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L'émission d'obligations vertes: entre liberté et contrainte


par Lise Wantier
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master 2 Droit bancaire et financier 2018
  

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Titre I : L'initiative règlementaire européenne

La principale initiative législative qu'il convient d'analyser est celle de l'Union européenne. Si elle reprend le coeur des initiatives privées, nous verrons qu'elle n'en est pas moins dénuée de tout caractère contraignant.

Chapitre 1 : La reprise des idées fondatrices

Le plan européen reprend les idées développées par les initiatives privées que nous avons précédemment étudiées.

Section 1 : L'une des mesures phare du plan d'action européen repose sur le volontariat

L'une des principales mesures du plan, à savoir un label européen pour les obligations vertes, a un fondement volontaire. Par ailleurs, la prise en considération de l'opinion des différents acteurs concernés rappelle la forte prégnance de ce principe.

$1. Une règlementation avec les acteurs

La Commission a lancé un plan d'actions « qui s'inscrit dans le soutien général à l'innovation sociale et facilitera la mise en place d'un écosystème adapté, en étroit en partenariat avec les acteurs du secteur et les Etats membres106». L'idée d'un partenariat avec les différents acteurs est prépondérante dans le plan, et la volonté de les contraindre est écartée.

Si l'on observe plus attentivement les différentes actions prévues, l'idée du volontariat est primordiale : le plan vise à mettre en place un label volontaire et une taxinomie, à « favoriser » l'investissement dans des projets durables, ou à élaborer des indicateurs de

106

Communication de la Commission, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un

écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales » /* COM/2011/0682 final

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référence en matière de durabilité. On remarque la place prépondérante laissée aux acteurs par la nature même de ces mesures.

La Commission souhaite également intégrer la durabilité dans les exigences prudentielles107, clarifier les devoirs des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d'actifs et atténuer le court-termisme des marchés des capitaux108. Lorsqu'elle énonce ce type d'objectif, elle n'exclue pas les entreprises sur la décision des moyens mis en oeuvre pour y parvenir. Elle annonce par exemple procéder à des analyses et consultations afin d'évaluer la nécessité d'imposer certaines obligations aux entreprises ou sur la nécessité de clarifier certaines règles. Une logique de discussion prévaut donc entre les régulateurs et les différents acteurs. La première étape de l'élaboration du label européen sera mise en oeuvre par un groupe d'experts techniques, qui se fondera sur les résultats d'une consultation publique et les « meilleures pratiques » constatées109. Pour l'élaboration du règlement délégué MiFID II concernant l'intégration des préférences des investisseurs en matière de protection de l'environnement110, de nombreuses consultations ont été menées.

$2. Le label : un choix laissé aux émetteurs

Comme nous avons pu le voir succinctement, la Commission a indiqué vouloir mettre en place un « système volontaire de labellisation à l'échelle de l'UE111». Le projet consiste à établir un label volontaire, fondé sur les meilleurs pratiques ainsi que l'avis d'un groupe d'experts techniques112.

107 Ibid, p°11

108 ibid, p°13

109 ibid, p°6

110 Draft Commission delegated regulation (EU) amending Delegated Regulation (EU) 2017/565 as regards the integration of Environmental, Social and Governance (ESG) considerations and preferences into the investment advice and portfolio management

111

Communication de la Commission, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un

écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales », p°6

112 ibid, p°6

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Le choix de mettre en place un label est révélateur de cette volonté de laisser une grande liberté aux émetteurs, et leur laisser la possibilité de se soumettre aux exigences que celui-ci requiert.

La mise en place d'un système de labellisation est fondée sur la volonté des acteurs de se positionner et se distinguer les uns par rapport aux autres dans un champ concurrentiel donné. Cela permet au législateur de les diriger, de manière souple, vers des comportements qu'il considère comme favorables à l'environnement, sans les contraindre.

La mise en place d'un label permet donc d'encourager les acteurs à agir dans un sens déterminé. Pour les obligations vertes, cela inciterait les émetteurs à se conformer aux normes européennes dans ce domaine. Mais cela peut également donner envie aux acteurs qui n'en émettent pas à bénéficier de l'aura d'un tel label.

Ainsi les émetteurs ne sont pas obligés de respecter toutes les obligations mises en oeuvre pour favoriser la protection de l'environnement, ils choisissent ou non de s'y soumettre. La seule différence avec les initiatives privées semble donc reposer sur l'uniformisation des conditions existantes, la clarté et la sécurité qu'un label européen offrirait aux investisseurs.

Section 2 : L'amélioration de la transparence de l'information au coeur du projet

Une autre mesure phare du plan, si ce n'est la mesure phare, concerne l'amélioration de la transparence. Au coeur des marchés financiers, cet objectif découle également des initiatives privées étudiées.

$1. La transparence, un objectif central

Déjà en 1977 la Commission faisait état de l'importance de l'information sur les marchés. Dans le code de conduite européen élaboré cette année-là, le second principe vise l'information complète et correcte des épargnants, car l'ignorance est toujours une source

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d'imperfections dans un marché, quel qu'il soit113. Dans le plan d'action pour la finance durable, la Commission rappelle l'importance de cette transparence114.

Dès lors, c'est tout naturellement que l'action n°1 du plan vise à établir un système européen de classification unifié des activités durables qui sera intégré dans la législation européenne. La Commission précise par ailleurs qu'« à ce stade, il s'agit de la mesure la plus importante et la plus urgente prévue dans le plan d'action115».

Etablir cette taxinomie vise à protéger l'intégrité et la fiabilité du marché des obligations vertes et à la rendre plus accessible et compréhensible pour les investisseurs. Elle constitue une base pour l'élaboration d'un label fiable116. Du point de vue de l'Union Européenne, définir une norme permettrait de renforcer la crédibilité des obligations vertes et permettre au marché européen d'arriver à maturité117. Mettre en place un système de classification unifié favorisera une plus grande sécurité juridique.

$2. Le projet de taxinomie

C'est dans la lignée de cet objectif de transparence que la Commission propose d'élaborer une taxinomie pour les projets qualifiés comme « verts ». La Commission propose de procéder par étapes, du fait de la complexité de la tache mais également de l'évolution des objectifs des politiques de l'Union Européenne, du marché, de l'environnement et des technologies118. Il est ainsi prévu qu'un groupe technique d'expert publie sur la base d'une consultation de toutes les parties prenantes, un rapport proposant une première taxinomie.

113 Recommandation de la commission du 25 juillet 1977 portant sur un code de conduite européen concernant les transactions relatives aux valeurs mobilières, exposé des motifs

114

Communication de la Commission, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un

écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales », p°4

115

116

117

Ibid, p°4

Ibid, p°5

COMMISSION EUROPENNE, « Obligations vertes », 28.02.2019 https://ec.europa.eu/newsroom/

fisma/item-detail.cfm?

item id=645336&utm source=fisma newsroom&utm medium=Website&utm campaign=fisma&utm content=Green%20bonds%20&lang=fr

118

Communication de la Commission, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales », p°5

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L'objectif étant « d'intégrer la future taxinomie européenne dans le droit de l'UE 119». La Commission souhaite recenser les activités qui peuvent être qualifiées comme durables en procédant étape par étape. Cela permettra aux investisseurs de savoir exactement quelles activités sont considérées comme durables et ainsi, de prendre leurs décisions d'investissement en connaissance de cause. L'une des membres du comité d'expert pour l'élaboration de cette taxinomie évoque que l'objectif est « de fournir des mesures communes fondées sur une base scientifique robuste et de fixer ensuite des règles ad hoc120». Selon le rapport HLEG121, cette taxinomie ne devrait pas être un standard, ni une liste obligatoire dans laquelle investir, mais un système de classification. En effet, un standard nécessiterait un système de seuils, de rapports, de gestion et de surveillance. L'objectif de cette taxinomie serait plutôt une utilisation par les organismes de normalisation de celle-ci afin d'éclairer leurs normes respectives122.

L'objectif du HLEG serait par ailleurs que cette taxinomie fournisse un cadre suffisamment neutre pouvant s'appliquer à une variété d'instruments financiers, y compris, mais sans s'y limiter, le financement de projets, les obligations et les actions123. Elle ne comprendra que des activités vertes mais ne prétendra pas être exhaustive même si des mises à jour régulières seront effectuées. Ainsi des activités n'y figurant pas ne devront pas être systématiquement considérées comme polluantes.

De plus, la taxinomie inclura des activités de secteurs ayant un impact négatif sur l'environnement dans la mesure où celles-ci réduisent de manière significative leurs impacts. L'objectif de la taxonomie étant de favoriser la transition vers des modes de fonctionnement plus favorables à l'environnement, et pas uniquement des activités déjà reconnues comme

119 Ibid, p°5

120 VINES FIESTAS Helena, «Un effort à court terme pour un grand bénéfice à long terme », Supplément Revue Banque au n°833, juin 2019

121 High-Level Expert Group on Sustainable Finance

122 HLEG « Financing a Sustainable European Economy, p°17 Final Report, 2018

123 Ibid

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telles, cela fait sens d'y inclure des secteurs qui améliorent leurs pratiques124. On retrouve ici la même idée qui avait était développée par les initiatives privées (Green Bond Principles).

Cette taxinomie apparait toutefois comme un premier jalon, on peut en effet lire dans le projet de règlement que :

« La définition d'exigences juridiques uniformes pour considérer un investissement comme durable sur le plan environnemental, sur la base de critères de durabilité environnementale des activités économiques eux aussi uniformes, est nécessaire pour servir de référence à la future législation de l'Union visant à permettre ces investissements 125

Un rapport intermédiaire a déjà été publié concernant les délibérations avec la désignation des premières activités prises en compte. Un rapport final sera publié fin juin, suivi d'une consultation officielle pour un travail achevé fin 2019126.

Chapitre 2 : Le projet de règlement européen : vers une ingérence ?

Toutefois, au-delà de ces mesures n'y aurait-il pas davantage de contraintes pour les émetteurs ? Le législateur européen n'irait-il pas trop loin ?

Section 1 : Le label européen, une fausse liberté ?

Le label, d'application certes volontaire va toutefois entrainer une réduction de la marge de liberté dont disposaient autrefois les émetteurs.

$1 : Les émetteurs, contraints de respecter le label européen pour émettre des obligations vertes

Précisons au préalable que le champ d'application de la proposition de règlement est large puisqu'il comprend les entreprises d'investissement, les entreprises et intermédiaires d'assurance ainsi que les acteurs des marchés financiers qui fournissent des conseils en

124 LA FRANÇAISE, « Stratégies & durabilité », Newsletter n°2, 11/03/19 https://www.la-francaise.com/fileadmin/docs/Publications/StrategieEtDurabilite032019.pdf

125 Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL sur l'établissement d'un cadre pour favoriser les investissements durables, COM/2018/353, considérant 13

126 VINES FIESTAS Helena, «Un effort à court terme pour un grand bénéfice à long terme », Supplément Revue Banque au n°833, juin 2019

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investissement127. Tous ces acteurs voient s'ajouter à leurs obligations de transparence les informations extra-financières portant sur l'environnement.

L'article 4 du projet de règlement « Application des critères de durabilité environnementale des activités économiques » prévoit que:

« Les États membres appliquent les critères de détermination des activités économiques durables sur le plan environnemental énoncés à l'article 3 aux fins de toute mesure imposant aux acteurs des marchés des exigences relatives à des produits financiers ou à des obligations d'entreprises qui sont commercialisés comme étant « durables sur le plan environnemental ». »

Cela aboutira à ne plus pouvoir commercialiser et émettre sous l'appellation « obligation verte » une obligation qui ne respecterait pas les critères établis à l'article 3 du règlement.

A la lecture de l'article 3, une activité économique est durable sur le plan environnemental si elle respecte tous les critères suivants :

(a) Elle contribue substantiellement à un ou plusieurs des objectifs environnementaux (à savoir l'atténuation du changement climatique, l'adaptation au changement climatique, l'utilisation durable et la protection des ressources hydrologiques et marines, la transition vers une économie circulaire et la prévention et le recyclage des déchets, la prévention et le contrôle de la pollution et la protection des écosystèmes sains).

(b) Elle ne cause de préjudice significatif128 à aucun des objectifs environnementaux énumérés.

(c) Elle est exercée dans le respect de garanties minimales. C'est-à-dire dans le respect des procédures que l'entreprise met en oeuvre pour faire en sorte que soient respectés les principes et les droits fixés par les huit conventions fondamentales citées dans la déclaration de

127 Proposal for a regulation of the European parliament and of the council on disclosures relating to sustainable investments and sustainability risks and amending Directive (EU) 2016/2341, article 1

128 ibid, article 12

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l'Organisation internationale du travail relative aux principes et droits fondamentaux au

travail129.

(d) Elle est conforme aux critères d'examen technique définis par la Commission.

Ainsi la marge de manoeuvre des émetteurs va être réduite, la taxinomie élaborée par l'Union Européenne permettra une connaissance précise des activités acceptées comme favorables à l'environnement ou non. Chaque objectif est précisément défini dans le projet de règlement, laissant peu de place une marge de manoeuvre des émetteurs, et permettant une clarté sans équivoque pour les investisseurs.

Par ailleurs, le rapport HLEG a établi une comparaison entre les Green Bond Principles et le futur label européen130. Il en ressort un suivi plus prononcé du côté européen avec des éléments obligatoires alors que les Green Bond Principles ne faisaient que les recommander. Par exemple, la divulgation de la proportion du produit utilisée pour le refinancement, le suivi de l'impact et l'établissement de rapports, certaines exigences en matière d'examen externe et la publication de cet examen sont obligatoires sous le label européen alors qu'ils n'étaient que recommandés par les Green Bond Principles.

$2 : Des propositions de modification réduisant la marge de liberté des émetteurs L'article premier du projet de règlement européen prévoit que :

« 1. Le présent règlement définit les critères permettant de déterminer si une activité économique est durable sur le plan environnemental, aux fins d'établir le degré de durabilité environnementale d'un investissement.

2. Le présent règlement s'applique :

(a) aux mesures adoptées par les États membres ou par l'Union et qui imposent des exigences aux acteurs du marché en ce qui concerne les produits financiers ou obligations d'entreprises qui sont commercialisés comme durables sur le plan environnemental ;

129 à savoir: le droit de ne pas être soumis au travail forcé, la liberté d'association, le droit des travailleurs de s'organiser, le droit de négociation collective, l'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur égale, la nondiscrimination, en termes de chances et de traitement, en matière d'emploi et de profession, ainsi que le droit des enfants à ne pas être astreints au travail des enfants.

130 HLEG « Financing a Sustainable European Economy, p°32 Final Report, 2018

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(b) aux acteurs des marchés financiers qui proposent des produits financiers comme étant des investissements durables sur le plan environnemental ou comme étant des investissements aux caractéristiques similaires131

Lors de la première lecture, a été proposé132 d'exclure du champ du règlement les acteurs déclarant expressément que leur produit ne poursuit pas des objectifs en faveur de l'environnement dans leur prospectus. Or entre annoncer qu'une obligation ne poursuit pas un tel objectif et ne rien dire, l'impact est différent. L'un des amendements133 proposait par ailleurs d'ajouter un article permettant de poser des critères afin de déterminer les activités économiques ayant un impact négatif significatif sur l'environnement. Mais cet amendement a été rejeté.

L'amendement n°39 va plus loin en prévoyant un contrôle des informations données par les états membres et les autorités européennes de surveillance, avec une obligation de correction des informations communiquées par l'acteur si celles-ci ne sont pas approuvées par l'état membre134. Également via l'inclusion d'un nouvel article 4a, est prévu un véritable contrôle du marché135. A ce titre on peut remarquer l'indication donnée dans l'amendement n°2088 à la loi PACTE :

« De même, dans un souci de protection des épargnants et des investisseurs et notamment en vue d'une harmonisation des labels de fonds verts envisagée dans le cadre du plan d'actions de la Commission européenne, une réflexion pourrait être menée sur le rôle de l'AMF dans la régulation et le contrôle des véritables labels « verts ».»

Ainsi la surveillance du marché des produits financiers qui sont commercialisés, distribués, ou vendus dans l'Union, est accrue via les amendements. Finalement, le texte tel

131 Proposition de règlement du parlement européen et du conseil sur l'établissement d'un cadre pour favoriser les investissements durables, COM/2018/353

132 Amendments 35, 55, 59, 87 and 96 http://www.europarl.europa.eu/doceo/document/ TA-8-2019-0325 EN.html?redirect

133

134

135

Ibid, amendement 38 Ibid, amendement 39 Ibid, amendement 40

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qu'adopté par le parlement va plus loin que la proposition de la Commission136. En effet, l'Autorité européenne de surveillance compétente peut, en cas de violation du règlement, interdire ou restreindre temporairement dans l'Union la commercialisation, la distribution ou la vente des produits financiers. Aussi, le parlement européen a exclu l'énergie nucléaire (ainsi que les combustibles fossiles et l'infrastructure gazière) de sa classification des actifs durables. La volonté d'aller plus loin des parlementaires est aisément perceptible.

Section 2 : Des obligations indirectes favorisant l'investissement vert

Le plan d'action prévoit également des mesures, indirectement liées aux obligations vertes, mais ayant pour effet de les favoriser. Cela, en contraignant d'autres acteurs que les émetteurs.

$1. Intégration d'obligations pour le conseil financier

Le rapport HLEG préconisait la prise en compte des préférences environnementales dans l'investissement. Le rapport indique que la directive MiFID II exige déjà des conseillers qu'ils proposent des produits adaptés aux besoins de leurs clients, mais qu'il est difficile de voir comment cette exigence peut être satisfaite si les conseillers ne sont pas tenus de s'enquérir des préférences d'investissement de leurs clients en ce qui concerne les impacts sur l'environnement. C'est pourquoi, il énonçait utile qu'une révision de l'acte délégué de la directive MiFID II intègre explicitement les préférences des investisseurs concernant l'impact sur l'environnement dans les exigences d'adéquation associées aux conseils financiers137. Cette préconisation fut reprise dans le plan d'Action138. La Commission précise que :

« Toutes les entités financières qui gèrent des investissements pour le compte de leurs clients ou bénéficiaires devront désormais les informer de l'impact de leurs activités

136 LEGISLATIVE OBSERVATORY, Text adopted by Parliament, 1st reading/single reading, 2018/0178(COD), 28/03/2019 https://oeil.secure.europarl.europa.eu/oeil/popups/summary.do? id=1580252&t=e&l=en

137

138

HLEG « Financing a Sustainable European Economy, p°28 Final Report, 2018

Communication de la Commission, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales », p°7

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sur l'environnement. Ce faisant, ces règles donneront plus de choix aux investisseurs qui souhaitent investir dans l'avenir de la planète tout en obtenant un rendement139

Le 4 janvier 2019, un projet de règlement délégué140 a ainsi été publié afin de mettre en application cet objectif. L'article 1er de ce règlement vise à préciser que les entreprises d'investissement fournissant des conseils financiers et des services de gestion de portefeuille doivent procéder à une évaluation obligatoire des préférences ESG de leurs clients dans un questionnaire qui leur est adressé. Ces entreprises d'investissement devraient alors tenir compte de ces préférences ESG dans le processus de sélection des produits financiers proposés. En outre, l'article 1er exige des entreprises d'investissement qu'elles établissent un rapport à l'intention du client expliquant comment la recommandation qu'elles lui adressent répond à ses objectifs d'investissement, à son profil de risque, à sa capacité à supporter des pertes et à ses préférences ESG (divulgation des informations ex post)141.

$2. Obligations des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d'actifs en matière de durabilité

La Commission rappelle dans le plan d'actions que plusieurs instruments législatifs de l'Union Européenne imposent aux investisseurs institutionnels et aux gestionnaires d'actifs d'agir dans l'intérêt supérieur de leurs investisseurs et/ou bénéficiaires finaux. C'est notamment le cas des directives MiFID II, OPCVM et AIFMD. Cependant, la Commission relève que les règles actuelles de l'Union sur le devoir des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d'actifs, de prendre en compte les facteurs et risques de durabilité dans leurs décisions d'investissement ne sont pas suffisamment claires ni cohérentes, d'un secteur à l'autre. Elle relève également que les facteurs de risque et de durabilité ne sont pas suffisamment pris en considération dans le processus d'investissement, privant les

139 COMMISSION EUROPEENE, Press release «Sustainable finance: Making the financial sector a powerful actor in fighting climate change», 24 Mai 2018 http://europa.eu/rapid/press-release IP-18-3729 en.htm?locale=FR

140 Amending Delegated Regulation (EU) 2017/565 as regards the integration of Environmental, Social and Governance (ESG) considerations and preferences into the investment advice and portfolio management

141 Commission Delegated Regulation (EU) É/É of XXX amending Delegated Regulation (EU) 2017/565 as regards the integration of Environmental, Social and Governance (ESG) considerations and preferences into the investment advice and portfolio management, p°5

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investisseurs de ce type d'information. L'action n1/4 7 du plan d'action vise ainsi à « clarifier les devoirs des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d'actifs ».

En fonction des résultats de l'analyse d'impact, la Commission présentera une proposition législative dans le but de remplir cet objectif. Cette proposition visera dans un premier temps à exiger explicitement des investisseurs institutionnels et gestionnaires d'actifs qu'ils intègrent la durabilité dans leurs décisions d'investissement. Et dans un second temps, à accroître la transparence à l'égard des investisseurs finaux sur la manière dont ces prestataires intègrent les facteurs de durabilité dans leurs décisions d'investissement, notamment en ce qui concerne leur exposition aux risques en matière de durabilité.

La France a déjà anticipé ces modifications dans la loi relative à la croissance des entreprises. Un amendement de l'article 23 de la loi PACTE avait été adopté, prévoyant l'ajout de ces deux alinéas :

« 26° Le premier alinéa de l'article L. 621-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : [L'AMF] veille à la qualité de l'information fournie par les investisseurs sur leur stratégie bas carbone et de gestion des risques liés aux effets du changement climatique, notamment en évaluant et proposant des méthodologies uniformes liées au climat142. »

L'objectif de cette modification est de préciser les fonctions de veille et de pilotage de l'AMF en matière d'évaluation de la stratégie bas-carbone des investisseurs et des risques liés aux effets du changement climatique. Ceci dans la continuité de ses missions traditionnelles auprès des investisseurs et des acteurs financiers. Également, en anticipation de la transposition de la règlementation européenne.

Cette modification de l'article L. 621-1 du Code monétaire et financier permet de

formaliser

« La compétence de l'AMF dans la prise en compte du risque climat dans les décisions financières en lui permettant d'évaluer et de proposer, en tant que régulateur, selon les normes et standards internationaux (normes ISO, Rapport de la TCFD) des méthodologies uniformes

142

Amendement n 2088 loi PACTE

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de prise en compte des critères climat par les investisseurs dans leurs décisions

d'investissement143

Il s'agit donc d'octroyer un pouvoir beaucoup plus large à l'AMF, elle pourra ainsi évaluer les méthodologies utilisées par les différents acteurs.

À la suite des diverses modifications, cet ajout figure à l'article 77 de la loi PACTE, « Le premier alinéa de l'article L. 621-1 est complété par une phrase ainsi rédigée concernant l'AMF : « Elle veille à la qualité de l'information fournie par les sociétés de gestion pour la gestion de placements collectifs sur leur stratégie d'investissement et leur gestion des risques liés aux effets du changement climatique». On comprend que le champ a été réduit, passant des « investisseurs » aux sociétés de gestion de placements collectifs. La précision relative à l'évaluation et la proposition de méthodologies uniformes liées au climat a également disparu du texte final.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe