisfaction de ses droits ou pour faire sanctionner les violations y relatives. En outre, la loi n'a pas toujours été protectrice des plus faibles ; au lieu de les protéger, elle a parfois contribué à les exposer à certains abus (arrestations et détentions arbitraires, exécutions extrajudiciaires)19(*). Au delà des individus personnes physiques, les violations dont il s'agit ont eu un impact sur l'ensemble des citoyens burkinabé.

§ 2 -Un besoin collectif

La soif de justice s'est révélée être également une soif collective. Elle était la résultante de toutes les soifs individuelles et il ne s'agissait pas d'individus isolés, appartenant à des minorités ethnique, raciale ou socioprofessionnelle, victimes d'une violation particulière d'un droit à caractère collectif, mais d'individus citoyens. Et comme l'a reconnu le chef de l'Etat burkinabé dans son adresse à la Nation du 21 mai 1999 : « les problèmes sociaux, les contentieux politiques, les dysfonctionnements administratifs, la modernisation des institutions républicaines, la recomposition de la scène politique, voilà autant de points sur lesquels, vous attendiez des réponses pertinentes à la mesure de vos aspirations profondes ».

En effet, les questions de justice sociale, économique et politique faisaient partie avec acuité des aspirations des burkinabés et plus que ces questions, celles relatives à la justice tout simplement étaient urgentes eu égard à la déliquescence du climat social et politique.

Cette analyse menée par le chef de l'Etat l'a été au bout de plusieurs mois de crise où les populations, à travers marches, meetings, sit-in et affrontements avec les forces de l'ordre et diverses atteintes aux biens publics et privés, exprimaient leur mécontentement. Dès lors, il devenait urgent, de prendre une décision politique qui apaise les esprits et fasse baisser la tension sociale.

Section 2 : Une décision politique

La volonté politique de parvenir à une réconciliation nationale était perceptible de par le passé. L'acte majeur a été l'ouverture, le 11 février 1991, d'un forum de réconciliation nationale. Malheureusement, l'atmosphère électrique des débuts du forum a conduit à sa suspension. Cela s'expliquerait par le fait qu'au Burkina Faso, les acteurs politiques d'hier sont aujourd'hui au pouvoir ou dans l'opposition ; toutes choses rendant difficilement crédible la volonté des uns et des autres à faire la lumière sur un passé dont ils restent comptables. Le président Blaise COMPAORE est conscient de cette difficulté lorsqu'il affirme: « L'accélération de l'histoire fait défiler les évènements à une allure telle que la maîtrise par l'homme des faits devient impossible, rendant celui-ci artisan de situations non désirées. Les instants tragiques que nous avons vécus, le 15 octobre courant, font partie de ces types d'événements exceptionnels que nous fournit souvent l'histoire des peuples. »20(*)

Le 21 mai 1999, à l'occasion de son message à la Nation, du Président du Faso réaffirmait une fois de plus sa volonté politique d'élucider les crimes présents et passés ; le tout, dans le souci de préserver la paix sociale, de rétablir la confiance dans les institutions, de renforcer la foi des burkinabé dans le dialogue et la concertation. Il faut dire que cette décision fait suite à des pressions exercées à tort ou à raison par des groupes de pressions dont le plus emblématique est le Collectif des Organisations Démocratiques de Masse et des Parties Politiques.

En tout état de cause, l'objet et le contenu de la recherche de la vérité, pour lesquels les burkinabé semblent être unanimes, restaient à préciser. 

* 18 V. constitution du Burkina Faso adoptée par referendum du 02 juin 1991, révisée par les lois constitutionnelles suivantes : n°002/97/ADP du 27 janvier 1997 ; n°003-2000/ AN du 11 avril 2000 ; n°001-2002/AN du 22 janvier 2002, P.8

* 19 V. Rapport sur l'Etat des droits humains au Burkina Faso, période : 1996- 2002, MBDHP 2002, p. 51-55

* 20 V. Vers un apaisement social, comité technique d'appui au gouvernement, éd découvertes du Burkina, juin 2004, p. 16

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