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La permanence de la qualité d'associé

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par Inès KAMOUN
Faculté de Droit de Sfax - Mastère en droit des affaires 2006
  

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Paragraphe 2 : L'admission de l'exclusion extrastatutaire358(*

Les conventions extrastatutaires ou pactes d'associés359(*) sont souvent conçues comme un instrument idéal de souplesse contractuelle libéré des règles impératives régissant les rapports sociaux360(*), qui auraient dû être respectées si la même disposition avait été stipulée dans les statuts361(*). Ainsi, la rigidité du droit des sociétés peut-elle conduire les associés à délaisser le cadre statutaire et recourir aux accords extrastatutaires362(*). Vu la souplesse offerte par les pactes d'associés, l'exclusion extrastatutaire peut se révéler intéressante363(*). Mais la question se pose, à cet égard, de savoir si une clause d'exclusion insérée dans un document extrastatutaire est valable.

La question ainsi posée fait l'objet d'un débat jurisprudentiel et doctrinal. Selon une position restrictive, la clause d'exclusion relève du « domaine réservé » des statuts364(*). Certaines décisions françaises365(*) ont adopté cette solution366(*). Il convient, à cet égard, de citer un arrêt rendu le 8 février 1982 par la Cour de cassation française qui a annulé une convention extrastatutaire qui prévoyait l'exclusion d'un associé en jugeant qu'« il semble acquis aujourd'hui qu'une convention extrastatutaire d'exclusion ne peut jamais ambitionner de se substituer aux statuts pour retirer à l'un des signataires sa qualité d'associé »367(*). Une partie de la doctrine française rejoint cette position et considère qu'il n'est pas permis qu'une convention extrastatutaire, distincte du contrat de société, puisse retirer à l'un des associés cette qualité368(*). Elle justifie sa position par le fait que la qualité d'associé est née par la signature du contrat de société. Dès lors, il ne semble pas possible qu'une convention extrastatutaire, donc en dehors du contrat de société, puisse ôter cette qualité369(*).

Cependant, cette position restrictive n'emporte pas la conviction ; le principe de la liberté contractuelle devrait en principe permettre de prévoir l'exclusion d'un associé dans une convention extrastatutaire. Cette validité peut s'autoriser des dispositions de l'art. 242 du C.O.C. aux termes duquel « les obligations contractuelles valablement formées tiennent de loi à ceux qui les ont faites ». Ainsi, bien que les conventions extrastatutaires d'exclusion ne fassent pas l'objet d'une disposition du droit des sociétés, elles restent régies par le droit des contrats et des obligations ; leur validité est admise au nom du principe de la liberté contractuelle, d'autant plus que l'exclusion d'un associé n'est pas contraire à l'ordre public370(*). En Tunisie, la jurisprudence n'a pas eu à se prononcer sur la validité de ces conventions. Une partie de la doctrine y est pourtant favorable371(*). Une partie de la jurisprudence372(*) et de la doctrine373(*) françaises considère aussi que l'accord des volontés, « manifesté par une convention extrastatutaire peut efficacement fonder le droit d'exclusion dans son principe »374(*).

Ainsi, l'exclusion d'un associé peut-elle être stipulée soit dans les statuts, soit dans une convention extrastatutaire. Mieux encore, ladite mesure peut être décidée par les juges même en l'absence de toute autorisation législative ou conventionnelle.

Sous-section 2 : L'admission de l'exclusion purement judiciaire

L'exclusion purement judiciaire désigne l'exclusion d'un associé prononcée par un juge en dehors de toute autorisation législative et de toute stipulation conventionnelle375(*) la prévoyant. A cet égard, la question se pose de savoir si, en l'absence de telles autorisations, le juge est fondé à prononcer ladite mesure. L'exclusion purement judiciaire est une question controversée. Afin de l'aborder, On va, d'abord, poser le problème suscité par une telle mesure (paragraphe 1) et démontrer, ensuite, sa possible justification (paragraphe 2).

* 358 On désigne par là la clause d'exclusion stipulée dans un pacte d'associés au sens restrictif.

* 359 V. Yves GUYON, Traité des contrats, Aménagements statutaires et conventions entre associés, op. cit., p. 301 et s. ; Marie-Christine MONSALLIER, L'aménagement contractuel du fonctionnement de la société anonyme, op. cit., p. 54 et s. ; Gilbert PARLEANI, Les pactes d'actionnaires, art. préc. ; Jean-Patrice STORCK, La validité des conventions extrastatutaires, D. 1989, chron., p. 267 ; Laurence DUPUIS et Catherine HUSSON, Formules commentées de clauses de pactes d'actionnaires, Gaz. Pal., n° 148, 27 mai 2004, p. 51 ; Marion SILVENTE, Pactes d'actionnaires : soigner votre contrat de mariage, article disponible sur Internet à l'adresse http://www.lentreprise.com/creation/50.3.25.131.1.0. html

* 360 Il s'agit aussi bien de la réunion de l'assemblée générale extraordinaire que de la mesure de publicité de la décision prise par ladite assemblée.

* 361 Michel JEANTIN, Les clauses de préemption statutaires entre actionnaires, Dr. soc., juillet 1990, p. 4, n° 23, cité par Jérôme BONNARD, L'influence des principes généraux du droit des contrats en matière de pactes d'associés, Mélanges JEANTIN, p. 139.

* 362 Renée KADDOUCH, Le droit de vote de l'associé, thèse, Université de droit, d'économie et des sciences d'Aix-Marseille, Faculté de droit et de sciences politiques, 2001-2002, publiée sur Internet à l'adresse http://www.glose.org/th005-htm.htm

* 363 V. Sylvie DARIOSECQ et Nathalie METAIS, art. préc. Selon ces auteurs, « la pratique privilégie les clauses d'exclusion insérées dans un pacte d'actionnaire en raison de la souplesse et de la discrétion de cet instrument ». V. également Florian SIMONEAU, Les pactes d'actionnaires : étude des clauses d'exclusion dans les pactes d'investisseurs en capital risque, mémoire pour le magistère de juriste d'affaires à l'Université de Panthéon- Assas Paris II, 2005, publié sur Internet à l'adresse www.u-paris2.fr/mja/etudiants/memoires2005.htm (consulté le 05-02-2006).

* 364 Jean-Patrice STORCK, La validité des conventions extrastatutaires, art. préc., p. 270, n° 14.

* 365 Il n'y a pas, à notre connaissance, de décisions tunisiennes en la matière.

* 366 CA Paris, 21 décembre 1983, Dr. soc. 1984, n° 74, note M. GERMAIN ; Bull. Joly 1984, §113, p. 303, citée par Marie-Christine MONSALLIER, L'aménagement contractuel du fonctionnement de la société anonyme, op. cit., p.292. Selon cette décision, semble prohibé le pacte qui tendrait à se substituer aux statuts en concernant l'ensemble des associés. En l'espèce, l'exclusion était stipulée dans un règlement intérieur. Une décision de l'assemblée générale a prononcé cette mesure contre l'un des associés. Celui-ci a donc intenté une action en justice pour demander l'annulation de ladite décision. Il a obtenu gain de cause tant auprès du Tribunal que de la Cour d'appel de Paris. Celle -ci a, en effet, annulé la décision d'exclusion puisque la convention extrastatutaire d'exclusion tendait, en fait, à se substituer aux statuts.

* 367 C. cass. F. (ch. Com.), 8 février 1982, Bull. Joly 1982, p. 970, cité par Jean-Jacques DAIGRE, La perte de la qualité d'actionnaire, art. préc., p. 541 ; Marie-Christine MONSALLIER, L'aménagement contractuel du fonctionnement de la société anonyme, op. cit., p.292. En l'espèce, les actionnaires d'une société anonyme avaient conclu entre eux une convention extrastatutaire qui permettrait d'exclure chacun des signataires à l'unanimité des autres. L'un d'entre eux, ayant fait l'objet d'une telle mesure, a intenté une action en responsabilité. La Cour d'appel a annulé ladite convention et la Cour de cassation a rejeté le pourvoi au motif que les juges du fond « ont retenu (à bon droit) que la convention litigieuse était distincte du contrat de société liant par ailleurs les parties et constaté qu'elle n'avait pas été signée par un représentant de la société ».

* 368 Jean-Jacques DAIGRE, La perte de la qualité d'actionnaire, art. préc., p. 541. Cet auteur considère que « les organes sociaux ne pourraient trouver compétence pour exclure un associé dans un pacte extrastatutaire ». V., dans le même sens, J.-P. STORCK, La validité des conventions extrastatutaires, art. préc., p. 270, n° 14 : « s'agissant d'une clause d'exclusion d'un associé stipulée dans un cas où aucun texte ne l'envisage, il a été jugé que seuls les statuts de la société pouvaient prévoir cette mesure, à l'exclusion des conventions extrastatutaires ».

* 369 H. LE NABASQUE, P. ELSEN, P. DUNAUD, Les clauses de sortie dans les pactes d'actionnaires, Dr. soc., Actes pratiques, 1992, n°5, p. 12, n°52, cité par Marie-Christine MONSALLIER, L'aménagement contractuel du fonctionnement de la société anonyme, op. cit., p.292.

* 370  V. en ce sens Florian SIAMONEAU, Les pactes d'actionnaires : étude des clauses d'exclusion dans les pactes d'investisseurs en capital risque, mémoire préc., p. 11 ; H. LE NABASQUE, P. ELSEN, P. DUNAUD, Les clauses de sortie dans les pactes d'actionnaires, art. préc. ; F. RIZZO, Le principe d'intangibilité des engagements des associés, art. préc.

* 371 Salma KHALED SLAMA, L'exclusion d'un associé dans les sociétés commerciales, thèse préc., p. 127 et s.

* 372 CA Poitiers, 12 novembre 2002, Dr. soc. juin 2003, p. 20, note Henri HOVASSE. En l'espèce, les associés d'une société anonyme avaient conclu un pacte extrastatutaire qui créait un lien entre la qualité d'actionnaire et celle de salarié ou de dirigeant, de telle sorte que si l'un d'eux venait à perdre sa qualité de salarié ou de dirigeant, il devait céder ses actions. La Cour d'appel de Poitiers avait admis la validité de ce pacte en jugeant que « les parties ont voulu de manière parfaitement affirmée contrôler, autrement que par des dispositions statutaires, le développement de la société fondé sur des changements importants de sa structure » et qu'« il n'est pas démontré que ce type de pacte viole la législation en vigueur ».

* 373 Henri HOVASSE, note sous CA Poitiers, 12 novembre 2002, préc. ; Sylvie DARIOSECQ et Nathalie METAIS, Les clauses d'exclusion, solution à la mésentente entre associés, Bull. Joly 1998, p. 908.

* 374 Didier MARTIN, L'exclusion d'un actionnaire, art. préc., p. 106 ; I. KRIMMER, La clause de rachat, art. préc., p. 104, n° 22.

* 375 Une stipulation conventionnelle peut être statutaire ou extrastatutaire.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand