WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'émigration malienne: configuration, modalités, et effets des migrations des ressortissants de la commune de Diéoura, cercle de Diéma.

( Télécharger le fichier original )
par BOULAYE KEITA
Université Paris 7 DIDEROT - Maà®trise 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Annexes 3 des photos :

Photo n°1 : La case ronde 88

Photo n°2 : La maison en tôle 89

Photo n°3 : Maison d'un migrant à Diéoura 89

Photo n°4 : Les locaux de la mairie de Diéoura 90

Photo n°5 : Maison d'un migrant à Bamako 90

Photo n°6: Puits à grand diamètre Founto 91

Photo n ° 7 : Paysage de savane à Noumokolo 92

Photo n°8 : Paysage désertique à Tassara

Remerciements

Si je suis l'auteur de ce mémoire, je suis aussi contraint par ma conscience morale de
remercier ceux et celles qui se sont montrés disponibles pour la réussite de mes recherches.

Ces remerciements vont à l'endroit de :

- Ma directrice de mémoire, Claire Ollivier, qui malgré son emploi de temps trop chargé, a suivi les travaux de ce mémoire avec grand intérêt et une rigueur scientifique dont je m'inspirerai.

- L'administration et les professeurs de l'Université Denis Diderot, Paris7 et, particulièrement, les professeurs du département de géographie qui n'ont ménagé aucun effort pour me permettre d'acquérir de nouvelles connaissances et compétences.

- Mes camarades de classe pour les échanges fructueux dans une atmosphère cordiale.

- Monsieur Camara Sadio, représentant du chef du village de Diéoura en France.

- Monsieur Magassouba Harouna Président de l'Association pour le Développement de la Commune de Diéoura.

- Les familles KEITA, GASSAMA, CAMARA, GARY, WAGUE résidant en France pour leur soutient

financier et moral constant.

- Tous les émigrés de la commune de Diéoura en France.

- Tous les chefs de village de la commune de Diéoura.

- Mon oncle Mamadou Kanté et mon ami Daouda Coulibaly pour leur apport intellectuel.

Bref, que tous ceux qui de loin ou de prés, ont contribué à la réalisation de ce mémoire trouvent ici l'expression de ma profonde gratitude.

Je ne peux clore ces remerciements sans rappeler l'estime que je porte au plus profond de mon coeur aux Maliennes et Maliens qui font une pression financière sur eux- mêmes pour améliorer le quotidien des familles et villages au bercail.

A tous, j'exprime ma profonde gratitude et ma reconnaissance.

Boulaye Keita.

Introduction

L'Afrique est un vaste continent qui offre au géographe plusieurs possibilités d'analyse pour mieux appréhender l'organisation de l'espace. Une des questions fondamentales est celle de la gestion des territoires. Parmi les éléments qui façonnent ces territoires, nous avons les migrations. L'étude des migrations dans ce mémoire est à mettre en rapport avec le processus de décentralisation en au Mali.

Depuis 1992, le Mali s'est engagé dans une politique de décentralisation conduite par la troisième République. Au niveau territorial, la principale composante de cette réforme est la réorganisation du découpage territorial sur l'ensemble de l'espace national dont l'unité de base est la commune1.

Dans la commune de Diéoura, les dynamiques de développement se sont en grande partie appuyées sur l'extérieur car fondées sur la migration.

De nombreuses associations de développement ont été créées au sein d'un réseau social reliant les villages aux lieux d'émigration. L'action des migrants s'inscrit aujourd'hui dans un conteste national, les effets à l'échelle locale sont d'une grande importance pour comprendre l'organisation socio-spatiale. Les migrants sont en effet les principaux acteurs du développement dans la commune de Diéoura.

L'objectif à atteindre dans ce travail est d'étudier les effets des migrations sur l'espace communal à travers les relations que tissent les migrants avec leur lieu d'origine. Il s'agit surtout de voir le rôle des migrants dans ce nouveau contexte de la décentralisation au Mali.

Nous formulons l'hypothèse que la migration est facteur de développement et un facteur de recomposition territoriale à l'échelle locale,

Qu'il y a une corrélation entre migration et pauvreté ?

Pourquoi la France reste t-elle une destination privilégiée des ressortissants de la région Kayes ?

Comment se sont structurés les réseaux migratoires dans le temps et dans l'espace dans la commune de Diéoura ?

La décentralisation peut-elle contribuer à un véritable décollage économique de la commune

1 - Stéphanie Lima, 1999

de Diéoura grâce à la volonté affichée des migrants à développer leurs lieux d'origine?

Voilà les réflexions autour desquelles nous allons tenter de faire une analyse des effets des migrations dans la commune de Diéoura.

Pourquoi faire encore une étude des migrants maliens en France dans la mesure où de nombreux travaux ont été réalisés sur la question ?

Soninké, originaire de la région émettrice de la majorité des migrants maliens en France (Kayes), et étudiant en géographie, j'estime important de faire une analyse des actions de développement de mes compatriotes à l'échelle de ma commune d'origine.

Je suis également très impliqué dans les mouvements associatifs au sein des migrants de la commune en France. Je suis l'un des artisans de la création de l'Association pour le Développement de la Commune de Diéoura (A. D. C. D), première association de migrants créée à l'échelle de la commune. J'ai joué un rôle de médiateur entre les anciens et les jeunes avant la création de l'association. C'est la raison principale pour laquelle mon premier poste a été « Secrétaire chargé des conflits » au sein de l'équipe qui dirige les actions de l'association puis « Secrétaire administratif » et actuellement « Secrétaire chargé des relations extérieures » afin d'établir les contacts avec les partenaires du développement (O.N.G., départements, collectivités locales ). Actuellement je travaille aussi sur un projet de développement pour la commune de Diéoura.

L'une des raisons principales de ma motivation tient au fait que les études réalisées jusque là sur les migrations maliennes en France portent sur l'ensemble de la région de Kayes ou d'autres cercles que de Diéma auquel appartient ma commune. Cependant on trouve des disparités importantes à l'intérieur de cette région. De plus, les effets de ces migrations sont plus visibles à échelle des villages que dans les grandes villes en sens qu'il est beaucoup plus facile de distinguer dans les villages les réalisations des migrants dans la structuration de l'espace contrairement aux villes où on une hétérogénéité d'acteurs qui transforment l'espace urbain.

Avec ce mémoire, je trouve un moyen d'apporter ma modeste contribution au débat lié à l'immigration qui fait couler beaucoup d'encre ici en France. La finalité de cette étude est peutêtre un moyen de montrer aux partenaires du développement qu'il existe dans la région de Kayes une commune qui a de nombreux atouts et de les inciter à intervenir là-bas.

Nous précisons déjà que notre choix s'est porté sur les habitants de la commune de Diéoura émigrés en France car que la mobilisation des migrants en matière de développement local y est

grand, en ce sens que les migrants de France ont plus de moyens pour s'engager dans le développement de leur lieu d'origine que d'autres comme ceux du Gabon ou de Côte d'Ivoire par exemple.

Il faut dire que la région de Kayes connaît une forte émigration de ses habitants depuis des siècles. L'ancienneté des pratiques migratoires dans la région de Kayes est une vérité évidente. C'est l'une des régions les plus enclavées du Mali.

Il y aurait aujourd'hui environ 120. 000 Maliens en France dont 95 % sont Soninkés et originaires de la région de Kayes2. Les 2/3 d'entre eux vivent dans la clandestinité.

Plus de 180 millions d'euros transitent annuellement de France vers le pays d'origine des migrants. 75% des transferts sont consacrés à la consommation familiale.

Selon les résultats de l'enquête menée par l'Association pour le Développement de la Commune (A.D.C.D.), il y a 630 émigrés de la commune de Diéoura en France. Ce chiffre ne prend pas en compte les enfants nés en France et les migrants de la commune installés dans les grandes ville au Mali ou ailleurs.

Au Mali, depuis la décentralisation, les populations sont chargées de gérer leurs propres affaires. On assiste ainsi à un retrait de l'État dans la gestion locale à l'occasion de la création des communes. Avec ce nouveau processus, beaucoup de cadres pourront être utiles à leurs lieux d'origine.

Nous, intellectuels maliens et émigrés aujourd'hui en France, sommes tous conscients que si les sommes rapatriées par les Maliens de l'extérieur en général et ceux de France en particulier, sont gérées de façon concertée, elles peuvent constituer les moyens d'un développement durable et épanouissant. Membre de cette population et témoin de la réalité des situations, au pays et en France, j'ai tenté de me rapprocher de ces immigrés en France pour recueillir auprès d'eux toutes les informations utiles dont l'analyse minutieuse pourra améliorer le futur.

Après avoir présenté la méthodologie utilisée et les choix des méthodes pour la réalisation de ce mémoire, je traite dans une première partie, la dynamique des réseaux migratoires dans le temps et dans l'espace construits par les Soninkés. Ici il s'agit de comprendre les raisons de la forte migration des habitants de la zone appelée « le bassin du fleuve Sénégal », de la région des trois frontières entre la Mauritanie, le Mali et le Sénégal.

Dans une seconde partie, je m'intéresse à l'étude des apports et des effets des migrations des

2 - Le monde 11 février 2003

ressortissants de la commune de Diéoura et leurs effets à l'échelle de la commune. Il s'agit du rôle joué par les migrants dans les villages d'origine collectivement et au niveau des familles individuellement. C'est dans cette partie que je vais tenter de mettre en lumière les réalisations des migrants de la commune de Diéoura après avoir étudié la genèse des associations Soninkés en France.

Enfin une troisième partie sera consacrée à l'étude de l'action des migrants et le processus de décentralisation, les limites et les perspectives pour un véritable développement de la commune de Diéoura.

Précision sur quelques termes utilisés :

Pour faciliter la compréhension de ce travail à tous les lecteurs, il s'avère nécessaire de cerner certaines expressions utilisées.

- Immigré:

Selon la définition de l'INSEE, la population immigrée est composée des personnes nées étrangères dans un pays étranger. Cette définition de la population immigrée se référant à deux caractéristiques invariables liées à la naissance des personnes, un individu né à étranger continue d'appartenir à la population immigrées même si sa nationalité change.

Il ne doit pas être confondu alors avec le mot étranger. Les deux notions ne se recouvrent que partiellement puisqu'on peut être étranger sans avoir immigré. C'est le cas des enfants nés en France de parent immigrés. Inversement, n peut être immigré et français par voie de naturalisation. Ainsi, le statut des Maliens venus faire fortune en France diffère-t-il de celui de leurs enfants nés sur le territoire français3.

- Les mots immigré et émigré sont deux faciès de la même personne:

Les personnages de l'émigré et de l'immigré occupent tour à tour une place centrale, selon que l'on se place du point de vue des sociétés de départ ou celles d'arrivée. Dans ce jeu de préfixes instituant le sens du mouvement (la sortie ou l'entrée) l'émigré et l'immigré sont moins définis en référence à leur propre trajectoire que par rapport au conteste spatial et social qui a servi de cadre à leur mouvement.4

Plus que par leur statut dans le pays où ils se trouvent, forcément instables, ils s'individualisent par le rapport qu'ils construisent et entretiennent avec les deux pays simultanément. Ni immigrés, ni émigrés, ils sont des migrants.

Pour éviter la confusion entre immigré et émigré, j'ai surtout utilisé dans ce travail le mot migrant. L'utilisation des mots immigré ou émigré dépendra de l'espace auquel on se réfère.

3 - P. Bouquier et al, 1999

4 - L. Faret, 2003

Conditions de travail et méthodologie de recherche

Pour être efficace dans la réalisation de ce mémoire, une recherche a été nécessaire, au cour de laquelle j'ai effectué des enquêtes pour saisir certaines réalités du processus migratoire dans le temps et dans l'espace.

1 - conditions de travail

La collecte d'informations s'est déroulée dans deux espaces indispensables pour cette étude: dans les foyers d'immigrés en France et principalement en Ile de France et dans la commune de Diéoura au Mali, le lieu d'origine des migrants auxquels nous nous intéressons. En plus de ces deux lieux, j'ai mené une recherche documentaire dans les bibliothèques universitaires, à la Bibliothèque Nationale de France (BNF), au centre Georges Pompidou et surtout au centre de documentation du C.N.R.S. (REMISIS) de Paris7, au site de Montréal-Tolbiac.

a - Le terrain de la recherche en France :

- Recherche documentaire :

Cette recherche a surtout consisté en une lecture approfondie des travaux déjà réalisés sur les migrations internationales et plus particulièrement les ouvrages sur les migrations Soninkés et maliennes en France et dans le monde. Il existe déjà de nombreux travaux sur le même thème mais cette lecture me permettait de replacer mon étude de cas dans un cadre général et de faire apparaître ses particularités. Il s'agissait aussi de voir la diversité des dynamiques migratoires dans le temps et dans l'espace.

- Les foyers d'immigrés en Ile de France :

La recherche d'informations dans les foyers s'est effectuée auprès des personnes fortement impliquées dans les mouvements associatifs pour le développement des lieux d'origine. Le foyer est le lieu abritant les doyens des différents groupes sociaux, les responsables d'associations ou de caisses de solidarité. Ils constituent aussi les lieux des réunions au cours desquelles se décident les projets de développement pour les villages, les cérémonies de mariage, de décès ou de baptême. Les foyers restent encore les lieux où habitent les immigrés Soninkés dans leur grande majorité. En plus de leur rôle de logements sociaux, les foyers sont aussi des maisons d'associations parce que les sièges des associations s'y trouvent, ainsi que à l'adresse de leurs

Présidents. Tenant compte de tous ces éléments, j'ai donc accordé une attention particulière aux foyers d'immigrés pour la réalisation de mes enquêtes.

La difficulté principale dans les foyers tient au fait que les gens ne sont pas toujours disponibles pour me recevoir et pour des entretiens approfondis. Souvent j'ai été obligé de reporter à d'autres dates mes entretiens du fait du programme trop chargé de certains migrants. Néanmoins j'ai pu recueillir les informations nécessaires à la réalisation de ce mémoire.

J'ai aussi réalisé des enquêtes auprès des immigrés de la commune de Diéoura qui vivent avec leur famille (épouses et enfants) en France. Il faut dire là que le contact a été plus difficile que dans les foyers. Par exemple, dans les foyers je partais réaliser mes enquêtes pendant les week-ends, souvent sans rendez. Par contre, les migrants qui vivent avec leur famille, sont logés dans des appartements et n'étaient toujours sur place pour des entretiens approfondis.

Les enquêtes ont été en général réalisées pendant les week-ends, les jours de repos des travailleurs migrants. En plus c'est pendant les week-ends qu'on a la chance de rencontrer un nombre important de migrants dans les foyers.

b - La collecte d'informations dans la commune de Diéoura au Mali :

La seconde phase, décisive, de ma recherche s'est déroulée dans la commune de Diéoura, le lieu d'origine des migrants. La recherche de terrain au Mali a débuté le 15 avril 2004 et s'est terminée le 30 juin 2004 qui correspond aussi à la date de mon retour en France.

Ce séjour dans la commune de Diéoura a coïncidé avec la saison sèche au Mali. Cela m'a permis de trouver la plupart de mes interlocuteurs sur place. Majoritairement paysans, les habitants de la commune de Dièoura se reposent pendant saison sèche, surtout les mois qui suivent la fin des récoltes (mars, avril mai). Cette période correspondait cette année avec l'organisation des élections communales au Mali, ce qui m'a privé des entretiens approfondis prévus avec l'ancien maire de la commune de Diéoura.

La difficulté pour moi, est venue du fait que les migrants jouaient un rôle dans ces élections. Donc souvent les gens m'ont considéré comme un migrant et non comme un étudiant chercheur. Cela a beaucoup influencé les réponses des enquêtés. A cause de la campagne électorale, je n'ai pas eu suffisamment de temps avec le Maire sortant pour connaître ses relations avec les migrants de la commune en France. Heureusement, en octobre 2003, j'avais eu un entretien avec lui à Paris qui reflétait ses véritables ambitions pour la commune et ses

relations avec les migrants.

En effet, mon entretien avec l'ancien Maire l de la commune de Diéoura, a été un véritable échec au moment de mes enquêtes au Mali, dans la mesure où il ne voyait pas mon rôle d'étudiant mais de migrant. Excepté l'ancien Maire, j'ai eu des entretiens intéressants avec les autres personnes que j'ai ciblées dans cette recherche dans la commune de Diéoura.

J'ai tenu compte du rôle social ou politique que jouent les personnes interrogées dans les lieux d'origine. Il s'agit des chefs de village et de leurs conseillers, du maire, des chefs de famille, de femmes, de jeunes non migrants et d'anciens migrants.

Il faut aussi préciser que pendant cette recherche, dans la commune de Diéoura je suis passé au moins deux fois dans chaque village de la commune. La première visite était une prise de contact avec mes enquêtés. C'était une manière pour moi de me familiariser avec eux et de les informer de l'objet de mon étude. La deuxième visite a consisté à réaliser les enquêtes et à visiter le village avec un responsable local pour voir les réalisations des migrants et les projets en cours. Je suis passé à plusieurs reprises dans le village de Diéoura, chef-lieu de la commune à dix huit kilomètres de mon village (Founto), car c'est là que se décident les projets de la commune. C'est donc dans le village de Diéoura que j'ai tenté d'étudier les transformations du paysage villageois sous l'action des migrants.

Hormis les réalisations collectives, j'ai étudié les pratiques individuelles des migrants et notamment en matière de construction immobilière dans le village de Diéoura.

J'ai également consacré en complément une dizaine de jours à Bamako (20 -30 juin 2004). Ce séjour de Bamako était important dans la mesure où la plupart des migrants investissent dans cette ville, privant de plus en plus les villages d'origine des transferts de fonds des migrants. Pendant ce séjour à Bamako, j'ai discuté avec quelques candidats au départ pour la France afin de savoir leurs réelles motivations. J'ai aussi cherché à rencontrer des hommes d'affaires impliqués dans l'organisation des réseaux clandestins. J'ai cherché à comprendre les multiples difficultés liées à l'obtention de visas pour atterrir sur le sol français et l'évolution spectaculaire des tarifs du voyage.

La collecte de données au Mali a été un atout indispensable pour la réalisation de mémoire. Le travail de recherche au Mali m'a permis de dépasser le cadre théorique de l'étude des effets des migrations et de comprendre la réalité des choses.

2 -Les méthodes utilisées :

Il est également important de préciser que j'ai tenu un langage de vérité à toutes les personnes que j'ai rencontrées. J'ai expliqué aux gens mon statut de simple étudiant pour ne pas influencer leurs réponses.

Pendant les travaux de terrain, j'ai utilisé plusieurs méthodes d'enquêtes, car pour mieux cerner les dynamiques migratoires, une seule technique ne pouvait me fournir toutes les informations fiables.

.a - Les entretiens ouverts :

Pour avoir beaucoup d'informations, des entretiens ouverts ont été réalisés avec quelques personnes fortement impliquées dans les affaires de la commune ici en France comme au Mali.

J'ai eu plusieurs entretiens avec Mr Camara Sadio, le représentant du chef de village de Diéoura en France. Mais j'ai remarqué que les entretiens ouverts poussaient certaines personnes à aller souvent loin du sujet. Par exemple dans la recherche de l'information liée à la mise en place des premiers réseaux migratoires, certains vieux nous amenaient sur le champs des conflits de générations, entre les vieux et les jeunes. L'entretien ouvert a permis aussi de cerner les thèmes sensibles susceptibles de créer des tensions dans la commune. L'entretien ouvert permet de déclencher le dialogue et de laisser s'exprimer librement les personnes interrogées. L'entretien ouvert a été beaucoup utilisé dans cette étude pour comprendre à fond la réalité de certaines choses.

b - Les interviews enregistrés:

Au départ, je n'avais pas envisagé de faire des interviews enregistrées pour éviter que le magnétophone ne dérange les personnes interrogées et ne les déconcentrer. Mais je l'ai utilisé avec l'ancien Maire de la commune de Diéoura et Mr Magassouba Harouna, le Président de l'Association pour le Développement de la Commune de Diéoura (ADCD). L'interview me permettait de connaître les différents points de vue et opinions par rapport aux tensions dans la commune. Souvent dans les interviews, je n'ai pas hésité à poser des questions liées à des problèmes très sensibles de la commune car j'ai compris que la prise en compte des tensions sociales me permettait de bien comprendre les agissements des migrants, par exemple en ce qui concerne la création de la caisse de solidarité et de l'Association pour le Développement de la

Commune de Diéoura, de même que les conflits liés au processus de décentralisation au Mali.

La caisse de solidarité est une caisse des migrants en France et gérée par les anciens, généralement notables du village. Les gestionnaires de cette caisse rendent très rarement compte de leurs actions aux migrants. Le paiement des cotisations est obligatoire

Par contre en ce qui concerne l'association pour le développement communal, on a une équipe composée de jeunes de toutes les catégories de personnes (nobles, et castes). Les projets de l'association sont débattus en public de façon démocratique, en présence de la majorité des migrants, sur proposition des membres de l'association. J'ai aussi cherché à comprendre, grâce l'interview, les axes prioritaires de développement selon les migrants et les non migrants.

c - Enquête par questionnaire :

J'ai utilisé le questionnaire auprès de toutes les catégories des migrants en France et un certain nombre de chefs de famille à Diéoura (Mali). L'objectif du questionnaire fait surtout de connaître les caractéristiques sociodémographiques des migrants (âge, sexe, ethnie, profession, ...). Avec le questionnaire j'ai aussi cherché à comprendre la vie des migrants en France, les conditions d'entrée en France, le projet des migrants, les relations avec le lieu d'origine.

J'ai interrogé 50 personnes en France dont 15 femmes, et 30 personnes au Mali dont 9 femmes. C'est encore une migration essentiellement masculine. Le nombre de femmes émigrées de la commune n'atteint pas 50. Toutes ces femmes vivent avec leur mari. Même si les immigrés se déclarent mariés, ils vivent en France en célibataires dans leur grande majorité.

Le questionnaire permet de dégager des tendances qui, par manque d'exhaustivité et qui ne reflètent pas une réalité absolue.

d - Enquêtes par observation participante :

Compte tenu de mon implication dans les mouvements associatifs des migrants de la commune de Diéoura en France, l'observation participative a été au coeur de cette recherche. Rien ne me différencie des migrants car nous vivons les mêmes réalités en France. Dans ce travail de recherche, la difficulté pour moi était de ne pas pouvoir faire souvent la différence entre mon rôle d'étudiant et de migrant engagé

Cette méthode a été surtout utilisée pour comprendre les comportements locaux des migrants

dans les foyers mais aussi au retour dans le lieu d'origine. L'observation m'a permis de connaître certains aspects de la vie quotidienne des migrants. À partir de l'observation, j'ai cherché à connaître la différenciation entre les familles, les villages, et les ethnies fortement au moins impliquées par les migrations. Par exemple la différenciation dans l'habitat des lieux d'origine et la présence de certains équipements dans la maison (moto).

J'ai voulu, pendant cette phase de terrain, rencontrer un responsable des ONG, KARED (Agence du Kaarta pour l'action Développement) ou PGRN (Programme de Gestion des Ressources Naturelles), qui travaillent dans la commune afin de connaître les relations entre ces différents partenaires et les ressortissants de la commune de Diéoura en France. Mais cela n'a été possible ni en France ni au Mali.

En France comme au Mali, la difficulté majeure a été le contact avec les femmes, pour des raisons sociales. Pour avoir le contact avec les femmes, j'ai été obligé de demander l'autorisation aux chefs de famille et les interroger en leur présence, ce que j'ai regretté car ce biais pesait énormément sur les réponses des enquêtées.

Globalement, la recherche d'information a été plus difficile que prévu. J'ai réalisé des enquêtes dans la mesure où je ne disposais pas de l'ensemble des informations sur ma commune dans les ouvrages que j'ai consultés sur ce thème. Aucune étude n'a été jusqu'à là réalisée sur la commune de Diéoura d'où la nécessité de mener une recherche efficace de terrain.

PREMIERE PARTIE :

LES DYNAMIQUES MIGRATOIRES CHEZ LES SONINKES

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire