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La problématique de la gouvernance locale dans la région de l'est-Cameroun: une analyse de la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua

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par Bertille Arlette JIOKENG NDOUNTIO
Universite Catholique d'Afrique Centrale - Master en Gouvernance et Politiques publiques 2010
  

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V. Revue de littérature

La gouvernance appelle de nombreux débats qui s'appliquent généralement à en énoncer une définition. Après de nombreuses interrogations au sujet de la meilleure forme de gouvernement, mieux, de gouvernance possible, l'intérêt de la question se trouve recentré autour de son but. Tout aussi important que la manière, le but de la gouvernance a fait couler beaucoup d'encre. Ainsi, ne suffit-il pas de savoir comment gouverner, encore faut-il savoir pourquoi le faire. C'est notamment à cette préoccupation que Hartmut SCHNEIDER tente de répondre lorsqu'il affirme qu'au delà de la gouvernance « classique », « la gouvernance participative (...) débouche potentiellement sur une plus grande efficacité au niveau de la prise des décisions et des résultats »22(*). Angel SALDOMANDO, dans ses interrogations sur la gouvernance23(*), met quant à lui l'accent sur l'aide de la gouvernance en matière de régulation sociale tandis que Pranab BARDHAN affirme que :

La décentralisation a une signification différente selon les personnes qui ont des raisons multiples de la soutenir (...). Les avantages de la décentralisation, définie comme un transfert de pouvoir, seront tout d'abord énumérés(...). Outre qu'elles permettent une meilleure adaptation aux préférences locales, les informations locales permettent souvent de trouver des manières moins couteuses et plus appropriées de fournir des services publics24(*).

Toutefois, le but de la gouvernance, ou du moins, de la gouvernance locale, ne se cantonne pas à la régulation des rapports sociaux. C'est pourquoi le PNUD, dans son rapport sur le développement humain de Janvier 1999, estime que « la bonne gouvernance peut aider à la lutte contre la pauvreté en Afrique en général et au Cameroun en particulier25(*) ». La décentralisation est érigée au rang de condition essentielle au développement humain durable. La gouvernance accompagnée d'une obligation de rendre des comptes à l'échelon local améliore le fonctionnement des services publics. Cette gestion décentralisée des affaires publiques peut également contribuer à résoudre des problèmes d'action collective dans la gestion des ressources patrimoniales communes et, ainsi, éviter ce que l'on appelle la tragédie des biens communaux ruraux. Les moyens de subsistance quotidiens des pauvres, en particulier en milieu rural, dépendent de manière vitale des ressources de l'environnement local26(*).

La question de la bonne gouvernance locale est toute aussi importante que ses implications sont grandes. Il faut croire qu'elle implique de passer des affaires publiques centrales aux affaires locales. Ce passage suppose donc que l'Etat, autrefois unique acteur, se dessaisisse de certaines de ses attributions pour les transférer à des collectivités territoriales décentralisées. C'est sans doute l'une des raisons qui justifie tout le succès, du moins dans les discours, que l'on reconnaît à la décentralisation aujourd'hui. C'est ce que semble soutenir Giorgio BLUNDO quand il affirme que « plus que d'un retrait pur et simple de l'Etat, il est sans doute question d'une réorganisation des techniques de gouvernement, par le transfert de compétences de régulation jadis étatiques vers des acteurs non-étatiques, individuels ou collectifs, auxquels on confère des qualités de responsabilité et de rationalité27(*) ».

Reconsidérer la problématique du rôle de l'Etat implique donc de tenir compte des divers autres acteurs pouvant l'aider dans les processus de prise de décisions. L'une des préoccupations majeures d'un Etat réside dans son propre développement tout en veillant au bien-être de ses populations. Le développement dont il est question ne sera donc plus l'apanage seul de l'Etat central. Cet état des choses s'apparente à ce que John Clayton THOMAS a appelé le « nouvel engagement des citoyens28(*) »

Toutefois, la promotion du développement au travers de la gouvernance locale rencontre de nombreux écueils parmi lesquels la pauvreté. BARDHAN propose de rester prudent vis-à-vis des dynamiques de la décentralisation en affirmant que :

D'une manière générale, il convient de résister à la tentation d'une vision trop romantique de la valeur du développement participatif décentralisé, attitude courante parmi les « anarcho-communautaires ». Cette forme en dépit de ses multiples et indéniables avantages, est impuissante à résoudre certains problèmes fondamentaux d'équité et d'efficience, dans les situations où les structures locales de gouvernement sont dominées par une élite, en particulier, les retombées positives sur les franges les plus défavorisées de la population seront tardives et incertaines29(*).

En réalité, la gouvernance au niveau local semble poser de nombreuses conditions à sa mise en oeuvre. En effet, l'homme naît et vit dans des groupes. Son histoire est par conséquent indissociable de la vie sociale. Aujourd'hui, les sciences sociales permettent une compréhension plus claire de cette imbrication de la personne et de la société. Des théories rendent compte de ce qui se passe quand les sujets vivent ensemble et des phénomènes d'interaction qui se produisent entre l'homme et le groupe : c'est la psychologie sociale. Le sujet situé face aux attentes, exigences et influences de son environnement humain tisse des relations. « La communication entre les personnes est conditionnée dans une large mesure par la perception d'autrui, et d'une manière globale de tout notre environnement. Il est donc utile de mieux connaître les processus perceptifs »30(*).

C'est sans doute ce qu'a voulu dire Pranab BARDHAN en affirmant que les conditions qui doivent être satisfaites pour obtenir ce résultat sont beaucoup trop strictes, en particulier pour les pays pauvres. Pour lui, l'hypothèse cruciale de mobilité de la population (c'est-à-dire des citoyens totalement informés et capables, de choisir librement) qui permet aux gouvernements de surmonter le problème consistant à amener les citoyens à révéler leurs préférences en matière de biens collectifs, est rarement opératoire dans les pays pauvres31(*).

Par ailleurs, l'ignorance des contours subtils de la fonction de maire et de son importance dans la gouvernance locale, semble déterminante à cet égard. En réalité, « c'est le rôle d'une personne, tel qu'il est perçu par un individu qui occupe une position déterminée à un certain moment, la manière dont il croit qu'il doit jouer son rôle. Cette perception peut être différente des attentes précédentes. D'une façon générale, l'imprécision de la définition d'un rôle est susceptible d'engendrer des difficultés dans les rapports d'un sujet avec son entourage »32(*).

L'impact positif de la gouvernance décentralisée n'est donc pas organiquement constitutif des stratégies de développement nationales établies dans la mouvance du DSCE. Pour la plupart des partenaires de coopération, c'est la réflexion sur la transformation des modalités de gouvernance locale qui va contribuer à établir le lien : la gouvernance locale apparaît comme un outil parmi d'autres d'empowerment33(*) des pauvres. L'argument majeur repose sur la proximité géographique qui garantit un niveau élevé d'information et de mobilisation des leaders politiques et des populations sur les réalités et les besoins locaux, et facilite ainsi l'obtention de résultats visibles.

En définitive, est-il intéressant de rappeler que toute cette littérature soulève un certain nombre de préoccupations. A cet égard, il nous incombe de préciser l'interrogation qui constitue le centre des articulations du travail ici présenté.

* 22 H. SCHNEIDER, Gouvernance participative : le chaînon manquant dans la lutte contre la pauvreté, Paris : OECD, Coll. Cahier de politique économique, 1999, p.8.

* 23 COLLECTIF, Les non-dits de la gouvernance : pour un débat politique sur la pauvreté et la gouvernance, Paris, Karthala, Coll. Coopération internationale, 2001, p.98.

* 24 P. BARDHAN, La gestion des affaires publiques au service du développement. Une approche par l'économie politique, Centre de développement de l'OCDE, Paris, 1997, p.51.

* 25 PNUD, Cameroun, Rapport sur le développement humain 1998, Yaoundé, Cameroun, Janvier 1999, p.51

* 26 PNUD, op. cit.,p.54.

* 27 G. BLUNDO, « La gouvernance, entre technique de gouvernement et outil d'exploration empirique », in La gouvernance au quotidien en Afrique : les services publics et collectifs et leurs usagers, Bulletin No 23-24, Juin-Décembre. 2002.

* 28 J.C THOMAS, Action publique et participation des citoyens : pour une gestion démocratique revitalisée, Paris, Nouveaux Horizons, 1995, p.1.

* 29 P. BARDHAN, op.cit, p.74.

* 30 P. BADIN, La psychologie de la vie sociale. Aspects psychosociaux de la personnalité, Socio guides, Ed. Le Centurion formation, 1977, p. 40.

* 31 G. BLUNDO, op. cit., p. 74.

* 32 P. BADIN, op. cit, p.41.

* 33 L'empowerment est un terme anglais traduit par « autonomisation » ou « capacitation » qui désigne la prise en charge de l'individu par lui-même, de sa destinée économique, professionnelle, familiale et sociale. C'est donc, comme son nom l'indique, le processus d'acquisition d'un « pouvoir » (power), le pouvoir de travailler, de gagner son pain, de décider de son destin de vie sociale en respectant les besoins et termes de la société.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery