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Financement des initiatives entrepreneuriales chez les jeunes du Bénin

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par Dona Maurice ZANNOU
IUB - DESS 2010
  

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III- SUGGESTIONS POUR UNE AMELIORATION DU SYSTEME DE FINANCEMENT DES JEUNES

Au regard des analyses des données d'enquête, il semble que le système de financement des initiatives entrepreneuriales des jeunes a besoin d'être revu et amélioré. A cet effet, nous pensons que les axes sur lesquels les actions à impact rapide peuvent être menées sont globalement de deux catégories. Il s'agit fondamentalement de revoir le système de financement lui-même et ensuite de repenser l'entrepreneuriat à travers les idées d'entreprise.

1- LE SYSTEME DE FINANCEMENT

Les résultats de l'investigation sur le terrain ont permis de comprendre qu'il existe en réalité beaucoup de problèmes au niveau du système de financement des initiatives des jeunes.

1-1- Conscientisation des jeunes à la solvabilité

Il nous semble primordial qu'un premier travail de conscientisation des promoteurs à la solvabilité s'impose. En effet, la mise en oeuvre de certains projets de développement dans le pays (où des subventions sont attribuées, des dons sont faits, des crédits sont mis en place sans aucune rigueur dans le remboursement) a renforcé certains jeunes promoteurs dans une position de débiteurs insolvables. Ils considèrent que l'argent des projets provient des pays riches et se persuadent que c'est une somme qu'il n'est ni utile ni obligatoire de rembourser.

Cette conviction, ils la transposent dans le contexte du crédit. Ce qui fait que pour eux, le remboursement n'est pas spontané. Ils pensent, malgré tous les garde-fous mis en place par les IMF qu'ils peuvent garder par devers eux les traites, malgré les échéances, pour les fructifier un peu. Ils attendent souvent d'être "gendarmés" par le chargé de crédit ou l'agent de remboursement des IMF avant de s'exécuter.

A ce niveau, une conscientisation est nécessaire et les acteurs du secteur de la microfinance sont concernés au premier chef. Ils ne semblent pas accorder de l'importance à cet aspect du processus de financement qui, pourtant, est en leur avantage s'il est maîtrisé. Ainsi, à travers des messages de sensibilisation et des émissions radio, ils peuvent conscientiser leurs clients sur les bienfaits des remboursements suivant les échéances. Cette action pourra progressivement faire entrer dans les moeurs la culture de solvabilité, car c'est un phénomène, en fin de compte, récurrent. Il arrive même que les débiteurs recourent à des moyens occultes pour passer outre le remboursement ; au mieux des cas, ils font en sorte que le créancier oublie les débiteurs qu'ils sont et, au pire des cas, ils commanditent sa mort.

Les réalités culturelles servent ainsi et malheureusement d'épouvantail aux créanciers et c'est un problème d'autant plus difficile à résoudre qu'il est aussi psychologique.

1-2- Création d'un cadre de concertation des structures de financement

Une initiative entreprise dans la commune a été sursise pour des raisons qui ne nous semblent pas objectives. Il s'agit de la suppression de la centrale d'échange et d'information du Consortium Alafia. Les raisons évoquées sont que les IMF ne souscrivent pas régulièrement leur contribution. Pourtant, nous considérons qu'un cadre de concertation des structures de financement s'impose aujourd'hui pour permettre d'indexer les clients qui sont des débiteurs multiples. Il ne s'agit pas pour nous de situer les responsabilités d'une telle suppression, mais de suggérer que les IMF s'inspirent de ce que le Consortium Alafia a initié pour mettre sur pied un système d'archivage et de centralisation des données relatives aux clients ayant des crédits en cours. Elles peuvent tenir compte des faiblesses de l'ancienne initiative pour parfaire un nouveau système d'archivage afin de sortir, selon une périodicité de leur choix, un fichier des clients non éligibles aux crédits. Ce fichier, accessible à toutes les IMF, selon les modalités qu'elles détermineront, permettra de remarquer la duplicité des uns et de réduire la multiplicité des crédits accordés aux autres.

1-3- Révision des conditions d'accès aux crédits

Dans les investigations, nous avons constaté que les IMF font des conditions d'accès que les promoteurs considèrent comme astreignantes. Pour obtenir un "petit" crédit, il faut aller parfois jusqu'à déposer une convention d'achat de parcelle. Cela constitue un handicap pour les gens issus de milieux défavorisés qui n'ont pas les moyens de s'offrir ce "luxe".

A l'opposé, les institutions de financement à caractère social ne demandent aucune de ces garanties avant de mettre en place le financement. Elles sont dans une dynamique presque philanthropique à l'endroit des promoteurs. Ce sont elles qui réussissent les exploits que n'arrivent pas à réaliser les IMF et qui consiste à octroyer aux promoteurs des montants substantiels à rembourser sur des périodes intéressantes. Malheureusement, cette générosité n'est pas toujours appréciée à sa juste valeur car c'est justement au niveau de ces structures débonnaires que les taux d'impayés sont les plus préoccupants.

Cette situation appelle forcément à une révision des conditions d'accès au financement. Dans le premier cas, les IMF doivent alléger les conditions en les débarrassant des accessoires qui ne sont pas primordiaux4(*) afin de les rendre fluides et accessibles à un plus grand nombre. Dans le second cas, les structures étatiques doivent réviser leurs stratégies de soutien aux jeunes entrepreneurs. Un minimum de conditions doit forcément être requis avant de bénéficier d'un financement, car l'expérience a prouvé que le bien acquis avec facilité n'est jamais géré avec lucidité. Et puis, dans les sélections de ces promoteurs bénéficiaires, les structures doivent faire preuve de rigueur pour éviter de mettre sur la ligne de départ, des profils douteux qui ne répondent pas aux conditions réelles de bénéfice des programmes d'aide et qui n'attendent que la première occasion pour détourner les ressources financières à eux allouées.

1-4- Perfectionnement du suivi des crédits mis en place

Si les crédits mis en place sont estimés suivis, il importe de souligner que ce suivi, comme nous l'avons constaté, n'est pas toujours efficace. Rappelons, à toutes fins utiles, que 70,6% des bénéficiaires ayant obtenu du crédit estiment que l'équipe de suivi vient voir les activités de terrain et 24,4% affirment que c'est pour aider à résoudre les difficultés rencontrées. Seulement 3,4% disent que l'équipe de suivi vient pour contrôler la régularité des dépenses tandis que 0,8% assurent que lorsqu'ils bénéficient d'une visite de l'équipe de suivi, c'est pour contrôler les documents de gestion.

Dans ces conditions, il est évident que le suivi n'est pas très bien fait par les responsables des structures de financement. En effet, une fois le crédit mis en place, les responsables peuvent commencer le suivi. Mais ils s'intéressent, de notre point de vue, à des aspects qui ne leur permettent pas de canaliser le promoteur et de l'aider à mener l'activité dans la perspective de "bien" rembourser. En voyant les activités menées par le promoteur et en s'intéressant aux diverses difficultés qu'il rencontre, il nous semble qu'on s'intéresse aux fruits que produit un arbre plutôt qu'à ses racines. Si les fruits sont maigres et qu'on veut les rendre gras, ce n'est pas en les arrosant qu'on y parviendra. C'est plutôt en apportant de l'eau et de la fumure aux racines. Ainsi, de notre point de vue, le suivi doit beaucoup plus s'axer sur les documents de gestion et sur la régularité des dépenses. Certes, il y a une difficulté majeure que nous n'occultons pas : l'analphabétisme de la majorité des promoteurs. Ainsi, les IMF doivent chercher à insérer dans leur programme un accompagnement en alphabétisation fonctionnelle.

2- LES INITIATIVES ENTREPRENEURIALES

Le second axe sur lequel il importe d'agir pour améliorer le secteur du financement des jeunes, est l'objet même qui sous-tend ces financements. Il s'agit des initiatives entrepreneuriales des jeunes. Elles souffrent essentiellement de trois maux qui seront décrits dans le présent paragraphe avec des propositions de solution.

2-1- La sensibilisation des jeunes à l'entrepreneuriat

Le contexte dans lequel l'entrepreneuriat s'exerce aujourd'hui mérite réflexion. En effet, les jeunes y vont en considérant l'entrepreneuriat comme étant un pis-aller. C'est lorsqu'ils n'ont pas encore trouvé quelque chose à faire qu'ils initient une micro-entreprise et parallèlement, ils continuent à chercher du travail. La mentalité de travailleur salarié est encore forte et tous ceux qui n'ont pas un revenu mensuel régulier pensent qu'ils sont moins que les autres.

Or, l'entrepreneuriat est une voie pour accéder à la richesse car, en mettant en oeuvre son idée, l'entrepreneur produit une plus-value, travaille pour l'accroissement du produit intérieur brut de son pays. Il peut gagner, si son entreprise prospère, plusieurs fois ce qu'il aurait gagné s'il était salarié. Ainsi, l'entrepreneuriat ne doit plus être considéré comme un pis-aller.

D'un autre côté, ceux qui sont déjà salariés dans diverses institutions et qui constatent que les salaires n'arrivent pas, la plupart du temps, à couvrir toutes leurs dépenses mensuelles, initient des activités nommées « à côté ». Ce sont de petites initiatives (buvette, cyber, vente de cartes de recharge, boutiques de divers...) qui leur permettent d'"arrondir les angles" les fins du mois et de disposer en permanence de liquidité. Puisque les promoteurs de cette catégorie sont des salariés, ils ne peuvent pas se consacrer intégralement à ces activités.

Ne pouvant pas être en permanence disponibles pour s'occuper de leur microentreprise, ils engagent des personnes dont ils ne maîtrisent pas toujours la moralité. Il y a donc, parfois, mauvaise gestion, vols et détournements. Or, en entrepreneuriat, la présence active du promoteur est un paramètre de succès. C'est, semble-t-il, ce que les ibo, les indo-pakistanais et les libanais, pour ne citer que ceux-là, ont compris et ont toujours fait. A contrario, l'entrepreneur béninois n'est « jamais » présent dans son entreprise et quand il l'est, il n'a pas le temps de recevoir les clients.

Pour pallier ces irrégularités, les jeunes doivent prendre conscience de ce principe cardinal de l'entrepreneur qui est d'être toujours près de (ou dans) son entreprise. En réalité, le salariat est incompatible avec l'entrepreneuriat, surtout lorsqu'on lance une nouvelle entreprise. C'est comme un bébé qu'il faut suivre avec la plus grande attention. Certes, le début de toute chose est difficile, mais c'est grâce à la persévérance et à la perspicacité qu'on a les résultats escomptés.

2-2- La diversification des idées d'entreprise

Un autre problème que rencontrent les jeunes au niveau de la mise en oeuvre de leurs idées d'entreprise est relatif à la nature des initiatives. L'originalité semble avoir déserté le forum et laissé place à un conformisme qui se perpétue dangereusement. Aujourd'hui, certaines activités ont le vent en poupe (les kiosques de vente de cartes de recharge et les cybers café) pendant qu'on a l'impression que d'autres sont carrément oubliées ou négligées. Or, pour qu'une idée d'entreprise prospère, il faut de l'originalité.

Le système de "copier/coller" qui est remarqué actuellement au niveau des idées d'entreprise des jeunes aujourd'hui, ne permet pas aux institutions de microfinance de réussir leur pari. Certains veulent bien investir dans des activités novatrices, mais ces dernières ne trouvent pas de jeunes qui répondent à leurs critères. Ce phénomène s'explique par le fait que les jeunes ne se préparent pas toujours à l'entrepreneuriat. La plupart s'improvisent entrepreneurs du jour au lendemain et ne veulent faire aucun effort pour investir les sentiers non battus. Ceux qui ont effectivement la vocation d'entrepreneurs ne veulent pas à leur tour sonder les opportunités d'affaires qui sont disponibles autour d'eux ; non pas parce qu'ils ne les soupçonnent pas, mais parce qu'ils évitent de prendre le risque. Or l'entrepreneuriat rime avec le risque ; et c'est souvent ceux qui risquent gros qui gagnent gros. La diversification des idées d'entreprise est donc plus qu'une nécessité : c'est une obligation. Sinon, si les jeunes continuent de faire les mêmes choses, leurs initiatives ne prospèreront jamais. Et ils penseront toujours, comme il est de coutume dans notre ethnosociologie, que ce sont des parents de mauvaise foi qui leur en veulent.

2-3- La promotion de la bonne gestion et de l'esprit de solvabilité

S'il est vrai que dans nos investigations, nous avons été rarement en face de réels cas de mauvaise gestion, nombreuses sont les personnes des IMF, voire des individus ayant bénéficié d'un crédit qui en ont parlé. Ainsi, les institutions de microfinance ont intérêt à ce que la bonne gestion soit promue au niveau des promoteurs qui obtiennent le financement.

Malheureusement, les enquêtes de moralité ne permettent pas toujours de détecter les promoteurs de mauvaise foi. Malgré les mesures coercitives que les institutions de microfinance mettent en exécution, les promoteurs indélicats constituent des brebis galeuses qui noircissent le tableau des performances des IMF en matière de remboursement. Il importe donc, au-delà de toute considération d'ordre procédural, que les jeunes prennent conscience de ce qu'un crédit se rembourse. L'adage le dit bien : « qui paie ses dettes s'enrichit » ? D'ailleurs, lorsque la dette est payée à temps, les IMF sont prêtes à octroyer des crédits de montants supérieurs aux précédents.

* 4 Frais d'ouverture de dossier ; exigence de convention de vente de parcelle pour des crédits légers ; contreparties trop élevées...

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci