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L'enfant naturel haitien entre le droit et la realite

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par Rose Maggy b. SHOUTE
Faculte de droit et des sciences economiques de Port- au- Prince - Licence 2002
  

Disponible en mode multipage

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Introduction

Pendant longtemps, le monde occidental considérait l'enfant naturel haïtien comme un sujet marginalisé qui n'a jamais su bénéficier du statut socio juridique conféré à l'enfant légitime, c'est-à-dire être doté de la personnalité juridique et ayant ses propres droits de manière équitable et équilibrée . Le fait par les concepteurs d'avoir eu un enfant hors mariage traduisait leur volonté de se placer en marge de la société et des règles matrimoniales. En France le statut juridique de l'enfant naturel a beaucoup évolué. La loi du 3 janvier 1972 a posé le principe d'égalité entre l'enfant naturel et l'enfant légitime. Chaque année environ 30% des enfants naissent hors mariage. A l'heure actuelle, les réactions de rejet des enfants naturels ont disparu.1(*) Il n'y a plus d'enfants illégitimes, il n'y a que des parents illégitimes affirment les commentateurs de la dite loi.

Le droit subit depuis plusieurs décennies une influence marquée par les Conventions. Les organisations des Nations Unies et des Etats Américains (ONU et OEA), dans leurs textes concernant les droits de l'enfant, ont banni toutes les formes de discriminations entre enfants, basées sur les conditions matrimoniales de leurs parents. L'article 2 de la convention relative aux droits de l'enfant adopté le 20 novembre 1989 par l'Assemblée générale des Nations Unies en est un témoignage.

Selon des auteurs comme Jean Carbonnier, Gabriel Marty et Pierre Raynaud, pour ne citer que ceux-là, plusieurs solutions en vue de protéger la filiation naturelle sont possibles. Pourtant en Haïti, l'inégalité persiste, l'écart entre la juridiction et les pratiques quotidiennes est trop flagrant.

Le code civil haïtien, qui est un plagiat du code de Napoléon, est très discriminatoire à l'égard des enfants naturels. Les données statistiques révèlent qu'en Haïti les naissances illégitimes sont supérieures à celles légitimes. Il y a un pourcentage de 75% d'enfants à naître hors mariage.1(*)

Conscient de ce taux élevé, le législateur haïtien est plusieurs fois intervenu pour donner un nouveau statut à l'enfant naturel et lui reconnaître les mêmes droits que l'enfant légitime. Il a aussi manifesté son souci de protéger les familles instituées en dehors du mariage civil ou religieux. Nous en avons pour preuve le décret du 22 décembre 1944, le décret du 27 janvier 1959 et les articles 259 à 262 de la constitution de 1987.

Certains auteurs haïtiens comme Me Grégoire Eugène, Me Ertha Pascale Trouillot, Me François Latortue... ont fait des études sur la filiation en Haïti et ont formulé des propositions en vue d'un relèvement du statut socio juridique de l'enfant naturel haïtien. Cette question préoccupent les sociologues, fait écho dans les médias et l'opinion publique. C'est sur cette base que nous avons choisi le sujet: «  L'enfant naturel haïtien entre le droit et la réalité. »

La question des enfants naturels dans la société haïtienne soulève des réactions. Elle est un sujet de réflexion sociologique surtout que la polygamie est l'essence des structures familiales africaines. Désormais, l'enfant naturel est devenu un membre à part entière de la société et des droits fondamentaux lui sont reconnus de manière équitable et équilibrée. Cependant l'effectivité de ces droits dépend de la réalité sociale. Les problèmes posés par cette question sont de divers ordres : juridiques, sociales, religieuses, morales.

Sur le plan juridique, on ne peut pas présumer la paternité naturelle. La présomption de paternité légitime « Pater is est quem nuptiae demonstrant » ne s'y applique pas. D'ailleurs, la qualité de père peut-être toujours contestée par la mère naturelle.

Du point de vue social, la mention d'enfant naturel portée dans l'acte de naissance représente un accroc. On a une perception négative de l'enfant qui est souvent gêné à produire cet acte dans certains milieux. Entre enfants naturels et enfants légitimes de mêmes géniteurs, il existe des malentendus, des heurts...

Sur le plan religieux, certaines sectes développent un certain préjugé contre les enfants naturels. Certains leaders protestants refusent de les baptiser ou de les présenter au temple. D'autres ne les présentent pas en même temps que les enfants légitimes, surtout pendant le culte d'adoration. Dans certaines églises catholiques, il y a un jour, une heure spéciale pour le baptême des enfants nés hors mariage. Certaines écoles congréganistes ne les reçoivent pas. Dans les séminaires de théologie catholique, on exige même l'acte de mariage des parents du postulant.

Sur le plan moral, l'enfant naturel connaît des effets néfastes de sa famille, des causes de déséquilibre psychologique qui peuvent nuire sa santé. Ces problèmes soulèvent quelques interrogations :

La question de filiation naturelle ne constitue-t-elle pas un véritable dilemme pour la société haïtienne ?

Une solution à ce problème n'est-elle pas une urgence de l'heure ?

Quels sont les voies et moyens à utiliser à cette fin ?

Les hypothèses de travail sont :

1- La filiation naturelle est un des grands dilemmes de la société haïtienne.

2-Il est urgent de trouver une solution.

L'objectif principal ou la finalité de l'étude est l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des enfants naturels.

Nous nous fixons les objectifs secondaires suivants :

1- Présenter un aperçu sur la filiation naturelle en France.

2- Présenter la situation socio juridique de l'enfant naturel en Haïti.

3- Jeter un regard critique sur la filiation naturelle et sa réglementation

4- Envisager des perspectives de solution

Pour réaliser ce mémoire, nous avons utilisé une méthodologie scientifique, rigoureuse et diverse.

La première démarche a été pour nous de constituer une masse de données à partir des sources bibliographiques étrangères et haïtiennes et d'après la mémoire collective.

A partir d'interviews libres, nous avons cherché à saisir les mécanismes de la filiation naturelle en Haïti. Nous avons eu des entretiens avec des prêtres, des pasteurs de différentes congrégations, des couples mariés, des concubins, des associations féministes et enfin des juristes.

Le travail comporte deux parties. La première sous le titre: « La filiation naturelle en France et en Haïti » réunit les deux premiers chapitres dont l'un donne une vue sur le phénomène en France ; l'autre l'étudie dans le contexte socio juridique haïtien.

La deuxième partie titrée : « Critique de la situation de l'enfant naturel en Haïti et éléments de solution » regroupe les deux derniers chapitres pressentant l'un un regard critique sur la filiation naturelle en Haïti, l'autre des éléments de solutions.

 

PREMIERE PARTIE

VUE SOCIOLOGIQUE SUR LA FILIATION NATURELLE EN FRANCE ET EN HAITI

Le terme filiation désigne le rapport entre une personne et ses descendants. On distingue trois sortes de filiations : la filiation légitime désignant la situation de l'enfant né de parents mariés «  ensembles », la filiation adoptive dépendant d'un acte de volonté et la filiation naturelle qui désigne la situation de l'enfant né de parents qui ne sont pas mariés. C'est cette filiation qui fera l'objet de notre étude.

Parmi les filiations naturelles on distingue : L'enfant naturel simple né de parents tous deux libres matrimonialement, l'enfant adultérin dont l'un des auteurs est marié avec une tierce personne et l'enfant incestueux dont les auteurs ont un lien de parenté ou d'alliance.

Cette première partie regroupera les deux premiers chapitres de l'étude. Le premier chapitre traitera de la filiation naturelle en France, le second de la filiation naturelle en Haïti.

CHAPITRE I

APERCU SUR LA FILIATION NATURELLE EN FRANCE

En raison des affinités historiques, culturelles et même juridiques entre la France, notre ancienne Métropole et Haïti, nous croyons opportun devoir jeter un coup d'oeil sur la question de la filiation naturelle en France avant de l'étudier en Haïti.

Ce chapitre sera divisé en deux sections dont la première donnera une vue sociologique de l'enfant naturel en France et l'autre en présentera le statut juridique.

Section 1- Vue sociologique sur la filiation naturelle

Dans cette section, nous donnerons une vue théorique sur la filiation naturelle. Nous présenterons d'abord le cadre conceptuel de l'étude puis la perception sociologique du phénomène en France.

Cadre conceptuel

Il s'agit dans ce segment de définir les principaux concepts qui seront utilisés dans l'étude.

1- concepts liés à la thématique

Adultère :

Le fait par un époux d'avoir des relations sexuelles avec une autre personne autre que son conjoint.

Enfance :

Première période de la vie humaine de la naissance à l'adolescence.

Enfant naturel :

Enfant né de parents qui ne sont pas marié ensemble.

Coutume :

Norme de droit objectif fondé sur une tradition populaire qui prête à une pratique constante, à un caractère juridiquement contraignant.

Concubinage :

Liaison de fait établie, généralement avec communauté de vie, entre un homme et une femme non mariés et a laquelle le droit attache diverses conséquences.

Femme :

Etre humain appartenant au sexe capable de concevoir les enfants a partir d'un ovule fécondé.

Filiation :

Lien de parenté unissant l'enfant à son père ou à sa mère.

Filiation naturelle :

Situation de l'enfant né de parents qui ne se sont pas mariés ensemble.

Inceste :

Union en vue du mariage que la loi interdit entre les parents ou alliés qu'elle détermine.

Moeurs :

Habitude d'une société, d'un individu relatif à la pratique du bien et du mal.

Polygamie:

Le fait pour un homme d'être marié simultanément à plusieurs femmes ou fait d'être marié à plusieurs conjoints soit pour un homme (polygamie) soit pour une femme (polyandrie).

Post nuptias :

Expression latine signifiant postérieurement à la célébration du mariage

Réalité :

Caractère de ce qui ne constitue pas seulement un concept, mais un fait.

Société :

Etat particulier à certains êtres qui vivent en groupes plus ou moins et organisés.

Subside :

Don, subvention.

Succession :

Le fait pour une personne de prendre la place d'un autre à la mort de celui-ci ou après cessation de son activité.

Lorsqu'il s'agit de succéder à un défunt à la tête de ses biens, la succession désigne surtout la dévolution du patrimoine héréditaire et ce patrimoine même.

Taux d'illégitimité :

Rapport du nombre de naissances hors mariage au nombre total des enfants nés vivants.

2- concepts juridiques

Ab intestat :

Formule dérivée du latin ab intestato, qualifiant soit la succession légale qui s'ouvre à défaut de testament, soit l'héritier d'un intestat appelé par la loi.

Adaptation :

Terme doctrinal servant à désigner les moyens qui tendent à assouplir le mécanisme des règles de conflit de lois.

Code :

Corps cohérent de textes englobant selon un plan systématique l'ensemble des règles relatives à une matière et issu, soit de travaux législatifs, soit d'une élaboration réglementaire, soit d'une codification formelle de textes préexistant et reclassés selon leur origine.

Convention :

Accord de volonté entre deux ou plusieurs personnes destiné à produire un effet de droit quelconque.

Devoir :

Certaines règles de conduite d'origine légale et de caractère permanent.

Droit :

Ensemble de règles de conduite socialement édictées et sanctionnées, qui s'imposent aux membres de la société.

Droit coutumier ou droit informel:

C'est un ensemble de règles coutumières ou de coutumes a valeur juridique qui régissent la vie des populations rurales.

Legs :

Action de céder la possession d'un bien à quelqu'un par testament.

Loi :

Toute norme ou système de normes d'ordre juridique.

Post nuptias :

Expression latine signifiant postérieurement à la célébration du mariage

Ratification:

Acte juridique unilatéral par lequel une personne approuve.

Reconnaissance :

Déclaration faite par un homme ou une femme dans certaines formes destinées a en assurer le caractère sérieux et la conservation relatant le lien de filiation qui unit l'auteur de la déclaration ont un enfant naturel.

B- Perception sociologique et ampleur du phénomène en France

1- perception sociologique.

La thèse classique voit dans l'illégitimité ou p1utôt dans l'union libre qui en est la source, un phénomène de déviance. L'union sexuelle ritualisée par le droit et les moeurs, le mariage constitue la norme sociale. L'enfant né en dehors de la norme est frappé d'un stigmate par la société.

Au sein de cette thèse, on note cependant une divergence entre sociologues : Pour les uns comme W. Goode, les parents naturels eux-mêmes perçoivent

leur situation comme déviante, ils n'y donnent aucune approbation, ils portent respect au mariage ; Pour les autres comme Rodman, le milieu déviant a sa propre échelle de valeurs, il sécrète un contre norme, un contre droit au regard duquel devient légitime ce que le droit étatique tient pour illégitime.1(*)

La statistique des naissances renseigne peu sur l'appartenance socioprofessionnelle des géniteurs. C'est quelque fois avec une autre signification que l'illégitimité est analysée comme un phénomène de classe ; on veut dire par là qu'elle a sa cause dans une inégalité de classe entre les deux parents de l'enfant ; que de cette inégalité de classe résulte un empêchement à mariage non moins contraignant que ceux de la loi, bien qu'il ne soit édicté que par les moeurs. A l'appui, on affirme que les pères naturels se retrouvent à égale dose dans toutes les catégories sociales, alors que les mères naturelles viennent pour la plupart du prolétariat. Mais l'affirmation doit peut-être plus, au souvenir historique du concubinage romain qu'à une recherche rigoureuse.

Tant qu'il existe la présence des enfants naturels dans une société, les réflexions sociologiques vont s'intensifier. On s'attendrait à découvrir constamment dans l'histoire, comme par une conséquence du rapport de forces, une réaction de discrimination et de rejet. C'est pourtant un fait que, dans certaines conjonctures qui se sont rencontrées de l'Antiquité grecque à notre époque, la société dominée par les enfants illégitimes en est venu de proclamer très haut.

Plusieurs explications sont possibles :

Soit que la société ait la volonté de rompre la continuité du statut social, selon le modèle révolutionnaire, ou qu'elle chérisse les valeurs de l'individualisme, place la réussite. Donc il faut donner à chaque enfant son égalité au départ. Il y a eu de cela dans les réformes du début de ce siècle;

Soit que la société des légitimes par instinct ait un comportement empirique;

Soit que les dirigeants, par calcul, sentent ou jugent le phénomène de l'illégitimité comme inoffensif. Cette réaction concerne des milieux où la transmission des biens et des privilèges des parents aux enfants, est dénuée d'importance ou provisoirement inactuelle. Joint que ces milieux restent suffisamment minoritaires pour que le système de stratification sociale ne soit pas menacé par leur promotion.1(*)

La filiation naturelle tend donc à devenir une situation qui n'a rien d'anormal socialement, ce que traduit l'augmentation considérable des naissances spontanées. Cette évolution démontre un rapport direct entre les droits de l'enfant naturel et la difficulté de la preuve de la filiation.

Après 1972, les interprètes ne tardèrent pas à soulever le problème. Si au delà des nombreuses applications spéciales qu'elle avait faite de la notion, la nouvelle loi n'avait pas entendu, implicitement attribuer à la possession d'état un rôle général de preuve dans la filiation naturelle. Voyons maintenant l'ampleur de ce phénomène en France

2- ampleur

La filiation naturelle est longtemps apparue comme une situation anormale tant socialement, parce qu'elle traduit un rejet des cadres traditionnels de la famille, que statistiquement parce qu'elle est beaucoup la moins fréquente. Le taux d'illégitimité est le rapport du nombre de naissances hors mariage au nombre total des enfants nés vivants. Ce taux, en France peut être suivi à travers les statistiques de l'état civil depuis le début du 19e siècle.

De 6,90 % (ou peut-être 5 %), pour la période de 1895-1830), il est passé en 1917 à 14,2 %). Puis on assiste à une décrue. 6.7 %) en 1936, 6,4 en 1955, 5, 9% en 1962-1965). A partir de 1965 il y a une remontée continue et très forte : 8,5 en 1976, 12,7 en 1981, 2, 8.2 % en 1989, 31,8 % en 1991.1(*)

Une part importante de ces enfants naturels ne le restera que quelque temps. Une statistique précise des légitimations par mariage subséquent qui aplatirait sans doute la courbe ascendante de l'illégitimité fait défaut. Pour les années récentes, des sociologues ont cru observer une moindre propension des cohabitants à revenir au mariage dès l'arrivée du premier enfant. Au demeurant, le taux d'illégitimité est une mesure qui appelle des analyses plus fines parce que :

1e) tel qu'il est construit, il est influencé par les variations propres de la natalité légitime, croissant ou décroissant.

2e) c'est une moyenne nationale qui peut recouvrir des disparités considérables, géographiques ou sociales. Par exemple en 1969 Paris en avait 14,4 %, Aveyron, 2,5 %, Vendée, 2,6 % ; en 1991 0n enregistrait 2,5 % en Alsace, 36 % en Normandie). Les reconnaissances paternelles n'ont jamais été rares : 35 % des illégitimes vers 1850, 47 % vers 1900 et elles ont beaucoup augmenté au 20e siècle.

3e) Les reconnaissances sont passées de 23 % en 1971 à 40 % en 1981, puis à 70% en 1992.Ce qui montre, qu'il s'agit bien d'un choix délibéré.1(*) Mais il faudrait suivre et rechercher dans quelle mesure ces reconnaissances ne préparaient pas une légitimation. En 1990, 397 constatations de reconnaissances ont été accueillies, 226 rejetées. En 1990, 155 actions en recherche de paternité ont été accueillies, 57 ont été rejetées. Par rapport à 180.000 naissances illégitimes, environ 212 actions c'est infirme q'un certain nombre de pères naturels sont incités à reconnaître volontairement leurs enfants.1(*)

On a incriminé tantôt l'étroitesse des cas d'ouverture tantôt l'ignorance et la pauvreté des mères naturelles. Probable aussi que beaucoup de mères abandonnées répugnent à engager une procédure qui aboutirait à conférer au père, déserteur des pouvoirs sur l'éducation de l'enfant. Et depuis 1990, l'attrait pour la maternité sans paternité a pu s'accroître dans quelques cercles intellectuels.

A l'heure actuelle, il faut surtout faire entrer en ligne de compte la cohabitation juvénile á laquelle doit être attribuée la très grande majorité des naissances hors mariage. Le développement de la cohabitation juvénile a dû contribuer au développement de la légitimation bien que l'on manque de données précises. Anizard et M. Maksud estimaient que de 1900 à 1971, la proportion des légitimités est passée de 27 à 55 % des enfants nés dans la condition d'enfants naturels. En 1990, il y a eu 105 légitimations post-nuptias, 64 légitimations par autorité de justice.

Nous avons présenté dans cette section, le cadre conceptuel et la perception sociologique du phénomène de la filiation naturelle en France. La section suivante présentera le statut juridique de l'enfant naturel dans ce pays.

Section 11- Le statut Juridique de l'enfant naturel en France.

Le statut juridique de l'enfant naturel en France tel est l'objet de cette section. Nous considèrerons ce statut juridique d'abord dans l'ancien droit et dans le code civil de Napoléon, ensuite d'après les lois de 1972 et de 8 janvier 1993.

A- dans l'ancien droit et le code civil

Sous ce sous-titre sera étudiée la filiation naturelle d'abord dans l'ancien Droit, ensuite dans le code civil.

1- 1 dans l'ancien droit

Dans l'ancien droit fortement influencé par le droit canonique, l'existence même d'une famille naturelle était contestée par une partie importante de la doctrine qui ne pensait pas qu'il puisse avoir d'autre famille que celle qui se fonde sur le mariage.

La double règle que les bâtards ne pouvaient ni succéder, ni laisser une succession, avait probablement des racines dans la conscience collective. L'enfant qui était né à l'ombre du sacrement de mariage, était rejeté hors de la famille et même hors de la société. Mais les moeurs vont orienter le droit, et le droit lui-même était devenu plus nuancé.

Quelques coutumes admettaient le bâtard à l'héritage de sa mère ; il lui arrivait de réserver les legs de ses parents, des legs et que la jurisprudence du royaume avait fini par les valider. Les lois de Brumaire et Nivôse an II accueillirent les enfants naturels à égalité de vocation ab intestinat avec les enfants légitimes. De cette égalité la Révolution espérait une division accrue des patrimoines, une méthode pour résoudre en douceur la question sociale.

Toutefois le droit révolutionnaire n'accueillit les adultérins qu'avec réserve. Il leur accorda dans la succession de leurs parents, le tiers de la portion qu'il aurait eue s'ils avaient été légitimés mais c'était à titre d`aliments et non d'héritage; et l'on vit la convention, par un décret du 19 Floréal II, censurer comme immoral la déclaration d'une femme mariée que son enfant était d'un autre homme que son mari.1(*)

La défiance vis-à-vis des adultérins s'explique par le fait que l'adultérine va contre le mariage, que le mariage civil est une institution fondatrice de la République, et que faire des adultérins avait été naguère plaisir aristocratique, est monarchique.

C'était à eux qu'aboutissaient, faute de droits successoraux, les actions en recherche de la paternité de l'ancien droit, qui n'étaient guère plus que des actions à fins de subsides. Les officialités, primitivement compétentes, admettaient ces actions sur un fondement pénal, toute conjonction hors mariage était illicite. La prise en charge matérielle de l'enfant figurait parmi les dommages intérêts que pouvait réclamer la fille séduite.

Le rapprochement constaté à l'enfant naturel n'eût pour conséquence le développement de ses scandales, écarta toute preuve de la paternité naturelle autre que celle résultant de la reconnaissance du père exprimée dans un acte authentique.

La recherche de la paternité était libre. Certes, elle pouvait être inspirée par le désir de recueillir une succession, son seul but était d'obtenir des aliments. En fait, les actions en recherche de paternité s'ajoutaient celles dûes à l'action par laquelle la mère réclamait simplement les frais de gésine et d'entretien. Cette action qui n'avait d'ailleurs pas pour résultat d'établir la paternité, la dénonciation sous serment, de son prétendu séducteur pour une fille mère qui accouchait pour la première fois obligeait l'homme à pourvoir provisoirement aux frais. Le législateur révolutionnaire craignait que l'octroi qu'il faisait de droits beaucoup plus considérables.

1-2 Dans le code civil

En ce qui concerne l'établissement de la filiation naturelle, il fallut une reconnaissance de la part de chacun des parents. Si aucune ne veut reconnaître l'enfant, pour établir un lien de filiation à l'égard de la mère, l'enfant ne pouvait qu'agir en justice. Dans l'établissement de cette filiation, l'action en justice est purement et simplement interdite jusqu'en 1912.

Le code civil est défavorable à l'existence de la famille naturelle. Les rédacteurs de ce code ont ignoré ses composantes ou mis en doute sa constatation en ce qui concerne le lien entre les parents ou les rapports de ceux-ci avec leurs enfants.

En ce qui concerne les rapports entre le père ou la mère de l'enfant naturel et celui de la famille naturelle n'avaient pas en 1804, un rayonnement semblable à celui de l'enfant légitime. Le code civil prohibait en principe la recherche de paternité naturelle sauf le cas d'enlèvement de la mère. Puisque l'enfant naturel est rattaché de façon divisible à chacun de ses parents, la présomption de paternité est inexistante.

Le titre de naissance est insuffisant pour établir la filiation, il faut donc un acte volontaire de reconnaissance. A cette époque, il était difficile d'établir la filiation adultérine ou naturelle simple. Pourtant il existe une exception de la filiation illégitime : la filiation incestueuse où l'enfant est rattachée à sa mère.1(*)

Par ailleurs, pour qu'un enfant puisse être rattaché à son père ou à sa mère naturelle, il faut que l'enfant ne soit pas de filiation pré-établie. Si le père veut reconnaître l'enfant, il faut contester la filiation précédente par la reconnaissance. Celui-ci est un acte unilatéral et solennel, Il existe pour la validité de la reconnaissance des conditions de fond et des conditions de forme : En ce qui concerne les conditions de fond, il faut une manifestation de volonté réelle et consciente, l'acceptation de l'enfant n'étant pas obligatoire. Antérieurement à 1972, l'enfant naturel était empêché de recevoir de son père ou de sa mère naturel des donations ou des legs.2(*)

En ce qui a trait aux conditions de forme, l'acte solennel s'effectue en mairie, devant l'officier d'état civil, lors de la naissance de l'enfant, postérieurement ou antérieurement. La reconnaissance peut se faire aussi par acte authentique devant notaire, il n'est pas soumis à véracité et peut être le fait du père biologique ou de tout autre homme. Aux termes de l'article 335 du code civil, pour la mère, la reconnaissance est plus simple, l'acte de naissance portant l'indication de la mère suffit. Les effets de la reconnaissance sont rétroactifs, absolus et irrévocables. Ainsi, l'annulation de l'acte juridique nécessite la rupture de l'acte de volonté. La reconnaissance ne pourra être frappée de nullité que s'il y a vice du consentement (dol ou erreur) selon l'article 339.

Elle peut être contestée par toute personne y ayant intérêt. L'action est également ouverte au Ministère public d'après l'article 339 alinéa.1

Quand il existe une possession d'état conforme à la reconnaissance et pour une durée minimum de 10 ans, aucune contestation n'est recevable. S'il y a rupture de la reconnaissance, l'effet est rétroactif, mais l'auteur de la reconnaissance, de complaisance qui rompt ses engagements envers l'enfant, doit lui verser des dommages et intérêts.

La possession d'état est ce mode d'établissement de la filiation naturelle prévu par l'article 334-8 et il doit être continu et paisible, il ne fait que présumer la filiation naturelle jusqu'à preuve du contraire.

La relation judiciaire pour établir la filiation naturelle est:

1e) Si la mère n'a pas accouché sous X, l'enfant peut intenter une recherche de maternité naturelle fondée sur une présomption, des indices et dans un délai de 30 ans.

2e) Par l'intermédiaire de l'action en recherche de

Paternité simple et l'action à fin de subsides largement ouverte, mais aux effets restreints, l'enfant seul peut l'entreprendre sauf s'il est mineur.1(*)

Aux termes de l'article 340-5, 1382 à 1385, lorsque le juge accueille l'action et établit la paternité, le tribunal peut condamner le père à rembourser toute une partie des frais sans préjudices de dommages et intérêts auxquels il pourrait prétendre. Si le tribunal déroute l'action, le juge peut néanmoins allouer des subsides à l'enfant si les relations entre la mère et le défenseur ont été démontrées au moment de la conception de l'enfant d'après l'article 340-7.

Au regard de l'article 908 et 1097, l'enfant ne peut bénéficier que de libéralités réduites.

Quant à la légitimation des droits naturels, un enfant naturel ne devient légitime que du fait de mariage des parents ou sur décision judiciaire. On considère trois cas :

1e) La légitimation par le mariage : aux termes de l'article 331, tous les enfants nés hors mariage sont légitimés de plein droit, subséquent de leur père et mère. Cette légitimation est automatique si trois conditions sont remplies : mariage des parents, filiation établie et filiation antérieur au mariage.

2e) Légitimation post-nuptias : elle ne peut y avoir lieu qu'en vertu d'un jugement constatant que l'enfant a eu depuis la célébration du mariage la possession d'état d'enfant légitime. Si cette légitimation n'a été établie qu'après la célébration du mariage, le législateur la considère comme douteuse, et elle ne peut y résultée d'une adoption ou d'une reconnaissance de complaisance. Le changement de nom se fait de plein droit si l'enfant est mineur.

3e) Légitimation par autorité judiciaire : Il faut que les parents réclament la légitimation après avoir établi la filiation de l'enfant, et l'impossibilité de mariage des parents. La légitimation par effets de justice n'a pas d'effets rétroactifs.

Pour le législateur, il s'agit de donner volontairement aux femmes fécondées hors mariage, la possibilité d'agir à l'égard du père, soit en dirigeant contre lui une action en recherche de paternité, soit en réclamant des subsides, à celui ou ceux qui auraient eu des relations sexuelles au moment de la période légale de la conception de l'enfant.

Il existe aussi des conditions pour l'action aux fins subsides : Tout enfant naturel peut réclamer des subsides aux hommes ayant eu des relations sexuelles avec la mère pendant la période légale de conception. La mère n'a pas besoin d'apporter la preuve que le défenseur est le père de l'enfant. Il lui suffit de prouver par tous moyens qu'elle a eu des relations sexuelles avec lui. Le défenseur, de son côté peut prouver qu'il n'est pas le père biologique de l'enfant. Cette action peut-être intentée pendant toute la durée de la minorité de l'enfant et peut-être l'objet d'une fin de non recevoir. 

En ce qui concerne les effets de l'action, aucun lien de filiation n'est établi juridiquement entre le père possible de l'enfant. Le tribunal condamne le ou les pères à payer des subsides, ou une pension alimentaire. L'action n'a aucun effet sur le plan personnel attaché à la filiation.

B - D'après les Lois du 3 janvier 1972 et du 8 janvier 1993

1-1 D'après la loi du 3 janvier 1972

La vraie réforme en matière de filiation réside en la loi du 3 janvier 1972. Cette loi a posé le principe de l'égalité devant la loi des enfants naturels et des enfants légitimes; elle a effacé, dans toutes les mesures du possible, les discriminations défavorables à ces derniers. Cette volonté égalitaire est affirmée par l'article 334 : « l'enfant naturel a, en général, les mêmes droits et les mêmes devoirs que l'enfant légitime dans ses rapports avec père et mère. Il entre dans la famille de son auteur. »

Cet article a consacré l'avènement de la famille naturelle. Depuis cette loi, la famille naturelle est aussi large que la famille légitime.1(*) Pour les rapports d'ordre patrimonial, la loi restreint les droits successoraux de l'enfant adultérin, ne lui donnant droit qu'à la moitié de ceux auxquels il aurait eu droit s'il avait été légitimé.

La dite loi a entraîné l'abandon de la prohibition antérieure.

Quant aux catégories d'enfants, le principe n'est pleinement respecté qu'en ce qui concerne les enfants adultérins. En outre, il existe une autre limite : la filiation d'un enfant naturel ne peut en principe, être établie lorsqu'il a déjà une autre filiation. Cette loi a, cependant, maintenu le rôle traditionnellement dévolu à la volonté individuelle dans l'établissement de la filiation naturelle. Cette solution surprenante de prime abord en ce qu'elle contredit le souci qu'a la loi de consacrer plus étroitement que jadis la vérité biologique, s'explique par le désir qu'a eu le législateur, de ne pas empêcher les reconnaissances de complaisance dont, selon l'exposé des motifs, la pratique est soutenue par une sorte de tradition populaire. Au demeurant, la prohibition de cette reconnaissance serait difficile à faire respecter.

Le maintien de cette conception n'a cependant pas empêché le législateur d'apporter quelques améliorations au droit antérieur. Un certain rôle a été accordé à l'acte de naissance; le contrôle a posteriori de la véracité de la reconnaissance, par la voie de l'action en constatation a été conservé ; la loi s'efforce de limiter les inconvénients d'un changement d'état consécutif à une constatation de reconnaissance. Le rapprochement con staté entre famille naturelle et légitime s'est accentué en une décennie.

Signalons un relatif alignement en matière d'autorité parentale, du moins lorsque l'établissement de la filiation naturelle découle des reconnaissances des pères et mères.

1-2 d'après la loi du 8 janvier 1993

La loi du 8 janvier 1993 a apporté diverses modifications d'importance variable au droit de la filiation, non sans contradiction d'ailleurs : parfois dans le sens d'une importance accrue de la vérité biologique, parfois dans le sens d'une singulière protection du secret. Une mère peut reconnaître l'enfant dont elle a accouché et qu'elle a remis par l'intermédiaire d'une association à un homme marié qui l'a déclaré et reconnu, sans que l'auteur de la reconnaissance puisse lui opposer ; l'article 338 est inapplicable lorsque la prétendue mère est une femme mariée.

Consacrant les solutions dégagées par la jurisprudence, la loi du 8 janvier 1993, en son article 22, a modifié et complété l'article 335 du code civil, désormais rédigé de la manière suivante : La reconnaissance d'un enfant naturel peut être faite dans l'acte de naissance, par acte reçu par l'officier de l'état civil ou par tout autre acte authentique. 

La dite loi, en matière de preuve de la filiation, s'est inspirée, du moins dans l'intention des auteurs, du projet de loi initial par le désir de faciliter l'établissement de la filiation naturelle. Mais le cours des débats parlementaires a transformé ce désir d'une stupéfiante manière parce qu'antérieurement à la réforme de 1993, l'article 341 du code civil, après avoir disposé qu'en principe la recherche de la maternité est admise en son premier alinéa ; principe paraissant naturel, absolu, et immuable, disposait en son alinéa 2 que l'enfant qui exercera l'action sera tenu de prouver qu'il est celui dont la mère prétendu est accouchée et qu'il sera reçu à le prouver en établissement qu'il a, à l'égard de celle-ci, la possession d'état d'enfant naturel, qu'à défaut, la preuve de la filiation pourra être faite par témoins; s'il existe, soit des présomptions ou indices graves, soit un commencement de preuve par écrit au sens de l'alinéa 4 de l'article 324 du code civil.

La loi du 8 janvier 1993 a supprimé l'exigence du passage par des cas d'ouverture à l'action en recherche judiciaire de paternité naturelle. Ce qui ouvre la porte à des possibilités selon l'article 25.

Toutefois, si le père prétendu et la mère ont vécu pendant la période légale de la conception en état de concubinage impliquant, à défaut de vie, des relations stables ou continues, l'action peut être exercée jusqu'à l'expiration des deux années qui suivent la cessation du concubinage. Si le père prétendu a participé à l'entretien, à l'éducation ou à l'établissement de l'enfant en qualité de père, l'action peut être exercée jusqu'à l'expiration des deux années qui suivent la cessation de cette contribution.1(*)

Cette section a été consacrée à l'étude du statut juridique en France d'abord dans l'ancien droit et le code civil ensuite d'après les lois du 3 janvier 1972 et du 8 Janvier 1993. Ainsi s'achève ce premier chapitre du travail.

Le chapitre suivant traitera de la filiation naturelle dans le contexte socio juridique haïtien.

CHAPITRE II

LA FILIATION NATURELLE : VUE SOCIOLOGIQUE ET STATUT JURIDIQUE

Le droit de la filiation est gouverné par un principe essentiel, celui de la primauté légitime. Le seul enfant qui intéressait le législateur, la société et l'église en particulier, est l'enfant du mariage.

La primauté de la filiation légitime se traduisait par une très forte inégalité quant à l'établissement et aux effets de la filiation. Cet établissement est bien plus facile que celui de la filiation naturelle. Une étude sur la condition sociale et juridique de ces enfants revêt une importance capitale en Haïti , une ancienne colonie française où les relations légales étaient rares et où des unions libres résultaient des naissances illégitimes. Ce chapitre comportera deux sections dont la première étudiera la perception sociologique de la filiation naturelle en Haïti et la seconde, son statut juridique.

Section 1

L'enfance naturelle en Haïti du point de vue sociologique.

Nous présenterons dans cette section, d'abord l'ampleur et la perception du phénomène des enfants nés hors mariage en Haïti ensuite les divers courants de pensée y relatifs.

A- Ampleur

1- avant l'indépendance.

A la veille de la Révolution française, la population blanche de Saint Domingue, sans compter les troupes cantonnées dans les villes et les marins des navires de guerre qui stationnaient dans les ports de la colonie, s'élevait à 30.826 habitants dont 21.166 hommes et 9660 femmes. Ce qui faisait plus de deux hommes pour une femme.

Ce chiffre donnant par un tableau datant de 1789, n'est pas sensiblement différent de celui qu'a fourni, pour le même temps, Moreau de St-Méry, Malhouet M. de la Luzerne.1(*) D'où une prolifération des enfants issus d'unions illégales et des négresses. On comprend que les sang-mêlés aient été si nombreux à St Domingue. Aux 21.166 hommes de la population permanente, il faut ajouter les soldats et les officiers de l'armée et les nombreux marins de la flotte qui visitaient fréquemment certaines villes d'Haïti. Sur toute la population libre de la colonie, montant à peu près à 58.000 âmes, il n'y avait d'après Hilliard d'Auberteuil, que 3000 femmes mariées, dont 2000 blanches et 1000 mulâtres et négresses libres.2(*)

Plus de 1200 blanches et 2000 mulâtresses ou négresses étaient livrées à la prostitution ou vivaient en concubinage, sans compter la foule innombrable des esclaves noires soumises aux caprice libidineux du maître.

Les facilités de débauches empêchant les jeunes gens de se marier, un nombre considérable d'honnêtes et vertueuses filles restent sans établissement.

Il y avait à saint Domingue une grande quantité de blancs mariés à des personnes de couleur. On accabla ces blancs de si cruels mépris, qu'on arrêta subitement ces associations dictées par la nature et qui auraient fait rapidement peupler et prospérer ces îles auprès du gouvernement métropolitain.

Comme d'année en année augmentait le nombre des affranchis et que cet accroissement paraissait mettre en danger l'avenir de la colonie, on voulut y apporter des entraves. Malgré divers règlements locaux et les difficultés créées par une ordonnance de 1775 qui essaya de restreindre les libertés non justifiées, le nombre des affranchissements suivit une progression ascendante.

D'après Moreau de St Méry, les affranchis étaient passés de 500 en 1703, à 1590 en 1770, à 6000 en 1775, à 25000 en 1780, à 28000 vers 1789.1(*) A ce chiffre, il faudrait ajouter ceux qui restèrent occultes. Combien une pareille marche a dû faire propager le concubinage dont les blancs veulent faire rejaillir maintenant la peine sur les fruits innocents qui en sont provenus.

Plusieurs blancs, ayant eu des enfants avec des filles de couleurs voulant s'arracher, eux et leurs enfants, à ce mépris injuste, s'établirent en France avec elles et par un nouveau mariage, ils légitimèrent leurs enfants.

Un arrêt du conseil défendait ces mariages même en France, et depuis, on vit des curés à Paris, refuser de marier des hommes de couleur avec des blanches. Ces mariages se multipliaient et le nombre des affranchis, ces alliés naturels de l'esclave augmentait d'année en année. D'ou les doléances des colons.

A l'époque coloniale, le degré de polygamie est en rapport avec le statut social.

2- à partir de l'indépendance

Les statistiques confirment l'observation courante : on compte, dans l'ensemble de la population rurale, trois fois plus de ménages placés que de ménages mariés. Et cette population semble avoir été largement faussée. Lors du recensement de 1950, entre 20 et 50 ans, ou dénombrerait six fois plus de placés que de mariés : placés 60% ; mariés 10% célibataires et autres 30 %.1(*)

Entre 20 et 30 ans, on dénombre encore près de 1/3 de célibataires dans la population rurale.

L'enquête démographique menée avec quelque précision dans les communes de Grand Gosier et d'Anse à Pitre indique que 8% seulement des chefs de ménage ont entre 20 et 30 ans. Le paysan n'envisage de fonder un foyer qu'à partir de 25 ou 30 ans.

Au regard des statistiques, il semble qu'entre 20 et 50 ans il y avait en moyenne 58 femmes pour 42 hommes sur 100 individus placés, ce qui représenterait environ un cas de polygamie pour 3 ménages.1(*)

Les statistiques du centre de Recherches Caraïbes, montrent que malgré l'augmentation rapide du nombre de mariages, un homme sur trois, âgé de 30 ans au moins, se mariait soit  80 % des enfants sont illégitimes.

Selon d'autres données statistiques fiables, en ce qui a trait aux enfants baptisés à la paroisse de Sainte Thérèse entre l'année 1947 et 1948, il y a eu 247 enfants dont 75 légitimes. Ce qui donne un total de 172 enfants naturels.

Selon l'enquête de l'institut haïtien de statistique et d'informatique, sur le statut matrimonial par sexe, le nombre de placés est supérieur à celui des mariés.

En outre les gens ont toujours tendance à cacher la vérité en disant qu'ils sont célibataires, veufs, divorcés ou séparés, alors qu'ils vivent dans le concubinage. Ce qui fait que le nombre de placés est conséquemment de beaucoup supérieur à ceux accusés par l'enquête. Ces derniers donnent aussi des enfants naturels.1(*)

B- Perception sociologique

1- Avant l'indépendance.

Le plus superficiel examen de la société de Saint Domingue révèle immédiatement l'existence de trois éléments aux caractères nettement tranchés, formant les trois classes de la population coloniale : les blancs, les affranchis et les esclaves. Les premiers étaient les maîtres et les deux derniers n'avaient que des droits limités. Ces trois groupes, par suite des barrières dressées entre elles par les règlements coloniaux, par leur mode de vie, par leurs habitudes, par l'opposition de leurs idées et de leurs intérêts, présentent des différences remarquables.

Les blancs créoles, comme les historiens s'accordent à le reconnaître, se distinguaient par leur élégance et la beauté de leur corps. Ils étaient vifs et impétueux. Un contemporain, Ducoeurjolly, dit qu'ils présentent à l'imagination ardente aux sens surexcités et dans les veines desquels, pour employer l'expression du romancier haïtien Amédée Brun, coûtait véritablement du sang.  Selon un auteur haïtien, Hannibal Price bien peu de ces hommes si entichés de leur qualité, avaient pur sang dans les veines.

Les premiers n'avaient pas fait délicats. Ils s'étaient unis, légalement ou illicitement à leurs négresses. De ces unions étaient nés des mulâtres. Ceux-ci par des unions successives avec des personnes de teint clair, tachaient de se rapprocher de cet idéal de peau blanche qui, atteint, devait leur procurer le bonheur parfait sous la forme d'avantages positifs.1(*)

Ces blanches créoles ne manquaient pas cependant de charmes, elles étaient très passionnées et poussaient la tendresse maternelle jusqu'à l'extravagance. Mais les blancs les accusaient tout de même de manquer d'affection comme épouses. Les hommes préféraient porter leurs hommages monnayés aux sémillantes mulâtresses ou abuser, pour répéter le mot du Père Du Tertre, de leurs servantes noires, plantureuses et saines.

Bref, le mariage n'a jamais été le mode d'union privilégié. Le concubinage était la règle et le mariage l'exception. Hilliard d'Auberteuil constate le fait pour le blâmer. Un blanc, dit-il, qui épouse une mulâtresse descend du rang des blancs et devient légal des affranchis : Ceux-ci regardent même comme leur inférieur.

Cet auteur va encore plus loin : « non seulement il ne doit pas être permis aux négresses, mulâtresses quarteronnes de se marier à des blancs, il est nécessaire qu'à l'avenir tous les nègres, griffes et marabouts restent dans l'esclavage ».

Un homme de couleur, Julien Raymond né à Aquin et issu de l'une de ces unions si véhémentement condamnées par Hilliard d'Auberteuil, avait été envoyé en France et avait reçu une brillante éducation. Le mélange des races, dit Lucien Peytraud, avait trop d'occasions fatales de se produire pour qu'il n'en fût pas ainsi. Il suffit de rappeler que, sous ce climat chaud, les négresses étaient à peine vêtues, qu'elles étaient de moeurs naturellement douces et qu'elles ne s'appartenaient pas.1(*)

Les négresses y trouvaient d'ailleurs leur intérêt, sinon leur plaisir. Leurs enfants, nés de ce commerce immoral, étaient le plus souvent affranchis, pendant qu'elles voyaient elles mêmes leur situation s'améliorer.

Beaucoup de sang-mêlé sautaient la barrière. L'appellation de sang mêlé constituait la plus grave injure qu'on pût faire à un blanc ou à un homme libre se prétendant de race pure.

Défense était faite à ceux, issus de mulâtresses, négresses quarteronnes non mariées, de porter les noms des blancs. Ils devaient avoir un surnom titré de l'idiome africain ou de leur métier et couleur, qui ne pourrait jamais être celui d'une famille blanche de la colonie. Les Unions légitimes entre blancs et gens de couleurs étaient rares. L'administration locale, de même que le gouvernement métropolitain, mettait tout en oeuvre pour les empêcher. L'autorité coloniale, approuvée par le pouvoir royal, refusa maintes fois l'autorisation nécessaire à des négresses affranchies qui étaient sur le point de se marier avec des blancs, elles ne pouvaient ni ne voulaient épouser des nègres esclaves, parce qu'un pareil mariage les eût entraînées dans la servitude.

Elles ne pouvaient s'unir aux blancs à cause du préjugé de couleur. Elles n'avaient devant elles que deux voies à suivre : ou se marier à des affranchis comme elles, qui ne s'en souciaient guère de leur côté dans leur désir de se rapprocher du blanc ; ou se livrer â la prostitution.

Les sang-mêlé ne pouvaient être nommés à aucun emploi ou dignité dans les colonies. Les charges dans la judicature et les milices étaient interdites aux affranchis. Ils n'avaient pas le droit d'exercer certains métiers ou d'occuper certains offices. Ils ne pouvaient être ni prêtres, ni avocats, ni médecins.

2- à partir de l'indépendance.

Tous les chefs d'Etat qui se succédaient au pouvoir n'étaient pas insensibles à la question de l'accroissement des naissances hors mariage. Les enfants illégitimes restent majoritaires, et il y a plusieurs facteurs qui sont à la base : les facteurs économiques, sociologiques, culturels.

2-1 facteurs économiques

Une grande partie de nos masses rurales évoluent dans la polygynie. Ceci s'explique par la politique agraire mis en place par nos premiers dirigeants. Ce système, oblige l'homme à avoir une concubine sur chacune de ses parcelles de terre en vue de la préserver et de la fructifier.

Le plaçage offre aux cultivateurs le moyen de conserver cette semi clandestine dont l'expérience séculaire démontre les avantages. Et il arrive souvent que cet homme soit déjà engagé dans les liens du mariage avec une de ses femmes d'où la naissance des enfants de toutes conditions sociales et juridiques.

Les conditions pécuniaires des gens sont encore plus déterminantes dans le régime des unions illégitimes. Les préparatifs et les cérémonies en vue du mariage sont très coûteux.1(*) Pour éviter des dépenses ils n'avaient pas d'autre choix que de se placer. Car, on se répète souvent un bon ménage vaut mieux qu'un bon mariage.

Il arrive très souvent que l'homme marié profitant de sa situation économique, à d'autres jeunes filles à coté de son épouse. Ces jeunes filles, à cause de leurs faibles ressources économiques, acceptent d'entretenir des relations sexuelles avec l'homme marie. Et pour retenir ce dernier afin de ne pas perdre son assistance économique, se réjouissent d'une grossesse. De là est né un enfant répute adultérin d'après la loi.

2-2 facteurs sociologiques et culturels.

Le mariage, institution d'origine aristocratique, est un facteur de promotion sociale : le passage d'une classe pauvre à une classe plus ou moins aisée. Il est considère comme un événement considérable, attestant une émancipation effective de la commune condition, et qu'à ce titre, il doit être entouré de jouissances particulières. Toutefois, on ne peut nier le plaçage polygynique qui est un signe déterminant dans la recherche du statut social de l'individu.1(*)

Le plaçage reste, dans les campagnes haïtiennes aussi bien que dans les milieux populaires urbains, le moyen le plus répandu de fonder un foyer. Il répond aussi à une ancienne tradition dont on retrouve les racines à l'époque coloniale, dans les moeurs de la masse servile. Cette situation de polygynie se rencontre souvent chez une catégorie des gens tels les chefs de section, les hougans, certains militaires. La polygynie est le modèle essentiel des structures familiales africaines. Pour ainsi dire nous sommes des descendants d'Afrique. Dans ces conditions, les unions libres offrent plus d'intérêt au couple que le mariage. Autant de facteurs qui ont concouru a cette affluence de naissances illégitimes. En Haïti, traditionnellement la majorité des unions ne sont pas sanctionnes par le mariage. Le placage est encore pour diverses raisons la forme d'union la plus répandue dans les villes et dans les campagnes.2(*)

Cette section a présenté l'ampleur et de la perception du phénomène de l'enfance naturelle en Haïti tant avant qu'à partir de l'indépendance. La prochaine section traitera du statut juridique de l'enfant naturel en Haïti.

Section 11

Le statut juridique de l'enfant naturel en Haïti.

Le statut juridique des enfants nés hors mariage en Haïti sera étudié d'une part avant le code civil et d'apres les lois de 1805 et de 1813, d'autre part à travers le code civil, les décrets et les conventions ratifies par l'état haïtien.

A- Avant le code civil.

1- d'après le code noir

Il ne semble pas qu'il y ait eu avant Mars 1685, date de la publication du code Noir, des dispositions légales relatives à l'affranchissement des esclaves, bien que cet édit royal eut, dans une certaine mesure, adopté les principes humanitaires déjà contenus dans les lois espagnoles des 15 Avril 1541, 31 Mars 1563, et 26 Octobre 1641.

L'on doit reconnaître cependant que ce code fut très libéral en matière d'affranchissement. Au moment où l'esclavage avait atteint son exaspération dans les Antilles, l'édit de 1685 ou Code noir fut publiée.

Cette oeuvre législative, promulgué par Louis XIV en 1685, le Code noir réglemente l'esclavage des noirs. Louis Salas Molin fut l'exégète impitoyable du texte et pourfendeur de toutes les hypocrisies abolitionnistes. Le code noir se compose de soixante articles qui gèrent la vie, la mort, l'achat, la vente, l'affranchissement et la religion des esclaves. Il définissait de manière stricte et précise les relations entre les maîtres et leurs esclaves, considérés comme des biens « meubles ». Les soixante articles peuvent être compartimentés en fonction thématique allant de la religion unique, qui condamne le concubinage, impose le baptême et régit le mariage et l'inhumation des esclaves, à la réglementation de leurs allées et venues, de leur nourriture et de leur habillement, en passant par l'incapacité de l'esclave à la propriété.

Les principes essentiels de ce Code établissent la déshumanisation de l'esclavage tant sur le plan juridique que civil, et la contrainte théologique qui s'exerce sur sa volonté. Ses articles 8 à 13 sous le titre  « Le concubinage/ Le mariage » régissent le statut juridique des esclaves et leurs effets civils sur les esclaves. Aux termes de l'article 8, l'obligation est faite, aux esclaves d'être catholiques. Le mariage est reconnu comme la seule forme d'union légitime. Mais pour avoir y accès, il faut être baptisé dans la région catholique, apostolique et romaine. Les enfants en dehors du mariage, tel établi par cet article, sont réputés bâtards.

Le code noir avait admis l'esclave à la jouissance de certains droits naturels et l'avait rendu capable de liberté. Selon le prescrit de l'article 9, les enfants nés du concubinage des esclaves avec leurs maîtres étaient adjugés à l'hôpital sans pouvoir jamais être affranchis. Mais le cas du mariage régulier d'une personne libre avec un esclave, l'esclave est affranchi et ses enfants rendus sont libres et légitimes. Les hommes libres qui auront un ou plusieurs enfants de leur concubinage avec des esclaves ensemble les maîtres qui l'auront souffert, seront chacun condamné à une amande de 2000 livres de sucre, et s'ils sont les maîtres de l'esclavage de laquelle ils auront eu les dits enfants, outre l'amende, qu'ils soient privées de l'esclave et des enfants. Cet article se prononce en faveur du mariage sans toutefois envisager des unions légales entre les blancs et les esclaves.1(*)

Les enfants, selon l'article 12 du code noir, qui naîtront des mariages entre esclaves, seront esclaves, et appartiendront aux maîtres des femmes esclaves, et non a ceux de leurs maris, si le mari et la femme ont des maîtres différents. Plus loin, si le mari esclave a épouse une femme libre, les enfants, tant males que filles, soient de la condition de leur mère, et soient libre comme elle, nonobstant la servitude de leur père ; et que si le père est libre et la mère esclave, les enfants soient esclaves également. (Art.13).

Cependant, la situation sociale du milieu va subir une transformation radicale qui sera commandée par le mouvement révolutionnaire concrétisé par la guerre de l'indépendance dont les effets réels seront enregistrés des 1804. La situation sociale des enfants naturels sera prise en compte et observée avec un peu plus de considération avec les lois particulières.

2- d'après la Loi du 28 Mai 1805

A partir de 1804, Il était impérieux de doter la République de lois répondant aux aspirations et aux coutumes de son peuple. Le premier chef d'Etat d'Haïti, l'Empereur Jean Jacques Dessalines, avait publié la loi du 28 Mai 1805 régissant la situation des enfants nés hors mariage. Soucieux de la prolifération des naissances hors mariage, l'empereur a oeuvré de façon à garantir leurs droits. Cette loi spéciale à référence constitutionnelle, comprend cinq titres ayant chacun plusieurs articles.

Le premier titre contient 19 articles traitant de l'état des enfants nés hors mariage et dont les auteurs sont vivants. « La recherche de la paternité est interdite alors que celle de la maternité est permise dans la mesure ou l'enfant pourrait établir la preuve de l'accouchement de sa mère ».

Selon l'article 5, la reconnaissance de l'enfant est faite par le père devant l'officier de l'état civil. Cette reconnaissance doit être confirmée par la mère, ce qui constitue son aveu.1(*)

Ce même titre admet en son article 12 la reconnaissance d'un enfant naturel né pendant le mariage. Ainsi, l'aspect le plus remarquable de cette loi résultait du contenu de cet article 12 qui reconnaît au père, même engagé dans les liens du mariage, la possibilité de reconnaître un enfant naturel né pendant le cours du dit mariage. La préoccupation du législateur était d'organiser la famille hors mariage et de protéger les enfants qui en étaient issus.

Les cinq articles du deuxième titre concernent le cas des enfants nés hors mariage reconnus par leurs auteurs antérieurement à la promulgation de cette loi. Ces enfants doivent confirmer par des actes authentiques leurs qualités s'ils avaient été déjà en possession des biens de leur père.

Le titre suivant envisage les procédures en ce qui a trait aux enfants illégitimes qui n'avaient pas été reconnus par leur père avant la publication de cette loi. Le quatrième titre ne comporte qu'un seul article éliminant toute distinction entre enfant légitime et enfant naturel.

Enfin, le dernier titre contenant trois articles concerne les enfants adultérins et incestueux. Ces derniers pouvaient être l'objet d'un désaveu de leur père. Toutefois, l'obligation était faite au père de pourvoir à leur entretien et à leur éducation. 1(*)

Nous en étions à cette phase avec le gouvernement de Dessalines quand, par suite du soulèvement on assista à l'accession de Pétion son successeur. Le gouvernement de ce dernier a laisse à la postérité une législation sur la matière dénotant une contribution certes, la loi du 10 Novembre 1813, mais teintée d'une certaine restriction.

3- d'après la loi du 10 Novembre 1813

Il fallait attendre la loi du 10 novembre 1813 pour voir fixer le statut des enfants dits illégitimes. Preuve d'un souci d'équité, geste politique aussi, cette loi apparaît à la fois comme la manifestation d'une volonté de protéger les enfants naturels et d'éviter le divorce entre l'ordre social et l'ordre juridique.

La célérité du législateur a élaboré un droit familial répondant incontestablement à une situation d'urgence qu'expliquent les circonstances de la formation de la nation haïtienne au lendemain de1804.

Il n'y avait pas vraiment une nouveauté. Pétion a adopté, en cette matière presque les mêmes mesures envisagées par Dessalines, mais avec quelques restrictions. L'origine bâtarde des habitants du pays est prise en compte et la loi mise en harmonie avec elle.

Le législateur instituait une différence entre les enfants nés hors mariage. Il octroyait à l'enfant naturel le droit de venir à la succession des parents avec les enfants légitimes. (Article 13) ; excluait de celle-ci la catégorie des enfants naturels non reconnus.

Si un père a eu un enfant, sans être engagé dans les liens du mariage, vient à se marier, l'enfant jouira des mêmes droits sur les biens de son père, que les enfants qui naiteront de ce mariage selon l'article 14 de cette loi.1(*)

Ainsi, cette loi comme celle de 1805 permet au père de reconnaître son enfant naturel conçu et né pendant le mariage ; mais dans la succession, l'enfant naturel n'a que le quart de la portion allouée à l'enfant légitime. Par contre va-t-on retrouver ces caractères particuliers dans le code civil ?

B- A partir du code civil.

1- d'après le code

1-1 état civil de l'enfant naturel.

Les articles 302 à 304 traitent de la légitimation des enfants naturels. Les enfants nés hors mariage dits enfants naturels, à l'exception des enfants incestueux ou adultérins peuvent, aux termes de l'article 302 peuvent être légitimes par le mariage subséquent de leur père et mère si ces derniers les ont reconnu avant leur mariage ou les reconnaissent dans l'acte de célébration.

Les enfants naturels décédés qui ont laisse des descendants peuvent être ainsi légitimes et cette légitimation profite aux dits descendants. (Art. 303) Comme le prescrit l'article 304, la légitimation par le mariage subséquent confère les mêmes droits que la naissance dans le mariage. La reconnaissance d'un enfant naturel sera faite par un acte spécial devant l'Officier de l'état civil, lorsqu'elle n'aura pas été dans son acte de naissance. Cette reconnaissance ne pourra avoir lieu au profit des enfants nés d'un commerce incestueux ou adultérin. (Article 306). En aucun cas cette reconnaissance ne peut donc nuire au conjoint ni aux enfants issus du mariage. (Art 308)

Le code civil ne reconnaît pas à l'enfant naturel reconnu les mêmes droits que les enfants légitimes. (Art. 309) Toute personne au prescrit de l'article 310 qui y a intérêt ne peut contester une reconnaissance faite par le père ou la mère, une réclamation faite par l'enfant naturel. Le législateur interdit a l'enfant naturel la recherche de la paternité seulement dans le cas d'enlèvement lorsque l'époque de cet enlèvement se rapporte a celle de la conception. Suivant une modification apportée à cet article, la recherche de la paternité peut se faire aussi dans le cas de concubinage notoire pendant la période légale de la conception. Et plus loin il déclare que cette action ne sera pas recevable si pendant la période légale de la conception, la mère était d'une inconduite notoire ou a eu un commerce avec un autre individu et aussi si le père prétendu était dans l'impossibilité physique d'être le père de l'enfant. (Art. 311).

La recherche de la maternité naturelle est admise et l'enfant qui réclame sa mère doit prouver qu'il est bien l'enfant indique dont la mère avait accouchée à l'époque indiquée. Il ne sera admis à en faire la preuve par témoins que s'il existe un commencement de preuve écrite. (Art. 312).1(*)

Un enfant, prescrit l'article 313 ne sera jamais admis à la recherche de la maternité. Nous passons à la dévolution successorale des enfants naturels.

1-2- enfant naturel et dévolution successorale

La succession a lieu quand il existe la transmission du patrimoine après la mort. Elle consiste également au maintien du bien-être sur le plan socio économique de l'enfant. Ainsi laissons-nous la réglementation du code civil en matière de la succession à l'égard des enfants naturels.

Les enfants naturels légalement reconnus héritent de leur père ou mère, ou de leurs ascendants naturel, mais non des ascendants légitimes de leurs père ou mère. (Article 606). D'après l'article 608 la part de l'enfant naturel devra être le tiers de la part de l'enfant légitime. La succession sera partage en autant de lots qu'il y a d'enfants légitimes multipliés par trois auxquels nombres sera ajoute a celui des enfants naturels. Chaque enfant légitime en prendra trois lots et chaque enfant naturel en prendra un.

La totalité de la succession, à défaut de descendants légitimes, appartient aux enfants naturels. (Art. 609).

Les enfants ou descendants d'un enfant légitime ou naturel prédécédés viennent dans tous ses droits. (610). Il reste entendu que l'enfant adultérin ou incestueux n'a pas droit à l'héritage. Il n'a droit qu'à des aliments qui ne peuvent être imputés que sur la portion dont la loi sur les donations et testaments permet aux père et mère de disposer. (611).

Le code civil attribue la succession de l'enfant naturel, décédé sans postérité légitime ou naturelle, et sans frère ni soeur naturelle ni descendants d'eux, au père ou a la mère qui l'a reconnu ; ou par moitie à tous les deux, s'il a été reconnu par l'un et par l'autre. Les ascendants légitimes de l'enfant naturel même reconnu, n'ont aucun droit à sa succession.

En cas de prédécès, des père et mère d'un enfant naturel, décède sans postérité, mais laissant des frères ou soeurs, les biens qu'ils avaient reçu d'eux passent a ses frères et soeurs légitimes s'ils se retrouvent en nature dans la succession, les actions en reprise, s'il existe, ou le prix de ces biens aliènes, s'il est encore du en tout ou en partie, retournent également aux frères et soeurs légitimes. Tous les autres biens passent aux frères et soeurs naturels, légalement reconnus, ou à leurs descendants. (625).

Aux frères et soeurs naturels légalement reconnus, ou à leur décédant, viennent tous les autres biens. Enfin, les dispositions des 618, 619, 620,621, 622 ,623 sont applicables aux frères et soeurs ou autres collatéraux naturels venant, soit entre eux, soit avec des descendants naturels à la succession d'un frère, soeur ou autre collatéral naturels.

2- d'après le décret- loi du 22 décembre 1944

Le décret-loi du 22 décembre 1944 fut pris sous la présidence d'Elie Lescot sur les enfants naturels. Ce décret établit l'existence et la distinction de trois catégorie d'enfants : l'enfant légitime, l'enfant naturel simple et l'enfant adultérin ou incestueux.

Il est de principe que la loi, tout en sauvegardant les préceptes universels de la morale et en visant à y plier l'état social, doit, dans toute la mesure du possible, épouser les contours des faits et des situations qu'elle est appeler à réglementer. Ce décret, évitant de troubler l'ordre public et de nuire à la concorde nécessaire entre les citoyens, a abrogé et modifié certains articles du code civil se rapportant à l'enfant naturel notamment ceux de 302, 305, 308, 309, 311,608 et 625. 1(*)

Il a reconnu aux enfants naturels simples, nés d'un homme et une femme non engagés dans les liens du mariage le droit à la légitimation.( art. 302) Cette reconnaissance sera faite par un acte spécial devant l'Officier d'Etat civil, lorsqu'elle n'aura pas été dans son acte de naissance. Et elle ne pourra nuire à l'enfant ni aux enfants nés de ce mariage. Cet enfant reconnu aura les mêmes droits que l'enfant légitime, sous la réserve des dispositions des articles 306 et 606 du code civil.

Le décret du 22 Décembre 1944 a abrogé définitivement l'article 608 et s'énonce ainsi : s'il y a concours des descendants légitimes et naturels, la part de l'enfant naturel sera égale à celle de l'enfant légitime.

En cas de prédécès, les père et mère naturel, selon l'article 625, les biens qu'ils avaient reçu d'eux passent à ses frères et soeurs légitimes même dans le cas de reprise s'ils se retrouvent en nature dans la succession.

Quant aux frères et soeurs naturels, légalement reconnus, ou à leur dé cédants, tous les autres biens leur revient. Qu'en est-il du décret du 27 Janvier 1959 ?

3- d'après le décret-loi du 27 janvier 1959.

L'unique objectif du décret du 27 Janvier 1959 était de mettre fin à toute inégalité entre la condition juridique des enfants naturels et celle des enfants légitimes. Pour ainsi dire l'égalité des droits et des devoirs entre les enfants naturels et les enfants légitimes est sacrée dans les articles de ce décret. La filiation naturelle engendre les mêmes droits et les mêmes devoirs que la filiation légitime. Ce décret contenant trois articles dont le premier s'énonce ainsi : « La filiation naturelle engendre les mêmes droits et les mêmes obligations que ceux dérivent de la filiation légitime. Néanmoins, la preuve de la filiation naturelle ne peut résulter que d'une reconnaissance volontaire ou judiciaire autorisée par la loi. Le deuxième parle de l'inapplicabilité du premier alinéa de l'article précédent aux successions définitivement partagées, soit à l'amiable par un acte ayant date certaine, soit en justice par une décision passée en force de chose souverainement jugée. Et le troisième article de ce décret abroge toutes lois qui lui sont contraire, notamment les articles 308, 606, deuxième alinéa  et 624 du code civil sur la filiation naturelle.

Depuis une époque récente, la protection de l'enfance fait l'objet d'une sensibilisation au niveau international. Cela se traduit par la mise au point de divers traités internationaux ratifiés par Haïti qui sont applicables au besoin contre la loi interne.1(*)Proposons-nous donc de contempler les grandes caractéristiques et la portée de ces conventions ratifiées par Haïti.

4- d'après la convention relative aux droits de l'enfant.

L'enfant étant un être humain complet, a besoin d'une protection spéciale. Souvent on pense qu'il n'a pas de droit puisqu'il n'exerce pas encore sa liberté. La convention internationale relative aux droits de l'enfant a fait ressortir dans son préambule les principes sociaux et juridiques applicables à la protection et au bien être des enfants, adoptée le 20 Novembre 1989 par l'Assemblée générale des Nations Unies, elle a été signée par l'Etat Haïtien le 26 Janvier 1990 et ratifiée le 23 Décembre 1994 par le parlement haïtien et publiée le 31 Juillet 1997 dans le Journal officiel, Le Moniteur # 59.

La convention est un ensemble de normes et d'obligations universelles acceptées et non négociables. Ces normes fondamentales que l'on appelle aussi les droits de l'homme définissent des droits de l'homme et des libertés essentiels que les gouvernements doivent respecter. Elles se fondent sur le respect de la dignité et de la valeur de chaque individu, indépendamment de sa race, de sa couleur, de son sexe, de sa langue, de sa religion, de ses opinions, de ses origines, de sa fortune, de sa naissance ou de ses facultés, et s'applique à chaque être humain, partout dans le monde.1(*)

Dans cinquante quatre articles et deux Protocoles facultatifs, la convention énonce les droits fondamentaux qui sont ceux de tous les enfants du monde. Les articles sont divisées en trois parties dont la première fait obligation aux Etats parties de respecter les droits qui énoncés dans la présente convention et de les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune. Les états partis s'engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en oeuvre les droits qui sont reconnus.

Cette convention définit l'enfant s'étend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plutôt en vertu de la législation qui lui est applicable.

Les Etats parties doivent respecter leurs droits et les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre.

L'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions qui le concernent. (Article 3).

En 1989, les dirigeants du monde ont décidé que les enfants devaient avoir une convention spéciale juste pour eux, car les moins de dix huit ans ont souvent besoin d'une protection et d'une assistance spéciales.1(*)

Les enfants naturels n'étaient pas les seuls victimes. Les parents en l'occurrence la mère faisait l'objet de mépris et d'exclusion sociale. La non observance de la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes est évocatrice.

5- d'après la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

La déclaration des droits de l'homme affirme le principe de la non discrimination et proclame que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droit sans distinction aucune notamment de sexe. Cette égalité est réaffirmée par la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, est entrée en vigueur le 3 septembre 1981 et ratifiée par Haïti le 3 Avril 1996, publiée le 9 septembre

1996 dans le Moniteur au # 66A. Elle est composée de six parties dont

La première comprend 6 articles, la deuxième 3, la troisième 5, la quatrième 2, la cinquième 6 et la sixième 8 articles.

L'expression « discrimination à l'égard des femmes » en son article premier, vise toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe dont le but est de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme ou dans tout autre domaine.

Les états partis condamnent cette discrimination et tendent à l'éliminer par des moyens appropriés et des dispositions législatives à assurer le développement et le bien-être des femmes :

1e) en éliminant les préjuges fondés sur l'idée d'infériorité ou de supériorité de l'homme ou de la femme.

2e) en faisant reconnaître la responsabilité de l'homme et de la femme dans l'éducation familiale.

Ils reconnaissent également à la femme l'égalité avec l'homme devant la loi.

3e) éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans toutes les questions découlant du mariage et dans les rapports familiaux. 1(*)

Nous avons, dans cette section, présenté le statut juridique de l'enfant naturel en Haïti d'abord avant et avec le code civil, ensuite d'après les lois particulières et les conventions ratifiées par Haïti. Nous terminons ainsi ce second chapitre de la première partie.

La seconde partie fera la critique de la situation socio juridique de l'enfant naturel en Haïti et ouvrira des perspectives de solution.

DEUXIEME PARTIE

Critique de la situation socio juridique de l'enfant naturel et

Perspectives de solutions.

Le mot critique vient du mot latin criticus ou du grec kritikos qui signifie jugement. C'est l'appréciation de la valeur d'une oeuvre, l'art de distinguer les qualités et les défauts d'une oeuvre littéraire ou artistique. Faire l'analyse critique de quelque chose, c'est en dégager les faiblesses et les lacunes.

La problématique est l'ensemble des questions qu'une science ou une philosophie se pose relativement à un domaine particulier, l'ensemble de problèmes posés par le phénomène ou la question sous étude.

Cette partie réunira les deux derniers chapitres de l'étude. Le premier consistera en la critique de la situation socio juridique de l'enfant naturel en Haïti, le second présentera des éléments de solutions.

CHAPITRE I

REGARD CRITIQUE SUR LA FILIATION NATURELLE EN HAITI

Il existe en Haïti certaines discriminations à l'égard de l'enfant naturel. La société haïtienne en a une perception négative et la législation haïtienne est restrictive à son égard. Ce chapitre, sera divisé en deux sections dont l'une présentera la perception négative de la filiation naturelle et ses conséquences, l'autre fera la critique de son statut juridique.

Section 1 1- Perception négative de la filiation naturelle et ses conséquences.

Toute société a son fondement culturel, un idéal qui lui est propre; les modes de pensée varient suivant les peuples, les tribus et les clans. Ainsi, une entité sociale ne peut pas s'accommoder à toutes les sociétés. Il demeure entendu que la société haïtienne a son fondement moral et les normes réglementant la conduite de ses membres. Une analyse sur la manière dont la société haïtienne perçoit le phénomène de la filiation naturelle devra nous donner une juste idée en ce sens.

A- Perception négative.

L'ignorance d'un fait de société, pour quelque raison que ce soit, rend le tissu social très perméable à toute sorte de rumeurs et de préjugés. Ces rumeurs inondent le monde de la raison et de la réflexion. Leur propagation est même une des conséquences les plus évidentes d'un savoir trop oriente, voire doctrinal. Autour de l'inceste, l'adultère, les préjugés populaires se côtoient.

1- position de l'église

Le droit canonique contraint les gens à se marier pour assurer leur salut. Ainsi, les prêtres refusent de baptiser un enfant dont le père n'est pas déclaré ou du moins limitent le nombre d'enfants naturels d'une même famille à baptiser. Ceci dans le but d'encourager les gens à se marier.

Car les croyances religieuses sont l'un des éléments important de la civilisation d'un peuple. Elles priment sur les lois nationales. Le droit canonique contraint les gens à se marier pour assurer leur salut. Il parait comme une condition peu respectable d'avoir des enfants naturels en Haïti. Certains protestants négligent toute leur vie sociale afin de préparer la venue prochaine du Christ. De nos jours l'église présente la grandeur du mariage surtout en aidant les concubins à régulariser leur vie par le mariage. Pour l'église se marier par devant l'officier d'état civil est un acte contraire au droit canonique. Cela constitue un péché et pour trouver le pardon il faut faire une cérémonie religieuse par la bénédiction de l'alliance.

Les pasteurs de leur côté, ne présentent pas les enfants naturels au temple. L'enfant qui n'est pas ne à l'ombre du sacrement du mariage est rejeté hors de la famille, et même hors de la société.

2- perception sociale.

Il existe dans la société haïtienne une hiérarchie entre les gens aisés et moins aisés. Si la richesse est un étalon important pour l'échelonnage des différences sociales, le type d'union qui prévaut en est un autre.

Le droit comme la société, se montrent très répressifs contre les relations sexuelles hors mariage surtout pour les femmes. Ces dernières tant qu'elles ne soient pas mariées se considèrent comme vivant en marge de la société.

Le mariage pour elles confère une valeur sociale à l'homme. Après vingt six ans, elles pensent qu'elles ont une chance minimale pour se marier.

Le plaçage, n'existe presque pas dans la bourgeoisie haïtienne. Pour elles, le mariage est une tradition, le seul état matrimonial normal.1(*)

Dès 1804, le mariage était considéré comme l'unique modèle de la famille. Christophe, dans le royaume du Nord interdit même le plaçage.

En Haïti, les enfants naturels sont vus d'un mauvais oeil. Paul Moral associe le plaçage à la médiocrité générale des niveaux de vie. Le luxe du mariage coûte très cher.1(*)

Les préjugés contre le plaçage gênent tellement les femmes que celles qui sont placés sont peu disposes à exposer au premier venu leur situation. Jusqu'à un certain point, la femme porte une souillure. Dans les categories sociales aisées, les couples non légaux répugnent à être qualifies de places. Cette attitude manifeste non une désapprobation en soi du plaçage, mais révèle l'existence d'une adéquation entre un rang social privilégié et le statut matrimonial.

Dans une société non encore libérée de certains tabous, les enfants naturels qui sont les plus frappés sont ceux issus de l'adultère et de l'inceste.

Le terme ` adultère' suscite beaucoup de réactions dans les esprits avec l'évolution des sociétés. Les réactions sont multiples et diverses. Ces réactions produisent surtout dans les sociétés monogamiques où il impose à chaque homme un seul époux ou à chaque femme une seule épouse.

Chez les Hébreux les deux coupables étaient lapidés, chez les Romains dans les premiers temps de la République, l'adultère était jugé par un tribunal domestique ou par le mari qui prononçait la peine qu'il voulait. Les coupables étaient traduits devant le peuple à cause des moeurs violées. Constantin prononça contre les adultères la peine du parricide et Justinien laissa subsister la peine de mort contre l'homme, celle de la fustigation Contre la femme et la réclusion pendant deux ans dans un monastère.

En Haïti, l'adultère de l'homme semble faire bon ménage avec la culture qui nous trempe, tandis que l'adultère de la femme fait l'objet de raillerie et de châtiment d'ordre social et moral. Cette analyse nous a conduit a nous poser des questions sur les conséquences d'une telle perception. Nous allons donc sur les lignes suivants étudier les retombés de cette attitude sur le tissu social haïtien.

B- Conséquences

La perception négative des enfants naturels a des conséquences sociales, religieuses et morales.

1- conséquences sociales.

Par rapport aux enfants légitimes, les enfants naturels sont l'objet d'une discrimination. C'est comme si eux et leurs parents nagent dans l'immoralité. Cette inégalité entre les enfants est l'une des causes des inégalités sociales. Jusqu'à nos jours, l'enfant naturel ne cesse de payer les conséquences des inconséquences de leurs auteurs. La mère peut être exclue de son groupe social.

Dans toutes les sociétés, l'inceste de son côté, fut prohibé, et l'infraction à la règle est sévèrement châtiée. L'interdiction pour un homme d'avoir des relations sexuelles avec des parents, apparaissait comme une loi universelle et, par conséquent liée à la nature humaine elle-même.

L'inceste, pour certains, c'est la forme la plus connue d'abus sexuel sur un enfant par une personne de confiance. Elle est toute utilisation d'un enfant mineur pour satisfaire des besoins sexuels ou émotionnels d'une personne dont l'autorité s'appuie sur des liens affectifs avec l'enfant. D'autres chercheurs ont apporté les explications les plus diverses pour montrer le caractère positif de la prohibition de l'inceste. H Orlogan et Henry Maine pensent que la prohibition de l'inceste constitue une mesure de protection contre les effets néfastes des mariages consanguins. E. Westermarck parle de la répulsion peut éprouver les uns les autres, quand ils sont liés par une vie commune.

Les auteurs des enfants naturels sont considérés comme irresponsables, immorales quand aux circonstances de son évolution au sein de la société haïtienne. Ses enfants y sont des exclus condamnes à vivre dans l'indignité.

Les portes de certaines écoles congréganistes sont presque fermées pour ces enfants. L'épithète d'oeuvre naturelle qui est porté dans l'acte de naissance de l'enfant lui cause des problèmes psychiques.

Pendant longtemps, de façon discriminatoire, il existait deux formats d'acte de naissance : un pour les enfants naturels et un pour les enfants légitimes.

Dans certaine famille, un homme n'est pas admis à épouser une fille naturelle. Parler publiquement du concubinage serait une insulte aux yeux de la société et de l'église.

Généralement, les enfants naturels sont considérés comme des agents de la délinquance. Pour certains, la filiation naturelle est source de la criminalité, de la prostitution et de la mendicité,

Les mauvaises relations existantes entre les parents naturels seraient la cause d'un nombre accru d'enfants dans les rues. Quant l'enfant réalise l'anormalité de ce qu'il vit, il est envahi par la honte et la culpabilité. La réalité de l'inceste est bien plus fréquente qu'il n'y parait. Ils sont nombreux à souffrir en silence, dans le secret.

Dans notre société de plus en plus monoparentale, les enfants sont à la charge de leur mère. ; Le pourcentage de mère élevant seul leur fils sans la présence d'homme dans la maison est très élevé.

2- conséquences religieuses.

La croyance religieuse est l'un des éléments composants de la civilisation d'un peuple. L'église joue une très grande influence sur la société. C'est d'elle que viennent les préjuges contre les enfants naturels. La bible considère comme un péché le fait d'avoir des enfants pour un parent. Ellen G. White dans son livre titre « Conseil sur la Conduite sexuelle, l'Adultère et le Divorce » parle de la triste conséquence de la polygamie qui assombrit la vie. Pour elles posséder plusieurs femmes était considéré par les peuples idolâtres comme un surcroît d'honneur et de dignité, et dans la bible David adopta ce point de vue. Mais la discorde regrettable et la jalousie qui opposèrent ses multiples femmes et leurs enfants lui firent voir la malheureuse conséquence de son attitude.1(*)

Au grand séminaire catholique, on ne reçoit pas cette catégorie d'enfants. Pour la présentation sur les fonds baptismaux, s'il ne s'agit pas d'un enfant légitime, ses parents ont le choix d'un jour et l'enfant peut recevoir le sacrement en son domicile. S'il s'agit d'enfants naturels, ils reçoivent ce sacrement surtout le samedi de très tôt en groupes. D'une autre coté, les églises protestantes ne les reçoivent pas en assemblée générale.

Les sanctions prises contre l'enfant qui n'a pas demandé à naître suscitent des réflexions. Cette punition a des répercussions psychiques sur l'enfant.

3- conséquences morales.

La mention d'oeuvre naturelle portée dans son acte de naissance lui cause des problèmes psychiques. Ils se croient inférieurs aux enfants dits légitimes. Souvent les enfants légitimes ne reconnaissent pas leurs frères et soeurs naturels pour éviter des problèmes au niveau de la famille dite vraie.

Les sanctions affectent la personne de l'enfant. L'enfant n'est nullement responsable quant à la condition de sa naissance.

L'enfant prive d'une protection physique, de sécurité et connaît les effets néfastes du stress familial environnemental, il est victime d'une maltraitance psychologique. A l'inverse, on connaît les effets néfastes du stress familial environnemental qui réalise une maltraitance psychologique.

La fréquence grandissante des séparations parentales, l'indisponibilité

des parents sont de plus en plus pour l'enfant des causes de carence affective et de déséquilibre psychologique de l'enfant. Lorsqu'une incompatibilité se manifeste entre le père et la mère de l'enfant, ce dernier s'en trouve atteint, il est le témoin visuel et affectif des bonnes ou mauvaises relations qu'entretiennent ses parents.

Les auteurs des enfants naturels sont considérés comme des irresponsables, des immoraux. Ces enfants sont des exclus condamnes à vivre dans l'inégalité.

L'inceste, pour un témoin de Jéhovah  est tout attentat à la pudeur commis sur la personne d'un enfant par un membre plus age de sa famille. Le plus souvent le coupable est un homme. Les rapports incestueux peuvent revêtir diverses formes.1(*)

A mesure que le monde actuel sombrera dans la déchéance, ce problème ira sans doute en s'aggravant. De nombreuses femmes victimes d'inceste souffrent de troubles affectifs et ne peuvent pas y penser. En effet ce drame laisse parfois une marque indélébile sur la conscience. Bref, les blessures affectives laissées par l'inceste sont aussi réelles que des plaies physiques.

Conformément à notre hypothèse nous venons montrer que la société haïtienne a une perception négative de l'enfant naturel et cela a de conséquences très graves pour l'enfant. La section suivante fera la critique du statut juridique.

Section II

Critique du statut juridique.

Après avoir fait la critique des dispositions relatives à la filiation naturelle du code civil, des décrets du 23 décembre 1944 et du 27 janvier 1959, nous verrons la régression de la législation haïtienne par rapport à d'autres lois antérieures et son retard par rapport à des législations étrangères.

A- Critique des dispositions du code civil, des décrets du 23Décembre 1944 et du 27 Janvier 1959.

1- critique du code Civil.

Sous le régime du code civil, l'enfant naturel ne bénéficiait d'aucun privilège. La législation haïtienne est trop discriminatoire à l'égard de l'enfant adultérin et incestueux. Il ne dispose aucun moyen de contrainte pour faire respecter leur droit d'aliments. Contrairement aux textes internationaux qui reconnaissent les mêmes droits et les mêmes devoirs à tous les enfants sans aucune considération de race, de sexe, de langue et de religion.

Les articles 302, 306 et 313 privent de tous les droits l'enfant adultérin ou incestueux. Les enfants nés pendant le mariage et ceux du commerce incestueux ne peuvent jamais bénéficier de la reconnaissance. Ce sont des enfants adultérins et incestueux. La reconnaissance est nulle et de nullité absolue si au moins l'un des auteurs se trouvait engagé dans les liens du mariage au moment de cette reconnaissance. C'est une injustice que le législateur fait aux enfants adultérins et incestueux. Cette injustice concerne également la mère. Car cette filiation adultérine n'engendre aucune obligation à la charge du père. Le code civil ne prévoit aucune solution juridique des problèmes crées par l'union entre l'homme et la femme quelle que soit leur position sociale et leur statut précédent. Il prévoit la recherche de la paternité naturelle.

Selon l'article 307, il s'agirait de deux naissances différentes avec deux actes de naissance. Donc il n'est pas permis à l'enfant adultérin d'être légalement reconnu par son père et sa mère dans un seul acte de naissance.

Le législateur est trop strict avec l'interdiction de la recherche de la paternité qu'il édicte en son article 311. Dans la pratique, l'enfant naturel peut difficilement réaliser son droit de recherche de paternité. Il aurait pu agir avec beaucoup de souplesse face aux enfants naturels. Cette disposition a bouleverse entièrement les esprits des juristes des années 1934 qui assimilaient l'article 311 a une injustice criante. A ce sujet, le père n'est-il pas tenu, par le seul fait de la génération, d'une obligation naturelle envers l'enfant, obligation qui nous parait inhérente à la qualité du père ?

Contrairement au code civil le droit coutumier n'écarte pas de la succession paternelle l'enfant non reconnu ni l'adultérin ou incestueux. L'article 611 est incomplet car il ne permet pas a l'enfant adultérin et incestueux de jouir pleinement les mêmes droits que les enfants légitimes et les enfants naturels simples.

Le code civil ne prévoit aucune solution juridique des problèmes crées par le concubinage. La situation de la concubine dépend de la passion de l'homme marié et de la conscience et de la moralité de l'époux.

Le code civil ne fournit aucun moyen à la concubine de revendiquer la part qui devrait lui revenir des biens acquis pendant le concubinage sous prétexte que son union est illégale.

Le code civil prévoit la recherche de la paternité naturelle seulement dans les cas prévu par l'article 302 du code civil. Cela signifie qu'un ravisseur peut se déclarer être le père d'un enfant une fois les parties intéresses. Alors qu'on sait très bien qu'un ravisseur sera toujours recherché par la justice. Ce qui n'arrivera jamais à se faire puisque la future mère, dans le cas d'enlèvement peut avoir eu des relations avec les autres complices. Face à une telle situation, on n'arriverait jamais à trouver le vrai père.

«S'il est une loi qui m'a paru la honte dans l'humanité s'est écrié naguère le bâtonnier JULES Favre, devant la chambre d'appel de la cour de Paris, c'est bien celle qui interdit la recherche de paternité naturelle, qui met ainsi le sexe le plus faible à la disposition du plus fort et permet à l'homme de chasser impunément celle qu'il a séduit avec le fruit de ses entrailles ».1(*)

La recherche de la paternité qui est interdite par le code civil est une injustice criante de notre législation qui en édictant l'irresponsabilité du séducteur et l'impunité de l'abandon, livre fatalement la fille mère à toutes les pernicieuses suggestions de la misère qui la conduit droit à la déchéance morale. JF Fanfan.

Ce code ne reconnaît pas à l'enfant adultérin le droit : à la reconnaissance, à la légitimation, à la recherche de la paternité et de la maternité, à un nom. Ainsi, des milliers d'enfants, du fait de ces discriminations, demeurent sans état civil et du même coup sans protection juridique. Les articles y relatifs sont incohérents et discriminatoires car ils ne visent pas au bien être des enfants adultérins.

Est-il possible que la démocratie haïtienne qui se dit humanitaire et libérale s'inflige plus longtemps de la honte de renier en face du monde deux principes fondamentaux de toutes sociétés civilisées.

La loi qui interdit la recherche de la paternité est donc une loi d'immoralité de destruction de l'ordre sociale et celle qui l'autorise, une loi de protection des faibles de conservation et d'équilibre. Et celle qui oblige un commencement de preuve par écrit non pas seulement de la mère mais aussi des témoins pour la recherche de la maternité est très rigoureuse car dans un pays comme le notre ou 85% de la population sont analphabètes, on comprend comment devient difficile l'obtention du commencement de preuve par écrit exigé par le législateur.

Le législateur a des attentions généreuses pour les femmes mariées qui ont droit à la moitie des biens acquis au nom du mari pendant le mariage, même lorsqu'il n'existe pas d'acquis de communauté il réserve à l'épouse survivante un droit d'usufruit sur une partie des biens propres du défunt

La concubine au contraire n'est l'objet d'aucune considération au regard de la loi.

Le fonctionnement et la dissolution du concubinage quant aux effets civils ne sont pas règlementés. En effet il est incontestable que la primauté du mariage prévaut dans la succession. L'article 606 en son 2ème alinéa limite le droit à la succession des enfants naturels. Selon l'article 608 quand il y a concours des descendants légitimes et naturels, le partage se fait de façon inégale. La part de l'enfant naturel devra être le tiers de la part de l'enfant légitime. Et cette part même fait retour aux héritiers légitimes si l'enfant naturel décède sans postérité et que les biens reçus de ses parents se retrouvent en nature dans sa succession. Le législateur, en accordant que le droit d'aliments aux enfants naturels en l'article 611, laisse penser que ces enfants ont fait pitié. Donc c'est une succession basée dur la discrimination entre les enfants. Et c'est ce qui détériore la situation des enfants en Haïti. Il existe une certaine lacune à l'article 613 où le code a omis de régler la situation des grands parents naturels venant à la succession de leurs petits enfants naturels, Alors qu'en l'article 616, il a envisagé spécialement celle de l'enfant naturel décédé sans postérité légitime et naturelle, sans frères ni soeurs naturels ni descendants d'eux. Selon cet article, la succession de l'enfant naturel décede sans postérité légitime ou naturelle, et sans frère, ni soeur naturel ni descendants d'eux, est dévolue au père ou a la mère qui l'a reconnu ; ou par moitie à tous les deux s'il été reconnu par l'un ou par l'autre.

L'injustice de notre code civil envers les enfants naturels résulte des dispositions de ses articles 608 et 625. Le législateur prétend déterminer l'ordre des héritiers d'après l'ordre probable des affections du défunt ; dans le cas de l'article 625, il écarte les parents naturels de l'enfant ne hors mariage au profit de ses frères et soeurs légitimes. La il y a une sorte de préjuge qui domine. Le législateur a fait beaucoup de restrictions des droits aux enfants naturels.

Priver de ce grand privilège qu'est la succession, c'est être hormis de tout soutient matériel et social qui conditionne la vie de l'enfant. Bref, Le code civil suscite trop de contradictions. C'est ce qui a fallu la parution des deux protection des enfants naturels n'a pas respecter le parallélisme qu'il consacre en matière de succession et ainsi tenir compte des réalités originales de notre milieu social. Apres avoir passé au crible le code civil haïtien nous allons donc apprécier à sa juste valeur les décrets en date du 22 décembre 1944 et du 27 Janvier 1957.

2- relativement aux décrets du 22 décembre 1944 et du 27 janvier 1959.

Le décret-loi du 22 décembre 1944 a modifié certains articles du code civil notamment ceux de 302, 305,308, 310, 608 et 625.

Le législateur de 1944 ne reconnaît pas à l'enfant naturel non reconnu de faire aucun acte contre son auteur. L'article 311 n'a pas modifié totalement le statut juridique de ces enfants. Il maintient toujours les interdictions relatives aux enfants adultérins. La filiation naturelle qui engendre les mêmes droits et les mêmes devoirs que ceux dérivant de la filiation légitime est interdite à l'enfant adultérin. Ce dernier ainsi que l'enfant naturel n'ont pas le droit non plus à la recherche maternelle et paternelle. On peut dire que les articles 308, 508, 606 alinéa 2, 617 premiers alinéas, 624 et 742 du code civil qu'il avait abrogé ne concernent pas cette catégorie d'enfant qui n'est autre que l'enfant adultérin. Le décret de 1944 n'a visé que les enfants naturels simples. Selon lui, l'enfant adultérin et incestueux n'ont aucune place sérieuse dans la législation haïtienne, il ne sera jamais légitime. Malgré les efforts déployés par le législateur de 1944 pour donner un nouveau statut favorable a l'enfant naturel leur sort n'a pas pu être égal a celui de l'enfant légitime. Le législateur n'a établi aucun changement sérieux entre l'enfant naturel non reconnu et l'enfant adultérin être incestueux. En ce qui a trait aux articles du code civil face aux enfants adultérins, il maintient les mêmes interdictions. Bref il n'a apporté aucun changement au statut juridique et aux droits inhérents à l'enfant adultérin.

Ce décret fait la différence des trois catégories d'enfants avec des privilèges inégaux. Le texte comporte des exceptions qui peuvent être considérés comme des clauses discriminatoires. En matière de succession plusieurs modifications ont été apportées, des réserves ont été faites sur les dispositions des articles 308 et 606. Malgré tout, le législateur n'a pas pris en compte l'enfant naturel non reconnu. Donc, il ne fait que soulager la misère des enfants naturels simples. Bref son statut socio juridique demeure instable. A ce sujet Antoine Salgado opine « Heureusement qu'il n'y a rien d'absolu, d'immuable et de sacré dans les textes de lois.»

Le législateur de 1944 n'a pas su arriver jusqu'au bout et c'est pourquoi celui de 1957 était venu mettre fin a toute inégalité entre la condition juridique des enfants naturels et celles des enfants légitimes. C'est dans cette optique que le décret du 27 janvier 1959 est venu abroger expressément les articles 308, 583, 606 alinéa 2, 617 alinéas 1, 624 et 742 du code civil. Le législateur de 1959 est conscient des discriminations dont sont victimes les enfants naturels, pourtant il n'a pas effacé entièrement les discriminations entre les enfants naturels et légitimes. Pour la reconnaissance de l'enfant naturel il faut encore un aveu de paternité. Ainsi la possession d'état est exclue comme mode de preuve en matière de la filiation naturelle. Ce décret a gardé presque les mêmes erreurs que ses prédécesseurs. Il a consacré l'exclusion des enfants adultérins dans la résolution du problème de l'inégalité entre les enfants légitimes et naturels.

En définitive, à l'analyse de l'état civil de l'enfant naturel l'évolution ne s'étend pas à toutes les catégories d'enfants naturels puisque la loi demeure encore vierge sur le sort des enfants adultérins et incestueux. Alors, comment faire répandre l'égalité au sein de notre société si l'on maintient la discrimination entre les enfants ? A ce stade, nous devons nous intéresser à l'étude des caractéristiques et de l'état d'avancement de la législation haïtienne en comparaison à celles de certaines législations étrangères. Ainsi, faut-il se demander si la legislation haïtiennes est en avance ou en retard par rapport à la législation des pays étrangers tels la France, l'Espagne, la Belgique et le Danemark.

B- Régression et Retard de la législation haïtienne.

1- Régression

1-1 par rapport à la loi de 1805

Les enfants nés hors mariage non reconnus étaient admis à prouver leur filiation, qu'un père même engagé dans les liens du mariage pouvait reconnaître un enfant naturel né pendant le cours du dit mariage et qu'une fois reconnu, cet enfant avait les mêmes droits que les enfants légitimes. Cette loi exprimait la volonté du législateur d'harmoniser la famille haïtienne, d'éliminer toutes discriminations entre frères et soeurs.

Le code civil de 1826 est venu enlever aux enfants nés hors mariage les privilèges que leur reconnaissait cette loi.

Le décret du 22 Décembre 1944 a maintenant la régression par rapport à la loi du 28 mai 1805 par la distinction qu'il fait entre l'enfant naturel et l'enfant adultérin. Ce décret mettant fin à toute inégalité entre la condition juridique des enfants naturels et celle des enfants légitimes, conserve pourtant les dispositions discriminatoires à l'égard de l'enfant adultérin. Il ne réhabilite pas la loi de 1805 ayant reconnu les droits a la naissance, à la létigimation, à la recherche de la paternité et à la succession des enfants naturels.

1-2 par rapport à la loi du 10 novembre 1813.

Il nous faut rappeler les dispositions de cette loi favorable aux adultérins qui pouvaient être reconnu par leur père selon l'article 15. Ces enfants ainsi que leurs descendants bénéficiaient de la succession de leurs parents. (Art.13). Ils pouvaient jouir de la totalité de la succession de leurs mères. (Art. 16).

Les dispositions du code civil haïtien tirées directement du code civil de Napoléon de 1804 sont venues enlever aux enfants adultérins le droit a la succession de leurs auteurs. Il existe toujours des discriminations à l'égard des enfants adultérins avec la modification du code civil par le décret-loi de 1944. Ce décret ne fait qu'établir des règles qui placent l'enfant adultérin sur le même pied d'égalité avec l'enfant légitime. Le code civil a ravi les droits qui lui étaient reconnu par les lois du 28 mai 1805 et du 10 novembre 1813.

2- Retard par rapport à certaines législations étrangères.

La législation civile a graduellement progressé en France. Le 5 Janvier 1972, le journal officiel a rapporté qu'il n'existe plus d'enfants adultérins et incestueux mais des enfants naturels qui ont généralement les mêmes droits et les mêmes devoirs que ceux légitimes. La société française a grandement évolué tenant compte des formes d'union qui sont acceptés tant par la société que par la législation.

Les législateurs français ont réformé la loi du 3 janvier 1972 sur la filiation afin de conformer la législation française au progrès scientifique et aux instruments internationaux telle la convention de l'ONU sur les droits de l'enfant du 8 Janvier 1993 qui est venue apporter quelques modifications notamment libéralisant la

recherche judiciaire de la filiation.

La recherche de la paternité est admise aujourd'hui par presque la généralité des législations étrangères.

De toutes les législations sur la matière, la plus séduisante est celle de la Belgique. En effet, la loi Belge sur la recherche de la paternité et de la maternité naturelle constitue l'une des plus importantes innovations de ce peuple. Aux termes de la loi du 6 Avril 1908, la recherche de la paternité est admise :

1e) S'il y a possession d'état d'enfant naturel.

2e) Si durant la période légale de la conception, la mère a été victime d'enlèvement par violence, ruses, menaces, détention, séquestration arbitraire ou viol.1(*)

Deux lois sont entrées en vigueur le 1er Avril et le 1er Juillet 1998 ont assimilé les enfants naturels aux enfants légitimes respectivement en matière de succession et de filiation. Le code civil belge a modifié afin de supprimer les discriminations pouvant exister entre les enfants légitimes, les enfants naturels et les enfants adultérins. Quel que soit le mode d'établissement la filiation, les enfants et leurs descendants ont les mêmes droits et les mêmes obligations à l'égard des parents.1(*)

La législation allemande n'exclut aucun mode de reconnaissance de l'enfant naturel.

Une évolution s'est produite en France, le concubinage est arrivé à produire des effets juridiques à un point tel que certains auteurs se sont demandés si on n'assistait pas à un retour au concubinat du droit romain. L'union libre prend une certaine consistance et se rapproche du mariage. L'ancienne loi frappait les concubines de la double incapacité de donner et de recevoir. Aujourd'hui, les libéralités sont appréciées par les tribunaux.

Le droit néerlandais ignore la notion d'enfant adultérin, De plus, depuis le 1er Avril 1998, date d'entrer en vigueur de la loi du 24 Décembre 1997 n'établit plus la distinction entre enfant légitime et enfant illégitime.2(*)

Le droit danois ignore également la notion d'enfant adultérin et d'enfant naturel. Les deux lois de 1937 abrogées des 1960 ont été remplacées par la loi sur le statut juridique des enfants. Cette loi s'applique à tous les enfants, quelle que soit leur filiation. La loi sur les successions énonce que : Les enfants héritent de la même façon.1(*)

Le droit espagnol ne reconnaît pas non plus la notion d'enfant adultérin. L'article 39-2 de la constitution de 1978 a établi l'égalité de traitement entre les enfants légitimes et ceux nés hors mariage.1(*)

La législation la plus attardée est celle d'Haïti. En Haïti plus que partout ailleurs, personne, jusqu'à cette heure, n'a encore pense à prendre la défense des enfants naturels non reconnus. La disposition qui interdit la recherche de la paternité est plus que bicentenaire, parce que remontant à mars 1925, date de la promulgation de notre code civil qui a consacré cette interdiction. Contrairement aux autres législations, le législateur haïtien a gardé le silence le plus complet.

Nous avons critiqué la le statut juridique de l'enfant naturel en faisant ressortir les discriminations à son égard, du code civil et des lois spéciales. Ainsi se termine ce chapitre. Le prochain et dernier chapitre apportera des éléments de solutions

CHAPITRE II

Eléments de solution au problème de l'enfant naturel

Il n'existe pas de société sans problèmes. Le fait de les identifier et les de poser est déjà un moyen d'affirmer une certaine responsabilité surtout lorsqu'il s'agit de sujets tabous. Nous avons étudié la situation socio juridique de l'enfance naturelle. Il nous revient maintenant d'apporter des mesures pour stabiliser l'enfant naturel le plus tôt possible. Ce chapitre sera divisé en deux sections dont la première présentera les mesures sociologiques et la seconde des mesures juridiques.

Section 1 Mesures sociologiques

Ces mesures porteront sur une nouvelle perception sociologique de l'enfant à créer par des actions sur le plan national et sur la base de certains modèles étrangers.

A- Actions au plan national

Ces actions porteront sur un changement de mentalité, une campagne d'information et d'éducation, une nouvelle conception de la femme, une nouvelle conception de la filiation naturelle et de la sexualité.

1- Changement de mentalité

Dans les pays beaucoup plus industrialisés et plus avancé, les questions d'enfants naturels ne se posent pas avec le même aspect. Le marché du travail se développe, la jeunesse a de larges possibilités de s'orienter. Il nous faut un changement de mentalité à l'égard des enfants naturels. Il faut que les hommes donnent plus d'attention à leurs enfants, qu'ils soient naturels ou légitimes.

Il faut rejeter certains préjugés qui aveuglent et qui empêchent d'être en accord avec les moeurs. Les églises doivent cesser d'établir la différence entre enfants naturels et enfants légitimes. Toutefois, pour arriver à changer la mentalité de toute une société, il est nécessaire de mener une campagne d'information et d'éducation.

2- Campagne d'information et d'éducation.

Le changement de mentalité se fera par une campagne d'information et d'éducation permanente destinée à recoudre le tissu social haïtien.

La population doit être informé des divers modes de constitution de la famille. Elle doit savoir que les familles constituées hors mariage sont reconnues par la constitution qui fait obligation à l'Etat de les proteger ainsi que les enfants qui en sont issus. L'accent doit être mis sur l'information des jeunes qui se préparent à fonder les familles. Ils doivent savoir que les enfants, quelle que soit la condition matrimoniale des parents sont égaux et ont besoin, pour se développer de l'affection.

Les écoles et les familles de leur côté, ont un très grand rôle à jouer.

Les discriminations contre les enfants et les femmes sont rarement médiatisées. Ainsi, la presse a pour mission aussi d'informer et d'éduquer la population en ce qui concerne les droits des enfants, en sensibilisant sur l'égalité de tous les enfants. De même pour les organisations des droits humains qui doivent oeuvrer à promouvoir l'unité de la nation haïtienne. Il faut une campagne de sensibilisation en ce sens. Toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes placées doivent être éliminées. Donc, une nouvelle vision de la femme s'impose.

3- Nouvelle conception de la femme

D'une manière générale, les femmes sont méprisées. La nouvelle conception de la femme dépendra de l'idée que la femme elle-même se fera de son rôle et de ses responsabilités. L'une des responsabilités de la société c'est de faire en sorte que la femme reflète mieux son univers et ses attentes, Il lui faut une meilleure connaissance de soi-même et une meilleure compréhension du monde extérieur. Il faut avoir une nouvelle conception de la femme qui est le centre de la famille.

Il nous faut une société où la femme est épargnée par les clivages sociaux. Car la perception sociologique de l'enfant naturel est liée à la situation sociale de sa mère. Pour répéter Belmondo Blackson Ndengue, en ce début de siècle, un code de conduite digne d'une société indépendante depuis plus de deux cent ans devrait accorder à la femme haïtienne la place qu'elle mérite. Car, elle a participé à toutes les luttes : depuis les sombres nuits de l'esclavage jusqu'à nos jours.1(*)

Il faut mettre un terme à la mauvaise tendance qui consiste à déconsidérer la femme concubine, à faire d'elle un être inférieur à la femme mariée. La femme qui vit en concubinage doit avoir possibilité de faire valoir ses droits.

A l'heure actuelle, dans le monde, des études ont montré que ce sont les mêmes types de situations qui sont à l'origine d'actes de violence à l'égard de la femme. Force est de constater que dans bon nombres de pays, ces stéréotypes ne correspondent plus à la réalité. Voila près de trois générations que le rôle de l'homme, en tant que maître du foyer, a changé et a évolué vers plus de partage des tâches et des responsabilités. En fait, la cause véritable de cette prédominance masculine générale sur les femmes résulte d'un douloureux manque réciproque de communication.

La prise de conscience des hommes du rôle et de la responsabilité qu'ils ont sur la santé physique et psychique des femmes jettera un faisceau de lumière sur cette ombre encore épaisse qui stagne au dessus de leur tête et leur coeur.

Elles doivent mener une lutte complète pour la promotion de toutes les femmes et de leurs progénitures.

Elles doivent :

1e) faire rayonner une nouvelle et noble conception de la femme.

2e) émanciper la femme sur le plan socioculturel.

3e) porter un intérêt particulier aux questions de la femme dans le monde rural.

5e) appuyer les démarches des femmes en vue de l'application des conventions relatives aux droits de la femme et aux droits de l'enfant.

Cette nouvelle conception de la femme entraîne automatiquement une nouvelle définition de la filiation naturelle.

4- Nouvelle conception de la filiation naturelle

Les naissances hors mariage sont entrées dans nos moeurs, donc il n'existe plus de raison de créer des distinctions entre la famille légitime et la famille naturelle. La filiation naturelle est l'objet d'une agression violente de notre société. Il est grand temps que l'haïtien sache que la filiation naturelle est un choix lie a un mode de vie.

Pour le progrès de notre société, la protection de la famille naturelle est une extrême urgence. Dans toute sa diversité, elle ne doit faire l'objet d'une différence avec la famille légitime. Enfin, une nouvelle conception de la sexualité doit être envisagée.

5- Nouvelle conception de la sexualité

Les conséquences des rapports sexuels hors mariage pèsent uniquement sur les femmes. Le concubinage, la polygamie font partie de nos moeurs, de nos coutumes. Inutile de croire qu'elles peuvent être facilement supprimées, car ce sont des traditions anciennes profondément enracinées.

L'émancipation sociale de la femme, l'avenir économique de la nation dépend de l'importance qu'on leur accorde. Tant que l'homme pourra impunément avoir des enfants, ici ou la, sans en prendre l'entière responsabilité, tant qu'il pourra partager ses faveurs entre plusieurs concubines sans en avoir aucune responsabilité, la femme sera toujours une esclave obligée de peiner durement pour l'entretien de ses enfants et exposée à la misère, aux chutes les plus lamentables. Il faut qu'il y ait une nouvelle conception de la sexualité en Haïti. Les hommes doivent cesser de chercher à satisfaire uniquement leurs désirs sexuels sans penser aux conséquences que ces rapports pourraient engendrer.

La femme doit être libre de s'unir a l'homme qu'elle aime. Elle a le droit au respect de la dignité inhérente à sa personne, au mode d'union qu'elle a choisi et à la protection de sa famille.

L'objet de cette section a été d'établir des mesures dans lesquelles on pourrait orienter la législation haïtienne afin de la rendre plus sociale. Nous avons proposé des mesures sociologiques à savoir un changement de mentalité, une campagne d'information et d'éducation et une nouvelle conception de la femme haïtienne.

B- Modèles étrangers de perception de l'enfant naturel.

Le monde évolue, les mentalités changent. A l'intention des haïtiens nous présentons ces nouvelles perceptions des naissances au mariage dans les pays européens et dans les Etats américains. Nous allons sur les deux points suivants apprécier la situation.

1- La filiation naturelle, une filiation normale.

En France, la filiation naturelle tend à devenir une Í situation qui n'a plus rien d'anormal socialement ; ce que traduit l'augmentation considérable des reconnaissances spontanées. Le taux d'enfants non reconnus lors de la naissance est tombé de 44% en 1974, à 35% en 1980 et à 27% en 1988, tandis que celui des enfants reconnus par leurs deux parents des la naissance est passe de 15% en 1974, à 22% en 1980 et à 32% en 1988.1(*)

En 2000, en France, sur les 775 000 enfants nés, un peu plus de 300 000, soit 40%, ont des parents non mariés. Il y a trente ans, ils n'étaient que 50 000 et ne représentaient que 6% du total des naissances.

Ce qui était autrefois contraire aux normes sociales est devenu aujourd'hui banal, en liaison avec le développement considérable des unions de fait.2(*) Désormais, la venue d'un enfant n'entraîne plus nécessairement le mariage. Dans une revue titrée «  Reflets et perspectives de la vie économique en France », Godelive Massuy-Stroobant a consacré un article aux enfants nés hors mariage.

Aujourd'hui, on les appelle enfants nés hors mariage alors qu'ils étaient qualifiés d'illégitimes, il y a moins de vingt ans. Cette nouvelle dénomination témoigne à la fois de la banalisation de la naissance survenant hors mariage légalement reconnue, mais aussi du changement des mentalités à leur égard, changement qui se manifestent dans plusieurs pays européens par une adaptation de la législation tendant de plus en plus à leur reconnaître des droits équivalents à ceux des enfants légitimes.

La cohabitation en union de fait se transforme, devient un mode de vie durable tandis que les mariages sont moins nombreux. Au début des années 90, plus d'un million de personnes se sont mises en couple chaque année. En moyenne, les 550.000 nouveaux couples se sont repartis entre 480.000 unions sans mariage et 65.000 mariages sans cohabitation préalable.

Comme dans la plupart des Etats américains, au Massachusetts par exemple la proportion des enfants illégitimes a beaucoup augmenté dans les années 1960, passant de 2% en 1961 à 4,18% en 1968 chez les Blancs et de 16,5% à 29,7% chez les Noirs. De nombreuses études ont insisté sur les désavantages matériels et moraux dont souffrent les enfants illégitimes.

Le nombre des enfants nés hors mariage a beaucoup augmenté.

2 - Atténuation des différences entre enfant naturel et enfant légitime.

Les différences sociales entre enfant naturel et enfant légitime se sont atténuées. Ce n'est plus aujourd'hui un handicap social de naître de parents non mariés.

On a enregistré en 1990, 762 407 au total des naissances dont 229 107 soit 30,1% de naissance hors mariage. En 1994, 711 610 dont 248 331 soit 34,9% hors mariage. En 1998, 738 080 dont 300 546 hors mariage soit 40,7% selon la source de l'INSEE.

Dans les années 1960 et 1970, les naissances hors mariage à l'époque peu nombreuses survenaient surtout dans certains milieux sociaux (ouvriers vivant en concubinage ou forains), ou étaient dues à des circonstances particulières (grossesses accidentelles), (difficulté d'obtenir le divorce...). Dans le premier cas, la reconnaissance était rapide mais moins souvent suivie d'un mariage. Dans le second cas, au contraire, la légitimation par mariage des parents était presque systématique après une reconnaissance tardive.

Aujourd'hui, avec la généralisation de la cohabitation, ces naissances se sont répandues dans tous les milieux même si elles restent un peu plus fréquentes dans les milieux populaires. En outre, les naissances non désirées se sont ratifiées. Il en résulte une atténuation des différences sociales de comportement vis-à-vis de la reconnaissance et de la légitimation.

La hausse des naissances hors mariage s'est accompagnée d'une augmentation du nombre des reconnaissances d'enfants. Actuellement, 6 enfants nés de parents non mariés sur 10 sont reconnus par leurs deux parents avant ou après la naissance et une filiation paternelle est établie dans 8 cas sur 10. Les enfants le moins souvent reconnus par leur père sont ceux dont la mère n'a pas d'activité professionnelle et est âge de moins de vingt ans ou de plus de trente cinq ans. Les reconnaissances par la mère seule sont en recul et concernent 7% des enfants nés hors mariage.

La reconnaissance par l'un au moins des parents précède la naissance par 58% des naissances hors mariage et elle est plus fréquente pour l'enfant premier né du couple.

Le milieu social a également un impact sur le moment de la reconnaissance: les enfants de mère cadre ou exerçant une profession intermédiaire sont plus souvent reconnus avant de naître

En France métropolitaine, 46,4% des naissances étaient le fait du couple non marié en 2004, contre seulement 8,5% en 1974. Dans le même temps, reconnaître son enfant est devenu un acte de plus en plus fréquent1(*).

Comme dans tous les pays d'Europe occidentale, la hausse des naissances hors mariage correspond à la dissociation entre la procréation et le mariage intervenue dans la seconde moitie du XXe siècle.

En Haïti, il faut rompre avec des mentalités qui appartiennent au passe faire siennes les nouvelles conceptions de la procréation, de l'enfance, de la cohabitation, de l'union de fait dans les Etats américains et dans les pays européens.

Section 11

Mesures juridiques

Il est regrettable que notre le civil haïtien ne comporte aucune disposition vis-à-vis de l'enfant adultérin et de l'enfant incestueux. La prise en compte de la filiation naturelle et de ses effets quand aux biens, aux relations entre les enfants naturels et légitimes et au sein de la société, doit conduire à l'élaboration d'un ensemble de règles qui protégent les mineurs, la concubine, le concubin, leurs biens et leurs relations avec les tiers, pour donner une assise juridique à cette union. Les lois qu'il comporte sont contraires à la convention. Bref, il faut une humanisation progressive des lois haïtienne et une assimilation du concubinage au mariage ; l'intégration du droit international relatif aux enfants à la législation nationale reste une tâche prioritaire.

Il faut un changement du statut juridique de l'enfant naturel. L'Etat haïtien a un rôle primordial à jouer. Comme mesures juridiques nous envisagerons le rétablissement des lois de 1805 et de 1813, ensuite des modifications apportées au code civil, et nous ferons des suggestions relatives aux décrets de 1944 et de 1959, une nouvelle législation adaptée aux normes internationales.

A- Suggestions relatives aux lois particulières et au code civil

1- rétablissement des lois de 1805 et du 10 Novembre 1813

La législation haïtienne actuellement doit s'inspirer des lois de 1805 et celles de 1813 pour une meilleure adaptation des enfants naturels au niveau de la société. Ces lois considéraient les enfants naturels comme des égaux sur le plan juridique. Le législateur de 1805 a élaboré un droit familial qui répondait aux circonstances de la nation haïtienne. Cette loi, comme le dit Madiou, était en harmonie avec les moeurs des haïtiens qui, presque tous, étaient des enfants naturels.

Vu l'état actuel des moeurs haïtiennes, le fort pourcentage de familles hors mariage, il faut sinon rétablir ces lois, du moins prendre une législation inspirée d'elle.

2- modifications au code civil

Il lui incombe de modifier les dispositions légales discriminatoires du code civil à l'égard des enfants naturels notamment ceux de 302, 306, 313, 611 et de promulguer une législation propre à protéger la famille, à garantir les droits de tous les enfants. Car les enfants adultérin et incestueux devront être légitimés par le mariage subséquent de leurs père et mère. Les dispositions des articles 606, 607, 608, 609 et 610 relatifs aux enfants naturels et incestueux doivent être éliminés. Ces enfants devront hériter de leurs père et mère. L'article 611 doit inclure les enfants naturels et incestueux de la succession de leurs auteurs. Ces modifications sont inspirées des articles 260 a 262 de la constitution et des articles 1, 3 paragraphe 1, 18 de la convention relative aux droits de l'enfant.

Il faut que l'état haïtien oblige l'homme haïtien à endosser ses responsabilités paternelles, car les lois ne doivent pas toujours se contenter de refléter les moeurs, elles doivent aussi exercer une action contraignante. Le ministre a la condition féminine et aux droits de la femme, Mme Marie Laurence Jocelyn Lassègue, de concert avec les ministres de la justice, des affaires sociales et de l'éducation nationale doivent oeuvrer à l'amélioration de la condition féminine.

Ces trois documents sur le travail domestique, le concubinage, la paternité en matière de filiation. L'un des textes visent a modifier le chapitre premier de la loi #8 du code civil haïtien. D'après le ministre, en désaccord avec la tradition juridique haïtienne, ce présente plusieurs innovations. Parmi lesquels il faut citer la déclaration de naissance à l'office de l'état civil par les deux parents, ou par l'un ou l'autre.1(*) Proposons d'autres suggestions à la lumière des décrets du 22 Décembre 1944 et du 27 Janvier 1957.

3- Suggestions relatives aux décrets du 22 Décembre 1944 et du 27 Janvier 1959

Le décret du 22 Décembre 1944 a accorde les mêmes droits aux enfants naturels, mais il n'a pas modifie les articles du code civil qui portent préjudice aux enfants adultérins et incestueux.

Le décret du 27 Janvier 1959 doit être modifie en proclamant l'égalité de tous les enfants sans aucune distinction conformément à l'article 2 de la convention relative aux droits de l'enfant. Les dispositions de ces deux décrets méritent d'être étendues aux enfants adultérins et incestueux. Les décrets-lois méritent d'être modifiés. Le gouvernement de Lescot n'a pas su arriver jusqu'au bout. Le législateur de 1959 de son côté n'a pas éteint

B- Nouvelle Législation

La loi étant la concrétisation des faits vise le général. On comprend qu'il est impérieux de doter le pays d'une nouvelle législation adaptée au droit international et à certaines législations étrangères.

1 - adaptation au droit international

Le droit international est en évolution constante et s'adapte aux nouveaux défis imposés par les changements sociaux et culturels. Ceci est d'autant plus valable qu'il s'agit de textes concernant les droits de l'enfant. L'Etat haïtien doit oeuvrer à l'édification d'une nouvelle structure de sécurité destinée à empêcher la formation de nouvelles lignes de division. L'enfant étant une personne au sens juridique, une personne à des droits et à des obligations dès sa naissance pourvu qu'il naisse vivant et viable, ses droits comprennent tout à la fois le droit de la filiation.

Une convention une fois ratifiée par un pays doit être mise en application. T Il nous faut adapter la législation haïtienne au droit internationale. Ceci est un fait indiscutable. L'intégration du droit international relatif aux enfants à la législation nationale reste une tache prioritaire.

Le droit haïtien ne doit pas être à l'écart de l'évolution qui se produit dans la société et ne peut pas rester indifférent aux changements qui s'y manifestent.

Enfin, nous pourrions plaider pour une mise en oeuvre du test d'ADN pour la recherche de la paternité en Haïti Ce test est pratiqué dans plus de 130 pays.

Le test d'ADN peut aider une mère et son enfant à succéder à un meilleur niveau de vie en désignant le père biologique de cet enfant. Le père devra probablement prendre ses responsabilités. De plus, le père pourrait aussi décider de s'impliquer davantage dans la vie de l'enfant.1(*)

Pour permettre à l'enfant naturel de prouver sa filiation, il faudrait admettre la possession d'état comme un mode de preuve de filiation.

1-1 suggestions relatives à la convention aux droits de l'enfant

La convention internationale relative aux droits de l'enfant a pour base justice pour tous les enfants sans aucune distinction, aucune exclusion.

La convention a une valeur supra nationale c'est- à- dire elle se place au dessus des lois régissant le statut des enfants. Haïti l'a intégrée officiellement dans la législation nationale par sa ratification. Cet acte engendre pour l'Etat haïtien certaines obligations légales, sociales et administratives. Il est clairement dit à l'article 273-2 de la constitution de 1987 que les traités ou accords internationaux, une fois sanctionnés et ratifiés dans les formes prévues par la constitution, font partie de la législation du pays et cette ratification abroge toutes les lois qui lui sont contraires.

Après la ratification, Haïti devrait modifier toutes les lois contraires à cette convention. Cette convention en son article 2 paragraphe 1 déclare que les états parties s'engagent à respecter les droits d'opinion politique ou autre de l'enfant de ses parents ou représentants légaux énonces dans la pressente convention et à les garantir à tout enfant relevant de sa juridiction, sans distinction de race, de couleur, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre de l'enfant, de ses parents ou représentant légaux.

Il a posé toute une série de principes relatifs aux droits fondamentaux de l'enfant tels le droit au développement de ses capacités, de vivre avec ses parents, de retrouver sa famille, etc... Ces normes sont à la fois interdépendantes et indivisibles ; on ne peut pas garantir certains droits en laissant de cote ou en sacrifiant d'autres. Par la ratification, le gouvernement haïtien s'est engage à défendre et a garantir les droits des enfants, ainsi qu'a répondre de ses engagements devant la communauté internationale. Le gouvernement est tenu de prendre des mesures, de mettre en oeuvre des politiques qui tiennent comptent des intérêts supérieurs de l'enfant. Il faut abroger les dispositions de la législation haïtienne qui sont contraires a cette convention et élaborer d'autres ayant pour objectif de protéger tous les enfants.

Il est important que la législation considérer le cas des enfants naturels dont le nombre ne fait qu'augmenter de jour en jour.

L'UNICEF est l'un des organismes internationaux qui travaille en Haïti depuis 1949. Sa mission est de défendre les droits des enfants, d'aider à répondre à leurs besoins essentiels et de leur donner davantage d'opportunités de s'épanouir pleinement. Il doit contribuer à modifier les cadres juridiques et politiques des Etats parties et à rappeler l'obligation qu'ont les gouvernements, les familles, les communautés et les individus de respecter ces droits et les aider à le faire.1(*)

1-2 suggestions relatives à la convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations a l'égard des femmes.

Une femme est un individu de sexe féminin de l'espèce humaine dont l'anatomie lui permet de porter et de mettre au monde des enfants, hors problème d'ordre médical. Outre la biologie, la perspective historique et culturelle peut rendre compte de certaines spécificités féminines, permettre de comprendre leurs places dans les sociétés traditionnelles ou contemporaines.

La place des femmes dans les différentes sociétés a été souvent étudiée au vingtième siècle et des mouvements féministes ont cherché à comprendre et à combattre les raisons de l'inégalité de condition entre les hommes et les femmes qui sont souvent au fondement même des sociétés traditionnelles, et dont on retrouve la trace jusque dans les sociétés contemporaines les plus évoluées. Celle-ci en tant que personne humaine, doit conquérir ses droits et privilèges que lui reconnaît la déclaration universelle des droits de l'homme et la convention relative aux droits de la femme.

La convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes affirme l'égalité des droits fondamentaux des hommes et des femmes dans la société et dans la famille. Cette convention revêt d'une place importante parmi les traités internationaux de protection de ses droits fondamentaux. Il existe d'autres instruments qui confèrent beaucoup d'importance à la famille et reconnaissent à la femme une grande place à l'intérieur de la cellule familiale.

La convention sur l'élimination de toutes formes de discrimination a l'égard des femmes ratifiée par Haïti rappelle les droits inaliénables des femmes, Haïti doit adopter toutes les mesures nécessaires pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans toutes les questions découlant du mariage et dans les rapports familiaux, assurer à l'homme et à la femme les mêmes droits et les mêmes responsabilités en tant que parents, quelque soit leur état matrimonial, pour les questions se rapportant à leurs enfants; dans tous les cas, l'intérêt des enfants sera la considération primordiale ;

La convention internationale au droit de l'enfant, dans son préambule, reconnaît la contribution des femmes au bien-être de la famille et au progrès de la société, mais rappelle que le rôle traditionnel de l'homme dans la famille et la société doit évoluer autant que celui de la femme si l'ont veut parvenir a une réelle égalité de l'homme et de la femme.

Le code civil haïtien, malgré les fondements juridiques, laisse persister un écart entre ce qui est prescrit par les lois et la réalité vécue par les femmes. Aujourd'hui, bien qu'un nombre sans précèdent de femmes élèvent une famille et jouent un rôle actif au sein de la société, elles sont toujours confrontées à des obstacles. Ces obstacles les empêchent qu'elles soient autochtones, handicapées, célibataires, parents uniques ou qu'elles vivent dans la pauvreté, de se réaliser pleinement.

2- adaptation aux législations étrangères

Les droits des certains pays étrangers ignorent la notion d'enfant adultérin, soit parce qu'ils considèrent ce dernier comme un enfant naturel, soit parce qu'ils ont supprimé toute différence entre enfants naturels et enfants légitimes.

En France, la filiation naturelle, pendant très longtemps a été considéré comme une situation anormale. Le fait par un couple d'avoir un enfant hors mariage semblait traduire la volonté de ce couple de se placer hors de la norme c'est-à-dire le mariage. Le législateur français soumettait l'enfant naturel à un statut d'infériorité. C'était une situation statistiquement anormal : le bâtard.

Depuis plus de vingt ans cette situation a beaucoup évolué. La loi du 3 Janvier 1972 a posé le principe d'égalité entre enfant légitime et naturel. Celle du 8 Janvier 1993 a considérablement modifie certains articles du code civil ayant rapport à la filiation naturelle.

Ce qui était autrefois contraire aux normes sociales est devenu aujourd'hui banal, en liaison avec le développement considérable des unions de fait et de l'évolution du temps. Le Pacte civil de solidarité crée en 1999, est un contrat conclu entre deux personnes majeures, quel que soit leur sexe, pour organiser leur vie commune Cette création législative est née de la nécessite de combler le vide juridique entourant les couples non mariés et notamment les homosexuels en mal d'une reconnaissance de leurs unions au cours des années 1990.1(*)

Nous ne demandons pas à notre législation de copier à la lettre la législation française comme il avait fait pour le code de Napoléon puisque chaque pays a ses moeurs, ses coutumes qui lui sont propres.

Dans le Pacte, les partenaires ne sont pas tenus au devoir de fidélité, ils se doivent une assistance mutuelle et matérielle, ils sont tenus solidairement l'égard des tiers. Les biens acquis a titre onéreux sont soumis à l'indivision.

Le Pacte constitue une nouvelle solution pour organiser contractuellement une vie commune parallèlement et différemment au mariage et il est moins formel que le mariage. Cette évolution est faite en vue de mieux structurer la famille car l'évolution des moeurs consacre de nos jours, un autre modèle de famille. Pour le législateur français, il ne suffit pas de se marier mais d'avoir aussi des liens affectifs et biologiques.2(*)

La législation haïtienne pourrait en quelque sorte suivre l'exemple français et s'adapter à nos coutumes. Cette loi serait garante de la sauvegarde des droits de l'enfant qui demeure au centre du droit de la famille. Les termes d'enfants naturels, incestueux, adultérins seraient bannis comme dans la terminologie juridique française.

Le droit Danois ignore les notions d'enfant adultérin et enfants naturels. Les deux lois de 1937 qui s'appliquent respectivement aux enfants nés hors mariage et aux enfants légitimes, et établissent une distinction nette entre les deux catégories d'enfants, ont été abrogées dès 1960. Elles ont été remplacées par la loi sur le statut juridique des enfants quelle que soit leur filiation.

Pourquoi la législation haïtienne ne suit- t-elle pas le modèle danois ?

Le droit espagnol ignore la notion d'enfant adultérin. L'article 39-2 de la constitution de 1978 a établi l'égalité de traitement entre les enfants légitimes et ceux nés hors mariage. La loi du 13 mai 1981 a donc adapté le code civil aux prescriptions constitutionnelles. Dans son article 108-2, il est précisé que la filiation, qu'elle soit légitime ou naturelle, produit les mêmes effets.

En Allemagne, la distinction entre la filiation naturelle et la filiation légitime a été abolie par la loi du 16 Décembre 1997 concernant la réforme du droit de l'enfant et de la filiation.

Différence selon que les parents détenteurs de l'autorité parentale commune ou non. Si les parents n'ont pas de nom de famille commun, mais ont l'autorité parentale en commun, ils décident par déclaration devant l'officier de l'état civil, du nom de celui du père ou de la mère. Si les parents n'ont pas pris de décision dans un délai d'un moi après la naissance de l'enfant, le tribunal de famille donnera à un des parents le droit d'en décider.1(*)

Dans le cas où l'autorité parentale deviendrait commune lorsque l'enfant a déjà un nom patronymique, la possibilité existe pendant un délai de trois mois, de décider d'un nouveau nom pour l'enfant.

Face à cette progression, Le législateur haïtien doit envisager des solutions adéquates pour améliorer le sort des enfants naturels.

Nous avons essayé, dans cette section d'apporter d'une part, des éléments de solution d'ordre juridique au problème de l'enfant naturel en Haïti. Nous avons envisagé un changement au niveau de la législation haïtienne, son adaptation aux normes internationales relatives aux droits de l'enfant et de la femme.

Conclusion

Ce mémoire est une étude de la filiation naturelle en Haïti. Nous nous sommes évertuée à présenter le phénomène de l'enfant naturel sur le double plan sociologique et juridique en France et en Haïti. Nous avons montré la perception sociale et l'ampleur du phénomène en Haïti pendant la dernière décennie.

Tout au long de la démarche, nous avons posé la problématique de la filiation naturelle comme un grand problème social. La société haïtienne a subi des transformations auxquelles auraient dû s'adapter les mentalités haïtiennes. En effet, certains gouvernements comme celui de Dessalines et de Pétion ont plus ou moins corrigé la situation des enfants naturels à partir des lois qu'ils ont créées respectivement en 1805 et en 1813. Il faut mentionner toutefois les travaux réalisés sous Boyer qui, dans leur portée peuvent être considérés comme contraire à l'avancement de la cause des enfants naturels. Vers les années 1900, les gouvernements de Lescot et de Duvalier ont apporté une amélioration tardive et incomplète de la situation de ces enfants.

Nous avons essayé de faire une critique de la situation sociale et juridique des enfants naturels en Haïti. La filiation naturelle ainsi que les enfants qui en sont issus, comme nous l'avons constaté tout au cours de notre analyse, sont marginalisés, et doublement victimes de discriminations sociales, de négligences et faiblesses de l'appareil judiciaire. Nous avons étayé notre démarche sur une étude comparative de la législation haïtienne en matière de filiation naturelle avec les législations française, espagnole, belge, danoise.

D'après notre observation, la législation au niveau de ces pays a du subir des modifications le plus souvent assez profondes pour s'adapter à la volonté et à l'évolution des moeurs. Ce qui fait que les dispositions légales ont toujours servi à la cause de la société et suivant l'aspiration et la conception des hommes de lois des différentes périodes historiques. Nous en prenons pour preuve les lois en vigueur à l'époque dans ces différents pays. La lecture de ces lois permet d'observer qu'elles reflétaient les opinions et la conscience des sociétés de l'époque.

Ces législations ont été repensées en fonction de la place que les enfants naturels y occupent. Ce qui fait la valeur de ces législations étrangères est qu'elles ont toujours été adaptées avec le temps et suivant la mouvance sociale et surtout toujours en harmonie avec l'évolution de leur société. Le législateur haïtien de son coté, d'après ce qu'il nous a été donné d'observer, se laisse toujours mené par les événements. Ce qui engendre une situation incommode aux enfants incestueux et adultérins auxquels il finit par ne pas reconnaître le droit à la légitimation, à la reconnaissance, à la succession.

Il s'agit pour nous de tenter d'apporter, dans le cadre de notre travail, des pistes de solutions à ces problèmes épineux et graves qui s'imposent a la justice haïtienne actuelle. A notre sens, consciente de l'importance du problème, nous avons dans le dernier chapitre du travail, proposé des suggestions qui pourront servir de base à toute volonté d'améliorer la situation de l'enfant naturel en Haïti. Il faut donc, des mesures sociologiques et légales, urgentes et rationnelles pour régler les questions de fait et les situations dérivées de cette filiation.

Nous avons proposé une nouvelle perception sociale et un nouveau statut juridique de la filiation naturelle en Haïti. Ce qui permettrait à l'enfant naturel de connaître des jours moins assombris de tristesse et d'angoisse.

Les parents doivent être rendus responsables de l'avenir de leurs enfants qu'ils soient issus de leurs oeuvres naturelles ou légitimes. Cette responsabilité ne se limite pas seulement aux seuls actes domestiques mais s'étend également aux domaines social et juridique.

Ceux qui défendent la famille, ses valeurs, son rôle dans la société comme les organismes de droits humains, la presse, les associations féministes, les juristes, doivent faire entendre leur voix partout où l'on décide de l'avenir des enfants. Il s'agirait là d'un service rendu à la nation haïtienne et à l'humanité toute entière. Ce travail devra profiter tant à soi-même qu'aux générations futures.

La convention relative aux droits de l'enfant représente, de ce point de vue un instrument précieux de référence. Nous sommes convaincue que par leur engagement, l'enfant naturel arrivera à trouver sa place dans la société. L'amélioration des conditions de vie des enfants naturels leur permettra d'accéder à une vie plus ou moins décente aux yeux de la société.

Dans le but d'harmoniser l'ordre social et de garantir le droit de tout individu, l'Etat doit remplir ses devoirs constitutionnels qui sont la protection de la maternité, de l'enfance et de la famille. Dans le cadre d'une politique de justice sociale, il doit mettre tout en oeuvre pour réhabiliter la filiation naturelle et garantir une vie sociale propre à contribuer à l'épanouissement de ces enfants aussi bien dans leur vie d'enfant que dans leur vie d'adulte. C'est le seul moyen qui, selon notre analyse, pourra garantir la possibilité d'avoir un citoyen honnête, paisible... et disposé à travailler valablement au développement de son pays.

Pour cela, il y a toute une série de dispositions et d'attitudes qui doivent être adoptées par l'Etat haïtien. Il faut harmoniser et adapter la législation du pays aux exigences du moment et au nouvel ordre mondial qui se veut garant du respect des droits de l'homme.

Une intervention pareille sera certainement efficace; mais pour être efficiente, ne devrait-on pas en envisager d'autres aussi pertinentes sur les plans environnemental et économique ?

* (1) http://plymendroit.free.fr/droit _civil .p, 1.

* 1 Serge Henri, Vieux: Le plaçage, Droit coutumier et famille en Haiti, p.84.

* (1) Carbonnier, Jean : Droit civil, La famille, p.455.

* (1) Jean Carbonnier : op. cit. p.480.

* (1) Carbonnier, Jean :Droit civil, La famille, op.cit., p455.

*

* (1) Carbonnier, Jean : Droit civil, La famille,op.cit., p.456.

* (1)Jean Carbonnier : op.cit, p.512.

* (1) Benabent, Alain : La famille, p.4eed.p.418

* (2) ibidem.

* (1) Benabent, Alain : Droit civil, La famille, 4ed., op.cit., p.430.

* (1) Gabriel, Marty et Pierre, Raynaud : Les personnes, 3e ed. p.546.

* (1) Carbonnier, Jean : Droit civil, La famille,op.,cit.p.493.

* (1) Dantes, Bellegarde: Histoire du peuple haitien, p. 34.

* (2) Ibidem.

* (1) Dantes, Bellegarde : op.cit., p.56.

* (1) Moral, Paul : Le paysann haïtien,p.172.

* (1) Ibidem : p.173.

* (1) Enquete sur les conditions de vie en Haïti ( ECVH-2001) Volume I, Juillet 2003.p.73-75.

* (1) Bellegarde, Dantes : Histoire du peuple haïtien, p.33.

* (1) Bellegarde, Dantes : Histoire du peuple haïtien, op.cit., p.34.

* (1) Vieux Serge,Henri : Le plaçage, droit coutumier et famille en Haïti,p.59-62.

* (1) Vieux Serge, Henri : Le placage, droit coutumier et famille en haiti, po.cit., p.55.

* (2) ibidem : p.59.

* (1) Sala, Molin : Code noir, p. 106.

* (1) Vieux, Serge Henri : op.cit., p.237.

* (1) Vieux Serge, Henri : Le placage, droit coutumier et famille en Haiti, p.235-239.

* (1) Louis, Joseph Janvier : Les constitution d'Haiti.

* (1) Leger Abel, Nicolas: Code Civil, p. 170-177.

* (1) Journal, Le Moniteuer # 19.

* (1) Journal, Le moniteur, # 59.

* (1) Compilation des textes internationaux, p.13.

* (1) Compilation des textes internationaux, op. cit., p.226.

* (1) Compilation des textes internationaux, op. cit., p. 227.

* (1) Moral, Paul : Le paysan haitien, op.cit., p.172.

* (1) Paul, Moral : Le paysan haitien, op.cit., p.172.

* (1) White, G. Ellen: Conseil sur la conduite sexuelle, l'adultere et le divorce, p.108.

* (1) Tour de Garde, 1e Janvier 1984, p.27-30.

* (1) Fanfant, J.E : De la recherche de la paternité, p.6.

* (1) http//www.senat.fr/droit francais.

* (1) http://wwww.senat.fr/droit belge..

* (2) Ibidem: droit neerlandais.

* (1) http//www.senat.fr/droit espagnol.

* (1) Amina :# 433, p.II.

* (1) Benabent, Alain : Droit civil, La Famille, 5e ed. p.378.

* (2) http://www.ined.fr/tout _savoir_population, p.1.

* (1) Instititut national de statistique et des etudes economiques,, Première : no 1105, octobre 2006.

* (1) http://www.lenouvelliste.com/article.php., 2006.

* (1) www.avocat/juriste/test d'ADN-information.

* (1) www.unicef.fr, p.2.

* (1) Code civil, Dalloz, 103e ed.p522-530.

* (2) Ibidem.

* (1) http://www.senat.fr/droit allemand.






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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote