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Christianisation et résilience des cultes du terroir à  Vo-Koutimé en pays Ouatchi (XXè-XXIè siècle)


par Edoh Emmanuel BODJRO
Université de Lomé - Master 2020
  

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1.2. De Vogan à l'occupation de Vo-Koutimé

Notre travail sur l'occupation de Vo-Koutimé s'est reposé sur le recueil des traditions orales. En effet, selon le mot du Chef Togbui Akouété Zouméké Akakpo II9 :

Le fondateur de notre village est l'ancêtre Togbui Kotokou qui aurait migré ensemble avec le vieux Akouma jusqu'à Akoumapé. Plus tard, le vieux Kotokou reprit le chemin et parvint chez ses cousins à Vogan où il résida pour un temps indéterminé dans le quartier Bamé avant de venir élire domicile sur le site aujourd'hui Vo-Koutimé.

André Tonou10 de son côté relate :

Les mauvais traitements du roi Agokoli à l'encontre de son peuple les poussèrent à quitter la cité de Notsè. Ainsi, au cours de leur migration, le vieux Kotokou, le futur fondateur de Vo-Koutimé, aurait fait chemin ensemble avec Akouma. Ce dernier devint fondateur et chef d'Akoumapé, un village de son nom. Kotokou passa quelque temps là et continua le chemin avec ses cousins de Vogan où il résida. Mais toujours habitué au déplacement, le vieux parvint à fonder lui aussi un futur village du nom de Vo-Koutimé.

9 Entretien du 15 mars 2020 au palais du Chef Canton à Vo-Koutimé, 76 ans.

10 Conseiller du parti UNIR dans la commune Vo 1. Entretien du 22 juillet 2020 dans son domicile à Vo-Koutimé, 70 ans.

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Les traditions ci-dessus ont été considérablement influencées par les récits populaires des éwé qui font d'Agokoli un tyran. Or, la migration du groupe de migrants ouatchi de Notsè remonterait à quelques années plus tard du grand exode et serait due au manque de terres cultivable dans la cité de Notsè.

En dehors de ces traditions et tant d'autres, toutes sont unanimes autour de la fondation du village par Kotokou. Quelles sont les raisons qui l'auraient poussé à choisir ce site parmi tant d'autres ? Et pourquoi le site se fit appeler « Vo-Koutimé » ?

1.2.1. Les raisons du choix du site et le toponyme « Vo-Koutimé »

L'occupation du site et le nom qui lui est attribué ne sont pas anodins. Des caractéristiques géographiques de la zone auraient motivé le vieux Kotokou à y rester.

En effet, le site du futur village de Vo-Koutimé est situé au bord de la rivière Boko permettant la présence d'une forêt longeant de part et d'autre ses abords. Une zone de cette envergure permettrait l'abondance de gibiers.

Nous comprenons, alors que la zone serait propice à la chasse. André Tonou11 affirme en ces propos : « Le vieux Kotokou, quelques années plus tard, à la recherche de produits de chasse, trouve un lieu très giboyeux. Il alla à Vogan ramener ses parents ».

Les avantages de ce cours d'eau ne sauraient se limiter qu'à la chasse. La rivière a été pendant longtemps la source d'approvisionnement en eau pour les Ouatchi de Vo-Koutimé avant la creusée d'un puits, le premier dans la zone, dans le quartier Wuikpokopé par les Allemands pendant la colonisation.

Par ailleurs, le fondateur serait sans doute à la recherche d'un endroit où il sera libre de tous soubresauts. Étant donné qu'après le départ des Éwé de Notsè, les conducteurs des groupes ont pour objectif la recherche d'une idéale liberté.

L'agriculture aurait joué un rôle important dans la venue des prédécesseurs de Togbui Kotokou. Ainsi, selon N. L. Gayibor (1992, p. 230), « Vo-Kutimé, Vo-Ative, Vo-Asso, etc. étaient tous des fermes de cultures qui se sont par la suite étendues ». Alors la volonté de rester plus proche des champs aurait conduit les ancêtres à résider sur le site de Vo-Koutimé.

Le toponyme « Vo-Koutimé » en dit suffisamment sur cette dernière raison. « Vo-Koutimé » est composé de deux vocables : « Vo » le préfixe qui signifie « liberté » est le nom de l'ethnie Vo à laquelle appartenait Kotokou. Le radical « Koutimé » désigne « y mourir ». Alors, le

11 Entretien du 22 juillet 2020 à Vo-Koutimé, 70 ans.

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fondateur ajouta à ce radical « Vo » faisant ainsi appeler le milieu « Vo-Koutimé » qui veut dire « y mourir dans la liberté ». Il donna ce nom lorsqu'un jour ses frères de Vogan, au cours d'une visite, lui ont demandé de venir rester avec eux. Il leur répondit : « vous êtes à Vogan (libre et sauve), moi je suis libre et je vais mourir ici12 ».

Le site de Vo-Koutimé ne se résuma pas à son lieu originel. Il connaîtra une véritable extension.

1.2.2. L'extension du village

Dès l'arrivée, le vieux Kotokou construit son habitat auprès d'un anacardier « Atchanti » sous lequel il se reposait lors des campagnes de chasse avant son installation. De cet arbre, dérive le nom à ce premier quartier Atchandomé « sous l'anacarde ». Le rejeton de l'historique arbre, véritable lieu de mémoire, est encore de nos jours sur pied. Comme le montre la photo ci-dessous.

Photo n°1.1 : Le rejeton de l'historique anacardier des Ouatchi de Vo-Koutimé

Source : cliché E. E. Bodjro (24/07/2020).

Toutefois, aucune trace de présence ancienne d'un quelconque groupe de population n'a été signalée. Plus tard, Kotokou reçut d'autres migrants qui sont soit ses cousins ou soit ses oncles auxquels il céda des parcelles. Ils créèrent de nouveaux quartiers qui sont au nombre de cinq (5) en occurrence Mamissi fondé par le vieux Agbodi (cousin à Kotokou), Glopé du vieux Agahoun (oncle à Kotokou), Kpota de l'ancêtre Egun (aussi cousin à Kotokou), Soko

12 Information recueillie auprès de Kokouvi Amouzou, 65 ans, Géomancien à Vo-Koutimé, le 23 juillet 2020.

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de Edoue (également cousin à Kotokou) et enfin Agadi fondé par l'ancêtre du même nom Agadi13.

Tous ces quartiers, en plus de l'ancien, sont attenants dont l'ensemble forme le village. Il est alors clair que le fondateur s'est entouré de ses proches.

Par ailleurs, certains descendants de ces six (6) ancêtres fondèrent de nouveaux quartiers du même nom que les anciens à environ deux (2) à cinq (5) kilomètres les uns des autres et du village mère, désignés sous le nom commun « Agblédi » (ferme agricole). Ainsi, la recherche des terres arables pour l'agriculture sera un facteur principal de leur création. Au fil du temps, ces nouveaux quartiers connurent une évolution démographique aussi remarquable que celle du village matriciel.

En outre, l'avènement du chef Akakpo I (un yovo fio14 ) aurait contraint d'autres populations du village d'origine à aller rejoindre les siens dans les fermes. En effet, au cours de la colonisation française, il fut un allié de taille dans la circonscription d'Aného. Il obéissait à la lettre aux ordres du chef de circonscription surtout quand il s'agit de veiller à la collecte des impôts ou d'offrir des travailleurs forcés. Il appliquerait une rigueur sans distinction. Ainsi, pour riposter contre ce système, les siens quittèrent le village mère pour s'installer définitivement dans leurs nouveaux quartiers en créant des sous-quartiers15.

Ils devinrent ainsi de nouveaux villages au point que certains d'entre eux comme Mamissi, Glopé, Atchandomé et Soko, eurent avec la décentralisation, des Chefs de village. L'ensemble de tout ceci forme le grand village des Ouatchi de Vo-Koutimé (Carte n°1).

À quand remonte alors l'occupation de cet espace ?

1.2.3. Essai de périodisation

Les traditions des Ouatchi de Vo-Koutimé ne se souvinrent guère de la date effective d'occupation du site, car les détenteurs des sources orales ont rejoint leurs ancêtres. À cet effet, nous tenterons de situer cette occupation en nous reposant, d'une part, sur la liste généalogique des fondateurs de deux quartiers notamment celle du vieux Kotokou d'Atchandomé et de l'ancêtre Egun de Kpota et, d'autre part, sur les écrits reposant les Ouatchi d'Akoumapé et de Vogan. Quand bien même que nous doutons de la fiabilité des généalogies ci-dessous, par faute d'absence d'un travail archéologique qui pouvait nous

13 Koulékpato Djokoto, 87 ans, doyen de la famille Djokoto, entretien du 20/07/2020 à son domicile à Atchandomé.

14 Nommé par les administrateurs français en 1919.

15Abotsi Miwonunyi Hubert, 70 ans, ingénieur retraité. Entretien du 24/07/2020 à son domicile à Vo-Koutimé.

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donner plus de précision, nous ne pouvons que s'en contenter. Alors, parlant de la généalogie de Kotokou et de Egun, elles se présentent comme suit16 :

Généalogie

(Atchandomé)

de Kotokou

 

Généalogie

de Egun (Kpota)

Egun

Kotokou

 
 
 

Assagba

Djokoto

 
 
 

Midonou

Agboglo

 
 
 
 

Nouwaga

Apetovi

 
 
 
 

Fovi

Adelan

 

Houindolo

Gatri

Amouzou

Sruikpè

Sakpo

 
 

Koudjodji

De ces deux généalogies, nous ressortons chacune huit générations. En prenant alors la durée moyenne de 30 ans par génération à cause de la patrilinéarité de la société et en posant le calcul suivant : 2020- (30x8) qui donne 1780, nous pouvons dire à cet effet que les ancêtres

16 Koulékpato Djokoto, 87 ans, doyen de la famille Djokoto. Entretien du 07/03/2020, à Kpota, à son domicile.

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ouatchi de Vo-Koutimé occupaient le site actuel probablement dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Par ailleurs, Akoumapé aurait été fondé vers la fin du XVIIe siècle ou au début du XVIIIe siècle (E. S. N'tsoukpo, 2011, p. 14). Quant à ce qui concerne Vogan, si leurs ancêtres fondateurs ont quitté Akoumapé sous le chef Akouma, le premier sur la liste de la dynastie royale, ils auraient sans doute fondé Vogan à la même période qu'Akoumapé, c'est-à-dire au début du XVIIIe siècle. Alors, le vieux Kotokou, fondateur de Vo-Koutimé, aurait quitté de Vogan, dans la première moitié du XVIIIe siècle, pour mettre pied sur le site au cours de ses activités de chasse, puisque les chasseurs d'autrefois faisaient des jours avant de retourner au bercail. Nous pouvons, à cet effet, supposer que son installation définitive à Vo-Koutimé remonterait à la seconde moitié du XVIIIe siècle.

De son extension, le village connaîtra une organisation sociopolitique et économique un peu particulière.

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