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La protection du creancier gagiste du fonds de commerce en droit positif rwandais

( Télécharger le fichier original )
par Modeste BISANGWA
Université Nationale du Rwanda - Bachelor's degree in law 2005
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE NATIONALE DU RWANDA

FACULTE DE DROIT

BP 117 BUTARE

LA PROTECTION LEGALE DU CREANCIER GAGISTE DU FONDS DE COMMERCE EN DROIT POSITIF RWANDAIS

Mémoire présenté et défendu en vue de l'obtention du Bachelor's degree en droit

Par Modeste BISANGWA

Directeur :

Me Jean Paul GAKWERERE

Butare, Octobre 2005

Dédicace

A Dieu Tout Puissant

Aux parents

Aux frères et soeurs

A Raïssa, ma fille aînée

Remerciements

La confection de ce travail a été rendue possible par l'appui d'un certain nombre de personnes à l'égard desquelles nous tenons à exprimer nos sentiments de gratitude.

De prime abord, nos sentiments de gratitude s'adressent à notre Directeur de mémoire, Me Jean Paul GAKWERERE, qui, malgré ses multiples occupations académiques, a accepté de diriger ce travail. Nous le remercions pour ses conseils inlassables et ses remarques strictes mais constructives dont dépend entièrement ce travail

En deuxième lieu, nos remerciements les plus sincères vont aux parents et à tout le corps professoral de l'Université Nationale du Rwanda qui ont toujours été à nos côtés tout au long de nos études universitaires. Sans eux nous ne serions pas ce que nous sommes aujourd'hui

Nous tenons également à exprimer nos sentiments de reconnaissance envers M. Vital IYAMUREMYE pour son soutien tant matériel que moral qu'il n'a cessé de nous apporter au cours de notre vie académique. Nous lui serons toujours reconnaissant

Nous serions d'une ingratitude notoire si nous ne témoignions pas notre reconnaissance envers Vincent MUNYANEZA et les agents de la collection juridique à travers son responsable Chantal MUKAMUTANA pour avoir mis à notre disposition la documentation nécessaire à la rédaction de ce travail.

Enfin, que tous ceux qui, de près ou de loin ont contribué à l'élaboration de ce travail, plus particulièrement mon collègue de classe J.M.V. NKUNDAKOZERA avec qui nous avons fait tout notre parcours scolaire et académique, Fabien MAJORO avec qui nous avons partagé la chambre et qui, en plus de cela, a assuré la lecture de ce travail, trouvent à travers ces lignes, nos sentiments de reconnaissance.

Modeste BISANGWA

Liste des sigles et abréviations

Al. : Alinéa

Art : Article

BACAR : Banque Continentale Africaine (aujourd'hui FINA BANK)

BORU : Bulletin Officiel du Rwanda Urundi

BCDI : Banque de Commerce, de Développement et de l'industrie

BCR  : Banque Commerciale du Rwanda

BK : Banque de Kigali

BNR : Banque Nationale du Rwanda

CCB : Code Civil Belge

CCLIII : Code Civil Livre troisième

CDVA : Commission de Développement et Vie des Affaires

Coll. : Collection

CPCCSA : Code de Procédure Civile Commerciale Sociales et Administratives

Cass. : Cassation

Ch. : chambre

Ed. : Édition

Ibidem : même auteur, même, même ouvrage, même page

Idem : même auteur, même ouvrage, à la page différente de la précédente citation

J.O.R.R. : Journal Officiel de la République du Rwanda

LGDJ : Librairie Général de Droit et de Jurisprudence

L.O. : Loi Organique

GAZ. PAL. : Gazette du Palais

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

Op. cit : opère citato

O.R.U. : Ordonnance du Rwanda Urundi

P. : page

pp. : De la page ...à la page

P.U.F. : Presse Universitaire de France

R.C.J.B. : Revue Critique de Jurisprudence Belge

RPDB : Revue Pratique de Droit Belge

R.W.. : Revue de la Wallonie

T. : Tome

Trib. : Tribunal

M.B. : Moniteur Belge

: numéro

UNR : Université Nationale du Rwanda

V. : volume

: verbo (voir le mot...)

Table des matières

DÉDICACE I

REMERCIEMENTS II

LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS III

TABLE DES MATIÈRES IV

INTRODUCTION GENERALE 1

CHAP I : PROTECTION DU CRÉANCIER GAGISTE DU FONDS DE COMMERCE CONTRE L'INFIDELITE EVENTUELLE DU DÉBITEUR 6

SECTION PREMIÈRE : ACTES DU DÉBITEUR À EFFETS SUR LA CONSTANCE DU GAGE DU FONDS DE COMMERCE 6

§1. Actes du débiteur à effet immédiat sur la consistance du gage 6

A. Vente du fonds de commerce ou certains de ces éléments 7

B. Transfert du siège d'exploitation sans le consentement du créancier 9

C. Déspécialisation plénière de l'activité du commerçant- débiteur 11

D. Donations et libéralités 12

E. Apport du fonds de commerce en société 13

F. Location- gérance du fonds de commerce 14

§2. Actes de mauvaise exploitation ou de gestion négligente 15

A. Le non - renouvellement du bail et autorisations administratives 15

B. Ne pas exercer certaines actions en justice 16

C. La non tenue des livres et documents comptables 17

D. Autres actes préjudiciables aux intérêts du créancier 17

SECTION 2 : DROITS DU CRÉANCIER GAGISTE DU FONDS DE COMMERCE CONTRE LE DÉBITEUR 18

§1. Recours de droit commun 18

A. Déchéance du terme 19

B. Saisie-arrêt entre les mains du tiers acquéreur sur le prix de vente des objets aliénés 19

C. Annulation de la vente ou réclamation des dommages et intérêts 20

D. Action paulienne ou action révocatoire 21

C. Action oblique 22

F. Action en déclaration de simulation 23

§2. Moyens de protection mise en oeuvre par le Décret de 1937 24

A. Sanction pénale du détournement frauduleux 24

B. Droit de suite 26

D. Droit de préférence 28

E. Droit de réaliser le gage 30

CHAP. II : PROTECTION DU CRÉANCIER GAGISTE SUR FONDS DE COMMERCE A L'EGARD DES TIERS 32

SECTION 1 : RAPPORTS NORMAUX DU CRÉANCIER GAGISTE AVEC LES TIERS 32

§1. Dispositions préventives 32

A. Publicité instrumentaire 32

B. Identification du propriétaire de la chose nantie 34

C. Inopposabilité de la clause d'interdiction de cession de bail au créancier 35

§2. Recours du créancier gagiste contre les tiers 36

A. Recours contre l'acquéreur de la chose nantie 36

B. Créancier gagiste du fonds de commerce contre le bailleur de l'immeuble où est exploité le fonds de commerce 40

C. Créancier contre le cessionnaire à titre de garantie 41

D. Recours du créancier gagiste en cas de perte du fonds grevé 43

E. Créancier gagiste du fonds de commerce face aux tiers dont les biens sont compris dans le gage 43

SECTION 2 : DU CONCOURS DES CRÉANCIERS GAGISTES AVEC LES AUTRES CRÉANCIERS TITULAIRES DES DROITS RÉELS SUR LE BIEN NANTI. 45

§1. Notion de concours et de rang 45

A. Concours 45

B. Rang de privilège 47

§2. Les conflits de rangs entre le créancier gagiste et les tiers créanciers 47

A. Conflit entre les créanciers gagistes du fonds de commerce 48

B. Conflit du créancier gagiste du fonds de commerce et les créanciers chirographaires saisissants 48

C. Concours avec le créancier hypothécaire 49

SECTION 3 : LA SITUATION DU CRÉANCIER GAGISTE EN CAS DE FAILLITE DU DÉBITEUR 52

§1. Le créancier gagiste du fonds de commerce dans le règlement de la faillite 52

A. Notion sur la faillite, sa finalité et ses effets 52

B. La position du créancier gagiste du fonds de commerce par rapport aux autres créanciers du failli 56

§2. Les droits du créancier gagistes contre la masse et contre le curateur 57

A. les droits du créancier gagiste du fonds de commerce contre la masse 57

B. Créancier gagiste du fonds de commerce face au curateur 58

CHAP. III : DES SOLUTIONS ALTERNATIVES FORGEES PAR LA PRATIQUE EN MATIERE DE GAGE DU FONDS DE COMMERCE ET LEUR IMPACT SUR LE SYSTEME DE CREDIT 61

SECTION 1 : ANALYSE CRITIQUE DES ACTES DE GAGE ÉMIS PAR QUELQUES BANQUES OEUVRANT AU RWANDA 61

§1. Nature juridique de l'acte 61

A. Un acte sous seing privé ou un acte authentique 62

B. Contrat d'adhésion 63

§2. Les droits que les créanciers se réservent par contrat 66

A. Les clauses relatives à l'assiette et à l'étendue de la garantie 67

B. Clauses relatives à la propriété 67

C. Engagements de poser ou ne pas poser les actes déterminés 68

D. Clauses relatives à l'examen de la comptabilité du client 68

E. Les clauses relatives à la sanction 69

F. Les clauses relatives au frais résultant de l'établissement de l'acte 69

G. Clauses relatives à l'information à donner au créancier 69

SECTION 2. CONSIDÉRATIONS CRITIQUES SUR LES ACTES DE GAGE ANALYSÉS 70

§1. Tendance à l'uniformité 70

§2. Le contrat pèse disproportionnellement sur les parties 71

§3. Gage du fonds de commerce n'est pas une garantie « fourre-tout » 71

§4. Les clauses sans effets juridiques 72

A. la création d'une obligation à l'égard des tiers 72

B. La création conventionnelle des privilèges 73

C. Stipulations préjudiciables aux tiers 74

SECTION 3. LES EFFETS DE LA PRÉCARITÉ DU GAGE DU FONDS DE COMMERCE SUR LE SYSTÈME DE CRÉDIT 75

§1. L'insuffisance de protection du créancier rend le crédit onéreux 75

§2 Débats quant au maintien du gage du fonds de commerce comme sûreté 76

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS 78

BIBLIOGRAPHIE 82

INTRODUCTION GENERALE

Dans la vie économique, et plus particulièrement dans le monde des affaires, il est d'un postulat que l'homme se trouve toujours devant les besoins illimités face aux ressources limitées. Ce postulat fait que les commerçants sont toujours contraints par l'état des affaires à recourir au crédit. Or, le recours au crédit va toujours de pair avec les exigences de la garantie. Celles-ci ont toujours hanté l'esprit du créancier et par la suite celui du législateur, qui, tous les deux, cherchent au jour le jour les garanties à la fois efficaces et souples.

L'histoire des sûretés nous apprend que dès les temps immémoriaux, la personne du débiteur qui ne parvenait pas à exécuter ses obligations ou à s'assurer d'un vindex, pouvait être abandonnée au créancier qui pouvait le mettre à mort ou le vendre comme esclave1(*). Cette situation a évolué vers la recherche d'autres sûretés respectueuses de la dignité humaine et la liberté individuelle. C'est ainsi que naquit l'idée de gage. Mais la sécurité des créanciers exigeait que les biens nantis leur soient attribués en propriété, bien entendu, à titre de sûreté. C'est le contrat de fiducie. Celui-ci était une forme de sûreté réelle, où la propriété du bien corporel était transférée au créancier en garantie du paiement de la dette, avec engagement de restitution si le débiteur s'exécutait à l'échéance2(*).

Cette sûreté a cependant été jugée à la fois désavantageuse pour le formalisme du transfert de propriété et dangereuse pour celui qui, après avoir remboursé son créancier, risque de se heurter à son insolvabilité3(*).

Ces reproches formulés à l'égard de la fiducie devaient donc déterminer le législateur à limiter ces risques que courent les débiteurs. Il fallait faire l'économie d'un double transfert et rétablir l'équilibre entre le créancier et le débiteur. Ainsi est né le gage ordinaire. Tout comme la fiducie, le gage emporte dépossession du débiteur avec cette différence qu'il ne transfère pas la propriété du bien au créancier. Ce mécanisme est jugé comme un progrès par rapport à l'utilisation de la propriété à titre de garantie4(*).

Un peu plus tard, une autre étape a été franchie. Les économistes ont commencé à dénoncer l'immobilisation de certains biens mis en possession du créancier. Ils estimaient que les petits commerçants ne pouvaient trouver les moyens de se procurer du crédit qu'en se privant de certains éléments corporels du fonds de commerce. Or, ces commerçants comme le souligne DE PAGE, n'avaient souvent, pour tout avoir, que leur fonds de commerce dont, pratiquement, il était impossible de tirer un crédit quelconque. D'une part, la mise en gage de certains éléments du fonds les priverait, à raison d'une condition essentielle de dépossession, de l'objet même de leur activité professionnelle, et, d'autre part, le fonds de commerce envisagé comme universalité ne conduirait guère à des résultats tangibles et ne permettaient pas, à raison de sa composition (biens mobiliers et incorporels) l'hypothèque5(*). Qui plus est, la dépossession empêcherait le créancier d'affecter le fonds à la garantie d'un autre créancier quand bien même sa valeur serait suffisante pour cela.

Pour remédier à cette situation, le législateur a institué un gage sans dépossession du débiteur désigné sous le vocable de «gage du fonds de commerce »6(*). Il s'agit d'une sûreté réelle sans dépossession par laquelle le débiteur donne en garantie son fonds de commerce tout en continuant son exploitation. Il est régi par le décret du 12 janvier 1920 portant gage du fonds de commerce, de l'escompte et du gage de la facture commerciale7(*) tel que modifié par le décret du 21 juin 1937 et celui du 24 mai 1959.

Contrairement au gage ordinaire qui requiert la dépossession du débiteur comme condition essentielle du contrat8(*), le fonds de commerce engagé est laissé entre les mains du débiteur. Celui-ci continue l'exploitation du fonds nanti sous réserve des droits du créancier. Ainsi, il recèle un danger évident pour le créancier car, il y a lieu de craindre, non seulement que le débiteur ne tombe en faillite mais aussi des manoeuvres frauduleuses ou dolosives auxquelles ce dernier peut se livrer et qui sont de nature à amoindrir la valeur du fonds.

En guise de protection du créancier contre ces risques, le législateur lui reconnaît, d'une part, un droit de revendication qui ne s'exerce que lorsque certains biens corporels (matières premières, le mobilier, matériel et outillage) ont été déplacés9(*). Même dans ce cas, il ne s'exerce que dans six mois et sous réserve de l'art. 658 CCLIII10(*). Ainsi, le droit de revendication ne s'exerçant que sous réserve de l'art. 658 n'est plus un droit de revendication puisqu'il ne peut s'exercer que contre les acquéreurs qui, en droit commun déjà ne seraient pas protégés ou contre les personnes qui ne prétendraient aucun droit sur la chose. A ce propos, HENRI DE PAGE et RENE DEKKERS commentant le droit belge, estiment que le législateur a repris d'une main ce qu'il avait donné par l'autre11(*).

D'autre part, le décret de 1937 sanctionne le constituant qui diminuerait frauduleusement la valeur du fonds nanti du chef de l'abus de confiance12(*). Cette sanction n'est non seulement assez dissuasive mais aussi elle ne profite en rien au créancier, car ce dont il a besoin ce n'est pas la sanction mais plutôt la sûreté.

Aussi, le décret de 1937 n'envisage-t-il pas le cas d'aliénation in globo du fonds de commerce. Le doute se laisse planer quant à la possibilité pour le créancier d'exercer un droit de suite dans l'espèce. La jurisprudence et la doctrine ont souvent répondu par l'affirmative mais la mise en oeuvre pratique de ce droit semble difficile non seulement parce qu'il n'est prévu par aucun texte légal mais aussi parce que la loi ne prévoit pas la procédure de saisie des universalités tel que le fonds de commerce13(*).

En plus, le décret de 1937 ne protège pas le créancier gagiste contre les tiers que par un moyen de publicité instrumentaire du gage ; il ne règle en aucune disposition les conflits qui naissent entre le créancier gagiste et les titulaires des droits préférentiels sur le bien nanti, surtout que, sauf clause contraire, il n'est pas interdit de constituer d'autres droits réels sur le bien nanti.

Ces reproches formulés à l'égard de la législation sur le gage du fonds de commerce poussent les créanciers soit à s'abstenir d'accorder le crédit, soit à chercher d'autres palliatifs pour suppléer à cette carence. Ils cherchent à renforcer cette protection par certains mécanismes nouveaux de sûretés dites négatives c'est-à-dire certaines clauses conférant au créancier un droit de veto ou un droit de regard sur le patrimoine du débiteur14(*). Eu égard à la position de force des créanciers qui, selon l'art. 8 du décret précité, ne peuvent être que des banques ou établissements de crédit agréés, il y a lieu de se soucier de l'équité et de la validité de ces mécanismes et si le débiteur ne fait qu'y adhérer faute de mieux. Ces conditions difficiles rendent le crédit cher et le système de crédit en pâtit.

Aux vues de cette situation et les risques que courent les créanciers gagistes du fonds de commerce, les questions suivantes méritent d'être posées : la législation rwandaise en matière de gage du fonds de commerce protège-t-elle efficacement le créancier gagiste contre lesdits dangers ? Quels sont les effets de la protection peu efficace du créancier gagiste du fonds de commerce sur le système de crédit ? Y a -t-il des mécanismes que les créanciers mettent en place pour suppléer à cette carence ? Telles sont les questions qui ont été à la base de notre sujet de recherche et auxquelles il faudra trouver des réponses. Mais, les développements qui ont précédé permettent de nous convaincre de manière provisoire que : la protection peu efficace du créancier gagiste du fonds de commerce pousse les créanciers à se créer des mécanismes d'autoprotection qui ont des effets négatifs sur le système de crédit.

Ainsi, le choix de ce sujet s'inspire de ce constat d'inefficacité de la protection réservée au créancier gagiste du fonds de commerce et du souci de contribuer à la reforme de la législation sur le gage du fonds de commerce en proposant certaines solutions surtout au moment où une commission de reforme de la législation commerciale a été récemment créée par le gouvernement.

Cette étude présente également un intérêt certain pour les praticiens du droit qui trouveront à travers ce travail certaines solutions des problèmes qu'ils rencontrent au jour le jour surtout dans l'interprétation de certaines dispositions de décret de 1937 car, il est d'un constat général que le gage du fonds de commerce est une matière qui n'a pas intéressé beaucoup d'auteurs. Ainsi, ce travail constitue une des tentatives, à circonscrire ce problème.

Compte tenu de la nature de notre travail, notre démarche sera guidée par la méthode exégétique c'est-à-dire une méthode consistant à interpréter et à expliquer les règles de droit particulièrement celles contenues dans les lois. Comme notre législation en la matière n'est pas trop développée, recours sera fait aux législations des pays dans lesquels notre droit tire ses assises. Ensuite, la doctrine des auteurs étrangers et nationaux nous aidera dans l'interprétation des différents textes légaux. Nous ne manquerons pas également de faire recours à la méthode analytique qui nous permettra de décortiquer quelques actes de gage du fonds de commerce de certaines banques du pays et la jurisprudence en la matière.

Que notre lecteur soit mis en garde que notre intention n'est pas de mener une étude générale du gage du fonds de commerce en tant que sûreté réelle sans dépossession. Notre attention ne sera focalisée que sur la protection qui est réservée au créancier gagiste et nous examinerons dans la suite si les solutions alternatives envisagées par les créanciers méritent une intégration dans le commerce juridique et ce, après l'analyse de leur validité.

Dans un premier temps l'accent particulier sera mis sur la protection du créancier gagiste contre l'infidélité éventuelle de son débiteur. Nous examinerons les actes du débiteur considérés comme dangereux pour la consistance du gage et les moyens tant de droit commun que ceux prévus par le décret de 1937 que le législateur met à la disposition du créancier pour parer à l'infidélité éventuelle de son débiteur. En deuxième lieu nous analyserons les dispositions protectrices du créancier gagiste du fonds de commerce dans ses relations avec les tiers qui, comme lui prétendent avoir des droits sur les biens de son débiteur. Enfin, une analyse des actes de gage du fonds de commerce émis par les institutions bancaires oeuvrant au Rwanda sera faite pour marier la législation sur le gage du fonds de commerce et la pratique. Cela permettra d'apprécier si ce qui se fait en pratique n'a aucun effet sur le système de crédit ou s'il faut intégrer dans le système juridique les solutions envisagées par les créanciers.

CHAP I : PROTECTION DU CRÉANCIER GAGISTE DU FONDS DE COMMERCE CONTRE L'INFIDELITE EVENTUELLE DU DÉBITEUR

Une sûreté n'est pas apte à constituer un instrument de crédit que si elle confère aux créanciers sollicités une garantie efficace de paiement15(*). La nature du gage du fonds de commerce qui, par hypothèse est une sûreté sans dépossession, expose le créancier aux aléas pouvant affecter la consistance de son gage. En effet, le fonds de commerce, objet du gage, est laissé entre les mains du débiteur. Le débiteur continue l'exploitation du fonds si bien qu'il peut anéantir le fonds grevé par différents artifices. En d'autres termes, la valeur du fonds dépend de la manière dont le fonds est exploité ou pour dire mieux, de la bonne foi du débiteur. Dès lors, le fait que le débiteur reste en possession du fonds nanti nécessite une protection du créancier gagiste16(*) surtout que le droit de disposition du débiteur reste intact. Au cours de ce chapitre, le souci de cohérence nous impose d'abord de mettre en exergue tous les actes du débiteur qui ont pour effet de porter atteinte à la consistance du gage (section première) et, dans la suite, les droits dont dispose le créancier contre les entreprises frauduleuses du débiteur (deuxième section)

Section première : Actes du débiteur à effets sur la constance du gage du fonds de commerce

Dans la présente section ces actes du débiteur ont été classés en deux catégories : la première catégorie embrasse les actes, semble-t-il, graves et conscients qui ont un effet immédiat sur la consistance du gage (première sous-section). La seconde catégorie comprend les actes résultant de la gestion négligente et qui affectent implicitement et d'une manière progressive la valeur du fonds nanti (deuxième sous-section). Tous ces actes ont en commun de porter atteinte à la consistance du gage. Ils diffèrent du seul fait que les premiers produisent leurs effets dès qu'ils sont posés alors que les derniers agissent progressivement.

§1. Actes du débiteur à effet immédiat sur la consistance du gage

Les actes du débiteur qui sont jugés dangereux pour la consistance du gage sont en nombre illimité mais les plus perceptibles sont la vente globale du fonds ou de certains de ses éléments, le transfert du siège d'exploitation, la location-gérance du fonds de commerce, l'apport du fonds de commerce en société, donations et libéralités et la déspécialisation plénière de l'activité du commerçant.

A. Vente du fonds de commerce ou certains de ces éléments

Mise à part, le gage du fonds de commerce régi par le décret de 1937, le législateur rwandais n'a pas cru devoir organiser d'autres opérations sur fonds de commerce entre autres la vente. Pourtant, comme il convient de le constater, la vente est un acte chargé de lourdes conséquences. Contrat translatif de propriété, elle a pour effet direct de porter atteinte aux droits du créancier gagiste en particulier et ceux des autres créanciers en général. Appliquée au fonds de commerce, la vente peut porter soit sur quelques éléments du fonds pris isolément, soit sur l'ensemble du fonds.

1°. Vente d'un élément isolé du fonds de commerce

Puisque le débiteur reste en possession des biens donnés en gage, il lui est loisible de procéder à la vente des marchandises, au remplacement du matériel, outillage, le mobilier, etc. C'est d'ailleurs l'objectif que poursuivait le législateur en permettant au débiteur de poursuivre l'exploitation du fonds en même temps que celui-ci sert de garantie. Ces différents actes de disposition doivent avoir pour objet d'améliorer la valeur du fonds ou, pour dire mieux, doivent s'accomplir dans le cadre d'une gestion rationnelle. Cependant, dans certains cas, le débiteur se livre à de telles ventes dans le seul but de nuire à ses créanciers.

En effet, les éléments corporels compris dans le gage se transmettent aisément sans aucune autre formalité et tombent sous le coup du droit commun de la vente. Selon HUBRECHT17(*), entre les parties, le transfert de la propriété se produit automatiquement comme il est de règle en droit commun (art. 264 CCLIII en ce qui est de notre législation) sauf dérogation par une clause particulière. Ainsi, l'acquéreur de bonne foi des éléments vendus sera considéré comme propriétaire à l'égard des tiers par application de l'art. 658CCLIII18(*).

Quant aux meubles incorporels, leur transmission est subordonnée aux règles spéciales à chaque élément du fonds. Ainsi, la cession du droit au bail à titre de cession de créance doit faire l'objet d'une signification ou d'une acceptation du bail (art. 353CCLIII). De même, la publicité spéciale pour la transmission des marques ou modèles et brevets devra être respectée19(*).

Dans tous les cas, la vente des éléments tant corporels qu'incorporels pris isolément, a pour effet direct d'amoindrir la valeur du fonds de commerce voire de le rendre inexistant dans certains cas. C'est le cas notamment de la cession de certains éléments incorporels du fonds. Ainsi par exemple, pour un débiteur qui ne travaille pas dans son propre immeuble, la cession du droit au bail rendrait inexistant le fonds de commerce. Aussi inconcevable serait un fonds de commerce sans nom commercial.

A part la vente d'un élément isolé du fonds de commerce qui, dans certains cas, a pour effet de le rendre inexistant, la cession peut aussi concerner le fonds de commerce pris dans son entièreté.

2°. Vente du fonds de commerce in globo

La vente globale du fonds de commerce est une opération grave qui fait cesser l'activité commerciale et qui, de facto, fait disparaître le fonds. Le droit commun étant d'un mutisme absolu quant à la transmission des universalités, on se pose la question de savoir si la vente du fonds de commerce reste soumise aux règles du code civil relative à la vente étant donné le fonds de commerce est une universalité dont les éléments ne sont soumis aux mêmes règles, plus particulièrement en ce qui concerne les biens incorporels.

A cette question, les auteurs s'accordent pour reconnaître que la vente du fonds de commerce doit être soumise aux dispositions particulières. Selon PEDAMON, commentateur du droit français, le législateur a été conduit à apporter aux règles de droit commun qui régissent la vente mobilière une série de dérogations pour qu'elles puissent s'appliquer au fonds de commerce. Ces dérogations ont, entre autres, pour objectifs de protéger les créanciers du vendeur contre les opérations ruineuses ou clandestines. C'est à cette fin que la loi du 17 mars 190920(*) organise la publicité de la vente qui donne aux créanciers un droit d'opposition et de surenchère21(*).

L'idée de l'existence des règles particulières régissant la vente du fonds de commerce se trouve également sous la plume de Paul DIDIER qui estime qu'une publicité particulière doit être organisée en cas de cession du fonds de commerce. Selon cet auteur, la publicité a pour but de protéger le créancier d'un commerçant en difficultés contre le risque de voir celui-ci vendre son fonds de manière précipitée et disparaître ensuite avec l'argent de la vente22(*). La publicité est destinée à alerter les créanciers du vendeur qui peuvent toujours craindre que le débiteur en difficultés ne cède son fonds clandestinement et ne disparaît avec le prix de la vente23(*).

Néanmoins, certaines règles de droit commun demeurent d'application. Il s'agit des règles relatives aux obligations des parties (art. 280 et 327CCLIII) et celles relatives au transfert des risques (art. 37CCLIII). Notons que l'article 39CCLLIII qui donne préférence à celui des acquéreurs qui a été mis en possession effective ainsi que l'art. 658CCLIII ne s'appliquent pas au fonds de commerce qui est un bien incorporel non susceptible de possession.

Bref, la vente, qu'elle porte sur un élément du fonds ou sur l'ensemble du fonds de commerce, a pour effet de porter atteinte aux droits du créancier gagiste en particulier et à ceux des autres créanciers en général. Il convient dès lors que la publicité soit organisée à l'instar des législations française et belge pour qu'une fois alertés, les créanciers puissent faire échec aux manoeuvres du débiteur.

B. Transfert du siège d'exploitation sans le consentement du créancier

Le déplacement du siège d'exploitation par le débiteur pose aussi un problème du maintien du fonds de commerce engagé lequel est lié à la clientèle24(*). Bien que l'importance de la clientèle soit fonction des qualités personnelles de l'exploitant ou même de la renommée du produit, elle dépend aussi de la situation du fonds de commerce. Un fonds de commerce situé tout près d'une agglomération a plus de chance d'être régulièrement fréquenté par les clients que celui situé dans les banlieues.

De ce qui précède ressort que le déplacement du fonds de commerce soulève un certain nombre de problèmes plus particulièrement en cas de transfert du fonds de commerce dans un ressort de la chambre commerciale du tribunal de Province ou de la Ville de Kigali autre que celui auprès duquel il est inscrit. On se demande s'il faut procéder à une nouvelle inscription ou si celle prise auprès du premier tribunal suffit. En outre, on se pose la question du sort du créancier qui omettrait de faire reporter son privilège au greffe du nouveau siège.

Le législateur rwandais ne répond pas à ces questions. La loi française exige que la décision du débiteur de déplacer le fonds de commerce vers un autre endroit soit notifiée au créancier qui doit apprécier si le déplacement projeté peut lui  nuire ou pas. Il peut accepter le déplacement par une mention en marge de l'inscription primitive si le fonds est déplacé dans le ressort du même tribunal ou par une inscription nouvelle si le fonds est déplacé dans le ressort d'un autre tribunal25(*)., Mais s'il craint une dépréciation du fonds pouvant conduire à sa disparition, il peut s'y opposer26(*) Dans ce dernier cas, il peut saisir le tribunal qui appréciera s'il y a lieu ou non de faire faire prononcer la déchéance du terme. La connaissance personnelle par le créancier du déplacement du fonds équivaudrait à un avis et entraînerait les mêmes conséquences.27(*)

Quant à la question de savoir ce qui adviendrait au créancier qui ne satisfait pas à ces formalités, le répertoire Dalloz indique que le législateur n'a pas cru devoir déterminer la sanction qui résulterait du défaut de mention ou de report des privilèges antérieurement inscrits28(*). Le législateur a laissé l'espèce à l'appréciation souveraine du juge qui tiendra compte de toutes les circonstances de fait. Nous estimons cependant que ce pouvoir d'appréciation laissé au juge est moins conciliable avec le régime de publicité organisé par la loi.

Dans tous les cas, le créancier risque de se faire primer par les créanciers inscrits au nouveau siège du fonds pour autant que ces derniers soient de bonne foi. On estime qu'il est plus conforme aux principes d'accorder la préférence aux créanciers inscrits au nouveau siège du fonds sur les créanciers inscrits avant le déplacement, tant que ces derniers n'ont pas fait opérer la mention en marge de l'inscription existante ou le report de l'inscription au nouveau siège, du moins lorsque les nouveaux sont de bonne foi29(*).

Enfin, signalons pour terminer que pour que le créancier soit primé par celui inscrit après le déplacement, il faut qu'il ait été avisé du déplacement ou qu'il l'en ait pris connaissance autrement.

C. Déspécialisation plénière de l'activité du commerçant- débiteur

Par déspécialisation plénière encore dite `renforcée' il faut entendre le changement total d'activité du commerçant. Elle s'oppose à la déspécialisation simple qui consiste quant à elle en l'adjonction à son commerce des activités connexes ou complémentaires. La déspécialisation plénière est donc un changement complet d'activités par rapport à celle prévue dans le bail et emportant mutation du fonds de commerce30(*). Elle peut aller jusqu'à un changement de la clientèle du fonds de commerce31(*)

Dans la plupart des cas, la tendance est de se laisser croire que la déspécialisation plénière préoccupe les seuls bailleurs. Force est de constater cependant que le créancier gagiste du fonds de commerce ne peut être épargné par ses effets, car la nouvelle activité envisagée par le commerçant peut ne pas être productive ou peut être désapprouvée par les autorités administratives. De là, il appert que le créancier a toutes les raisons de s'opposer au tel changement d'activités. C'est la raison même qui pousse les législations étrangères à attirer toute l'attention à ce mécanisme.

Selon PEDAMON, la loi française exige que toute demande de déspécialisation plénière soit notifiée aux créanciers inscrits. Ceux-ci peuvent demander que l'opération soit subordonnée à des conditions propres à sauvegarder leurs intérêts ; par exemple que des garanties supplémentaires leur soient accordées ou qu'un nouveau calendrier de remboursement soit établi32(*).

En tout état de cause, lorsque l'autorisation est accordée, les droits des créanciers inscrits s'exercent avec leur rang antérieur sur le fonds transformé. Il s'opère une véritable subrogation réelle par la volonté du législateur33(*).

Au Rwanda, cette possibilité de notification n'est prévue par aucun texte. Certes, le créancier se contenterait de la publicité organisée par la loi sur le registre de commerce34(*). Aux termes de ladite loi, nul ne peut exercer une autre activité que celle mentionnée au registre de commerce (art. 3); tous changements aux situations déclarées lors de l'immatriculation du commerçant, donnent lieu à une inscription complémentaire (art.11).

Quoique le registre de commerce soit théoriquement public, il n'est pas aisé pour le créancier d'être informé du contenu de celui-ci, encore qu'il est tenu au greffe de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de Province ou de la Ville de Kigali35(*). Il fallait donc imposer au débiteur l'obligation d'informer préalablement son créancier chaque fois qu'il entend changer d'activité.

D. Donations et libéralités

Aux termes de l'art. 25 de la loi n° 22/99 la libéralité est un acte par lequel une personne transfère à titre gratuit à une autre un droit patrimonial36(*). L'art. 26 de la même loi distingue 4 sortes de libéralités à savoir les donations entre vifs, le partage d'ascendants, le legs et la promesse de libéralités. Toutes ces libéralités ont en commun qu'elles supposent un appauvrissement réel du disposant. En effet, pour que l'acte à titre gratuit constitue une libéralité, il faut que l'appauvrissement et l'enrichissement corrélatifs se réalisent au moyen d'un transfert de droits patrimoniaux37(*).

Ainsi, supposant un appauvrissement réel sans compensation, la libéralité ne va pas sans porter atteinte aux droits des créanciers. Si le débiteur se livre à des libéralités excessives, il porte sans doute atteinte à la valeur du fonds grevé. Le débiteur peut le faire par fraude ou tout simplement sans qu'il soit animé de mauvaise foi, dans un seul but de bienfaisance ou philanthropique. Certains actes, ne paraissent pas au premier abord comme libéralités, mais en dernière analyse, ils sont des libéralités à part entière. C'est notamment le cas des renonciations translatives ou in favorem, une remise de dette, une reconnaissance de dette, etc38(*).

Par conséquent, les libéralités ont pour effet de nuire aux créanciers du disposant. C'est ainsi qu'ils doivent être dotés de moyens suffisants pour parer à ce danger. Le droit commun leur reconnaît une action paulienne leur permettant de faire annuler les actes de fraude du débiteur en faisant valoir la règle ''nemo liberalis, nis liberatus''39(*). Selon DEKKERS, les créanciers n'ont pas à prouver que le donateur savait qu'il se rendait insolvable en faisant sa libéralité. La donation est nulle comme telle quand elle se fait aux dépens des créanciers. En outre, les créanciers n'ont pas à prouver non plus la complicité du tiers40(*)

E. Apport du fonds de commerce en société

L'apport en société est une opération qui devait logiquement relever à la fois du droit de sociétés et de la législation sur le fonds de commerce en raison des intérêts concurrents à protéger. Nous regrettons cependant que le législateur Rwandais ne s'en soit jamais préoccupé lors de l'élaboration de la législation sur le gage du fonds de commerce. Même l'art. 24 de la loi sur les sociétés commerciales41(*) ne se contente que d'affirmer que chaque associé doit effectuer un apport soit en espèces, soit en nature, soit en industrie, sans toutefois définir l'apport.

A ce propos, HUBRECHT considère que l'hypothèse d'apport en société se rapproche de celle de la vente avec cette différence que l'apporteur du fonds reçoit non pas une somme d'argent mais des parts sociales difficilement monnayables42(*). Dans le passé, l'apport du fonds de commerce a été un moyen souvent employé par les débiteurs pour soustraire leurs actifs à leurs créanciers, car la société n'était pas tenue du passif43(*). Le fonds de commerce peut être apporté, soit en toute son entièreté, soit partiellement. Toutefois, on estime qu'un apport partiel à une autre société doit être considéré comme dépassant la gestion courante44(*)

Ainsi, un problème se pose de savoir si la seule publicité exigée d'une société commerciale en constitution45(*) suffit à renseigner les créanciers de l'apport projeté par le débiteur pour qu'ils puissent éventuellement s'y opposer ou demander l'exigibilité immédiate. La jurisprudence étrangère a toujours estimé qu'en cas d'apport à une société en formation cette publicité fait double emploi avec celle concernant les actes de société qu'il n'est pas donc indispensable, dans ce cas, de procéder à la publicité spéciale46(*).

Nous estimons de notre part, qu'en l'absence d'une procédure spéciale permettant aux créanciers de faire connaître leurs créances, la société constituée pourrait se refuser de faire honneur à celles-ci alléguant qu'elle a ignoré leur existence. Une telle publicité permet aux créanciers de déclarer leurs créances et cette déclaration met la société en demeure soit de prendre en charge ce passif, soit de renoncer à l'apport envisagé47(*)

Par ailleurs, même si les créanciers inscrits peuvent faire valoir leur droit de suite, il serait mieux de prévenir d'abord car l'expérience démontre que le droit de suite risque d'échouer devant les tiers pour différentes raisons.

Quant à la possibilité de faire recours à l'exigibilité immédiate, cette éventualité reste possible mais faute d'information, l'exigibilité se heurterait à son insolvabilité car le fonds est déjà entre les mains de la société constituée. La seule possibilité serait de saisir le titre à sa disposition.

F. Location- gérance du fonds de commerce

La location-gérance, dite aussi «gérance libre » est une opération sur le fonds de commerce par laquelle le propriétaire du fonds, agissant en qualité de bailleur, concède à un tiers, moyennant une rétribution qui est en réalité un loyer, le droit d'exploiter le commerce 48(*).

Le locataire gérant doit être un commerçant et exploite librement le fonds, à son profit à ses risques et périls. Cette situation peut présenter de multiples inconvénients. Pour le bailleur qui, en fin de bail, risque de retrouver son fonds en piteux état, car le locataire a intérêt à le pressurer avant de le restituer et pour les créanciers du bailleur dont le gage se trouve entre les mains d'un tiers qu'ils ne connaissent pas et qu'ils n'ont pas choisi49(*). En outre, la location-gérance, en se prolongeant, peut s'apparenter à une cession de fonds de commerce que l'on aurait faussement qualifié pour éviter le paiement des droits de mutation50(*).

Aussi, la mise en location-gérance suscite-t-elle des difficultés pour les créanciers du propriétaire du fonds. Qui du bailleur ou locataire supporte les dettes du fonds et à partir de quelle période ? Quels sont les moyens à la disposition des créanciers pour faire valoir leurs droits de créance ?

Dans les pays dotés d'une législation sur la location-gérance, la mise en gérance doit, au début et à la fin de la location, faire l'objet d'une publicité appropriée au registre de commerce et au bulletin officiel51(*). Cette publicité permet notamment de connaître jusqu'à quelle date le propriétaire du fonds est responsable des dettes de l'entreprise et à partir de quelle date cette responsabilité incombe au gérant libre. Il est donc évident qu'avant la publication, les dettes restent à charge du propriétaire du fonds et le gérant libre supporte les dettes contractées après la publication. La location-gérance pourrait donc être envisagée par les créanciers inscrits comme tout autre acte diminuant la consistance du gage. Les créanciers seraient donc admis à faire prononcer la déchéance du terme ou faire prononcer la nullité du contrat.

Enfin, soulignons qu'il n'y a pas que les actes conscients des débiteurs qui puissent nuire le créancier. Le débiteur peut aussi se rendre coupable d'actes de gestion négligente ou de mauvaise exploitation.

§2. Actes de mauvaise exploitation ou de gestion négligente

Cette catégorie englobe les actes que le débiteur pose soit par ignorance soit par négligence sans toutefois qu'il soit animé d'une quelconque mauvaise foi mais qui, à cause de leur nature ont pour effet de porter atteinte à la consistance du gage. Ces actes comprennent entre autres le non-renouvellement du bail commercial et les autorisations administratives, la non tenue des livres et documents comptables, le non-exercice de certaines actions en justice et beaucoup d'autres actes préjudiciables au créancier

A. Le non - renouvellement du bail et autorisations administratives

L'art. 2 du Décret de 1937 fait du droit au bail un élément du fonds de commerce. Il est même le plus important car, pour un commerçant qui ne travaille pas dans son propre immeuble, le fonds de commerce ne peut pas se concevoir en son absence. Dans ce dernier cas, un fonds de commerce sans droit au bail serait comme une maison sans fondation.

On appelle bail commercial le contrat par lequel l'entreprise commerciale prend en location les locaux nécessaires à son exploitation52(*). En d'autres termes, c'est la créance du locataire contre le propriétaire, c'est-à-dire le droit à la jouissance des lieux loués où s'exerce le commerce. Le bail est si important pour la valeur du fonds de commerce que son non renouvellement nuirait certainement aux créanciers. Il en va de même de la résiliation du bail par l'une des parties. Le créancier lésé n'a d'autre choix que de désintéresser le bailleur pour sauvegarder ainsi le droit au bail

En outre, certaines activités du commerçant ne peuvent s'exercer que sous certaines licences et autorisations administratives. Il en est ainsi par exemple des débits de boisson, les exploitations minières, l'implantation d'établissement dangereux, insalubre ou incommodes53(*). Ces permis et autorisations administratifs font corps avec le fonds de commerce et ne peuvent s'en détacher sous peine d'anéantir la valeur du fonds. Si à l'expiration du délai de ces permis et autorisations administratifs, le débiteur s'abstient de les faire renouveler le fonds de commerce risque de disparaître.

Il faut donc convenir que le créancier doit disposer de certains moyens pour parer à ce danger qui menace son droit et privilège. Tout premièrement l'exécution de bonne foi prônée par l'art. 33 al. 3CCLIII oblige le débiteur de ne pas porter atteinte aux droits de son cocontractant. Sur base de cet article le créancier serait donc fondé à intenter contre le débiteur une action personnelle basée sur l'exécution de mauvaise foi du contrat, soit pour lui contraindre à exécuter son obligation, soit pour lui réclamer les dommages et intérêts. En second lieu, il peut faire recours à l'art. 86 CCLIII qui permet au créancier de demander l'exigibilité immédiate des sommes dues lorsque le débiteur vient à diminuer les sûretés servant à la garantie de la créance.

B. Ne pas exercer certaines actions en justice

Le gage du fonds de commerce, sûreté sans dépossession, implique que le débiteur continue l'exploitation du fonds grevé. Il accomplit tous les actes nécessaires à la bonne exploitation du fonds. Il peut exercer tous les actes conservatoires et toutes les actions lui reconnues par la loi. Ainsi, le débiteur qui subit la concurrence d'un tiers peut exercer l'action en concurrence déloyale. Il peut en outre exercer les actions en contrefaçon des marques et modèles, l'action paulienne, l'action oblique, etc. 54(*) Qu'advient-il si le débiteur néglige d'exercer l'une ou l'autre de ces actions ou s'abstient d'accomplir les actes conservatoires ? On admet généralement que le non-exercice de ces actions pourrait indirectement et d'une manière progressive avoir un impact sur la valeur du fonds et porter atteinte aux droits du créancier. Le créancier peut-il les exercer à la place de son débiteur ? L'article 64 CCLIII donne une réponse (voir la section2).

C. La non tenue des livres et documents comptables

Selon l'art. 1 du Décret du 20 avril 193555(*), tout commerçant doit tenir des livres et y indiquer, d'après les principes d'une comptabilité régulière, l'état des opérations commerciales et sa situation de fortune. Ces livres devront être écrits dans l'une des langues suivantes : français, néerlandais, allemand, anglais, espagnol, italien, portugais ou dans l'une des langues indigènes qui seront déterminées par le gouverneur général56(*).

La non-tenue de ces documents et livres est sanctionnée par l'art. 416 CP réprimant la banqueroute simple du commerçant. Aux termes de cet article : «pourra être déclaré coupable de banqueroute simple et puni des peines prévues à l'article précédent le commerçant en cessation de paiement :

1° qui n'aura pas tenu les livres ou fait ses inventaires selon les dispositions prévues par le code du commerce.

2° dont les livres ou inventaires seront incomplets, irréguliers ou rédigés dans une langue autre que celles dont l'emploi, en cette matière, est prescrit par la loi ;

3° dont les livres ou inventaires n'offrent pas sa véritable situation active et passive, sans néanmoins qu'il y ait fraude (...)

La situation décrite par l'art. 416, 1°, 2°, 3° éveille des soupçons. En effet, un commerçant qui ne tient pas les livres et documents est peu contrôlable quant à sa comptabilité et il risque de se retrouver en état de cessation de paiement sans aucun autre signe révélateur.

D. Autres actes préjudiciables aux intérêts du créancier

Le débiteur peut se rendre coupable de différents actes ou omissions qui préjudicient les intérêts du créancier. Le débiteur peut par exemple omettre de conclure un contrat d'assurance, se livrer aux pratiques illégales telles que les ententes illicites, la fraude fiscale, refuser de payer les impôts, etc. Le débiteur peut aussi faire des renonciations translatives, renoncer à une succession, faire des ventes à vil prix, des cessions de créance sans contrepartie, etc. Tous ceux-là peuvent avoir pour effet d'amoindrir, plus ou moins progressivement, la valeur du fonds.

Section 2 : Droits du créancier gagiste du fonds de commerce contre le débiteur

La volonté avérée du législateur d'offrir aux petits commerçants la possibilité d'obtenir le crédit sans se dessaisir de leur fonds, doit pouvoir se concilier avec la protection du créancier. L'absence de dépossession qui est pourtant requise pour le gage classique devrait déterminer le législateur à sentir une nécessité impérieuse de protéger de manière aussi efficace que possible le créancier gagiste du fonds de commerce. A cet effet, législateur met à la disposition du créancier certains mécanismes lui permettant non seulement de sanctionner les manoeuvres du débiteur mais aussi de revendiquer contre les tiers les éléments du gage dont le débiteur aurait abusivement disposé.

Il semble cependant que des formules assez évanescentes du décret de 1937 n'ont pas répondu efficacement à cette préoccupation. Cela étant, recours est fait au droit commun. Il convient d'abord d'examiner les recours de droit commun que le créancier peut exercer pour suppléer à l'inefficacité de la législation sur le gage du fonds de commerce (sous-section première) pour ensuite analyser ceux prévus par le décret de 1937(sous-section deuxième).

§1. Recours de droit commun

Avant d'être ce qu'il est, le créancier gagiste du fonds de commerce est avant tout créancier. De ce fait, tous les recours de droit commun lui sont ouverts au même titre que les autres créanciers. Il peut les exercer chaque fois que les conditions de l'art. 12 al.3 du Décret de 1937 ne lui permettent pas d'exercer une action en revendication notamment en cas de prescription du délai de 6 mois prévu dans cet article.

Parmi les recours de droit commun auxquels le créancier gagiste peut faire recours, on citerait la déchéance du terme, la saisie-arrêt entre les mains du tiers acquéreur sur le prix de la vente de l'objet aliéné, annulation de la vente ou réclamation des dommages et intérêts, l'action paulienne, l'action oblique et l'action en déclaration de simulation.

A. Déchéance du terme

Pendant la durée du gage le débiteur a l'obligation d'exploiter convenablement le fonds grevé en évitant tout acte ou omission pouvant réduire la substance du gage. Si le débiteur contrevient à cette obligation, le créancier peut mettre en oeuvre la sanction de l'art. 86 CCLIII qui prononce la déchéance du terme contre un débiteur qui a fait faillite ou qui, par son fait, a diminué les sûretés qu'il avait données par le contrat à son créancier.

Le problème délicat est de pouvoir énumérer limitativement les cas qui sont considérés comme diminuant les sûretés et qui permettraient le créancier à saisir le juge pour réclamer la déchéance. Il est généralement admis que le déplacement du fonds sans notification du créancier pourrait entraîner l'exigibilité immédiate. De même, le débiteur encourrait la déchéance du terme, si, par l'aliénation des éléments isolés du fonds ou par leur affectation au gage d'un autre créancier, il diminuait la garantie du créancier nanti57(*). Il en est de même de la résiliation du bail, l'inexécution des engagements pris par le débiteur dans l'acte de gage, voyage préjudiciable à ses affaires, négligence dans la gestion, etc.58(*)

Il faut bien avouer cependant que les cas qui viennent d'être mentionnés ne sont indiqués qu'à titre exemplatif. A notre avis, tout acte du débiteur quel qu'en soit la nature entraînerait la déchéance du terme pour autant qu'il ait pour effet de diminuer la garantie du créancier. La gravité de l'acte ou de l'omission est laissée à l'appréciation souveraine du juge.

Il est à déplorer que la procédure à suivre soit incertaine car, à notre avis, une telle mesure nécessite une décision urgente. Une procédure en référé aurait été nécessaire pour que le créancier puisse protéger efficacement ses droits en péril. Nous estimons que la procédure judiciaire de droit commun lui serait préjudiciable.

B. Saisie-arrêt entre les mains du tiers acquéreur sur le prix de vente des objets aliénés

Il arrive que l'action en revendication prévue par l'art. 12 du décret de 1937 échoue devant un tiers acquéreur en raison notamment de l'écoulement d'un délai de 6 mois prévu l'art. 12 al. 2. Selon l'opinion dominante, ce créancier qui perd son droit de suite sur les meubles corporels aliénés individuellement, conserve son droit de préférence sur le prix tant que le prix n'est pas payé59(*). Il en est de même du créancier contre lequel l'art. 658 CCLIII a été opposé.

Il est admis que ce droit du créancier de faire saisir-arrêter le prix de la vente des objets aliénés entre les mains du tiers acquéreur subsiste même après que le prix ait été payé entre les mains du curateur car le curateur opère les recouvrements non pas au nom du débiteur mais au nom des créanciers et dans la mesure des droits individuels de chacun d'eux60(*).

La saisie-arrêt est régie par l'art. 225 al. 1 CPCCSA61(*) qui permet à tout créancier muni d'un titre authentique ou privé de saisir-arrêter entre les mains d'un tiers les sommes et effets mobiliers appartenant à son débiteur ou s'opposer à leur remise.

S'il n'y a pas de titre, le juge président du domicile du débiteur ou du tiers saisi, peut, sur requête, permettre la saisie -arrêt. Cette éventualité est subordonnée à une condition que la créance soit certaine, exigible et liquide ou puisse être liquidée immédiatement et provisoirement par le président du tribunal (art. 225 al. 2 CPCCSA).

Quant à la procédure de saisie-arrêt, elle est régie par les articles 226 est suivant du CPCCSA. Le créancier saisissant est tenu de dénoncer par voie d'huissier la saisie-arrêt au débiteur saisi dans les 48 heures (art. 228 CPCCSA). Faute par le saisissant de saisir la juridiction dans un délai imparti, la saisie-arrêt est nulle (art. 229 al. 1). La même dénonciation doit également être faite, à la diligence du saisissant au tiers saisi, faute de quoi les paiements faits par ce dernier jusqu'à la dénonciation sont valables (art. 229 CPCCSA) Notons que le débiteur saisi peut demander au tribunal la main levée de la saisie (art. 230 CPCCSA).

C. Annulation de la vente ou réclamation des dommages et intérêts

Dans le même cas que le précédent, le créancier peut faire annuler la vente faite en fraude de ses droits. La doctrine justifie cette action en annulation par la soi-disant idée de dépossession «symbolique » ou «fictive » du fonds de commerce en faveur du créancier. On considère que ce dernier remet la détention du fonds en main du constituant. Dans ce cas, le constituant qui vend la chose nantie sera considéré comme ayant livré la chose d'autrui et de ce fait même, la vente serait nulle avec cette conséquence que le débiteur se ferait octroyer les dommages et intérêts s'il a ignoré que la chose fût à autrui62(*). Cette idée se trouve aussi sous la plume de F. T'KINT qui estime que la vente d'un bien dont le vendeur n'a pas la libre disposition est nulle63(*).

Par contre, la jurisprudence trouve le fondement de l'action en annulation dans le caractère public du gage. En effet, la cour de cassation belge estime que "l'aliénation frauduleuse ne peut s'opérer qu'au mépris de l'usage ou de l'emploi déterminé en vue duquel ces objets ont été remis ou laissés, de par la loi qui a organisé ce gage en main du débiteur"64(*). En d'autres termes, c'est le fait que la loi organise la publicité du gage qui permet au créancier de faire annuler la vente conclue au mépris de ladite publicité.

D. Action paulienne ou action révocatoire

Le Code Civil Rwandais ne parle de l'action paulienne que d'une manière fugitive. Aux termes de l'art. 65 CCLIII les créanciers peuvent, en leur nom personnel, attaquer les actions faites par le débiteur en fraude de leurs droits. En terme doctrinal, il s'agit d'une action paulienne conférée au créancier.

L'action paulienne est un moyen de droit qui permet au créancier de réintégrer à son profit (et à son seul profit car l'acte attaqué demeure opposable aux créanciers autres que le demandeur de l'action) dans le patrimoine de son débiteur les biens qui en auraient été frauduleusement distraits65(*). L'action paulienne est une action personnelle qui a pour base, pour fondement, un quasi-délit66(*). L'idée fondamentale réside en la volonté du débiteur de se rendre insolvable ou d'aggraver son insolvabilité au préjudice de ses créanciers qui voient ainsi échapper les biens qu'ils comptaient saisir, et sur lesquels ils ont d'ailleurs un droit de gage général67(*). Ainsi, elle ne profite qu'au créancier qui en a pris l'initiative et lui confère un véritable droit de préférence68(*); l'acte attaqué reste opposable aux autres créanciers69(*).

L'action paulienne ne peut être exercée que pour autant qu'une créance est exigible et certaine70(*). Dans ce cas, elle n'est pas d'un grand secours pour le créancier gagiste, car la fraude peut être exercée pendant la durée du gage, avant même que sa créance ne soit exigible. Selon DE PAGE, l'action paulienne n'est pas une mesure conservatoire mais une mesure d'exécution. Elle suppose que le créancier ait déjà discuté les biens de son débiteur, et, n'en trouvant plus assez pour se faire payer, cherche chez autrui ceux qui ont été frauduleusement soustrait de son droit de gage pour s'en faire attribuer le profit71(*). En outre, il serait difficile pour le créancier gagiste du fonds de commerce de rapporter la preuve de la complicité du cocontractant en cas d'actes à titre onéreux ce qui réduit l'action à quelque chose d'aléatoire72(*).

Il faut bien avouer cependant que contrairement à l'action en revendication prévue par l'art. 12 al 2 du décret de 1937, l'action paulienne présente l'avantage d'être étendue dans le temps car, en tant qu'action personnelle, elle est soumise à la prescription trentenaire.

C. Action oblique

L'action oblique nous vient de l'art. 64 CCLIII qui dispose : " les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne". Elle est une prérogative reconnue au créancier d'agir en lieu et place et pour le compte du débiteur négligent dans le but de préserver les droits de ce dernier et, de ce fait, la consistance de son patrimoine.

Ainsi, pour pouvoir exercer l'action oblique, le créancier doit justifier de 3 conditions : son intérêt à agir, l'inaction du débiteur ; enfin, l'existence d'une créance certaine et exigible73(*). Dès l'instant que ces conditions sont réunies tous les créanciers tant privilégiés que chirographaires peuvent agir, que leur titre soit, ou non, antérieur à l'acquisition du droit que le débiteur néglige d'exercer74(*). De là, le créancier gagiste sur le fonds de commerce est donc reçu à intenter une action oblique pour recouvrer une créance en souffrance, interrompre une prescription, inscrire une hypothèque ou poursuivre une instance dont le débiteur se désintéresse, etc.). Il s'agit donc des droits et actions de son débiteur qui existent dans son patrimoine et qu'il néglige de faire valoir contre les tiers75(*).

Contrairement à l'action paulienne qui ne profite qu'au seul créancier qui en a pris l'initiative, l'action oblique est une mesure conservatoire dont le produit profite à l'ensemble de ses créanciers. Partant, son exercice reste sans intérêts surtout lorsqu'il y a d'autres créanciers dont les rangs sont antérieurs au sien. Le créancier ne trouve aucun incitant à l'exercice de l'action oblique dès lors qu'aucune préférence ne lui est reconnue.

F. Action en déclaration de simulation

La simulation consiste en un mensonge concerté entre les contractants qui conviennent de dissimuler leur volonté véritable derrière un contrat qui ne sera qu'une apparence. Elle s'oppose au dol qui est réticence ou le mensonge d'un seul. Il existe donc entre deux cocontractants, deux accords de volonté nés en même temps : l'un ostensible mais mensonger (acte apparent, acte simulé) l'autre sincère mais secret (la contre-lettre, acte dissimulé). Les motifs de la simulation sont variés. Ils peuvent être licites76(*) mais le plus souvent ils sont illicites. Dans ce dernier cas, elle tend à porter préjudice aux créanciers de l'un des cocontractants.

Par conséquent, ces derniers ont le droit de méconnaître la contre-lettre et de s'en tenir à l'acte apparent. La contre-lettre ne lui est pas opposable mais ils peuvent aussi bien, s'ils y ont intérêt, écarter l'acte apparent pour se prévaloir de la contre-lettre. L'action par laquelle ils demandent ainsi à rétablir la réalité pour faire jouer en leur faveur les effets de la contre-lettre, est l'action en déclaration de simulation.

En effet, cette action suppose un acte fictif qui ne crée donc pas l'insolvabilité réelle du débiteur. Par cette action le créancier priera le juge de dire que le bien aliéné n'est, en réalité, jamais sorti du patrimoine du débiteur, qu'il n'a jamais cessé d'en faire partie et que l'acte qui constate la transmission ou la constatation de charge n'est qu'apparent, non sincère, qu'il est fictif. Le créancier trouve intérêt à exercer l'action en déclaration de simulation, car tout comme dans l'action paulienne le bénéfice de l'action lui appartient à lui seul. Il faut observer cependant que la simulation n'est qu'une hypothèse rare car dans la plupart des cas la sortie est réelle. L'action en simulation n'est qu'une monnaie rare.

§2. Moyens de protection mise en oeuvre par le Décret de 1937

A part les moyens de droit commun que le créancier gagiste du fonds de commerce peut mettre en ouvre comme tout autre créancier, le décret de 1937 met à sa disposition d'autres moyens spécifiques qui se justifient par le caractère particulier du gage du fonds de commerce. Ce sont notamment la sanction pénale du détournement frauduleux, le droit de suite, le droit de préférence et le droit de réaliser le gage en cas de non paiement.

A. Sanction pénale du détournement frauduleux

Le débiteur, par le fait du gage est constitué gardien des éléments du fonds de commerce. L'art. 18 du décret de 1937 punit d'un mois à deux ans de servitude pénale77(*) et d'une amende de 100 à 10.000 francs ou d'une de ces peines seulement, le débiteur qui diminue frauduleusement la consistance du fonds de commerce qu'il a donné en gage. Même si le législateur fait usage du terme «diminution frauduleuse », les auteurs en sont venus à conclure qu'il s'agit bien d'une infraction d'abus de confiance78(*).

Ainsi envisagée, la question se pose de savoir pourquoi le régime de droit commun est écarté. Faut-il conclure que la diminution frauduleuse de la consistance du gage ne cadre pas avec l'élément matériel de l'abus de confiance de droit commun ? Une autre question est de savoir ce que serait le fondement de la condamnation du débiteur. Est-il condamné du fait qu'il est constitué gardien ou simplement à un autre titre ? Les développements qui suivent se penchent sur ces questions

En ce qui concerne "l'abus de confiance spéciale" résultant de la diminution frauduleuse de la consistance du gage, analysons d'abord ce qu'il en est de l'abus de confiance prévue par le code pénal rwandais. Le code pénal rwandais punit quiconque a frauduleusement détourné ou dissipé au préjudice d'autrui, des effets, deniers, marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature contenant ou opérant obligation ou décharge et qui lui avaient été remis à titre de louage, de dépôt, de mandat, de gage, de prêt à usage ou pour un travail, salarié ou non salarié, à charge de les rendre ou d'en faire un usage ou un emploi déterminé79(*). Il ressort des dispositions de cet article que pour mettre en application les sanctions qu'il porte, il faut que les effets, deniers, marchandises et quittances, écrits aient été remis à titre de l'un des contrats y énumérés à savoir le contrat de louage, de dépôt, de mandat, de gage, de prêt à usage ou un contrat de travail.

Cependant, il est de notre avis qu'aucun des contrats énumérés à l'article 424 du code pénal rwandais ne permet d'accommoder l'idée de dépossession des biens du fonds de commerce. Certains auteurs animés par l'idée de dépossession « fictive » ou « symbolique » estiment que le constituant du gage n'est qu'un simple détenteur qui n'a pour mission que de préserver et conserver le bien nanti80(*). En cette qualité il serait considéré comme un simple dépositaire. A notre avis, ce parallélisme accuse d'un certain illogisme, car le dépositaire ne peut que garder le bien qu'il a reçu en dépôt, il n'a aucun droit de disposition sur le dit bien. Il est donc clair que cette idée est contraire à la raison d'être de l'institution de gage du fonds de commerce qui est de doter les petits commerçants d'un instrument de crédit tout en poursuivant l'exploitation de leur fonds.

Biens plus, il nous semble que le contrat de gage auquel fait allusion l'art. 424 ne peut entrer en ligne de compte que pour un créancier ordinaire aux mains duquel un gage a été remis. Il ne peut pas faire bon ménage avec la réalité du gage du fonds de commerce.

Par contre, le fondement de la sanction de la diminution frauduleuse peut donc être recherché ailleurs ce qui justifie, à notre sens, le recours au régime spécial. Selon MOREAU MARGREVE : « c'est l'obligation de conservation imposée au constituant du gage en raison même de la garantie constitué en faveur du créancier qui explique et justifie qu'il puisse, en cas d'inexécution de son obligation, être condamné pour abus de confiance »81(*). Le constituant qui a grevé le fonds, a l'obligation de gestion rationnelle, pareille obligation est tout à la fois la mesure de ce qu'il ne peut plus faire et de ce qu'il peut encore faire. Il ne peut modifier les éléments du fonds de commerce si ses agissements sont contraires à une bonne gestion mais il le peut à l'inverse82(*). De là, il y a lieu de constater que l'abus de confiance de l'art. 18 du décret de 1937 n'est pas fondé sur l'un ou l'autre des contrats prévus par l'art. 424 CP mais résulte plutôt d'une obligation pesant sur le constituant de ne pas diminuer la consistance du gage (obligation de gestion rationnelle).

Avant de conclure cette rubrique relative à la sanction pénale, nous pensons de lege ferenda que les sanctions portées par l'art. 18 du Décret de 1937 devraient être revues dans le sens de l'augmentation des peines, car elles paraissent moins dissuasives pour un commerçant de mauvaise foi. L'insuffisance de la sanction a poussé Jacques FERRONIERE à proposer au créancier gagiste d'insérer «la clause d'arrosage » dans son contrat de prêt. Celle-ci est une clause permettant au créancier d'exiger au débiteur, soit un supplément de garantie soit un payement avant terme lorsque les garanties viennent à diminuer83(*). Toutefois, l'utilité de cette clause ne paraît pas évidente, car celle-ci restera sans effet si le débiteur n'a pas d'autres biens à donner en complément de garantie ou se trouve dans l'impossibilité de payer avant terme84(*).

Aussi, est-il d'un grand intérêt de souligner que pour le créancier, l'intérêt n'est pas de voir le débiteur condamné à un emprisonnement ou à une amende. Pour lui, il serait mieux que les biens détournés retournent dans le patrimoine du débiteur pour qu'il exerce sur ceux-ci un privilège. La tentative d'obtenir les dommages et intérêts sera également vouée à l'échec car, dans la plupart des cas le débiteur est insolvable. C'est pourquoi un autre mécanisme permettant au créancier de poursuivre le bien en quelques mains qu'il se trouve a été imaginé. Il s'agit d'un droit de suite reconnu au créancier.

B. Droit de suite

Le droit de suite est un attribut du droit réel permettant au titulaire de celui-ci de saisir le bien grevé du droit en quelques mains qu'il se trouve85(*). Il est unanimement admis que le droit de suite complète le droit de préférence et que les deux combinés confèrent toutes les prérogatives d'un droit réel. Le droit de suite protége le titulaire de la sûreté contre la disparition de l'actif du débiteur. Il confère au créancier le droit de saisir le bien en quelques mains qu'il se trouve et le faire vendre à son profit.

Traditionnellement, le droit de suite n'était que l'attribut des seules sûretés immobilières en vertu de l'adage « les meubles n'ont pas de suite par hypothèque» (voir art. 2119 du code civil français). Selon T'KINT il n'est pas praticable en matière mobilière pour deux raisons :

1° Le droit de suite n'est pas compatible avec la protection que l'art. 2279 (équivalent à 658 CCLIII) du code civil reconnaît au possesseur de bonne foi d'une chose mobilière, lequel est fondé à repousser toute revendication des tiers ;

2° Le droit de suite ne se conçoit pas sans une publicité efficace qui protège les tiers et spécialement les acquéreurs des biens grevés, dans la mesure où il est difficile, sinon impossible d'organiser pareille publicité pour les meubles86(*).

Contrairement au code civil français qui consacre la règle « les meubles n'ont pas de suite », l'art. 12 al 2 du décret de 1937 reconnaît au créancier le droit de revendiquer entre les mains des tiers acquéreurs les éléments séparés du fonds (matière première, matériel et outillage) lorsqu'ils ont été déplacés sans son consentement. La revendication doit se faire dans un délai de 6 moins faute de quoi le créancier perd son droit de préférence sur les effets déplacés. En revanche, l'acquéreur peut invoquer le bénéfice de l'art. 658 CCLIII. Signalons que le droit de suite n'est pas consacré par l'art. 12 al. 1 du décret de 193787(*) comme le prétend Joseph HATUNGIMANA, car le droit de suite et le droit de préférence ne sont exercés que contre le tiers et non entre les parties 88(*)

En ce qui concerne les éléments qui font objet du droit de suite, T'KINT, commentant le droit belge, estime que l'énumération de l'art. 11§ II CCB équivalent à de notre art. 12 al. 2 du Décret de 1937 n'est pas limitative89(*). C'est-à-dire que le créancier peut revendiquer outre les éléments corporels énumérés à l'art. 12 al. 2, même les autres éléments corporels du fonds de commerce aliénés sans son consentement tels que les marchandises aliénées dans l'esprit de fraude.

Toutefois, nous ne souscrivons pas à cette position, car aucun élément ne nous permettrait d'arriver à une telle conclusion. A note sens, l'énumération de l'art. 12 al 2 reste limitative car, si le législateur n'avait pas voulu rendre limitative cette disposition, il se serait satisfait à dire tout simplement que le créancier peut revendiquer les éléments du fonds de commerce déplacés sans son consentement sans pouvoir désigner nommément certains d'entre eux (les matières premières, le matériel, le mobilier et outillage). Or, les marchandises peuvent être aliénées en dehors de la gestion normale. De même, les éléments incorporels tel que le droit au bail, le nom de commerce, peuvent être cédés conduisant ainsi à la disparition du fonds de commerce. Peut-on étendre la disposition aux marchandises ou aux meubles incorporels qui font pourtant partie de l'assiette du gage du fonds de commerce ? En tout cas la réponse négative s'impose sinon l'énumération dont question à l'art. 12 du décret de 1937 ne serait que fantaisiste.

Outre la limitation du droit de suite dans le temps et la possibilité pour le tiers acquéreur de lui opposer l'art. 658CCLIII, l'exercice du droit de suite supposerait l'exercice d'un continuel contrôle de la part du créancier gagiste, contrôle coûteux et qui risquerait d'être mal accueilli ! Il n'est pas rare, en fait, que le créancier gagiste ne soit informé de la cession d'un élément du fonds, quand ce n'est pas du fonds lui-même, et ce, en dépit des clauses contractuelles, qui spécifient que défense est faite au constituant de conclure telle ou telle opération sans autorisation préalable du créancier gagiste90(*).

Quant à la possibilité d'exercer le droit de suite en cas d'aliénation globale du fonds de commerce, il est généralement admis que le créancier gagiste exerce un véritable droit de suite quoique sa base théorique soit faible. En effet, ce droit de suite est une construction prétorienne et ne repose sur aucun texte légal. Il se justifie par la double considération que le gage se réalise sans dépossession et qu'il est soumis à la publicité91(*). D'une part, la sûreté serait illusoire si le créancier n'était pas protégé contre l'aliénation de mauvaise foi par le débiteur qui maintient la possession du bien et d'autre part, la publicité dont le gage du fonds de commerce fait objet rend celui-ci opposable aux tiers qui sont avertis de l'existence du gage. On estime que l'acquéreur de bonne foi qui aurait omis de vérifier, l'absence d'inscription sur le fonds serait un acquéreur négligent92(*).

Pour conclure, notons que malgré toutes ces considérations en faveur de l'existence du droit de suite en cas d'aliénation globale du fonds de commerce, l'absence de texte fait que sa mise en oeuvre n'est pas toujours aisée. En plus, le succès du droit de suite est soumis à la condition, que le fonds demeure identifiable ce qui est dans la plupart des cas irréalisable. Et enfin, le droit de suite ne peut pas atteindre les résultats escomptés qui pour autant que le créancier bénéficie d'un droit de préférence.

D. Droit de préférence

Le droit de préférence qui est la prérogative des droits réels, permet à son titulaire de se mettre à l'abri du concours des autres créanciers et le protège contre l'insuffisance du patrimoine du débiteur. Il se trouve consacrée par l'article premier du Décret hypothécaire du 15 mai 192293(*). Le droit de préférence du créancier gagiste s'exerce non seulement lors de la réalisation du gage mais aussi comme conséquence de l'action en revendication intentée par le créancier (l'art. 12 al. 2 «le créancier conserve son privilège sur les éléments du fonds déplacés »).

Cette prérogative permet au créancier gagiste d'être payé par préférence sur le prix de vente du fonds. Ce droit subsiste sur l'ensemble du fonds jusqu'à l'apurement total de la créance. En plus, le principe de l'indivisibilité du gage consacré par l'art. 612 CCLIII s'applique en matière de nantissement du fonds de commerce.

Pour faire valoir son droit de préférence, le créancier doit tout d'abord provoquer la procédure de réalisation. Cette procédure s'opère par une saisie des éléments qui composent le fonds de commerce. Cette saisie se fait sans la permission du juge, mais après une mise en demeure faite à l'emprunteur et au tiers bailleur du gage s'il y en a un (art. 12 al. 1 décret de 1937). Une vente doit s'en suivre après que les saisies opérées aient été déclarées valables par le juge de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali sur requête du créancier poursuivant94(*). Le prix de la vente sera réservé par priorité au créancier gagiste.

Toutefois, même si le créancier gagiste a le droit de se faire payer par priorité au rang que lui assure son privilège sur le prix de la vente du fonds, il est primé par les privilèges de meilleur rang tel que le privilège des salariés, du trésor, les frais de justice, etc.95(*) Il est déplorable que la législation sur le gage du fonds de commerce n'ait réglé suffisamment les conflits de rang en cas de pluralité de privilèges sur un même fonds. Cette question sera abordée dans le 2e chapitre.

Notons que si à la suite de l'exercice du droit de suite par le créancier, la vente du fonds atteint les éléments sur lesquels ne porte pas son privilège, son droit de préférence ne s'exerce que sur le prix des éléments compris dans le nantissement. Ensuite, il a été jugé que même si le créancier perd son droit de suite sur les meubles corporels aliénés individuellement, il conserve son droit de préférence sur le prix tant que le prix n'est pas payé96(*).

E. Droit de réaliser le gage

Parmi les formes légales d'exécution prévues par le code de procédure civile, commerciale, sociale et administrative, la réalisation du gage du fonds de commerce ne peut passer que par la saisie. Contrairement au « gage classique » où le bien qui en fait objet est entre les mains du créancier gagiste ordinaire, le créancier gagiste du fonds de commerce sera préalablement contraint de saisir le fonds ou les éléments qui le composent.

En principe, pour pouvoir saisir, l'intéressé doit avoir un titre exécutoire qui peut être un jugement, un arrêt, ordonnance, les sentences arbitrales, actes authentiques contenant les clauses de vente par voie parée, les contrats de marché publics passés en forme administrative, les actes authentiques et les jugements étrangers revêtus de l'exequatur par l'autorité judiciaire compétente (art. 195 CPCCSA). En outre, la saisie conservatoire requiert la permission du juge-Président du tribunal de district ou de la ville ou celui du tribunal de province ou de la ville de Kigali, suivant leur compétence matérielle.

Ainsi l'art. 12 al. 1 du décret de 1937 reconnaît au créancier au bénéfice duquel un fonds de commerce a été donné en gage, le droit de faire saisir pour sûreté des sommes qui lui sont dues et sans la permission du juge, tous les éléments constitutifs du fonds de commerce donné en gage. Cette saisie se fait simultanément avec la mise en demeure faite à l'emprunteur et au tiers bailleur de gage s'il y en a un.

De ce qui précède, on en déduit qu'il s'agit bien d'une saisie conservatoire, car le droit définitif du saisissant est subordonné à une demande en validité dans un délai de 48 heures de la saisie. La demande en validité est portée devant le juge de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali par le créancier poursuivant97(*).

La saisie aboutit donc à la vente du gage en bloc ou en détail, soit publiquement, soit de gré à gré, au choix du juge et par la personne qu'il désignera. Toutefois, une mise en demeure préalable est requise. Elle est signifiée au débiteur et au tiers bailleur de gage s'il y en a un. La requête est adressée au juge de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali dans le ressort duquel le fonds de commerce est situé98(*)

Il est à déplorer cependant que ni le décret de 1937, ni le nouveau code de procédure civile, commerciale, sociale et administrative ne précisent la procédure de saisie des universalités comme le fonds de commerce dont les éléments sont soumis aux régimes juridiques différents. Le Décret de 1937 ne se satisfait qu'à préciser que le juge peut ordonner la vente en bloc du fonds de commerce mais sans préciser la procédure de saisie qui est pourtant une étape préalable à toute vente. Aucune des formes de saisie connue ne sert de manière adéquate à réaliser l'appréhension globale du fonds99(*). Comment alors le juge s'y prend-il dans un cas concret? A notre humble avis, nous pensons que le juge appliquera les règles différentes suivant la nature des biens (sommes, marchandises, éléments incorporels, etc.) ce qui aura bien sûr pour effet de morceler la réalisation du gage et d'amoindrir la valeur du fonds par rapport à celle qu'il aurait s'il était réalisé comme un tout.

CHAP. II : PROTECTION DU CRÉANCIER GAGISTE SUR FONDS DE COMMERCE A L'EGARD DES TIERS

La sûreté dont bénéficie le créancier gagiste du fonds de commerce ne saurait être efficace que dans la mesure où il est protégé contre les tiers. Le terme tiers utilisé dans ce chapitre renvoie aux acquéreurs du bien objet du gage, au bailleur et les autres titulaires des droits réels sur le fonds grevé. Toutes ces personnes peuvent avoir les droits à prétendre sur le bien. Dans ce chapitre, ces droits s'analysent dans le cadre des relations normales avec les tiers d'une part (première section), et dans le cadre de la faillite du débiteur d'autre part (section deuxième).

Section 1 : Rapports normaux du créancier gagiste avec les tiers

Dans le cadre des rapports normaux, la protection du créancier gagiste du fonds de commerce va s'analyser à travers les dispositions préventives que le législateur met en place pour protéger le créancier contre les tiers, différents recours contre les tiers et les principes généraux qui participent à la résolution des conflits entre le créancier et les personnes ayant les privilèges sur les meubles nantis.

§1. Dispositions préventives

Les dispositions préventives que le législateur met en place comprennent la publicité instrumentaire, l'exigence que le constituant soit propriétaire de la chose nantie et l'inopposabilité de la clause d'interdiction de cession de bail au créancier.

A. Publicité instrumentaire

La nature du gage du fonds de commerce, sûreté réelle sans dépossession nécessite qu'une publicité soit organisée pour son opposabilité. Selon l'art. 4 du décret de 1937, l'acte du gage n'est rendu public que par son inscription qui en est faite dans un registre tenu à cet effet. Des extraits sont délivrés à tout requérant. L'al. 2 de l'art. 4 précise que le gouverneur général règle tout ce qui a trait à la bonne marche du service (...). Le commissaire provincial désigne le fonctionnaire chargé du service des inscriptions100(*). C'est ce qui a été fait respectivement par l'ordonnance n° 40/AE101(*) et AM n°99/13102(*).

En effet, aux termes de l'article premier de l'ordonnance n° 40/AE, l'inscription prévue par l'art. 4 du décret de 1937 sur le gage du fonds de commerce se fait, dans un registre tenu à cet effet au siège de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali103(*) dans le ressort duquel le fonds de commerce est établi. Quant à la désignation du fonctionnaire chargé du service des inscriptions l'article unique de l'AM n° 99/13 désigne les greffiers des chambres commerciales des tribunaux de province ou de la ville de Kigali pour le service des inscriptions des actes de gage sur le fonds de commerce. Toutefois, ni le décret ni l'AM ne précise le délai endéans lequel l'inscription doit avoir été accomplie.

L'inscription requise par la loi n'est pas une condition de validité du gage mais plutôt une condition pour l'opposabilité de celui-ci aux tiers104(*). En effet, entre les parties aucune formalité n'est requise pour la validité du gage; même un acte sous seing privé suffit (art. 3 décret de 1937).

Par contre, dans certaines législations, comme en France, lorsque le nantissement comprend des brevets d'invention ou modèles industriels, il doit en outre, être inscrit à l'office national de la propriété industrielle, sur production du certificat d'inscription délivré par le greffier du tribunal du commerce, dans la quinzaine qui suit cette inscription, à peine de nullité du nantissement à l'égard des tiers105(*). Il semble que cette formalité n'est pas prévue en droit rwandais. Il est de l'opinion dominante que l'inscription remplace la mise en possession effective du créancier, en permettant aux tiers de se rendre compte de l'existence du privilège106(*). L'inscription protège donc le créancier contre les tiers. A ce propos, il a été jugé que si le débiteur transfère le siège d'exploitation du fonds dans un autre arrondissement, une nouvelle inscription est dès lors requise, à peine d'inopposabilité du gage aux tiers107(*).

Il est d'un grand intérêt de souligner que le rang des gages sur fonds de commerce se détermine d'après l'ordre des inscriptions (art. 6 du Décret de 1937). Il en est de même des conflits de rang avec d'autres créanciers autres que gagistes. Ils sont en grande partie résolus suivant la règle de l'antériorité d'inscription108(*).

En plus, c'est le caractère public du gage c'est-à-dire l'inscription qui en est faite qui justifie le droit de suite que la doctrine et la jurisprudence reconnaissent au créancier gagiste du fonds de commerce en cas de déplacement global du fonds de commerce nanti. C'est pour cela qu'on estime que par l'inscription qui en est faite au greffe, les tiers sont avertis de l'existence du gage et que celui qui acquérrait le fonds de commerce nanti en dépit de la publicité serait en tout cas un acquéreur négligent109(*).

B. Identification du propriétaire de la chose nantie

Le Décret de 1937 n'exige pas de manière expresse que le constituant puisse être propriétaire du bien nanti. Pourtant, cette condition se déduit de l'art. 4 al. 4, 2° qui impose entre autres éléments du bordereau à joindre à l'expédition de l'acte de gage, l'identification du propriétaire du fonds grevé. L'identification ainsi exigée, sous-entend que l'intention du législateur est de vérifier si réellement le constituant est propriétaire de la chose qu'il entend soumettre à la garantie du créancier car, l'interdiction de grèvement des biens appartenant à autrui est d'une exigence habituelle en matière des sûretés réelles conventionnelles.

Toutefois, ici la propriété doit s'entendre comme la titularité du fonds et non comme la propriété au sens de droit réel portant sur une des valeurs corporelles ou incorporelles110(*). C'est ainsi par exemple qu'il est généralement admis que l'usufruitier d'un fonds de commerce peut constituer valablement sur ce fonds un nantissement. Celui-ci sera soumis aux mêmes causes d'extinction que l'usufruit lui-même, et ne permettra au créancier que de faire vendre l'usufruit et non le fonds lui-même. L'hypothèse reste surtout théorique111(*).

L'exigence que le constituant soit propriétaire de l'objet nantie est si primordiale que T'KINT estime que le nantissement constitué sur un fonds appartenant à un tiers est nul112(*). Selon cet auteur, il peut être assimilé à la vente ou l'hypothèque de la chose d'autrui. Le gage de la chose d'autrui n'est pas seulement inopposable au verus dominus, il est aussi nul entre les parties, à raison du fait que, ne pouvant être opposé au tiers propriétaire, il ne peut transférer au créancier la sûreté qui est l'essence de la convention de gage. Le propriétaire peut toujours méconnaître le nantissement, même si le créancier était de bonne foi.

La nullité qui frappe le nantissement de la chose d'autrui doit être considérée comme une nullité relative. Il en découle que :

1° Seul le créancier peut, à l'exclusion du débiteur se prévaloir de la nullité

2° Si le constituant devient propriétaire le nantissement se trouvera de plein droit validé

3° Le véritable propriétaire peut ratifier la constitution du nantissement indûment faite par un tiers113(*).

Toutes ces considérations montrent combien serait précaire la sûreté constituée sur le fonds de commerce dont le débiteur n'est pas propriétaire. C'est certes cette situation qui a amené le législateur à exiger l'identification du propriétaire du fonds. L'objectif n'est autre que de protéger le créancier contre les effets de la nullité du gage.

C. Inopposabilité de la clause d'interdiction de cession de bail au créancier

En pratique, il est fréquent que le commerçant ne soit pas propriétaire de l'immeuble ou des locaux dans lesquels il exploite son fonds de commerce. Il en obtient alors la jouissance par un bail à usage commercial. Celui-ci est l'un des éléments les plus importants du fonds de commerce. C'est lui, en effet, qui assure la continuité de l'exploitation de l'entreprise dans un certain local. De lui dépendent donc, en grande partie, la clientèle et l'achalandage114(*). C'est ainsi que la résiliation du bail à la demande du propriétaire doit être notifiée aux créanciers inscrits. De même, le législateur rend inopposable au créancier la clause d'interdiction de cession de bail.

Aux termes de l'art. 11 du Décret de 1937, la clause d'interdiction de cession de bail n'est opposable au créancier gagiste ou à ses ayants droits continuant dans l'immeuble loué, le même commerce et le garnissant de meubles suffisants. Cette disposition tend à renforcer la valeur de la garantie.

Néanmoins, l'applicabilité de l'art. 11 paraît se réduire à des considérations purement théoriques. En effet, on s'imagine mal la situation où le créancier serait amené à continuer le même commerce dans l'immeuble loué. Selon DE PAGE, cette disposition semble notamment concerner le cas où le fonds de commerce serait, à l'échéance de l'obligation principale, attribué au créancier gagiste par voie de dation en payement115(*). Rappelons que sont nuls le pacte commissoire exprès et toutes clauses fixant d'avance le lieu où la vente aurait lieu ou dispensant des formalités relatives à la procédure de réalisation du gage116(*).

Comme on peut toutefois le constater, la dation en paiement du fonds de commerce est une hypothèse qui est rare mais qui reste quand même envisageable. Telle est la raison qui a amené le législateur à protéger le créancier au bénéfice duquel la cession de bail peut être faite, en rendant inopposable à son égard la clause d'interdiction de cession de bail. Soulignons à toutes fins utiles, que le législateur subordonne l'inopposabilité au créancier gagiste de la clause d'interdiction de cession du bail au respect de l'obligation de garnir le bien de meubles suffisants. Cette exigence vise à protéger le bailleur qui ne peut en tout cas être relégué aux oubliettes.

§2. Recours du créancier gagiste contre les tiers

Les recours qui vont faire objet de notre analyse au cours de cette sous-section sont les recours contre l'acquéreur de la chose nantie, le bailleur de l'immeuble où est exploité le fonds de commerce, contre le cessionnaire à titre de garantie, recours en cas de perte du fonds grevé et le recours contre les tiers dont les biens sont compris dans le gage

A. Recours contre l'acquéreur de la chose nantie

Commençons tout d'abord par observer que le recours contre l'acquéreur de la chose objet du gage du fonds de commerce peut être envisagé dans deux hypothèses. Dans un premier temps il s'agit d'une hypothèse où le tiers a acquis le fonds de commerce en tant qu'une universalité et dans le second cas il sera question de l'acquisition d'un élément isolé du fonds de commerce.

1° Acquisition du fonds de commerce en tant qu'universalité

Les tenants de l'idée de possession fictive en faveur du créancier gagiste maintiennent que ce dernier est réputé mis en possession du fonds par le fait de l'inscription de son privilège au greffe de la chambre du tribunal de province ou de la ville de Kigali dans un registre tenu à cet effet. Son droit subsiste aussi longtemps que l'inscription est maintenue à l'égard des tiers et notamment du tiers acquéreur117(*). Malgré la vente à ce tiers et sa mise en possession de fait, le créancier gagiste, resté, par la fiction de la loi, possesseur juridique du fonds de commerce conservera son privilège et devra poursuivre la réalisation du gage contre son débiteur comme si la vente n'avait pas eu lieu118(*). Aussi, considère-t-on que la vente d'un bien dont le vendeur n'a pas la libre disposition est nulle119(*) et l'art. 658 CCLIII ne saurait être invoqué par l'acquéreur de bonne foi car le fonds de commerce en tant qu'universalité n'est pas un meuble corporel susceptible de possession.

2° Acquisition d'un élément isolé du fonds de commerce

La situation est différente si l'aliénation faite par le débiteur gagiste porte sur un ou certains éléments corporels du fonds envisagés isolément. Le législateur, tout en reconnaissant au créancier gagiste du fonds de commerce une action en revendication contre le tiers acquéreur120(*), confère à ce dernier, lorsqu'il est de bonne foi, la possibilité de faire échec à son action réelle en revendication.

En effet, aux termes de l'art. 12 al. 3 du décret de 1937 « l'acquéreur de bonne foi peut cependant invoquer le bénéfice de l'art. 658 du CCL III ». Cette protection conférée au tiers acquéreur se justifie par la nécessité du commerce. La rapidité des transactions mobilières, comme leur nombre, ne donnent pas à l'acquéreur la possibilité de s'informer utilement quant au droit de l'aliénateur.121(*) Il acquiert le bien avec la conviction que le cédant en est propriétaire. Il s'en tient à l'apparence que constitue la mainmise de son auteur sur la chose.

Néanmoins, pour que le bénéfice de l'art. 658CCLIII puise être invoqué contre le créancier, certaines conditions sont requises. Précisons d'abord la portée de la règle de l'art. 658, pour enfin en préciser les conditions d'application.

a) La portée de la règle « en fait de meuble possession vaut titre »

Selon RENE DERKERS, la règle « en fait de meubles, la possession vaut titre » déroge à une autre, plus générale que le propriétaire peut toujours revendiquer son bien entre les mains de qui que ce soit. Dès que le propriétaire apporte la preuve de son droit, tout le monde doit s'incliner ; et le tiers qui détient le bien d'autrui, doit le restituer. C'est de ce principe que l'art. 2279 (équivalent à l'article 658CClIII) s'écarte, en voulant que la revendication d'un meuble corporel échoue devant un possesseur de bonne foi122(*).

En d'autres termes, on pourrait dire qu'en matière de meubles corporels le propriétaire perd sa revendication devant un possesseur de bonne foi. Cette revendication réapparaît en cas de perte ou de vol (art. 658 al. 2) bien que sous forme mitigée, car dans cette hypothèse, le propriétaire de la chose peut la revendiquer dans les 3 ans à compter de la perte ou du vol (art. 658 al.2 CCLIII). Selon Jean CARBONNIER, la maxime peut et doit suivant les cas, être comprise de deux manières. La maxime veut d'abord dire que lorsqu'une personne a acquis un meuble d'un non propriétaire, elle en devient elle-même propriétaire, si elle a reçu la possession de bonne foi. C'est la fonction acquisitive de la maxime. La maxime veut dire en second lieu et secondairement, que la possession fait présumer jusqu'à preuve contraire une acquisition régulière de propriété en la personne du possesseur. C'est la fonction probatoire de la maxime123(*).

b) Conditions d'application de la règle de l'art. 658

Pour que la présomption de l'art. 658 puise jouer il faut que certaines conditions soient réunies :

- La possession doit porter sur une chose mobilière qui n'a été ni volée ni perdue.

- La possession doit être sans vices et effective

- La possession doit être de bonne foi124(*)

Il ne sera que question de survol car l'analyse approfondie déborderait le cadre de la présente étude.

Par contre, l'art. 658CCLIII ne s'applique qu'aux meubles corporels qui s'acquièrent sans vérification, qui circulent facilement et sans écritures, par simple remise de la main à la main. Il s'applique également aux titres au porteur bien qu'incorporels, aux billets de banque, etc.125(*) Échappent à cette règle les meubles incorporels (sauf exceptions indiquées), les universalités juridiques, les objets incorporés dans un immeuble et les meubles corporels faisant partie du domaine public126(*).

En ce qui concerne la possession, celle-ci suppose que celui qui invoque le bénéfice de l'art. 658 ait une maîtrise effective de la chose et qu'il se comporte comme s'il était le propriétaire. Encore faut-il qu'il ait toutes les apparences du droit ; que le possesseur ait fondé sa maîtrise d'une façon honnête ; qu'il n'ait rien à se reprocher. En outre, la possession doit être exempte de vices c'est-à-dire la discontinuité, violence, clandestinité, équivoque127(*)

Quant à la bonne foi, celui-ci est la conviction d'avoir bien agi. En matière de possession, cette conviction se ramène à croire qu'on tient la chose du véritable propriétaire. Comme le débiteur est généralement propriétaire du matériel, de l'outillage et des matières premières, la bonne foi consistera dans l'ignorance légitime dans le chef de l'acquéreur des droits du titulaire du privilège sur le fonds de commerce. Un doute sur les droits du cédant, toute circonstance de nature à éveiller les soupçons excluent la bonne foi. Celle-ci est toujours présumée quitte à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver (art. 650 CCL III). Elle doit exister au moment de l'acquisition et non au jour de la revendication (art. 651 CCL III).

c) Personnes protégées par l'art. 658 CCLIII
L'article 658 CCLIII protège l'acquéreur d'un meuble, le titulaire d'un droit réel restreint dans les limites de ses droits et au détenteur mais seulement à la faveur de la présomption qu'il est possesseur128(*).

Ledit article protège également le sous-acquéreur de mauvaise foi car il n'est pas, à proprement parler, de mauvaise foi au regard de l'art. 658CCLIII. La bonne foi dans le système de cet article, consiste à n'avoir aucun doute, aucune suspicion, non point sur les origines lointaines, mais sur l'origine immédiate du droit transmis c'est-à-dire le droit de propriété du cédant, et de nul autre. Or, le cédant était devenu propriétaire puisqu'il remplissait les conditions posées par l'art. 658CCLIII.

B. Créancier gagiste du fonds de commerce contre le bailleur de l'immeuble où est exploité le fonds de commerce

Aux premières vues, on s'imagine mal le cas dans lequel le créancier gagiste serait amené à s'affronter au bailleur de l'immeuble. Pourtant, comme nous avons eu l'occasion de le souligner, le droit au bail constitue un élément très important du fonds de commerce qu'il importe pour les créanciers de protéger sous peine de voir le gage disparaître. En cas de non payement du loyer, le bailleur peut poursuivre la résiliation soit judiciaire soit amiable. Le droit rwandais ne disposant pas d'une législation sur le bail commercial, recours est fait à la législation étrangère en la matière.

C'est ainsi que l'art. 14 de la loi française du 17 Mars 1959 dispose que le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscription doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits au domicile élu par eux dans leurs inscriptions. De l'autre côté, la résiliation amiable du bail ne devient définitive, qu'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus (al. 2 de l'art. 14). Cette procédure a pour but de permettre aux créanciers de désintéresser éventuellement le bailleur et de sauvegarder ainsi le droit au bail qui constitue une partie essentielle de leur gage129(*).

Si la résiliation judiciaire intervenait sans notification préalable, les créanciers inscrits seraient recevables à demander des dommages et intérêts au propriétaire devant le tribunal civil à raison du préjudice qu'il leur a causé130(*). Quant à la résiliation volontaire elle ne peut jamais être opposable aux créanciers, car elle ne devient définitive qu'un mois après la notification131(*).

C. Créancier contre le cessionnaire à titre de garantie

Les affrontements entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le cessionnaire à titre de garantie naissent de l'idée d'extension du gage du fonds de commerce aux créances, valeurs et espèces alors que celles-ci constituent l'assiette même de la cession à titre de garantie par voie d'endossement (en propriété ou pignoratif) des factures notamment ou par voie d'escompte ou d'endossement des effets132(*).

En effet, un débat houleux s'est toujours tenu entre différents auteurs au point de savoir si les créances, valeurs et espèces sont incluses dans le gage du fonds de commerce. La réponse a été donnée par la cour de cassation belge dans son arrêt du 6 Nov. 1970133(*) dont l'un des motifs est libellé comme suit :«Attendu que, si les créances, valeurs et espèces ne font généralement pas partie du fonds de commerce, les opérations juridiques portant sur le fonds de commerce peuvent y inclure ces éléments au moyen d'une clause spéciale ». Un peu plus tard, en 1986, la même cour décide que l'inclusion des créances dans le gage est opposable aux tiers même en l'absence de mention dans le bordereau d'inscription134(*).

Ces deux décisions ont été vivement critiquées par T'KINT qui estime que l'inclusion conventionnelle des créances dans le gage doit être portée à la connaissance des tiers tout comme d'ailleurs celle des marchandises135(*). MOREAU MARGREVE quant à elle s'attaque à l'inclusion conventionnelle des créances, valeurs et espèces dans le gage, car elle méconnaît la loi du concours et de ce fait, préjudicie les droits des tiers. Elle estime en outre, qu'elle méconnaît la règle "pas de privilège sans texte", car il n'est pas au pouvoir des particuliers d'étendre l'assiette d'une sûreté à des biens autres que ceux que le législateur permet aux parties contractantes de soumettre au gage136(*).

Une autre critique a été émise par FONTAINE qui estime que cet arrêt ne se justifie pas parce que les créances, valeurs et espèces font, par principe, partie du fonds de commerce, au motif qu'il s'agit non du résultat de l'exploitation mais des facteurs indispensables de productivité de l'entreprise137(*). Cependant, si critiquée soit-elle, la décision est consacrée par la grande partie de la jurisprudence et de la doctrine.

Le concours entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le cessionnaire à titre de garantie résulte des nécessités d'exploitation. En effet, il arrive que pour les nécessités d'exploitation, le débiteur cède certains éléments de l'actif, notamment des créances, pour l'obtention du crédit. Cette cession devrait normalement être compatible avec l'existence du gage. Ce dernier soumet le débiteur à l'obligation de ne pas amoindrir le fonds au préjudice du créancier. Ainsi, est-il interdit au créancier de céder une créance sans contrepartie.

C'est pour cela que la cession de créance à titre de garantie a suscité des inquiétudes lorsqu'elle intervient postérieurement au gage du fonds de commerce. On a estimé que la cession « sort » la créance cédée du patrimoine du débiteur et la soustrait à l'emprise de ses autres créanciers. En outre, elle aboutit à créer par une voie détournée, une sûreté réelle renforcée et ce, au mépris de la règle «pas de sûretés sans textes »138(*). Bien plus, la cession de créance à titre de garantie permet aux parties de réaliser indirectement un gage en éludant, par le recours à un artifice, l'interdiction de la clause commissoire. La créance cédée est bel et bien attribuée au créancier à défaut de paiement de la dette par le cédant139(*). Ce faisant, et c'est le but recherché, les parties parviennent à soumettre leur convention aux règles de la cession de créance et non à celles du gage.

Dans le cas où le créancier gagiste du fonds de commerce estimerait que la cession de créance à titre de garantie envisagée par le débiteur a pour effet d'amoindrir la valeur du fonds, il lui est loisible de mettre en cause la cession et d'en contester le principe140(*). Il en est de même lorsque l'interdiction de cession résulte expressément du contrat lequel fait défense au débiteur de céder ses créances sans l'accord du créancier gagiste du fonds de commerce. La cession pourrait alors être contestée, sur le seul fondement du contrat de gage par le créancier. Dans ce dernier cas, comme dans le précédent, le créancier doit apporter la preuve de la connaissance, par le tiers, de l'interdiction ce qui constitue pour lui un obstacle sérieux. Pour éviter ces difficultés le créancier gagiste du fonds de commerce devrait donc réagir à temps c'est-à-dire au moment où le cession est envisagée. Toutefois, celle-ci n'étant soumise à aucune publicité il lui est difficile de s'en rendre compte à moins qu'il ne se soit réservée par contrat, le droit de regard sur le patrimoine de son débiteur.

D. Recours du créancier gagiste en cas de perte du fonds grevé

Lorsque le fonds de commerce vient à disparaître par cas fortuit le privilège du créancier gagiste disparaît par voie de conséquence. Mais le privilège subsiste sur les éléments qui survivent à sa disparition141(*).

Il est également admis que la subrogation réelle joue en faveur du créancier au cas où l'incendie viendrait à détruire une partie des éléments du fonds. Son privilège sera reporté sur des indemnités d'assurance. Le créancier n'a le droit qu'à l'indemnité correspondant au matériel puisqu'il n'a pas droit sur les marchandises142(*) à moins que celles-ci aient été incluses dans le gage par une clause expresse en concurrence de 50% (art. 2 al. 2 Décret de 1937).

Enfin, lorsque l'immeuble dans lequel le fonds est exploité vient à être exproprié pour cause d'intérêt public ce qui a pour effet de porter atteinte au droit au bail et par voie de conséquence à la disparition du fonds, le privilège du créancier nanti s'exerce sur l'indemnité accordée au propriétaire pour la perte du droit au bail143(*).

E. Créancier gagiste du fonds de commerce face aux tiers dont les biens sont compris dans le gage

Il arrive que lors du nantissement ou même depuis le nantissement les biens du tiers se soient introduits dans le fonds de commerce sans que leur propriétaire ait avisé le créancier nanti. Par exemple un tiers dépose un frigo chez le débiteur gagiste ou ce dernier emprunte quelques caisses d'emballage de primus144(*) chez son voisin à l'insu du créancier gagiste. L'on se demande si ceux-ci sont compris dans le gage (lors de la réalisation par exemple).

En l'espèce, l'on enseigne que le nantissement comprend tout le matériel et le mobilier commercial servant à l'exploitation alors même qu'ils appartiennent à des tiers si le créancier nanti a ignoré le droit de ces derniers, soit que ces objets fussent déjà dans le fonds, soit qu'ils y aient été introduits depuis le nantissement sans que leur propriétaire ait avisé le créancier nanti145(*). En principe, le mobilier et l'outillage ne sont compris dans le fonds grevé que s'ils sont la propriété du titulaire du fonds146(*)mais dès que le créancier n'a pas été averti de leur introduction dans le fonds de commerce, ils sont présumés être sa propriété.

Cette solution est à notre avis sage et protège le créancier contre les manoeuvres dont le débiteur pourrait se rendre coupable en attribuant la propriété de certains objets à un tiers pour éviter leur saisie. La situation du débiteur gagiste est calquée sur celle du bailleur d'un immeuble relativement aux choses appartenant à autrui que le locataire a introduit dans l'immeuble. Le grèvement de l'ensemble des biens découragerait également les pratiques devenues monnaie courante de déguiser les contrats de vente sous forme d'une location.

Par ailleurs, un doute se laisse planer quant au grèvement du matériel ou du mobilier que le débiteur détient en vertu du contrat de location- vente ou leasing mobilier. La complexité de cette situation résulte du fait que le contrat de leasing mobilier papote entre deux contrats à savoir le contrat de vente avec réserve de propriété et le contrat de bail. Dans ce cas, il faudra apprécier dans chaque espèce pour déceler l'intention des parties. Généralement on distingue deux hypothèses : Si on admet que ce contrat est bien un bail et non une vente avec clause de réserve de propriété, le créancier gagiste du fonds de commerce ne pourra prétendre que le fonds de commerce contient la créance d'utilisation de ce matériel. Au contraire, si le matériel a été acheté à crédit par le commerçant et même si le contrat de vente contient une clause de réserve de propriété, le créancier gagiste du fonds de commerce peut prétendre son droit sur le matériel acheté147(*).

Cette solution se justifie par le fait que la vente a entraîné un appauvrissement du débiteur que la clause de réserve de propriété risque de ne pas combler notamment lorsque celle-ci vient à expirer (voir l'art. 335 CCLIII). Rappelons, pour être complet, que l'art. 110 du Décret sur les faillites rend inopposable au curateur de la faillite de l'acheteur, la clause réservant au vendeur la propriété de la chose vendue pendant un certain délai ou jusqu'à l'accomplissement de certaines conditions148(*).

Dans le cas de leasing mobilier, seuls les clauses du contrat permettront d'apprécier si tel est une location ou tel autre est une vente pour enfin l'inclure ou non dans le nantissement.

Section 2 : Du concours des créanciers gagistes avec les autres créanciers titulaires des droits réels sur le bien nanti.

Le créancier gagiste du fonds de commerce n'est pas le seul créancier à prétendre un droit sur le patrimoine du débiteur, d'ailleurs, comme nous avons eu l'occasion de le souligner, le débiteur peut même, après le gage, grever le fonds ou certains de ses éléments en faveur des autres créanciers. Lors de la réalisation du gage, le créancier entre en concours avec ces créanciers. Il est alors impératif d'examiner d'abord les notions de concours et de rang (section première) pour ensuite examiner les conflits de rang entre différents créanciers avec le créancier gagiste du fonds de commerce (deuxième section)

§1. Notion de concours et de rang

A. Concours

Jean RENAULD et Pierre COPPENS définissent le concours comme étant une situation dans laquelle les droits de recours accessoires des créanciers acquièrent la vertu de s'opposer, soit entre eux, soit à d'autres droits susceptibles de leur préjudicier149(*). Une autre définition plus ou moins large et plus précise a été donnée par L. VINCENT qui définit le concours comme la rencontre due à l'initiative des créanciers ou à la volonté du législateur des prétentions contradictoires des créanciers sur un ou plusieurs biens du débiteur dont celui-ci a perdu la libre disposition150(*). De ces deux définitions se dégagent les causes du concours et ses effets.

1° Causes du concours

Selon RENAULD et COPPENS pour que surgisse la situation de concours il ne suffit pas qu'une personne ait contracté des dettes en quantité supérieure à la valeur des biens dont elle dispose. La preuve en est que l'insolvabilité du débiteur n'empêche point la compensation, n'invalide point, en principe les paiements qu'obtiendraient encore certains créanciers et ne suffit à elle seule de tenir en échec les recours du vendeur impayé151(*).

De ce que l'insolvabilité du débiteur ne crée point par elle-même le concours, ressort que cet état ne l'empêche point de disposer licitement des biens qui lui restent encore, d'effectuer les paiements, de contracter même les engagements nouveaux, le tout sauf fraude. Le concours est soumis à une condition matérielle, l'insuffisance de biens du débiteur au regard de son passif, mais aussi à une condition formelle, la cristallisation des droits de recours de ses créanciers sur tout ou partie de ses biens152(*). Cette cristallisation consiste précisément dans le déclenchement de la procédure de réalisation de tout ou partie du patrimoine du débiteur, soit sur l'initiative des créanciers en cas de saisie-exécution, soit à l'effet de la loi «concours légal » ou «concours de plein droit » en cas de faillite et la procédure d'obtention du concordat préventif153(*).

Enfin, soulignons que le concours suppose nécessairement plus d'un créancier. La saisie d'un ou de plusieurs biens du débiteur est à l'origine d'un concours dès qu'un autre créancier entend faire valoir ses droits sur ces mêmes biens ou sur le prix de leur réalisation en s'associant à la procédure qui devient, dès lors collective. Ce concours est limité quant aux biens et aux personnes ; il a pour assiette les seuls biens saisis et n'oppose entre eux que les droits des créanciers poursuivants154(*).

2° Effets du concours

En cas de saisie, le concours ne concerne que les biens saisis. La répartition égalitaire n'est imposée et organisée que pour ces biens. En revanche, en cas de faillite, le concours englobe la totalité du patrimoine saisissable du débiteur.

De même le concours est imposé, selon le cas, à un nombre plus ou moins élevé de créanciers. Lorsque l'un d'eux a saisi les biens de son débiteur, seuls les créanciers saisissants et les créanciers qui se sont joints à lui, en formant opposition à la répartition du prix des biens saisis, sont en concours et c'est entre eux seuls que sera distribué selon le principe d'égalité le produit de réalisation des biens saisis. Au contraire, en cas de faillite le concours étend ses effets à tous les créanciers155(*).

Enfin, le concours conduit à la distribution par contribution du produit de réalisation des biens qui en sont l'assiette. La distribution par contribution n'exclut pas les privilèges de certains créanciers d'où il faut examiner la question de rang des privilèges

B. Rang de privilège

La notion de concours est inséparable de celle de rang. Lorsque les créanciers sont en concours, il faut nécessairement déterminer qui passe avant l'autre et sur quoi il passe avant.

Les privilèges, sûretés réelles résultant de la volonté du législateur en raison de la qualité de la créance, sont devenus actuellement très nombreux au point qu'on a du mal à en régler le rang. Au Rwanda, ils sont régis par l'ordonnance du gouverneur général du 22 janvier 1896 portant créances privilégiées. Mais différents textes disparates récemment élaborés n'ont cessé d'en augmenter le nombre au point qu'ils manquent une théorie d'ensemble. Cette multiplication de privilèges pousse à se poser la question de savoir ce qui demeure du principe d'égalité des créanciers. Ce droit est d'autant battu en brèche que MOREAU MARGREVE en est venu même à parler de l'immolation du créancier chirographaire156(*).

En conclusion, la question du rang des privilèges revient donc à déterminer dans quel ordre des titulaires des privilèges sont payés lorsqu'ils s'opposent et dans la mesure où ils s'opposent sur les mêmes biens157(*). Elle sert à départager les créanciers munis de privilèges ou hypothécaire qui s'affrontent sur un même bien du débiteur dont la valeur n'est pas suffisante pour les satisfaire tous.

§2. Les conflits de rangs entre le créancier gagiste et les tiers créanciers

Le caractère hétéroclite de l'assiette du gage du fonds de commerce suscite un certain nombre de conflits qui opposent le créancier gagiste du fonds de commerce et d'autres créanciers prétendant un droit de préférence concurrent sur tout ou partie des biens entrant dans l'assiette du gage du fonds de commerce. L'insuffisance ou l'inexistence des textes légaux en la matière donnent droit à la jurisprudence de faire une oeuvre normative dans ce domaine. La charge étant rarement simple, les juges sont amenés soit à raisonner par analogie, soit à utiliser des dispositions qui n'ont pas en vue le conflit en cause158(*).

L'analyse de tous les concours des sûretés dépassant le cadre de la présente étude et nombreuses études ayant été consacrées à ce problème159(*), nous nous bornerons à l'approche des conflits les plus fréquents dans la pratique commerciale.

A. Conflit entre les créanciers gagistes du fonds de commerce

Aux termes de l'art. 6 du décret de 1937 «le rang des gages sur fonds de commerce se détermine d'après l'ordre d'inscription ». Cette solution vaut aussi dans toutes les hypothèses où les sûretés en conflit sont toutes soumises à une publicité. C'est l'application de la règle « prior tempore, potior jure ». Ainsi, si les gages étaient inscrits le même jour, les créanciers exercent en concurrence, un gage de la même date sans distinction entre l'inscription du matin et celle du soir quand bien même cette différence serait marquée par le fonctionnaire chargé du service des inscriptions (art. 6 al. 2 du décret de 1937).

Dans certains cas, une opinion a été émise selon laquelle dans cette dernière hypothèse le conflit devrait se régler par le numéro d'ordre. Nous estimons cependant que la position du législateur rwandais est équitable, car rien ne justifierait sur le plan de l'équité la préférence de l'un ou l'autre des créanciers inscrits le même jour d'autant plus que le décret de 1937 n'impose pas la mention d'heure à laquelle elles sont prises.

Toutefois, l'art. 7 du décret de 1937, donne au juge- président de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali, le pouvoir d'ordonner, après la liquidation, la convocation des créanciers qui se seront fait connaître, afin de conclure entre eux un arrangement sur la distribution du prix. Dans ce cas, nous pensons que seule la convention de cession d'antériorité leur permettrait d'intervertir l'ordre d'inscription.

B. Conflit du créancier gagiste du fonds de commerce et les créanciers chirographaires saisissants

Le débiteur gagiste n'a plus que le créancier gagiste. Il peut avoir d'autres créanciers fussent-ils chirographaires. La constitution du gage du fonds de commerce n'a pas pour effet de priver lesdits créanciers du droit de saisir-exécuter les éléments du fonds auxquels cette voie d'exécution s'applique160(*). Néanmoins, lorsque les créanciers chirographaires ont fait usage à leur droit de saisie, le droit du créancier gagiste du fonds de commerce se rapporte sur les deniers provenant de la vente161(*).

Dans un cas d'espèce, l'art. 9 de la loi belge du 25 octobre 1919 portant vente et nantissement du fonds de commerce protège le créancier gagiste du fonds de commerce en cas de saisie-exécution pratiquée sur tout ou partie des actifs qui composent le fonds, par un autre créancier. Cet article lui reconnaît le droit de former opposition entre les mains de l'huissier instrumentant. Selon T'KINT, cette règle contraint l'huissier par voie de conséquence à vérifier chaque fois si les fonds dont les éléments ont été saisis n'est pas grevé d'un gage et dans l'affirmative à prendre en compte la sûreté lorsqu'il s'agira de répartir le produit de la vente162(*). Lorsque les deniers ont été distribués aux créanciers saisissants au mépris du privilège du créancier gagiste, celui-ci garde une action en dommages et intérêts contre l'huissier qui a procédé à cette répartition sans avoir vérifié au greffe si le fonds est libre de tout droit de gage et sans avoir prévenu le créancier gagiste163(*). Le créancier ne peut pas réclamer des saisissants la restitution des sommes reçues.

C. Concours avec le créancier hypothécaire

Ni le décret hypothécaire, ni celui sur la mise en gage du fonds de commerce ne donnent aucune indication à cet égard. Le conflit entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le créancier hypothécaire ne peut surgir que quand le débiteur gagiste est en même temps propriétaire de l'immeuble dans lequel est exploité le fonds. En effet, il faut envisager un cas où une hypothèque grève le mobilier et l'outillage immobilisé par destination. Or, pour qu'il en soit ainsi, il faut que le propriétaire des meubles soit aussi propriétaire de l'immeuble par nature (art. 8 du CCL II).

Le conflit entre ces deux créanciers semble se résoudre assez aisément, car les deux sûretés sont soumises à une publicité. Dès lors il suffit d'appliquer la règle de l'antériorité de droits « prior tempore, potior jure ». L'application de cette règle suppose que soit admise l'inclusion des immeubles par destination dans l'assiette du gage du fonds de commerce164(*), question qui a fait longtemps problème165(*).

A ce propos, Jacques HEENEN dans sa note sous Liège 4 juin 1963166(*) a exposé 4 thèses qui s'affrontent. Selon la première thèse, le matériel n'est jamais compris dans le gage lorsque le fonds de commerce est exploité dans un immeuble appartenant au commerçant. Le motif à l'appui de cette thèse est que les art. 8 et 9 de la loi belge du 17 Mars 1909 (équivalent à notre art. 2 du Décret de 1937), en disposant que le mobilier commercial et l'outillage servant à l'exploitation du fonds sont susceptibles d'être compris dans le nantissement n'ont pas modifié le caractère du contrat de gage en ce que celui-ci ne peut avoir pour objet que les choses mobilières.

- La deuxième thèse se résume de la manière suivante : L'inscription du gage fait cesser ou empêche l'immobilisation par destination du matériel.

- La troisième thèse : Le matériel affecté à l'exploitation après l'inscription du gage est grevé en premier rang par celui-ci et ensuite par l'hypothèque.

- La quatrième thèse admet le concours entre le créancier hypothécaire et le créancier gagiste sur le matériel, quel que soit le moment de l'affectation. C'est cette thèse qui a été adoptée par plusieurs auteurs et jurisprudence167(*). Selon cette thèse le matériel affecté à l'exploitation par le propriétaire de l'immeuble peut être grevé du gage sur le fonds de commerce tout en restant un immeuble par destination. Si une hypothèque a en outre été consentie, le concours entre les deux sûretés se règle par la date de l'inscription de chacune d'elles : le premier inscrit aura la préférence, quel que soit le moment de l'affectation au service du fonds168(*).

Le droit Rwandais semble avoir consacré implicitement cette thèse. En effet, l'art. 24 du décret hypothécaire étend l'hypothèque aux immeubles par destination. Par contre, selon l'art. 2 du décret de 1937 le gage comprend notamment le mobilier et l'outillage. De l'analyse de ces deux dispositions on en conclut d'une part, que le mobilier et l'outillage peuvent faire l'objet d'hypothèque s'ils sont immobilisés par destination et d'autre part qu'ils peuvent faire l'objet du gage du fonds de commerce et le conflit entre le créancier hypothécaire et le créancier gagiste du fonds de commerce se règle par antériorité de droits.

D. Concours avec le porteur du warrant des marchandises et le créancier gagiste ordinaire

Le conflit entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le porteur du warrant surgit lorsque le débiteur, ayant grevé le fonds de commerce de gage, consent un warrant sur les marchandises faisant partie du fonds déjà grevé. Or, comme il est de règle, les conflits entres les sûretés conventionnelles soumise à l'inscription se résout par la règle d'antériorité.

C'est cette solution qui a été consacrée par la cour de cassation belge dans son arrêt du 19 Nov. 1992 dans une affaire qui opposait l'INCA (l'Institut National du Crédit Agricole), porteur du warrant en concurrence de 50% des marchandises à SONAGES s.a et la Caisse Nationale de Crédit professionnel, toutes deux créanciers gagistes du fonds de commerce constitué par la société Maes s.a qui, dans la suite est tombée en faillite.

En l'espèce, l'INCA soutenait que les biens warrantés avaient cessé de faire partie de l'assiette du gage sur le fonds de commerce, qu'il n'y avait donc pas de concours entre lui et les deux autres protagonistes, car en tant que porteur du warrant son privilège s'exerçait sur les biens qui ne formaient plus l'assiette du privilège de ses protagonistes (créanciers gagistes du fonds de commerce).

Face à cette question, la cour de cassation énonce comme principe que la mise en gage n'enlève pas à l'exploitant du fonds de commerce la possession à titre de propriétaire des marchandises warrantées, et que ces marchandises continuent à faire partie du fonds de commerce du débiteur gagiste. L'une de ses motivations est libellée comme suit :

[...] « Attendu que le warrantage de biens faisant partie d'un fonds de commerce gagé n'a pas pour effet de modifier l'assiette du gage du fonds de commerce et partant, de contraindre le créancier à user des droits que lui confère l'art. 11 de la loi du 24 Oct. 1919 » 169(*)[...]

On déduit de ce jugement que même si le créancier conserve le pouvoir de disposer des biens isolés du fonds de commerce, et de les mettre en gage, le privilège procédant d'un engagement ultérieur d'un bien faisant partie du fonds nanti précédemment ne préjudicie en rien des rangs respectifs qu'il conviendra d'attribuer, le cas échéant aux privilèges en question. Le warrantage du fonds de commerce n'a pas pour effet de le faire échapper aux privilèges des créanciers antérieurs. En d'autres termes, les biens warrantés continuent de faire partie de l'assiette du gage du fonds de commerce et le conflit entre le créancier gagiste et le porteur du warrant des mêmes biens se règle par la règle d'antériorité des droits.

Section 3 : La situation du créancier gagiste en cas de faillite du débiteur

Les développements qui ont précédé ont été consacrés aux rapports normaux du créancier gagiste du fonds de commerce et les autres créanciers, mais sa situation en cas de faillite de son débiteur mérite une attention particulière du fait de la particularité de cette institution, sa finalité et ses effets. Au premier plan nous examinerons la situation du créancier gagiste dans le règlement de la faillite (par. 1) et nous verrons ensuite les droits dont il dispose contre la masse et contre le curateur (par. 2)

§1. Le créancier gagiste du fonds de commerce dans le règlement de la faillite

Avant d'examiner la position du créancier gagiste par rapport aux autres créanciers, jetons d'abord la lumière sur la notion de la faillite, sa finalité et ses effets.

A. Notion sur la faillite, sa finalité et ses effets

1° Notions

L'activité du commerçant n'est pas toujours caractérisée par les moments de bonheur. Il arrive qu'une entreprise qu'elle soit individuelle ou sociétaire rencontre de sérieux problèmes de trésorerie et qu'elle ne soit plus à mesure de régler ses dettes. Cette situation ne préoccupe pas le seul commerçant, elle l'est aussi pour toutes les personnes avec lesquelles il traite. Celles-ci, qui sont en grande partie commerçants ou banquiers, ont besoin de recouvrer leurs créances pour qu'elles puissent régler à leur tour leurs dettes. Il est dès lors évident que si on ne vient pas au secours du commerçant débiteur en difficultés, cette situation entraînerait des défaillances en chaîne ce qui aurait des conséquences graves même sur l'économie nationale toute entière.

Selon GRESSE, "la notion d'entreprise en difficultés est vaste ; elle va de la situation financière difficile à la faillite. Le processus de la défaillance est progressif et comporte le plus souvent 3 niveaux : la défaillance économique, la défaillance financière et enfin la défaillance juridique"170(*). La défaillance économique peut être définie par les pertes économiques que subit l'entreprise ; elle n'est plus rentable et donc ne contribue pas positivement à l'économie nationale. La défaillance financière quant à elle se traduit par l'impossibilité de l'entreprise de faire face à son passif. L'entreprise ne trouve plus de solution pour gérer sa dette, et cela se traduit par les incidents de paiement. Enfin, la défaillance juridique qui est la sanction légale de la défaillance financière : la justice constate alors la faillite171(*).

La faillite est donc le résultat de tout un processus et constitue une procédure collective de liquidation qui est à l'origine d'un concours des créanciers172(*). Elle tend à suppléer aux lacunes d'une institution de droit commun, la déconfiture, à laquelle la législation rwandaise ne fait pas allusion et qui crée un système anti-égalitaire et où le paiement devient le prix de la course en vertu de l'adage «ius vigilantibus scriptur » ; la loi du plus attentif173(*).

Au Rwanda, les faillites sont réglées par le Décret du 27 juillet 1934 portant faillites174(*)duquel se dégagent les conditions pour être déclaré en faillite. Selon l'article 2 dudit décret il faut qu'on soit commerçant, qu'on soit en cessation de paiement et avoir son crédit ébranlé. Une fois que ces conditions de fonds sont remplies, la faillite est déclarée par un jugement de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali au greffe de laquelle l'aveu doit être fait, soit sur l'aveu, soit à la requête d'un créancier, soit encore à la requête du Ministère Public (art. 4 du Décret de 1934)175(*).

2° Finalité de l'institution de faillite

La défaillance du débiteur, avons-nous dit, a pour effet de priver ses créanciers des ressources sur lesquelles ils comptaient pour régler à leur tour leurs dettes. Par conséquent, il faut que ce risque de provoquer des défaillances en cascade et qui a une incidence directe sur l'économie nationale soit endigué avant qu'il ne produise ses effets.

Aussi, l'institution de la faillite s'explique-t-elle par la nécessité particulièrement contraignante dans les domaines commercial et industriel où l'activité repose sur le crédit, de maintenir intact le gage commun des créanciers et d'éviter, par l'organisation minutieuse d'une procédure collective de liquidation, des poursuites anarchiques176(*).

Enfin, par le mécanisme des inopposabilités de la période suspecte, le législateur permet au curateur de réintégrer dans le patrimoine du débiteur les biens qui en auraient été soustraits et permet de corriger les inégalités antérieurs à la naissance du concours. L'institution de la faillite assure donc efficacement et en temps utile le concours de l'ensemble des créanciers sur tout le patrimoine du débiteur177(*).

3° Effets de la faillite

Une fois le jugement déclaratif de la faillite est prononcé il produit un certain nombre d'effets dont les principaux sont le dessaisissement du débiteur et l'inopposabilité des actes accomplis pendant la période suspecte.

a) Dessaisissement du débiteur

Aux termes de l'art. 6 du Décret sur les faillites, le failli, à compter du jugement déclaratif de la faillite178(*) est dessaisi de plein droit de l'administration de ses biens, même ceux qui peuvent lui échoir tant qu'il est en état de faillite. Tous paiements, opérations et actes faits par le failli et tous paiements faits au failli, en violation du dessaisissement dont celui-ci est frappé sont nuls de plein droit (art. 6 al. 2).

Néanmoins, le dessaisissement ne crée pas une incapacité du failli. Celui-ci peut exercer une activité nouvelle sans autorisation ou habilitation (art. 6 al. 1 du décret sur les faillites). Le dessaisissement dont il est question a pour effet de rendre inopposables à la masse des actes par lesquels il disposerait de son patrimoine ou l'engagerait.

En outre, le dessaisissement a pour effet la nomination d'un où plusieurs curateurs chargés de gérer les affaires de la faillite (art. 5, 1 du décret précitée). Celui-ci agit sous la haute surveillance du juge de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de Province ou de la Ville de Kigali (art. 15 du même décret). Le failli ne peut plus disposer de son patrimoine. Tout paiement est fait entre les mains du curateur et seul celui-ci a qualité pour agir en son nom (art. 12 du même décret).

b) Inopposabilité des actes accomplis pendant la période suspecte

La faillite, avons-nous dit, est l'aboutissement d'un long processus. Elle est précédée d'une longue période au cours de laquelle le débiteur essaie de sortir d'une situation financière désagréable. Au cours de cette situation, le danger guète les créanciers car certains d'entre eux peuvent être avantagés par le débiteur au préjudice des autres, contrevenant ainsi à la règle de l'égalité des créanciers. En outre, le débiteur peut se rendre coupable de certains actes tendant à soustraire les biens au curateur dès qu'il entend la faillite proche. C'est pour ces différentes raisons que le législateur institue une période avant la déclaration de la faillite au cours de laquelle les actes du débiteur seraient inopposables aux créanciers.

Ainsi, le début de cette période se détermine par rapport à la date de cessation de paiement. Elle ne peut être reportée de plus de 6 mois antérieurs au jugement déclaratif de la faillite (art. 5 al. 2 du décret sur les faillites). Au cours de cette période, certains actes déterminés peuvent être déclarés inopposables à la masse. Certains sont frappés d'inopposabilité de droit, les autres d'inopposabilités facultatives179(*).

Sont frappés d'inopposabilités de droit, les libéralités et les actes lésionnaires (art. 7, 1°, 2°) les paiements anormaux : paiement avant terme et les modes anormaux de paiement (art. 7, 3°, 4°), les sûretés réelles constituées en garanties des dettes antérieures (art. 7, 5°, 8). L'inopposabilité facultative quant à elle frappe les actes pour lesquels le curateur apporte la preuve que le cocontractant du futur failli connaissait l'état de cessation de ses paiements. C'est ainsi que l'art. 9 du décret sur les faillites permet au juge de déclarer inopposable à la masse des créanciers « tous autres actes faits par le débiteur après la cessation de ses paiements si ceux qui ont reçu de lui ou qui ont traité avec lui ont eu connaissance de la cessation de paiement.

Enfin, le décret sur les faillites rend inopposable toutes autres constitutions d'hypothèque faites par le débiteur si l'inscription a été prise depuis la cessation de paiement et s'il s'est écoulé plus d'un mois entre la date de l'acte constitutif et celle de l'inscription ou si, de la part de celui qui a traité avec le constituant, le contrat s'est fait avec connaissance de la cessation de paiement (art. 8 du décret sur les faillites).

B. La position du créancier gagiste du fonds de commerce par rapport aux autres créanciers du failli

L'une des raisons d'être de l'institution de la faillite, avons-nous souligné, est d'éviter des recours anarchiques des créanciers. C'est pour cela que dès le jugement déclaratif de la faillite, les créanciers n'ont plus le pouvoir d'exercer les poursuites individuelles contre le débiteur. Ils sont regroupés au sein de la masse représentée par le curateur. En outre, un comité composé de 3 membres choisis parmi les créanciers chirographaires établi au siège du de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de Province ou de la Ville de Kigali est désigné par le juge dans les quinze jours de la déclaration de la faillite (art. 20 du décret sur les faillites). Le comité a pour mission d'assister le curateur et de suivre les opérations de la faillite. Son caractère est purement consultatif (art. 22).

Toutefois, la masse n'incorpore que les créanciers sans sûretés. Elle comprend également les créanciers qui ne disposent sur le patrimoine du failli que d'un privilège général. Ceux-ci sont considérés comme créanciers chirographaires bénéficiant d'un droit de préférence aux autres180(*). Les créanciers qui jouissent d'un privilège spécial mobilier ou ceux qui jouissent d'un droit de gage ne sont inscrits dans la masse que pour mémoire (art. 107 décret sur les faillites). Soulignons qu'ils peuvent tomber dans la masse si le montant du prix de réalisation est moindre que leur créance, l'excédent tombera dans la masse comme créance chirographaire (art. 109 décret sur les faillites).

De ce qui précède, il ressort que le créancier gagiste du fond de commerce ne fait pas partie de la masse des créanciers du fait du caractère spéciale de son privilège. Delà, on se demande s'il n'est pas réaliste de dire que la suspension des poursuites individuelles contre le débiteur ne s'impose qu'aux seuls créanciers chirographaires et les créanciers titulaires du privilège général, les créanciers bénéficiant d'une sûreté spéciale pouvant poursuivre l'exécution de leurs créances malgré la faillite. Cette question nous ramène aux droits dont le créancier gagiste du fonds de commerce dispose contre la masse et contre le débiteur et fera l'objet du paragraphe suivant.

§2. Les droits du créancier gagistes contre la masse et contre le curateur

Dans le paragraphe précédent, nous venons de voir que le créancier gagiste du fond de commerce ne fait pas partie de la masse du fait du caractère spécial de son privilège. Dans le présent paragraphe nous discuterons les droits dont le créancier gagiste dispose contre la masse et ses rapports avec le curateur

A. les droits du créancier gagiste du fonds de commerce contre la masse

Parler des droits du créancier gagiste du fonds de commerce revient à concilier deux idées diamétralement opposées : d'une part, la finalité de l'institution de la faillite d'éviter les poursuites anarchiques des créanciers et d'autre part, le caractère spécial du privilège du créancier gagiste du fonds de commerce qui le met à l'écart de la masse. Ainsi, la question qui se pose est celle de savoir si malgré la finalité de l'institution de la faillite, le créancier gagiste peut poursuivre la réalisation du fonds de commerce du failli en ignorant les droits de la masse.

A cette question, le code civil relativement au gage ordinaire et le Décret sur « les warrants »181(*) ont répondu par l'affirmative. Aux termes des articles 606 CCL III et 19 al. 9 du Décret sur les warrants, « l'exercice des droits conférés au créancier gagiste et au porteur du warrant, n'est suspendu ni par la faillite, ni par l'état de saisie, ni par le décès du débiteur ou du tiers bailleur de gage ».

Par contre, l'art. 14 al. 2 du décret sur les faillites anéantit cette possibilité en étendant l'application de son alinéa premier au créancier gagiste et au porteur du warrant. En effet, l'art. 14 al. 1 suspend jusqu'à la clôture de l'assemblée de vérification des créances, toutes voies d'exécution, pour parvenir au paiement des créances privilégiées sur partie du mobilier dépendant de la faillite. Toutefois, il admet que les mesures conservatoires puissent être poursuivies. Le législateur semble avoir repris d'une main gauche ce qu'il avait donné par une main droite.

Pour tempérer cette position, qui est à notre sens rigide, le législateur donne pouvoir au juge d'autoriser le créancier ou le curateur à poursuivre la vente des biens grevés de la sûreté réelle après avoir pris l'avis du comité des créanciers chirographaires et le failli dûment appelé (art. 14 al. 3 du décret sur les faillites).

Avant de nous occuper du sort du créancier gagiste, il convient de dire que la qualification du privilège du créancier gagiste du fonds de commerce n'est guère aisée. Traditionnellement, on se convient que le gage du fonds de commerce est un privilège spécial. Mais en raison de l'ampleur de son assiette, il y a également tendance à le classer parmi les privilèges généraux.

Contrairement au droit belge où la faillite ne suspend pas les droits du créancier gagiste du fonds de commerce182(*), les dispositions de l'art. 14 al. 1 du décret sur les faillites s'opposent à une telle éventualité. Le législateur rwandais semble avoir suivi les enseignements de MOREAU MARGREVE qui, critiquant la solution consacrée par l'arrêt de la cour de cassation belge du 8 avril 1976, estime que la décision de ladite cour selon laquelle la faillite ne suspend pas les droits du créancier conduit à l'émiettement de la liquidation d'une faillite et risque en cas de précipitation du gagiste, de ne pas produire les résultats escomptés183(*). En plus, elle a pour effet de restreindre la mission du curateur184(*).

Force est de conclure que l'art. 14 du décret sur les faillites ne tient pas en considération des particularités du gage du fonds de commerce. En effet, contrairement au gage ordinaire où le créancier a la possession matérielle de la chose, les biens sur lesquels porte le gage du fonds de commerce restent entre les mains du débiteur et après le jugement déclaratif de la faillite entre celle du curateur. Il y a lieu de craindre que ces biens ne s'entremêlent avec ceux de la masse ce qui priverait le créancier gagiste de son privilège ou rendrait sa sûreté moins efficace. Bien plus, soumettre la réalisation à l'autorisation du juge et à l'avis du comité des créanciers chirographaires revient à réduire sa sûreté à quelque chose d'illusoire. Que le créancier gagiste poursuive la réalisation de son droit dans les formes régulières cela ne devait inquiéter personne car s'il est vrai que l'existence d'un gage du fonds de commerce a pour conséquence de réduire l'actif mis à la disposition des créanciers chirographaires, c'est le propre de tout privilège.

B. Créancier gagiste du fonds de commerce face au curateur

Le jugement déclaratif de la faillite suspend l'exercice des droits du créancier gagiste du fonds de commerce tout comme d'ailleurs ceux des autres créanciers privilégiés (art. 14 du décret sur les faillites). Dès lors, le dessaisissement qui en résulte a pour effet de mettre les biens objet du gage entre les mains du curateur.

Néanmoins, l'art. 14 précité admet cependant que les mesures conservatoires peuvent être poursuivies à la diligence du créancier gagiste. S'il est admis qu'après le jugement déclaratif de la faillite, toutes les actions ou voies d'exécutions seront suivies, intentées ou exercées contre le curateur, le risque d'affrontement entre ce dernier et les créanciers titulaires des droits réels, d'une hypothèque ou d'un privilège spécial, est évident.

En effet, il a été jugé que le curateur, lorsqu'il agit dans le cadre de sa mission légale, ne peut qu'exercer les droits qui sont communs à l'ensemble des créanciers et non les droits de ceux-ci individuellement ou des droits qui compètent aux seuls créanciers jouissant d'un privilège spécial185(*). Autrement dit, le curateur n'est pas qualifié pour agir au nom des créanciers titulaires d'un privilège spécial. Les biens gagés échappent à la masse dans la mesure où ils couvrent la créance garantie.

D'ailleurs, si un conflit surgit entre la masse et le créancier gagiste d'une part ou le créancier gagiste et le créancier disposant d'un privilège général d'autre part, le curateur ne représente que la masse.

Il ressort de ces considérations, que le curateur ne peut prendre l'initiative de la mise en oeuvre de la procédure de réalisation du gage. Il ne le pourrait, dans l'intérêt de la liquidation de la faillite, qu'au cas où le créancier gagiste ne prendrait à cet égard aucune initiative186(*). Quoique l'art. 14 du décret sur les faillites dispose que les voies d'exécution sont suspendues, il ne se prononce pas en faveur de l'exercice de ces voies par le curateur. Selon les termes de la cour d'appel de Liège, « confier au curateur le soin de procéder à la réalisation du gage du fonds de commerce équivaut en effet à confier à une même personne le mandat de s'appliquer à la défense absolue des intérêts de la masse comme du créancier gagiste du fonds de commerce ». Rappelons, pour être complet, que les curateurs peuvent à toute époque, avec autorisation du juge, retirer les gages au profit de la faillite en remboursant la dette et les frais non frustratoires exposés par le créancier pour la conservation ou en vue de la liquidation du gage (art. 108 du décret sur les faillites). Par contre, les objets d'un gage restent en dehors de l'actif de la faillite dans la mesure où le prix de leur réalisation n'excède pas le montant de la garantie187(*).

Toutefois, le constat est que la mise en oeuvre de l'art. 108 n'est guère aisée. On se pose la question de savoir si le remboursement se ferait entre les mains du créancier, ou si le curateur consignera cette somme sur un compte dans un établissement de banque ou de crédit agréé par la BNR comme il est dit à l'art. 34 du décret sur les faillites. A notre avis, le versement devrait se faire directement entre les mains du créancier, car le retrait de la banque nécessite les formalités préjudiciables au créancier (voir l'art. 30 du décret sur les faillites)

En guise de conclusion, le gage du fonds de commerce devrait présenter plus d'intérêt pour le créancier en cas de faillite. Or, comme il ressort des textes analysés, sa situation dans la faillite n'est pas du tout enviable. Ce ne serait pas trop pessimiste de dire qu'elle n'est pas différente de celle des créanciers chirographaires. Le caractère sui generis du gage du fonds de commerce devrait pousser le législateur à reconnaître au créancier gagiste du fonds de commerce le droit de se faire payer malgré la faillite. A défaut, le législateur aurait créé une sûreté qui ne l'est que de nom.

CHAP. III : DES SOLUTIONS ALTERNATIVES FORGEES PAR LA PRATIQUE EN MATIERE DE GAGE DU FONDS DE COMMERCE ET LEUR IMPACT SUR LE SYSTEME DE CREDIT

En matière de crédit, il est un principe sacré que le crédit va toujours de pair avec la garantie. Celle-ci doit être aussi efficace que possible pour permettre le créancier de recouvrer ce qu'il a donné. Or, les développements qui ont précédé ont démontré que la législation sur le gage du fonds de commerce accuse de nombreuses lacunes quant à la protection du créancier gagiste du fonds de commerce. C'est ainsi que pour combler ces lacunes, les créanciers mettent à profit la possibilité qui leur est offerte par le principe de l'autonomie de la volonté pour insérer dans l'acte qui constate le contrat de gage du fonds de commerce une série de clauses dont l'objet est de maximiser leur garantie contre le débiteur.

Par ces clauses, les créanciers, parties économiquement fortes, tendent à se faire offrir des avantages exorbitants au détriment de leurs débiteurs qui sont considérés comme parties économiquement faibles. Au cours de ce chapitre, il sera question d'analyser les actes de gage émis par certaines banques oeuvrant au Rwanda pour déceler leur nature ainsi que les droits que les créanciers se créent par contrat (section première). Ensuite, un regard critique sera jeté sur les actes de gage analysés (section deuxième) et enfin, notre étude portera sur les effets que l'insuffisance de protection du créancier gagiste du fonds de commerce pourrait avoir sur le système de crédit (section 3)

Section 1 : Analyse critique des actes de gage émis par quelques banques oeuvrant au Rwanda

Dans cette section, l'analyse portera sur les actes de gage émis par la BCDI, BACAR188(*), BCR et la BK. L'étude portera premièrement sur la nature juridique de ces actes et ensuite les droits dont les créanciers se ménagent par contrat.

§1. Nature juridique de l'acte

D'une part, l'acte de gage du fonds de commerce peut être un acte sous seing privé ou authentique et d'autre part, il s'analyse en un contrat d'adhésion

A. Un acte sous seing privé ou un acte authentique

Aux termes de l'art. 3 du décret de 1937, le gage est constitué par un acte authentique ou sous seing privé. La portée de cet article est discutée. On a estimé que le verbe « constitué » utilisé par le législateur ne peut être utilisé que pour un acte sous seing privé, qu'il ne convient pas pour l'acte authentique, car "constituer" renvoie à la conclusion du contrat. Constitué signifie `conclu'189(*).

Cependant, à s'en tenir à ce qui est prévu par la législation du gage du fonds de commerce, il appert que le gage du fonds de commerce peut être constaté par un acte sous seing privé c'est-à-dire constitué d'un texte auquel la ou les parties ont apposé leur signature ou à défaut, leur empreintes digitales (art. 14 CPCCSA). Dans ce cas, les parties n'ont pas à faire recours à l'autorité publique. Leur consentement suffit à créer un acte de gage valide. D'autre part, il peut être constaté par un acte authentique c'est-à-dire celui qui est établi ou reçu par un officier public habilité, agissant dans le cadre de ses fonctions (art. 11 CPCCSA et 199 CCLII). Dans ce dernier cas, il est un contrat solennel.

Cette disposition qui prévoit le choix entre la forme solennelle et le consensualisme mérite une attention particulière. En effet, l'acte authentique dont question ici n'est pas créatif mais seulement déclaratif. Il n'intervient que pour des raisons probatoires sinon cette liberté de choix entre les deux formes serait inconcevable s'il faut en faire dépendre la validité de l'acte. La disposition signifie plutôt que les parties au contrat de gage peuvent soit se contenter d'un simple écrit portant leurs signatures ou faire constater leur consentement par l'officier public. Cela dépendra de leur choix compte tenu de la force probante attachée à ces différents contrats.

Toutefois, dans la pratique, le gage du fonds de commerce est généralement constaté par acte sous seing privé en raison de la facilité d'établissement des actes sous seing privé permettant la rapidité des opérations surtout en matière commerciale et dans d'autres activités similaires. Aussi, en raison de la souplesse et de la liberté des formes des actes sous seing privé, les opérations sont-elles très rapides du fait que les parties ne sont pas obligées de recourir à quelqu'un d'autre tel un officier public ou une tierce personne pour la validité de l'acte établi. Enfin, le fait que l'acte sous seing privé n'occasionne pas beaucoup de frais explique sa raison d'être dans les rapports entre les particuliers190(*).

Néanmoins, que le gage soit constaté par un acte consensuel ou solennel, celui-ci doit faire l'objet d'une inscription au greffe de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali. Mais, le défaut d'inscription n'a pas pour effet de priver le contrat de gage de tout effet dans les relations du créancier et le débiteur puisque la formalité d'inscription du gage du fonds de commerce n'est pas exigée pour sa validité inter partes mais plutôt pour le rendre opposable aux tiers.

Notons que cet acte sous seing privé doit être rédigé en double. Cette formalité dite "du double" est prescrite à l'art. 207 CCLIII et implicitement à l'art. 14 al. 3 du décret de 1937 qui oblige le créancier à présenter au fonctionnaire chargé du service des inscriptions une expédition de l'acte de gage, si celui-ci est authentique ou l'un des doubles, s'il est sous seing privé.

B. Contrat d'adhésion

GEORGES BERLIOZ, dans son ouvrage "contrat d'adhésion" considère les contrats bancaires comme le domaine d'élection des contrats d'adhésion. Selon cet auteur, ceux-ci sont établis sur les formules préétablies par la banque, à des conditions que cette dernière, sauf dans les cas d'opérations extrêmement importantes, n'accepte pas de discuter191(*).

Un contrat d'adhésion est un contrat dont le contenu contractuel a été fixé, totalement ou partiellement, de façon abstraite et général avant la période contractuelle192(*). Il en est ainsi du contrat de gage qui, selon l'art. 8 du décret de 1937 se conclut en faveur des banques ou autres établissements de crédit ou de commerce agréés par la BNR, suppose que les débiteurs qui sont logiquement parlant dans une position de faiblesse se soumettent à la volonté des premiers.

De la définition donnée par cet auteur, on décèle certaines caractéristiques essentielles du contrat d'adhésion par rapport au contrat par négociation à savoir l'absence de débat préalable, la détermination unilatérale du contenu contractuel, qu'elle soit le fait de l'une des parties ou d'un tiers193(*). La volonté unilatérale fixe l'économie du contrat ou l'un de ses éléments, la volonté de l'adhérent n'intervient que pour donner une efficacité juridique à cette volonté unilatérale. Même si l'adhèrent obtient des aménagements à ces modalités il n'en demeure pas moins qu'il est dans une situation particulière de dépendance vis-à-vis du stipulant.

1° Le caractère préétabli du contrat d'adhésion

L'examen des actes de gage émis par les banques oeuvrant au Rwanda révèle que ces contrats sont établis sur des formulaires préétablis par les banques et à des conditions sacrées qui ne peuvent en tout cas être discutées par les parties. L'analyse de l'acte permet donc de constater qu'il s'agit d'un formulaire dont les clauses ont été préétablies et qui est rempli mutatis mutandis chaque fois que survient une demande de crédit. Ainsi ce que l'on appellerait la conclusion du contrat ne se réduit que dans l'adjonction dans la formule déjà existante de quelques éléments en rapport avec l'identification du client et ceux relatifs à la dette garantie

Dans les actes de gage analysés, le caractère `préétabli' se manifeste par le fait que lesdits actes laissent les espaces dans lesquels il faut remplir les informations nécessaires notamment comme nous l'avons indiqué celles relatives à l'identification du client et à la dette contractée. Il se décèle plus particulièrement de l'art. 10 de l'acte BCDI qui est écrit d'une manière générale et impersonnelle comme s'il avait été rédigé par un tiers au contrat. Il est libellé comme suit : « s'il s'agit de personnes physiques, les parties certifient les noms, lieu et date de naissance des gagistes tels qu'ils sont mentionnés en tête des présentes, le tout au vu de leur registre de commerce ». La lecture intelligente de cette clause du contrat fait ressortir qu'elle n'a pas été rédigée par les parties pour régler leurs rapports réciproques mais plutôt qu'elle est destinée à un nombre illimité de clients éventuels. Ceci confirme d'ailleurs le fait qu'elle soit préétablie par la banque qui la soumet à l'adhésion de ses cocontractants.

En plus, l'analyse de différents contrats de gage par lesquels les banques se font accorder la faveur démontre à suffisance que lesdits contrats ont été rédigés d'avance surtout en ce qui est de leur contenu. Ainsi, pour le stipulant (banque), sa prévision est aidée par le délai de réflexion, l'expérience qui lui a permis de modifier des clauses et d'en réaliser la portée. Parce que c'est une opération répétée, d'application multiple et indifférenciée, et qu'il fait habituellement, il a la compétence du professionnel qui lui permet d'insérer dans le contrat les clauses presque exclusivement rédigées dans le seul but de protéger les intérêts de cette partie.

Ainsi, ayant affaire à un professionnel, le client a de la peine à pouvoir déceler les clauses qui lui sont défavorables et qui sont souvent formulées dans des termes techniques et ambigus dont ce dernier ne pourrait saisir la portée technique.

2° L'illisibilité

Une autre technique utilisée par les banques est de rédiger le contrat en caractère non lisible pouvant importuner ou indisposer le lecteur194(*). Ce vice avait été déjà relevé par BERLIOZ comme une des techniques devenues monnaie courante dans ce genre de contrat195(*) . Contre ce vice, la jurisprudence a invoqué le principe de la bonne foi (art. 33 al. 3 CCLIII) pour annuler lesdits contrats. En effet, lorsque le contrat d'adhésion est complexe ou difficile à lire, l'adhérent, qui n'a en général ni le temps ni les connaissances nécessaires pour le lire, doit pouvoir se fier à la bonne foi du stipulant et à ses affirmations. Non seulement celui-ci doit ne pas induire l'adhérent en erreur mais il doit même lui fournir des explications suffisantes196(*).

3° Le contrat met toutes les dépenses à charge de l'adhérent

Un autre trait caractéristique du contrat d'adhésion est qu'il met presque toutes les dépenses y relatifs à charge de l'adhérent. C'est ce qui apparaît par exemple dans l'art. 3 de l'acte BCDI qui met à charge du client tous les frais relatifs à la vérification de la comptabilité du client alors qu'une telle opération ne se fait que dans le seul intérêt du créancier. C'est le cas aussi de tous les actes de gage analysés en ce qui concerne les frais de rédaction du contrat, d'inscription et de renouvellement.

Contre ces clauses, on a invoqué la notion de lésion comme mécanisme pouvant permettre de condamner le pouvoir économique qui s'exerce par l'intermédiaire du contrat d'adhésion197(*). Ainsi, le client peut s'attaquer audit contrat dès qu'il estime que ce contrat lui fait manifestement grief. A ce propos, BERLIOZ estime que le stipulant ne doit pas pouvoir impunément, par abus de sa position dominante, extorquer les conditions abusives par le biais d'une adhésion du cocontractant. Il semble cependant que cette opinion n'a pas reçu l'approbation de la grande majorité de la doctrine et de la jurisprudence.

§2. Les droits que les créanciers se réservent par contrat

Dans le but de maximiser leur garantie, les créanciers se réservent certains droits sur le patrimoine de leurs débiteurs que la doctrine a l'habitude de qualifier de « sûretés négatives ». Par celles-ci, il faut entendre une variété de clauses que l'on trouve dans certains contrats tel le contrat d'ouverture de crédit, les actes constitutifs de sûretés proprement dites, dans les actes de subordination de créance ou dans les lettres de patronage et qui confèrent au créancier soit un droit de veto, soit un droit de regard par rapport à la gestion du patrimoine du débiteur198(*). Il ne s'agit pas de sûretés proprement dites, en ce sens que ces clauses n'offrent pas une garantie de paiement. Leur but est de prémunir le créancier contre des modifications néfastes pour lui, du patrimoine du débiteur199(*) Le client les préférera ou les adjoindra à la sûreté traditionnelle parce qu'elles ménagent le crédit du débiteur et qu'elles sont discrètes et moins onéreuses que les sûretés véritables200(*).

Le droit de veto sur le patrimoine consiste en différentes clauses ayant pour effet de limiter la liberté de gestion de son patrimoine par le débiteur. Elles interdisent le débiteur à poser certains actes indiqués dans l'acte. Elles se reflètent dans différentes clauses du contrat notamment celles relatives aux différents engagements (de faire ou de ne pas faire) par lesquelles le créancier s'oblige ou s'interdit de poser certains actes de nature à porter atteinte à la consistance du gage et dont l'autorisation est toujours requise pour leur accomplissement.

Contrairement aux précédentes, les clauses qui confèrent un droit de regard sur le patrimoine du débiteur n'interdisent pas ce dernier d'accomplir certains actes aux effets potentiellement négatifs pour le créancier ; elles l'obligent par contre à renseigner le créancier soit sur demande de celui-ci, soit d'initiative, sur la conclusion de ces actes, soit antérieurement, soit postérieurement201(*). Dans certains cas, ces clauses vont jusqu'à accorder au créancier le droit d'intervenir dans la gestion du patrimoine du débiteur, exerçant ainsi sur la gestion de son patrimoine ou celui du garant du débiteur une espèce de tutelle.

Ainsi, les actes de gage analysés contiennent une série de clauses par lesquelles les créanciers se réservent les droits leur permettant de sauvegarder la consistance du gage et par voie de conséquence obtenir la garantie maximum de paiement. Ces clauses concernent par exemple, la consistance du gage, l'étendue de la garantie, les engagements du débiteur de ne pas poser certains actes déterminés, la propriété du fonds, la sanction, l'examen de la comptabilité du client, l'assurance, etc.

A. Les clauses relatives à l'assiette et à l'étendue de la garantie

Dans tous les actes de gage analysés, il est stipulé que la sûreté couvre le remboursement de toutes les sommes que le client doit ou pourrait devoir en principal, intérêts, commissions et frais à la Banque, de quelque chef et à quelque titre que ce soit, soit seul, soit solidairement ou non avec d'autres.

L'assiette du gage comprend tous les éléments corporels et incorporels affectés à l'exploitation de l'entreprise. Dans lesdits actes, on remarque que les créanciers se frayent des solutions contractuelles quant aux questions qui ont été longtemps discutées entre autres celle relative à l'inclusion des créances, valeurs et effets de commerce dans l'assiette du gage. Par ces contrats, ceux-ci font intégralement partie du gage du fonds de commerce202(*)

Enfin, le gage porte également sur tous les autres fonds de commerce que le client possède ou pourrait posséder ultérieurement sous quelque dénomination et en quelque lieu que ce soit.

B. Clauses relatives à la propriété

Les clauses relatives à la propriété consistent en ce que le client déclare à la Banque que le fonds de commerce qu'il donne en gage est sa propriété entière et exclusive et qu'il n'est grevé d'aucune charge, privilège et ne fait l'objet d'aucune saisie. Cette propriété s'étend non seulement sur le fonds principal mais aussi à tous les entrepôts, chantiers, bureaux, installation ou dépôts quelconques, le déplacement éventuel n'affectant pas le gage. Celui-ci grève aussi bien ce qui aurait été déplacé. Toutefois, lorsque les entrepôts, chantiers, et autres sont situés dans le ressort d'une conservation d'hypothèque distincte de celle où le gage est inscrit, ils ne doivent pas avoir entraîné une immatriculation à un registre de commerce autre que celui dont a fait l'objet le fonds de commerce principal.

C. Engagements de poser ou ne pas poser les actes déterminés

Il s'agit des engagements de faire ou de ne pas faire. Ainsi par exemple le client s'engage de tenir toujours en magasin ou ses divers comptoirs, des marchandises et/ ou produits pour une valeur, au prix de revient, double des ses engagements envers la Banque sans que ses stocks puissent à aucun moment être inférieures à une certaine valeur déterminée par la Banque203(*) . Le client doit requérir l'autorisation préalable de la Banque pour tout engagement de son fonds de commerce sous peine de déchéance.

En outre, le client s'engage à tenir le fonds de commerce et ses divers éléments, y compris les marchandises en cours de route, constamment assurés par un organisme agréé par la Banque, contre les risques d'incendie, gaz, électricité, foudre et toute explosion, de vol ou de perte et en général contre tous risques propres à l'exploitation dont il s'agit et faire établir par cette compagnie une déclaration équivalente à l'avenant hypothécaire utilisé en matière de prêt hypothécaire et ce à concurrence de la valeur réelle admise par la Banque tant que dureront les effets du contrat.

A défaut pour le client de pourvoir à ces assurances, la Banque est autorisée à contracter aux frais, risques et périls du client, lesdites assurances, sans que l'exercice ou du non-exercice de cette faculté, puisse découler à charge de la banque aucune responsabilité.

Il s'interdit enfin, sans autorisation préalable et écrite de la Banque, de contracter aucune location ni aliénation, ni aucun engagement de tout ou partie de son fonds de commerce, de faire apport de celui-ci en société, en général de ne rien faire qui puisse altérer la valeur du gage204(*).

D. Clauses relatives à l'examen de la comptabilité du client

En vertu de ces clauses, la Banque aura le droit, à tout moment de faire procéder par une personne de son choix, à l'examen de la comptabilité du client, à la vérification sur place du mobilier, de l'outillage, du matériel et de la quantité de marchandises et d'une façon générale de recueillir tous éléments susceptibles de la renseigner sur l'état des affaires et ce, aux frais du client.

E. Les clauses relatives à la sanction

L'inobservation des prescriptions notamment relatives au maintien de la consistance du fonds, à l'information à donner au créancier, aux différents engagements de faire ou de ne pas faire, est sanctionnée par une exigibilité immédiate de toutes sommes qui sont dues par le client, sans préjudice de poursuite de remboursement par toutes voies de droit.

En outre, la dénonciation de la ligne de crédit et l'exigibilité des sommes seront immédiates :

- Dans tous les cas prévus par la correspondance des parties et dans le Règlement Général des ouvertures de crédit

- dans le cas où la remise en gage n'occuperait pas le rang conforme à ce qui aurait été déclaré, en cas d'inexactitude des déclarations faites à l'acte de gage ou en cas d'inexécution des engagements pris par le client dans l'acte ;

- en cas de décès, faillite, concordat, incapacité, saisie, protêt de l'effet de commerce

- si le client transportait en un autre lieu le siège principal de ses exploitations ;

- si le client quittait le Rwanda pour quelque cause que ce soit pour une durée qui serait préjudiciable à ses affaires ou négligeait gravement celles-ci.

Il en sera de même dans le cas où l'une ou plusieurs choses données en gage seraient saisies ou revendiquées par un tiers, en cas de contestation par un tiers des droits de la Banque.

F. Les clauses relatives au frais résultant de l'établissement de l'acte

En ce qui concerne les frais quelconques résultant directement ou indirectement de l'établissement de l'acte ou de son exécution, ceux-ci sont à charge du client et sont garantis par le gage constitué. Il en est ainsi des frais d'inscription et du renouvellement éventuel du gage.

G. Clauses relatives à l'information à donner au créancier

Le client doit signaler à la Banque toute modification de son immatriculation ou tout fait qui changerait la valeur du gage. Le client est tenu de donner à la Banque toutes justifications que celle-ci jugerait nécessaires au sujet de la consistance du gage constitué. Aussi, la Banque doit-elle accepter d'abord la valeur réelle du bien pour lequel le client souscrit une assurance.

Il s'engage en outre à informer la Banque de tous faits, cas fortuits ou autres qui diminueraient la valeur de la garantie. Il devra donner immédiatement connaissance à la Banque de tout jugement de condamnation qui serait prononcé à la requête d'un autre créancier, privilège ou non, de toute saisie qui serait faite sur les biens, de tout protêt qui serait dressé à sa charge (art. 7 acte BK). Le client s'engage enfin à notifier immédiatement à la Banque toute cession, destruction ou désaffectation des éléments formant assiette du gage du fonds de commerce.

Section 2. Considérations critiques sur les actes de gage analysés

Les actes de gage sur lesquels a porté cette analyse ne vont sans susciter des critiques. Etant l'émanation de la volonté d'une des parties économiquement forte imposant à l'autre partie ses propres volontés, les clauses de ces contrats sont souvent exorbitantes au mépris flagrant du principe de la liberté contractuelle. Or, le contrat exige un minimum de civisme, de justice et de sincérité contractuelle205(*). Le civisme contractuel renvoie à la conformité du contrat à l'ordre public et aux bonnes moeurs et représente une exigence générale de validité206(*).

Les actes de gage analysés font ressortir qu'ils tendent à l'uniformité, pèsent disproportionnellement sur les parties contractantes, envisagent le gage du fonds de commerce comme une garantie fourre-tout et qu'enfin ils englobent les clauses qui n'ont aucun effet sur le plan juridique.

§1. Tendance à l'uniformité

L'examen minutieux des actes de gage analysés fait ressortir que les clauses de ces contrats sont presque uniformes sauf différences liées notamment à la présentation, et aux styles utilisés. Cette uniformité se traduit notamment par le caractère préétabli de ces actes, l'extension de l'assiette du gage, l'entendue de la garantie, les frais de procédure, les clauses d'assurance, les sanctions, etc.

De cette uniformité, on peut se poser la question de savoir si les banques n'ont pas fait des ententes en cette matière. On pourrait même penser que ces actes constituent des contrats-types. Mais, en dernière analyse on ne trouve aucune indication dans ce sens car celui-ci requiert qu'il soit élaboré par un certain organisme professionnel pour servir un certain nombre de personnes ou associations oeuvrant dans un même domaine. Or, dans les contrats analysés, il appert que même s'ils sont uniformes quant aux clauses qu'ils contiennent cela est dû au fait que les initiatives surtout en matière de rédaction de contrats sont très rares au point que celui qui va rédiger tend toujours à faire référence à un autre contrat d'où la tendance à l'uniformité.

§2. Le contrat pèse disproportionnellement sur les parties

L'une des caractéristiques de ces contrats bancaires est que ses clauses pèsent de manière disproportionnelle sur l'adhérent et le stipulant.207(*) Ainsi, on s'étonne de voir que du début à la fin on ne trouve aucune clause relative aux droits du débiteur ou à l'obligation du créancier. Toutes les obligations sont mises à la charge de l'adhèrent. C'est ainsi par exemple que tous les actes de gage analysés mettent à charge du client tous les frais survenus à l'occasion de l'examen par la banque de la comptabilité du client, la vérification sur place du mobilier, de l'outillage, du matériel et de la quantité de marchandises stockées et d'une façon générale de recueillir tous les éléments susceptibles de la renseigner sur l'état des affaires.

Bien que la banque ait rendu un service au client, il est à notre avis injuste que les frais suscités par le maintien ou la sauvegarde de la sûreté du créancier soient exclusivement supportés par le seul débiteur alors qu'ils profitent au seul créancier et qu'en plus le crédit porte aussi des intérêts. On pourrait aussi imaginer le cas d'une banque soucieuse du maintien de son gage qui procéderait intempestivement au contrôle de la comptabilité du client. Ce dernier risquerait de se ruiner en payant toujours les frais relatifs au contrôle.

§3. Gage du fonds de commerce n'est pas une garantie « fourre-tout »

Une majorité d'actes de gage sous examen confirment le caractère commercial du gage du fonds de commerce208(*). Mais à considérer certaines clauses ce ces contrats on tend à conclure que le gage du fonds de commerce n'est plus une garantie commerciale mais plutôt une garantie fourre-tout.

Ainsi, tous les actes étendent la garantie à toutes les créances dues « à quelque chef et à quelque titre que ce soit ». Cette stipulation du contrat laisse entrevoir que toutes les créances, même les créances civiles, sont garanties par le gage du fonds de commerce.

Quoique le législateur ne s'oppose pas expressément à cette éventualité, il est de notre avis que l'esprit de la loi, qui est de favoriser le crédit en faveur de la petite bourgeoisie commerçante et industrielle d'abord, et à tous les commerçants ensuite, s'y opposerait, car selon MOREAU MARGREVE, la constitution du gage du fonds de commerce ne peut servir qu'au paiement des créances nées dans le chef d'organismes de crédit agréés, à la suite d'opérations de crédit conclues avec des commerçants pour les besoins de leurs activités commerciales209(*). De là, nous estimons que cette clause méconnaît l'esprit du législateur de faire du gage sur fonds de commerce une garantie commerciale et non une garantie « fourre-tout ».

§4. Les clauses sans effets juridiques

Certains de ces actes contiennent des clauses qui ne peuvent être appliquées et si l'adhèrent se refusait à leur faire honneur le stipulant ne peut pas les faire exécuter sous la houlette d'une autorité publique. Cela est dû au fait que certaines sont contre l'ordre public ou contre les règles et les principes généraux du droit. Il en est ainsi notamment des clauses créant les obligations à l'égard des tiers au contrat, celles créant conventionnellement un privilège et les stipulations préjudiciables aux tiers.

A. la création d'une obligation à l'égard des tiers

C'est un principe du droit qu `un contrat ne peut créer des obligations qu'à charge des parties contractantes. Il ne peut nuire ni profiter aux tiers que dans les cas prévus par la loi notamment en cas de stipulation pour autrui et de promesse du porte-fort (art. 63CCLIII). C'est l'effet relatif des contrats.

Toutefois, en dépit de cette prescription légale, les actes de gage soumis à notre analyse révèlent que la volonté unilatérale qui entend dicter les obligations auxquelles l'autre partie doit adhérer, étend ce pouvoir à un tiers au contrat. C'est ce qui apparaît dans l'acte de gage BCDI (art. 6) selon lequel «l'assureur sera tenu de donner préavis à la banque en cas de suspicion, annulation ou modification pour quelques raisons que ce soit, notamment le non-paiement des primes ». Quelle est la valeur juridique de cette clause qui crée une obligation à charge de l'assureur qui, pourtant n'est pas partie au contrat ? Qu'adviendrait-il si l'assureur ne satisfaisait pas à cette obligation ?

A ce propos, J. CARBONNIER considère que la loi contractuelle régit les parties, les tiers lui échappent. Le contrat n'a d'effet absolu que seulement dans les relations de chaque partie avec l'autre, il ne peut nuire aux tiers, il ne leur est pas opposable, il ne peut non plus leur profiter210(*). C'est aussi ce qui ressort du jugement de la cour de cassation belge selon le quel le contrat, dans son aspect consensuel, ne constitue pas une règle générale et abstraite, pouvant avoir des effets à l'égard des tiers211(*).

De ce qui précède, ressort que l'assureur n'est pas lié par l'obligation qui est mis à sa charge par le contrat auquel il n'a pas été partie. Il peut donc en ignorer l'existence et ne peut lui être opposé. On se demanderait alors l'intérêt qu'aurait la banque d'insérer au contrat une clause qui à premier abord ne produira aucun effet. Nous croyons que cette clause «fantôme » constitue une manoeuvre pour faire croire au client adhérent qu'une obligation lourde pèse sur lui qu'au cas où il ne l'exécuterait pas, le créancier dispose de moyens suffisants d'information. Quoiqu'il en soit, cette clause ne peut produire aucun effet juridique.

B. La création conventionnelle des privilèges

Le droit rwandais ne définit pas le privilège. A ce propos nous nous référons au droit belge qui définit le privilège comme « un droit que la qualité de la créance donne au créancier d'être préféré aux autres créanciers [...] »212(*). De cette définition ressort que le privilège est une faveur qui résulte de la loi en raison de la qualité de la créance. Il est l'oeuvre exclusive de la loi et échappe complètement à l'autonomie de la volonté ; il ne saurait être créé par convention213(*) sous peine de méconnaître la règle « pas de privilège sans texte ».

Dans la pratique cependant, notamment dans les contrats bancaires on remarque une tendance croissante de se frayer des privilèges conventionnels. C'est ainsi que l'acte de gage BCDI contient une clause selon laquelle « en cas de réalisation, la banque est payée par préférence à tous les autres créanciers, de tout ce qui lui est dû ainsi que les frais de poursuite » (art. 8). De même, le déplacement éventuel du fonds de commerce n'affecte pas le gage, celui-ci grève aussi bien ce qui aurait été déplacé (art. 1).

Dans le premier cas, le décret de 1937 accorde au créancier le droit d'être préféré aux autres créanciers. L'insistance de la clause insérée dans le contrat pourrait aller jusqu'à se faire préférer même avant tous les privilèges spéciaux comme par exemple celui des frais de justice, le privilège des salaires, etc. Cette clause si tendancieuse soit-elle ne saurait pas opposable aux tiers, car elle constitue une violation flagrante de la loi et du principe général selon lequel « il n'y a pas de privilège sans texte ».

Dans le second cas, nous estimons qu'en cas de déplacement, même si la loi est muette à ce sujet, seul le report de privilège peut faire subsister le privilège sur les biens déplacés si le déplacement doit s'entendre dans le sens d'un transfert d'un endroit à un autre et non dans le sens du détournement. Ainsi, cette hypothèse serait comparable à celle du bailleur qui, selon DE PAGE, ne peut stipuler que son privilège subsistera sur les meubles du preneur, même s'ils quittent les lieux loués214(*).

En plus, même dans le cas où le déplacement dont il est question à l'art. 1 pouvait s'entendre dans un autre sens désignant « le détournement », la subsistance du privilège sur les biens déplacés ne serait subordonnée qu'à l'exercice avec succès d'une action en revendication prévue à l'art. 12 al. 2 du décret de 1937. Dans le cas contraire, le maintien du privilège ne serait qu'un vain mot.

C. Stipulations préjudiciables aux tiers

Certaines dispositions du décret de 1937 ont été édictées dans l'esprit de protection des tiers. Il en est le cas notamment de l'art. 2 al.2 du décret de 1937. Cet article prévoit la possibilité d'inclure dans l'assiette du gage du fonds de commerce les marchandises en stock à concurrence de 50% de leur valeur. Cette disposition n'a d'autres buts que de protéger les créanciers chirographaires qui verraient la sûreté absorber la totalité de l'actif du débiteur215(*). La moitié restante doit rester affectée à la garantie des fournisseurs ou de la masse chirographaire.

Force est de constater cependant que la pratique en la matière est tout autre. En effet, l'art. 3 al. 3. de l'acte BCDI inclut les marchandises dans l'assiette du gage du fonds de commerce sans préciser la proportion dans laquelle elles sont incluses : « sont également compris dans le gage, la marchandise, le stock et le prix de vente les représentant ».

Ainsi, une clause incluant toutes les marchandises dans l'assiette du gage nous parait contraire à l'ordre public, car avons-nous indiqué, l'inclusion des marchandises à concurrence de 50% de leur valeur n'a d'autres intérêts que de protéger les tiers (créanciers chirographaires et les fournisseurs). De là, nous croyons qu'une disposition édictée pour protéger les tiers ne peut être méconnue sans porter atteinte à l'ordre public.

Section 3. Les effets de la précarité du gage du fonds de commerce sur le système de crédit

Dans nos développements antérieurs, notre effort a été de montrer que la protection du créancier gagiste du fonds de commerce est précaire. De ce fait, ce dernier essaie de suppléer à cette carence au moyen des clauses insérées dans l'acte de gage. Cette situation ne va sans effets sur le système de crédit. D'une part, elle rend onéreux le crédit pour le débiteur et d'autre part, elle suscite un débat houleux quant à la nécessité de maintenir le gage du fonds de commerce comme sûreté

§1. L'insuffisance de protection du créancier rend le crédit onéreux

Dans tout le système de crédit, consentir un crédit suppose de toute évidence que le créancier accorde sa confiance à l'emprunteur. Le plus souvent, cette confiance est donnée avec précaution, en échange de garanties qui viennent renforcer le contrat entre le créancier et le débiteur216(*).

Ces garanties sont donc des éléments inséparables du crédit. Elles doivent permettre au créancier de recouvrer les sommes qu'il a mises à la disposition de l'emprunteur. En d'autres termes, aucun mécanisme de sûreté ne peut être qualifié de garantie que si elle est susceptible de jouer ce rôle c'est-à-dire permettre le créancier de récupérer son dû.

Il est pourtant admis de dire que les garanties ne sont pas utiles au seul créancier. Le débiteur a tout intérêt à assurer au créancier des certitudes suffisantes, car d'elles dépend son crédit. On ne prête qu'aux riches, dit l'adage. Le créancier ne consentira à prêter qu'à un débiteur capable de lui rembourser. Un système efficace de sûretés remplit ainsi cette fonction. Il rassure les créanciers et en même temps facilite, pour le débiteur, la recherche du crédit.

Il ressort de cet état de chose que le législateur a à concilier les impératifs peu conciliables à savoir le besoin de financement et de crédit d'une part, et d'autre part, la protection du créancier. Mais il semble que le législateur s'est beaucoup préoccupé du premier impératif au détriment flagrant du second. Le législateur a été mu surtout par des considérations économiques au détriment de la protection du créancier.

Devant cette protection peu efficace du créancier gagiste, celui-ci peut adopter deux comportements : soit il s'abstient catégoriquement d'octroyer le crédit car ne voyant pas dans le gage du fonds de commerce une sûreté lui permettant de recouvrer sans peine sa créance, ce qui est le but même de la sûreté, soit encore il opte pour l'octroi du crédit à des conditions onéreuses tel que cela a été indiqué dans nos développements antérieurs.

Dans un tel cas, le débiteur qui a besoin du crédit est tenu d'accepter sans discussion les clauses du contrat qui, souvent constituent un fardeau pour lui. C'est cette situation qui fait que les auteurs ont commencé à s'interroger sur la nécessité de maintenir ou pas le gage du fonds de commerce comme sûreté commerciale.

§2 Débats quant au maintien du gage du fonds de commerce comme sûreté

L'insuffisance de protection du créancier gagiste du fonds de commerce a conduit certains auteurs217(*) à se poser la question de savoir s'il faut réviser ou tout simplement supprimer la législation sur le gage du fonds de commerce et la sûreté qu'elle comporte. MOREAU MARGREVE, tenant de sa suppression, considère que le manque d'élaboration intrinsèque, l'absence de principes généraux en matière de sûretés et des imprécisions en matière de faillite font du gage du fonds de commerce une garantie de crédit fort aléatoire. Aussi, continue-t-elle, il ne présente souvent qu'un intérêt marginal pour les créanciers ; ceux-ci exigent d'autres garanties, s'intéressent essentiellement, lors de la demande de crédit, à la compétence du manager-demandeur de crédit, à la rentabilité de son commerce et aux dettes qui le grèvent218(*).

Quoique le gage du fonds de commerce ne soit pas fréquemment pratiquée, nous ne pouvons pas nous ranger du coté des tenants de la suppression de cette garantie, car nous estimons que dans l'économie peu diversifiée comme la nôtre une telle sûreté pourrait répondre aux besoins incontournables de financement de nombreux petits commerçants qui n'ont que leur fonds de commerce à offrir en garantie. Nous considérons que le législateur se doit de réviser la législation sur le gage du fonds de commerce en tenant compte des inquiétudes du créancier gagiste du fonds de commerce. Pour cela, il doit mettre à la disposition de ce dernier une procédure facile et claire de revendication des biens déplacés et de réalisation du fonds de commerce. En plus, il doit le doter d'un moyen d'information lui permettant de s'enquérir régulièrement de la situation du fonds de commerce nantie pour que, le cas échéant, il puisse prendre à temps les mesures juridiques appropriées.

De surcroît, aux vues des clauses analysées par lesquelles le créancier fait sa loi contractuelle en faisant stipuler en sa faveur tous les avantages du contrat, nous affirmons que cela constitue une raison parmi tant d'autres qui poussent les commerçants à ne pas faire recours à une telle sûreté et à préférer les sûretés encore moins souples.

Enfin, nous avons un espoir que la commission juridique qui a été récemment mise en place par le gouvernement pour réviser les textes de lois commerciales ne manquera pas de jeter les bases de la protection du créancier gagiste du fonds de commerce et ainsi mettre fin à la situation où le créancier fait sa loi.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

La mise en gage du fonds de commerce jaillit des considérations purement économiques. Il a pour but ultime permettre aux petits commerçants, qui n'ont aucun autre moyen d'obtenir le crédit sans pour autant cesser leurs activités commerciales. Le législateur a eu donc à répondre à deux préoccupations essentielles : D'une part, il devait trouver une solution au problème de crédit des commerçants les moins nantis et d'autre part, protéger les dispensateurs de crédit (les créanciers). Entre ces deux défis, le législateur, mu par des considérations économiques, semble n'avoir servi qu'au premier. Or, les deux sont étroitement liés au point que l'une ne peut se réaliser indépendamment de l'autre. L'objectif de protection des créanciers semble avoir été relégué en arrière plan.

Au premier plan, le créancier doit être protégé contre les manoeuvres de son débiteur qui pourrait tenter de rendre illusoire sa sûreté par différents artifices. En effet, l'absence de dépossession qui est caractéristique du gage du fonds de commerce eût nécessité la protection efficace du créancier gagiste. Le débiteur qui reste en possession du fonds nanti peut accomplir sur celui-ci différents actes et opérations inhérents à son droit de disposition qui ne lui est pas retiré par le fait du gage.

Il peut notamment vendre le fonds en bloc ou quelques éléments de celui-ci, le donner en location-gérance, voire même l'apporter en société. Il peut en outre, lorsqu'il l'estime nécessaire déplacer le fonds de commerce à un autre endroit ou changer complètement son activité. Toutes ces entreprises sur le fonds de commerce ont certainement pour effet de porter atteinte aux droits du créancier.

En guise de protection, le créancier gagiste du fonds de commerce, comme tout autre créancier, dispose des moyens de droit commun pour faire échec aux manoeuvres du débiteur, mais ces moyens ne pourvoient qu'à la conservation du patrimoine de son débiteur mais ne constituent pas en réalité de véritables sûretés. Tels sont par exemple, la déchéance du terme, l'action oblique, l'action en déclaration de simulation, la saisie-arrêt des sommes entre les mains d'un tiers, etc. ces moyens sont loin d'être cotés d'efficaces, car ce que le créancier recherche est une sûreté et non une garantie de paiement.

En plus, le Décret de 1937, lacunaire à plusieurs égards prévoit en faveur du créancier quelques mécanismes de protection mais leur efficacité est fort redoutable. Parmi ces mécanismes se trouve la sanction prévue par l'art. 18 de ce décret. En réalité, celle-ci ne présente guère d'intérêt car ce qui importe pour le créancier ce n'est pas la répression mais le recouvrement de sa créance. En plus, le droit de revendication que lui reconnaît l'art. 12 al. 2 du même décret est limité dans le temps et sur certains biens corporels et ne s'exerce que sous réserve de l'art. 658 CCLIII. Par ailleurs, le législateur ne souffre mot quant à l'existence en faveur du créancier d'un droit de suite en cas d'aliénation globale du fonds de commerce. Même en cas de son exercice, comme l'admet d'ailleurs la jurisprudence et la doctrine, aucune forme de saisie du fonds dans son entièreté n'a été prévue par le législateur ce qui rend difficile sa mise en ouvre pratique.

Par ailleurs, les différents conflits qui surgissent entre le créancier gagiste et les titulaires de droits préférentiels sur le bien nanti n'ont pas été réglés par le législateur ce qui multiplie les affrontements des créanciers sur le bien. Certes, la jurisprudence a été amenée à intervenir mais sans que des solutions unanimes soient dégagées.

Toutes ces lacunes participent de la précarité du gage sur fond de commerce. Cette précarité justifie les précautions prises par les créanciers pour se prémunir contres les entreprises de leurs débiteurs et en général contre les tiers. La pratique, au moyen de l'instrument contractuel supplée à la carence de la législation en se créant des conditions favorables aux créanciers laissés par la loi à la merci de leurs débiteurs. C'est ainsi que les créanciers se créent par contrat des conditions favorables auxquelles les clients sont amenés à adhérer faute de mieux et qui rendent le crédit onéreux pour ces derniers.

L'analyse des contrats passés entre les clients et les banques révèle qu'il s'agit bien des contrats d'adhésion. Le créancier, partie forte en raison de sa puissance économique fait stipuler dans le contrat les clauses qui n'ont d'autres but que de protéger le créancier et dont les vicissitudes doivent être subies par le débiteur qui ne fait qu'y adhérer. Les clauses de ces contrats étendent outre mesure la garantie et l'assiette de celle-ci et mettent le fardeau de tous les frais à charge du débiteur et d'autre part, elles portent atteinte aux droits des tiers souvent pour la création de privilèges conventionnels.

Cette situation pourrait susciter la réaction des débiteurs qui pourront à leur tour réclamer une protection contre lesdites clauses. On ne saurait alors rompre ce cercle vicieux. Ce serait rappeler l'histoire de l'oeuf et de la poule. De toute façon, la logique du contrat préconiserait que la protection du créancier soit la règle, celle du débiteur n'étant que le corollaire de celle du créancier.

Toutes ces considérations sur la précarité du gage du fonds de commerce ne vont sans graves conséquences sur le système de crédit. Ces conséquences tiennent de ce que le crédit et la garantie sont les deux faces de la même pièce au point que la carence affectant l'un de ces deux éléments ne peut épargner l'autre. La banque ne peut consentir le crédit qu'en échange de la sûreté. En un mot, c'est de la sûreté dont dépend le crédit.

Eu égard à ces développements, on en est venu à s'interroger sur l'opportunité même du maintien de cette sûreté dans le système juridique. Pourquoi maintenir une sûreté qui ne répond plus au but de la sûreté c'est-à-dire pourvoir à la satisfaction du créancier ?

Toutefois, nous ne pouvons pas souscrire à cette opinion, se trouvant-elle sous la plume d'un éminent auteur, car elle ne reste vraie que dans son pays ou l'économie est diversifiée permettant d'emprunter sur les autres sûretés que sur les marchandises. Dans notre pays le gage du fonds de commerce reste d'une grande utilité étant donné que beaucoup de nos commerçants ne disposent que de leur fonds de commerce à offrir en garantie. Nous pensons que le but que poursuivait le législateur reste toujours recherché.

Ainsi, nous recommandons au législateur de réviser aussitôt que possible la législation sur le gage du fonds de commerce en général avec l'accent particulier sur les dispositions relatives à la protection du créancier gagiste. La révision devrait tenir compte du caractère spécial du gage du fonds de commerce d'une part, et la nécessité de ne pas entraver exagérément la gestion du fonds. A cet effet, nous souscrivons à l'idée de Mme MOREAU- MARGREVE qui soutient que l'inopposabilité des actes anormaux de gestion pourrait être organisée et l'article 658 CCLIII être écarté lorsque la prise de possession par un tiers porte sur un bien durable du fonds de commerce (matières premières, matériel et outillage)219(*). Le législateur devrait en outre envisager les actions suivantes :

- Etendre le droit de suite dans le temps, car la durée de forclusion de celui-ci (6mois) se révèle un délai bref pouvant préjudicier le créancier gagiste.

- Il se doit d'intégrer dans la législation du gage du fonds de commerce, et cela d'une façon expresse le droit de suite en cas d'aliénation in globo du fonds de commerce ;

- Organiser un mode de saisie approprié et adapté au gage du fonds de commerce en particulier et en général à toutes les universalités.

- Trancher les conflits les plus fréquents entre les créanciers et jeter des bases pour la résolution d'autres conflits éventuels ;. Réglementer différentes opérations sur fonds de commerce telle que la vente, la location-gérance, apport en société, le déplacement et penser à rattacher à ces opérations un système de publicité pouvant alerter le créancier de l'existence des entreprises préjudiciables à ses intérêts. Cette publicité serait aussi requise en cas de subrogation et cession d'antériorité.

- Accorder le régime spécial au créancier gagiste lors de la liquidation de la faillite de son débiteur. Le caractère spécial du gage du fonds de commerce requiert que les droits du créancier gagiste du fonds de commerce ne soient pas suspendus par la faillite comme cela est de règle en droit belge.

- Le législateur devrait, à l'instar de celui de l'OHADA220(*), organiser le droit d'information du créancier notamment en prescrivant que le débiteur soumette au créancier la situation de son fonds pendant une durée déterminée pour éviter que le créancier fasse sa loi par des clauses assez lourdes pour le débiteur. A défaut, le Rwanda devrait ratifier les actes uniformes de l'OHADA d'autant plus qu'il en est membre221(*).

- Enfin le législateur, devrait revoir à la hausse les amendes prévues par l'art. 18 du Décret de 1937, car elles n'ont plus un caractère persuasif qui devrait caractériser toute peine.

Pour terminer, disons qu'une étude comme celle-ci ne peut pas prétendre épuiser tous les contours du sujet. C'est pour cela que nous interpellons les chercheurs ultérieurs qui seraient intéressés par le domaine de bien vouloir nous compléter notamment en analysant l'impact de la prolifération des sûretés issues de la pratique sur le gage du fonds de commerce ou discuter l'opportunité même du maintien du gage du fonds de commerce comme sûreté. Nous remercions d'avance quiconque voudra prendre le relais de notre recherche. Ce faisant, ce serait pour nous un signe d'encouragement.

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HEENEN, J., «Nantissement du fonds de commerce et immeubles par destination », in R.C.J.B., 1964, pp. 21-30.

MARC VAN QUICKENBORNE « Du concours entre le créancier gagiste sur fonds de commerce et le gagiste ordinaire, in R.C.J.B., 1994, pp 37-72.

MERCHIERS, Y., «La réalisation du gage sur fonds de commerce du failli » in R.C.J.B., 1989, pp. 272-286.

MOREAU-MARGREVE, I., « Heurs et malheurs du créancier gagiste sur fonds de commerce », in R.C.J.B., 1980, pp127-171.

RENAULD, J. et COPPENS, P., «Notion de concours entre créanciers, son application au régime des sociétés dissoutes et des successions acceptées sous bénéfice d'inventaire », in R.C.J.B., 1965,pp. 101-119.

RENE DE RYKE, "concours des privilèges : vente d'objets mobiliers à destination commerciale et le gage sur fonds de commerce" in R.C.J.B., 1969, pp 482-496.

III. LES TEXTES LEGAUX RWANDAIS ET ETRANGERS

1. Constitution de la République Rwandaise du4/6/2003, in J.O.R.R., n° spécial du 4 juin 2003.

2. LO n° 07/2004 du 25/05/2004 portant organisation, fonctionnement et compétences judiciaires, J.O.R.R., n° 14 du 15 juillet 2004.

3. Décret-loi n° 21/77 du 18 août 1977 portant Code pénal rwandais, J.O.R.R., 1978, n° 13bis.

4. Loi n°18/2004 du 20/6/2004 portant code de procédure civile, commerciale sociale et administrative, J.O.R.R., n°spécial du 30/7/2004.

5. Loi n° 06/1988 du 12 février 1988 portant organisation des sociétés commerciales, J.O.R.R.,1988, modifiée par la loi n° 39/1988 du 27 octobre 1988, J.O.R.R., 1988.

6. Loi française du 17 mars 1909 portant vente et nantissement du fonds de commerce, code du commerce, 95e éd. 2000.

7. Loi n° 08/ 99 portant réglementation des banques et autres établissements financiers, J.O.R.R., n° 13 du 1/7/1999

8. Loi belge du 5 mai 1872 portant révision des dispositions du code de commerce relatives au gage et à la commission.

9. Loi n° 36/91 du 5 août 1991 portant Registre de commerce, J.O.R.R., 1991.

10. Loi n° 22/99 du 12/11/1999 complétant le livre premier du code civil et instituant la 5e partie relative aux régimes matrimoniaux, aux successions et aux libéralités, J.O.R.R.., n° 22 du 15/11/1999.

11. Loi n° 06/1988 du 12 février 1988 portant organisation des sociétés commerciales, J.O.R.R.,1988, modifiée par la loi n° 39/1988 du 27 octobre 1988, J.O.R.R., 1988.

12. Décret du 27 juillet 1934 portant faillites, B..O, 1934.

13. Décret du 20 mars 1923 portant warrant, B.O., 1923.

14. Décret du 31 juillet 1912 portant livres de commerce, B.O., 1912, rendu exécutoire au Rwanda par l'ORU n° 63/just. du 31 août 1935, B.O.R.U. 1965.

15. Décret du 15 mai 1922 portant régime hypothécaire, B.O., 1922.

16. Décret du 21 juin 1937 portant gage du fonds de commerce, escompte et endossement de la facture commerciale, BO, 1937.

17. Décret du 24 janvier 1957 portant créances privilégiées, B.O, 1957

18. AM n° 99/13 du 14 juillet, 1965 portant inscription des actes de gage du fonds de commerce, J.O.R.R., 1965.

19. ORU n° 41/78 du 28 mai 1956 portant établissement dangereux, insalubres ou incommodes, B.O.R.U, 1956, p. 442.

20. Ordonnance n° 40/AE du 11 mars 1938 portant inscription des actes de gage du fonds de commerce, BA, 1938 rendue exécutoire au Rwanda par l'ORU n° 29/AE du 27juin 1938, B.O.R.U, 1938.

IV. REPERTOIRES

1. Répertoire pratique de droit belge, t. 5, Bruxelles, Bruylant, 1950

2. Répertoire de législation, de doctrine et de jurisprudence, t. 6, Paris, Dalloz, 1914.

V. SOURCE INTERNET

- http//www.linternet/JF/despcialisation_du_bail_commercial-htm

- http//www.sndp.fr/bdj/immob/BAILACT-htm

- Http//www.jurisint. org. Pub/ohada/index/index. org. fr. htm

VI. JURISPRUDENCE ETRANGERE

1. Cass. belge (1ère chambre), 8 avril 1976, R.C.J.B., 1980.

2. Cass., 19 nov. 1992, R.C.J.B., 1994.

3. Gand, 22 avril 1997 RW, 1997-1998, p. 1263.

4. Montpellier, 30 nov. 1932, Gaz. Pal. 1933.

5. Rouen, 14, nov. 1908, in RPLDJ, 1950.

6. Rennes, 26 oct. 1950, Gaz. Pal. 1957. 1. 27

VII. AUTRES DOCUMENTS

1. Acte de gage du fonds de commerce de la BCDI, inédit

2. Acte de gage du fonds de commerce de la BK, inédit

3. Acte de gage du fonds de commerce de la BACAR, inédit

4. Acte de gage du fonds de commerce de la BCR, inédit.

5. Acte uniforme portant organisation des sûretés, OHADA.

ANNEXES

- Acte de gage du fonds de commerce de la BCDI

- Acte de gage du fonds de commerce de la BCR

- Acte de gage du fonds de commerce de la BK

- Acte de gage du fonds de commerce de la BACAR

* 1 H. DE PAGE, Traité élémentaire de droit civil belge, t. VI, 2ème partie (les sûretés), pp. 623-624.

* 2 P. OURLIAC et J. DE MALAFOSSE, Histoire du droit privé : les obligations, v.1., Paris, coll. Thémis, PUF, 1957, n° 332, p. 354.

* 3 Idem, p. 355.

* 4 Ibidem

* 5 H. DE PAGE, op. cit., t. VI, n° 1106, p. 1138.

* 6 Cette terminologie a été critiquée, certains auteurs estimant qu'il ne mérite pas cette qualification à raison notamment des similarités que cette institution présente avec l'hypothèque. On a proposé qu'il soit qualifié d'hypothèque immobilière (voir I. MOREAU MARGREVE, "Heures et malheurs du créancier gagiste sur fonds de commerce", note sous cass. belge (1ère ch.), 8 avril 1976, in R.C.J.B., 1981, n°11, p. 140).

* 7 Décret du 12 janvier 1920 portant gage sur fonds de commerce escompte et gage de la facture commerciale B.O., 1920, p. 179 tel que modifié par le décret du 26 juin 1937, B.O, 1937, p. 618 et celui Du 24 mai 1959, B.O., 1959,p 1369. Toutefois, un grand nombre d'articles du Décret de 1920 ayant été remplacé par ceux du Décret de 1937 notamment ceux relatifs à la protection du créancier gagiste du fonds de commerce, dans la suite de ce travail nous nous en referons comme « décret de 1937 ».

* 8 Art. 602 du décret du 30 juillet 1888 portant Code civil livre troisième relatif aux contrats ou des obligations conventionnelles tel que modifié à ce jour, B.O., 1888, p. 109.

* 9 Art. 12 al.2 du décret de 1937.

* 10 Art. 12 al. 3 du décret précité

* 11 H. DE PAGE et R. DEKKERS, Traité élémentaire de droit civil belge, t. 6, Bruxelles, Bruylant, 1953, p. 1146.

* 12 Art. 18 du décret de 1937.

* 13 I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., pp 145-146. voir aussi F. T'KINT, Les sûretés et principes généraux du droit de poursuite des créanciers, 3e éd. , Bruxelles, Larcier, 2000, n° 339, p. 177.

* 14 A-M. STRANART, Les sûretés, Bruxelles, E-story Scientia, 1992, n° 120, pp. 174-175.

* 15I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., p.130.

* 16 MARC VAN QUICKENBORNE, «Du concours entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le gagiste ordinaire », note sous Cass. belge, 19 nov. 1992, R.C.J.B., p. 40.

* 17 G. HUBRECHT, Droit commercial, 11ème éd., Sirey, 1988, p.42.

* 18 Voir l'art. 12 al.3 du décret de 1937.

* 19 G. HUBRECHT, op. cit., p. 42.

* 20 Loi française du 17 mars 1909 portant vente et nantissement du fonds de commerce, Code de Commerce Dalloz, textes, jurisprudences et annotations, 95è éd., Paris, Dalloz, 2000, p. 917.

* 21 M. PEDAMON, Droit commercial, commerçants et fonds de commerce, concurrence et contrat de commerce, Paris, Dalloz, 1994, n° 257, p. 202.

* 22 P. DIDIER, Le droit commercial, 2ème éd., Paris, Dalloz, 2001, p.14

* 23 Idem, p.13.

* 24 F. T'KINT, op. cit., p. 173.

* 25 M. PEDAMON, op. cit., n°289, p.225.

* 26 Art. 13 al.1 de la loi française du 17 mars 1909 portant vente et nantissement du fonds de commerce (Voir Y. CHAPUT, Code français de commerce, textes, jurisprudence, annotations, 95ème éd., Paris, Dalloz, 2000, p.139)

* 27 Gand, 22 Avril, 1997, R.W., 1997-1998, p.1263

* 28 Répertoire Dalloz, t.6, Paris, Dalloz, 1914, n° 431, p.430.

* 29 Ibidem

* 30 http//www. linter.net/JP/despecialisation_du_bail_commercial-htm. Consulté le 20/8/2003.

* 31 M. PEDAMON, op. .cit. n°292, p.226.

* 32 Ibidem

* 33 Ibidem

* 34 Loi n° 36/91 du 5/8/1991 portant registre de commerce, J.O.R.R., 1991, p.1150.

* 35 Ordonnance n°40/AE du 11 mars 1938 portant inscription des actes de gage du fonds de commerce, B.A., 1938, p. 226 rendu exécutoire au Rwanda par l'ORU n°29/AE du 27 juin 1938, B.O.R.U., 1938. Toutefois cette ordonnance doit être lue en comparaison avec la loi organique n°07/2004 du 25/04/2004 portant organisation, fonctionnement et compétences judiciaires surtout en ce qui est des nouvelles dénominations des juridictions.

* 36Loi n22/99 du 12/11/1999 complétant le livre premier du code civil et instituant la cinquième partie relative aux régimes matrimoniaux, successions et libéralités, J.O.R.R.. du 15/11/1999.

* 37 R. DEKKERS, Précis de droit civil belge : les régimes matrimoniaux, donations et les testaments, t.3, Bruxelles, Bruylant, 1955, p.491.

* 38 Ibidem

* 39 En vertu de cette règle, le débiteur n'est pas autorisé à faire des libéralités avant qu'il n'exécute ses obligations envers ses créanciers

* 40 R. DEKKERS, op. cit., p.544.

* 41 Loi n° 06/1988 du 12/02/1988 portant organisation des sociétés commerciales, J.O.R.R., 1988, p. 437 modifiée par la loi n° 39/1988 du 27 octobre 1988, J.O.R.R., 1988, p.1653.

* 42 G. HUBRECHT, op. cit., p. 49 ; M. PEDAMON, op. Cit., n° 282, p. 220.

* 43 Répertoire Dalloz, op. cit., p.642.

* 44 Y. GUYON, Droit des affaires, t.1, n° 638.

* 45 Art.17 de la loi sur les sociétés commerciales susmentionnée

* 46 Répertoire Dalloz, op. cit., p. 642

* 47 M. PEDAMON, op. .cit., n° 282, p. 220.

* 48 G. HUBRECHT, op. cit, p. 48.

* 49 P. DIDIER, op. cit., p. 18

* 50 G. HUBRECHT, op. cit., p. 48

* 51 Ibidem

* 52 P. DIDIER, op. cit., p. 14.

* 53ORU n° 41/78 du 28 mai 1956 portant établissement dangereux, insalubres ou incommodes, B.O.R.U., 1956, p. 442.

* 54 F. TERRE, PH. SIMLER et Y. LAQUETTE, Droit civil: obligations, 8ème éd., Paris, Dalloz, 2002, n°1143, p. 1065; voir aussi A. BENABENT, Droit civil: obligations, 9ème éd., 2003, n°849, p.569.

* 55 Décret du 31 Juillet 1912 portant livres de commerce, B.O, 1912, p. 726 modifiée par le Décret du 20 Avril 1935, BO,1935, p. 508 rendu exécutoire au Rwanda par ORU n° 63 Just. du 31 Août 1935 B.O.R.U. 1935, p. 136.

* 56 Ces langues s'expliquent par le fait que le décret date de l'époque coloniale. Aujourd'hui on se contenterait de dire qu'ils doivent être rédigés en langues officielles à savoir le kinyarwanda, français et l'anglais (art. 5 de la constitution du 4 Juin 2003, J.O.R.R., n°spécial du 4 juin 2003).

* 57 Répertoire Pratique de Législation, de Doctrine et de Jurisprudence, op. cit., V° « fonds de commerce », n° 363, p. 426. ; voir aussi RPDB, op. cit., V° « fonds de commerce », n°172, p. 811.

* 58 Acte de gage de fonds de commerce DCDI et le client RW., p. 2, inédit.

* 59 Rouen, 14 Nov. 1908 cité in Répertoire Pratique de Législation, de Doctrine et de Jurisprudence, n° 359, p. 426.

* 60 Ibidem

* 61 Loi n°18/2004 du 20/06/2004 portant code de procédure civile, commerciale, sociale et administrative, J.O.R.R., n° spécial bis du 30/7/2004.

* 62 Voir l'art. 276 CCLIII

* 63 F. T'KINT, op. cit., n° 339 p. 177.

* 64 Cass. belge, 9 Avril 1934, Pas., 1934, p. 231.

* 65 Voir R.C.J.B., 1995, p. 317.

* 66 Voir les art. 258 et 259 CCLIII

* 67H. DE PAGE, op. cit., t. 3, 1969, p. 222.

* 68F. T'KINT, op. cit., n°29, p.25.

* 69 Ibidem

* 70 H DE PAGE, op. cit., t. 3, n° 229, p. 239.

* 71 Ibidem

* 72 Ibidem

* 73 H. DE PAGE, op. cit., p. 216 n °191.

* 74 Ibidem.

* 75 Idem, p. 210.

* 76 J. CARBONNIER, Droit civil, obligations, t. 4, 22e éd. refondue, Paris, PUF, 2000, p. 172, n° 84.

* 77 La servitude pénale signifie emprisonnement mais le terme n'est guerre utilisé en droit pénal rwandais.

* 78 I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., p. 142 ; A-M. STRANART, op. cit.,p. 45.

* 79 Art. 424 du décret-loi n° 21/77 du 18 Août 1977 portant Code pénal rwandais, J.O.R.R., 1978, n° 13bis.

* 80 Répertoire Pratique du droit belge, op.cit, n° 170, p.810.

* 81 I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., p. 142.

* 82 Idem, p. 145

* 83 J. FERRONIERE, Les opérations de banques, 4e éd., Paris, Dalloz, 1963, p. 390.

* 84 HATUNGIMANA Joseph, Le régime juridique des sûretés réelles sans dépossession en matière de crédit au Rwanda, mémoire de licence, UNR, 1997, p. 40.

* 85G. CORNU, Vocabulaires juridiques, 8ème éd. revue et augmentée, Paris, PUF, 2000, p. 841.

* 86 F. T'KINT, op. cit., n° 201, p. 112.

* 87 Art.12 al.1 du décret de 1937 : « le créancier au bénéfice duquel un fonds de commerce a été donné en gage peut, simultanément avec la mise en demeure faite à l'emprunteur et au tiers bailleur de gage s'il y en a un, et sans permission du juge, faire saisir, pour sûreté des sommes qui lui sont dues, tous les éléments constitutifs du fonds de commerce donné en gage ».

* 88 H. DE PAGE et R. DEKKERS, traité élémentaire de Droit civil belge : les privilèges, les hypothèques, la transcription et la prescription, t.VII, 2e éd., p. 738

* 89 T'KINT, op. cit., n° 338, p. 177.

* 90 Ibidem.

* 91 F. T'KINT, op. cit., n° 339, p. 177; A-M. STRANART, op. cit., p. 46.

* 92 F. T'KINT, op. cit., p. 169.

* 93 Décret du 19 Mai 1922 portant régime hypothécaire

* 94 Al. 5 de l'art. 12 du décret de 1937 lu concomitamment avec la loi organique sur l'organisation, fonctionnement et compétence judiciaires, supra, note 35.

* 95 Décret du 24 janvier 1957 portant créances privilégiées, B.O, 1957, p. 303.

* 96 Rouen, 14 Nov. 1908, D.P, 1911, 2. 312

* 97 Art. 12 al. 5 du Décret de 1937 lu concomitamment avec la loi organique sur l'organisation, fonctionnement et compétences judiciaires susmentionnée.

* 98 Art. 14 du décret de 1937 en comparaison avec la loi organique précitée

* 99 I. MOREAU MARGREVE, op. cit., p. 158.

* 100 Dans la structure administrative actuelle, cette compétence reviendrait au Président de la République et celle du commissaire provincial au ministre ayant le commerce dans ses attributions.

* 101 Ordonnance n° 40/AE du 11 mars 1938 portant inscription des actes de gage du fonds de commerce, B.A, 1938, p. 226 rendue exécutoire au Rwanda par ORU n° 29/AE du 27 Juin 1938, B.O.R.U., 1938.

* 102 A.M n° 99/13 du 14 juillet 1965 portant inscription des actes de gage du fonds de commerce, J.O.R.R., 1965, p. 250.

* 103 L'ordonnance et l'AM en question utilisent les anciennes dénominations des juridictions. Actuellement toutes les affaires commerciales sont de la compétence de la chambre commerciale, financière et fiscale du tribunal de province ou de la ville de Kigali (voir la LO n° 07/2004 du 25/04/2004 portant organisation, fonctionnement et compétences judiciaires, J.O.R.R. n°14 du 15 juillet 2004)

* 104 I. MOREAU MARGREVE, op. cit.,, n°17, p. 146; voir aussi n° 24, p. 155.

* 105 Art. 24 al. 8 de la loi française du 17 mars 1909 portant vente et nantissement du fonds de commerce, code du commerce, 95e éd., 2000.

* 106 Répertoire pratique de législation, doctrine et jurisprudence, t.5, Bruxelles, Bruylant, 1950, op.cit., n°114, p.808.

* 107 Cour d'Appel de Bruxelles, 20 Juin 1985, RPS, 1986, p. 155.

* 108 Ibidem

* 109 T'KINT, op. cit., n° 339, p. 177.

* 110 I. MAREAU MARGREVE, op. cit., p. 149.

* 111Répertoire pratique de législation, de doctrine et de la jurisprudence, op. cit., n° 301, p. 401.

* 112 Idem, n° 302, p. 421 ; T'KINT, op. cit., n° 326, p. 172.

* 113 Répertoire pratique de législation, doctrine et jurisprudence, op. cit., n° 302, p. 421.

* 114 G. HUBRECHET, op. cit., p. 49.

* 115 H. DE PAGE,.op. cit., t. VI, n° 1109, p. 1146.

* 116 Répertoire pratique de Droit Belge, op. cit., n° 176, p. 811.

* 117 Idem, n° 170, .

* 118 Ibidem.

* 119 T'KINT, op. cit., n° 339, p. 177

* 120 Art. 12 al. 1 du décret de 1937.

* 121 H., L. et J. MAZEAUD et F. SHABAS, Leçons de Droit civil ; Biens, Droit de propriété et ses démembrements, Paris, Montchrestien, 1994, p. 269.

* 122 Idem, p. 522.

* 123 J. CARBONNIER, Droit civil :les biens, t. 3, Paris, PUF, p. 268.

* 124 H., L. et J. MAZEAUD et SHABAS, op. cit., p. 274.

* 125 R. DEKKERS, op. cit., p. 554.

* 126 Idem, pp. 554-555.

* 127 Voir M. DIKETE, Droit des biens, notes de cours 2001, Butare, UNR, inédites; Voir aussi l'art. 623CCLIII

* 128 R. DEKKERS, op.cit., p. 560.

* 129 G. HUBRECHT, op. cit., p. 47.

* 130 Répertoire Pratique de Législation, de Doctrine et Jurisprudence, op. ci t., n° 437, p. 430.

* 131 Ibidem.

* 132 STRANART, op. cit., n° 27 p. 43.

* 133 R.C.J.B., 1972, p. 322.

* 134 Cass. belge, 6 Nov. 1986, Pasicrisie. 1987, I, p. 301

* 135 F. T'KINT, op. cit., n° 332, p 175.

* 136 I. MOREAU MARGREVE, op. cit., p. 133.

* 137 FONTAINE, « Inclusion des créances du fonds de commerce » note sous l'arrêt du 6 Nov. 1970, R.C.J.B., p. 322.

* 138 F. T'KINT, op. cit., n° 300, p. 159.

* 139 Ibidem.

* 140 Idem, n° 352, p. 182.

* 141 Répertoire Pratique de Législation, de Doctrine et de Jurisprudence, op.cit, n° 592.

* 142 Idem, n° 593.

* 143 Ibidem.

* 144 La primus est une bière qui est distillée par la Brasserie et limonadelie du Rwanda (BRALIRWA) à base de sorgho, d'eau, de sucre et d'autres produits chimiques.

* 145 Repertoire Pratique de Legislation, de Doctrine et de Jurisprudence, op. cit., n° 347, p. 424.

* 146 I, MOREAU MARGREVE, op. cit., R.C.J.B., 1980, p. 139.

* 147Idem, note 31, p. 139.

* 148 Art. 110 du Décret du 27 juillet 1934 portant les faillites, B.O., 1934.

* 149 J. RENAULD, et P. COPPENS, « Notion de concours entre créanciers son application au régime des sociétés dissoutes et les successions acceptées sous bénéfice d'inventaire », in R.C.J.B., 1965, p. 101-119.

* 150 L. VINCENT, cité par T'KINT, op. cit., n° 85, p. 51

* 151 Voir RENAULD et COPPENS, op. cit., p. 106

* 152 F. T'KINT, op. cit., n° 85, p. 51 ; RENAULD et COPPENS, op. cit., p. 109.

* 153 Idem, pp. 109-110.

* 154F. T'KINT, op. cit., n° 88, p. 52

* 155 F. T'KINT, op. cit., n° 102.

* 156 I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., XXXIVe Séminaire CDVA, Bruxelles, Bruylant, 1983, p. 102.

* 157 Ibidem.

* 158 I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., R.C.J.B., 1980, p. 162.

* 159 A-M STRANART, op. cit., pp. 81-86; F. T'KINT, op. cit., pp 180-182; J. HEENEN, "nantissement du fonds de commerce et immeubles par destination", in R.C.J.B., 1964, pp 21-30; RENE DE RYKE, "concours des privilèges: vente d'objets mobiliers à destination commerciale et le gage sur fonds de commerce" in R.C.J.B., 1969, pp 482-496; M.V. QUICKENBORNE, "Du concours entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le gagiste ordinaire", in R.C.J.B., 1994, pp 37-72.

* 160 Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 163.

* 161 Ibidem.

* 162 F. T'KINT, op. cit., n° 344, p. 179.

* 163 Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 163

* 164 I. MOREAU MARGREVE, op. cit., p. 162 ; Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 168 ; A-M. STRANART, op. cit , p. 44 ; Jacques HEENEN, note sous liège, 4 Juin 1963, R.C.J.B., 1964, p. 21.

* 165 STRANART, op. cit., p. 44.

* 166 L'arrêt peut se résumer comme suit : Un commerçant exploite son fonds de commerce dans un immeuble qui lui appartient ; il a donné le fonds en gage à un créancier et hypothèque l'immeuble au profit de l'autre. La question étant de déterminer les droits de chacun.

* 167 Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 168, p. 810.

* 168 J. HEENEN, op. cit., p. 24.

* 169 Cass. belge, 19 nov., 1992, commenté par MARC VAN QUICKENBORNE, " Du concours entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le gagiste classique", in R.C.J.B., 1994, pp 28-72.

* 170 C. GRESSE, Les entreprises en difficultés, Paris, Economica, 1994, p. 12.

* 171 Ibidem

* 172 F. T'KINT, op. cit., n° 90, p. 54.

* 173 M. MUDACUMURA, Le sort des créanciers dans la faillite en droit rwandais, mémoire de licence, Butare, UNR, 2000, p. 2.

* 174 Décret du 27 Juillet, 1934 portant faillites, B.O., 1934, p. 796.

* 175 Toutefois, la novelle loi sur le Ministère Public limite l'intervention de celui-ci aux seules matières pénales. Le Ministère Public ne serait plus admis à introduire une action pour faire déclarer la faillite (Voir la LO n°03/2004 du 24/03/2004 portant organisation, compétence et fonctionnement du MP).

* 176 F. T'KINT, op. cit, n 105, p. 63.

* 177 Ibidem

* 178 Le terme « jugement déclaratif de la faillite » utilisé dans la législation sur les faillites a été vivement critiqué par T'KINT qui estime qu'il est incorrect. Pour lui, il s'agit plutôt d'un jugement constitutif d'un état nouveau (F.T'KINT, op., cit., n° 109, p. 67)

* 179 Voir les art. 7, 8 et 9 du décret sur les faillites.

* 180 RIPERT et ROBLOT, Traité élémentaire de Droit commercial, 5e éd., LCDJ, 1964, p. 641.

* 181 Décret du 20 mars 1923 portant warrants, B.O., 1923, p. 289.

* 182 Loi belge du 5 Mais 1872 portant révision des dispositions du code du commerce relative au gage et à la commission ; voir aussi cass. belge 8 Avril 1976. op. cit., R.C.J.B., p. 121.

* 183I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., p. 160 ; voir aussi Y. MERCHIERS, op. cit., p. 285.

* 184 Idem, p. 161.

* 185 Cass., 8 Avril 1976, op. cit., R.C.J.B., pp. 126-127.

* 186 Y. MERCHIERS, « La réalisation du gage sur fonds de commerce du failli » note sous Liège, 9 janvier 1987, in R.C.J.B.,

1989, p. 278.

* 187 Cass. belge, 8 Avril 1976, op. cit., R.C.J.B., pp. 126-127.

* 188 Les actes de gage que nous avons utilisés ont été conclus au moment où la BACAR n'avait pas encore changé de dénomination. Pour le moment la BACAR est devenue FINA BANK S.A avec effet au 1er septembre 2005.

* 189 I. MOREAU-MARGREVE, Op. cit., R.C.J.B., note 92, p. 155.

* 190 P. KANTENGWA, L'acte sous seing privé en droit judiciaire rwandais, mémoire de licence, UNR, Kigali, 1990, p. 6

* 191 G. BERLIOZ, Le contrat d'adhésion, Paris, Dalloz, LGDJ, 1973, p.40.

* 192 Idem, p.27.

* 193 Ibidem

* 194 A ce propos voyez l'acte de gage émis par la BCR, et la BACAR en annexe.

* 195Idem, p.37.

* 196 Rennes, 26 oct. 1950, Gaz. Pal. 1957. 1. 27.

* 197 RIEG, Le rôle de la volonté dans l'acte juridique en droit civil allemand, 1961, Paris, p. 244, cité par G. BERLIOZ, op. cit., pp.108-109

* 198 A-M. STRANART, op.cit., n° 120, pp. 174-175

* 199 I. MOREAU- MARGREVE, op. cit., CDVA, p. 197; A-M, STRANART, op. cit, p. 175

* 200 A-M. STRANART, op. cit., p.175

* 201 Idem, p.200.

* 202 voir l'art. 2 de l'acte BACAR et l'art. 2 de l'acte BCR.

* 203 Cette stipulation se trouve dans tous les actes analysés si bien qu'elle pourrait être analysée en une clause de style

* 204 Voir l'art. 4 al. 1 de l'acte BCR

* 205 J. CARBONNIER, Droit civil : les obligations, t. 4 , 22e éd. refondue, Paris, Dalloz. 1975, n° 68, p. 143.

* 206 G.BERLIOZ, Op. cit., p.109.

* 207 BERLIOZ, op. cit , p. 38.

* 208 Voir les arts.11 des actes BCDI et BCR

* 209 I. MOREAU MARGREVE, op. cit, R.C.J.B., 1980, p. 152.

* 210 J. CARBONNIER, op. cit., n° 115, 2000, p. 232.

* 211 Cass. belge, 14 avril 1972, JCP, 1972, II. 17269 cité par BERLIOZ, op. cit., p. 148, note 170 bis.

* 212 Art. 12 du Décret hypothécaire belge, cité par F. T'KINT, Op. cit, p. 114, n° 206.

* 213 F. T'KINT, Op. cit., n° 207, p. 115; H. DE PAGE, Op. cit., t. VII, 2e éd., n° 17, p. 21.

* 214 H. DE PAGE, et R. DEKKERS, op. cit, t. VII, 2e éd., p. 21, citant Gand, 3 avril 1935.

* 215 F. T'KINT, Op. cit, n° 331, p. 174.

* 216 J. MARCHAL et F. POULON, Monnaie et crédit dans l'économie française, t. 2, Paris, Cujas, pp. 249-250.

* 217 I. MOREAU MARGREVE, op.cit, R.C.J.B., 1980, p. 169.

* 218 Ibidem

* 219 I. MOREAU-MARGREVE, op. cit., R.C.J.B., 1980, p. 169.

* 220 OHADA signifie Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ; voir aussi ANOUKAHA, F.et autres, OHADA, Les sûretés, Bruxelles, Bruylant, 2002.

* 221 Http//www.jurisint. org. Pub/ohada/index/index. org. fr. html






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