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Etude cytogénétique des avortements spontanés à  répétition dans la région de Constantine


par Sabrine Khallef
Université des Fréres Mentouri Constantine - Master 2020
  

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1-6-2- Folliculogénèse

- Follicule primordial et primaire : le follicule primordial est constitué d'un ovocyte

de 1er ordre entouré d'une couche de cellules folliculeuses aplaties. Le follicule primaire est caractérisé par les cellules folliculeuses devenant cubiques.

- Follicule secondaire : le follicule est qualifié de secondaire au moment où l'épithélium
folliculaire devient pluristratifié formant ainsi la couche granuleuse. En outre, la zone pellucide apparaît entre l'ovocyte et l'épithélium et au-delà de la membrane basale, le stroma ovarien se transforme en thèque du follicule.

- Follicule tertiaire : il est caractérisé par la présence d'une cavité (antrum) dans la granulosa
et d'une thèque externe, couche fibreuse autour de la thèque interne. Au terme de son développement, le follicule est appelé follicule de De Graaf (Le Moigne et Foucrier, 2009).

1-6-3- Ovulation

Le follicule de De Graaf réagit à la décharge d'hormones gonadotropes aboutissant à la libération d'un ovule fécondable et permettant la constitution du corps jaune.

1-6-4 -Corps jaune

Après l'expulsion de l'ovocyte, les trois couches de la paroi folliculaire se réorganisent pour former une glande endocrine ; le corps jaune. Il deviendra fonctionnel vers le sixième jour post ovulatoire. En l'absence de fécondation, il régresse juste avant les menstruations (Turpin, 1995).

1-6-5- Physiologie ovarienne

L'ovaire a une double fonction, exocrine (maturation et émission cyclique de l'ovocyte) et endocrine (imprégnation hormonale oestroprogestative de l'appareil génital féminin), sous le contrôle des gonadotrophines hypophysaires : l'hormone folliculostimulante (FSH) et l'hormone lutéinisante (LH) (Gougeon, 2008).

Chapitre I Physiologie et physiopathologie de la reproduction chez l'humain

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L'activité ovarienne au cours du cycle comporte quatre phases : la phase menstruelle qui marque le début de chaque cycle, la phase folliculaire, la phase ovulatoire et la phase lutéale. La phase folliculaire, qui dure de 12 à 16 jours, est marquée par le recrutement d'un follicule primordial que sa maturation conduit à devenir un follicule ovulatoire. Ce processus de recrutement se fait par le passage du stade de follicule primordial à celui de follicule primaire, puis se fait le passage au stade de follicule secondaire, le follicule continue sa croissance inévitablement jusqu'à ce qu'il soit détruit par atrésie ou qu'il ait ovulé. Les cinq stades ultérieurs comportent la transformation en follicules préantraux de classe 1 marqués par l'apparition de cellules thécales. 70% de ces follicules préantraux vont évoluer vers les stades ultérieurs, passant par le stade de follicule antral débutant de classe 2, puis de classe 3 et 4. Le passage de la classe 4 à la classe 5 a lieu pendant la phase lutéale du cycle précédent l'ovulation, n'impliquant que des follicules prêts (qui dure jusqu'au dernier jour du cycle ovarien). L'ovulation est caractérisée par l'expulsion de l'ovocyte, ce qui suppose le développement d'une activité protéolytique altérant la membrane basale et la rupture des différentes couches de la thèque. Elle a été précédée par un pic de l'LH lié à l'augmentation rapide de l'oestradiol, durant 48 heures (Gougeon, 2008).

2- Les étapes d'implantation embryonnaire 2-1 - La fécondation

La rencontre entre le spermatozoïde et l'ovocyte est l'une des étapes essentielles de la reproduction. Elle nécessite un ovocyte et un spermatozoïde tous deux compétents. Elle se déroule généralement au tiers moyen supérieur de la trompe de Fallope. Lors de la fécondation, le spermatozoïde entre en contact avec la zone pellucide entourant l'ovocyte, cette zone pellucide sert de barrière empêchant la polyspermie. La première division a lieu très rapidement (durant les 24 premières heures) et se déroule toujours dans la trompe. L'embryon n'atteint l'utérus que durant le 5ème jour de son développement. Il reste entouré des cellules de la corona radiata jusqu'au stade blastocyste (Gridelet, 2015) (figure 04).

2-2- Division cellulaire (segmentation)

Les facteurs maternels précoces jouent un rôle primordial durant le début du développement embryonnaire. L'ovocyte supporte les premières divisions du zygote et fournit le matériel protéique nécessaire jusqu'au stade 4-8 cellules. Il apporte la grande majorité du cytoplasme et des composants nucléaires de l'embryon. Les cellules embryonnaires, aussi appelées blastomères, sont flexibles et totipotentes, autrement dit, elles sont capables en se développant et en se multipliant de donner tous les types cellulaires du corps humain (De Paepe et al., 2014).

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Figure 04 : Les étapes de la fécondation (Strauss et Lessey, 2009).

2-3- Le blastocyste

Au stade blastocyste, l'embryon sort de la zone pellucide qui l'entoure et ses cellules s'organisent, pour la première fois, en deux types cellulaires différenciés, le premier, appelé trophoblaste, qui forme une couche unicellulaire et forme le pourtour du blastocyste, le second type forme la masse cellulaire interne cellules qui donnent le futur foetus. Le trophoblaste est à l'origine du chorion qui forme le placenta et la séparation entre l'embryon et les cellules maternelles (De Paepe et al., 2013) (figure 05).

Figure 05 : Jeune vs vieux blastocyste (Moore et Persaud, 2003).

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2-4- Implantation embryonnaire

Le succès de l'implantation embryonnaire n'est pas uniquement une préparation hormonale adéquate de l'endomètre mais nécessite une interaction étroite, synchronisée et réciproque entre les différentes cellules de l'endomètre et l'embryon. C'est ce qui est appelé dialogue materno-foetal durant la phase d'implantation. Ce dialogue s'établit grâce à de nombreuses cytokines, facteurs de croissance, chimiokines, récepteurs et molécules d'adhésion produits et sécrétés par l'endomètre et par l'embryon (Thouas et al., 2014). La plupart des grossesses biochimiques, qui sont définies par l'incapacité de l'embryon à ce développer correctement, et les fausses couches spontanées, approximativement deux tiers, sont dues à une implantation incomplète de l'embryon (Norwitz et al., 2000). L'éclosion embryonnaire permet un contact direct avec les cellules épithéliales de l'endomètre. Ce contact est appelé phase d'apposition. Durant cette phase, de véritables contacts dynamiques ont lieu entre le blastocyste et l'endomètre via des molécules d'adhésion et des récepteurs :

- L'interleukine-1 (l'IL-1) : sécrété par le blastocyste, elle augmente l'expression d'intégrines
à la surface de l'endomètre lui permettant d'interagir avec l'embryon.

- La mucine MUC-1 : l'épithélium est recouvert sur toute sa surface épithéliale de glycocalyx,

expliquant en partie sa nature non adhésive. Au niveau du site d'implantation, une diminution de l'expression des mucines (principalement de MUC-1) à la surface des cellules épithéliales endométriales est observée et serait impliquée dans le positionnement du blastocyste. (Brayman et al., 2004).

- L'expression de selectines à la surface du blastocyste ainsi que celles de sélectines

complémentaires à la surface de l'épithélium endométrial durant la phase réceptive (Genbacev et al., 2003).

Après la phase d'apposition vient la phase d'adhésion, durant laquelle l'embryon et l'endomètre ont des contacts plus précis via des molécules d'adhésion (et principalement des intégrines). Le trophoblaste se sépare en deux types cellulaires distincts : le syncytiotrophoblaste et le cytotrophoblaste (Gridelet, 2015).

Le syncytiotrophoblaste forme la couche extérieure des futures annexes embryonnaires qui est en contact avec les cellules épithéliales de l'endomètre et la lumière de la cavité utérine. Le cytotrophoblaste forme une couche interne qui est en contact avec la masse cellulaire interne et le blastocoele. Le syncytiotrophoblaste sécrète des enzymes lytiques et des facteurs déclenchant l'apoptose des cellules épithéliales de l'endomètre pour permettre l'invasion de l'embryon au sein de l'endomètre qui correspond à la dernière phase de l'implantation (Gridelet, 2015).

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L'invasion du blastocyste dans l'endomètre commence par la liaison des cellules du syncytiotrophoblaste aux constituants de la membrane basale et de la matrice extracellulaire de l'endomètre via les intégrines. Le trophoblaste envahit ensuite le stroma conjonctif sous-épithélial suite à une décomposition des composants de la membrane basale et de la matrice extracellulaire. Cette décomposition est liée à l'activation de métalloprotéases (figure 06).

Figure 06 : Les phases d'implantation embryonnaire (D'Hauterive, 2010).

L'endomètre joue donc un rôle important par l'expression de protéines d'ancrage et par sa modification en décidue lors de l'implantation. La placentation débute après l'enfouissement total de l'embryon au sein de l'endomètre et le placenta se forme suite à l'apparition de villosités dans le trophoblaste (Gellersen al., 2007).

2-5 -Molécules et cellules importantes dans le dialogue materno-foetal

À côté des molécules d'adhésion qui représentent la « partie visible » du dialogue existant entre le blastocyste et l'épithélium endométrial, toute une série de molécules et de cellules sont impliquées dans la régulation de l'implantation.

2-5-1- L'hCG

L'hormone chorionique gonadotrope (hCG) est une hormone glycoprotéique de 36 à 40 kDa. Elle est composée de deux sous-unités (á et â) liées par une liaison non covalente. La sous-unité á, composée de 92 acides aminés, est codée dans le chromosome 6 et est commune aux différentes hormones de la famille des glycoprotéines dont font partie la LH, la FSH et l'hormone thyréostimuline (TSH) (Policastro et al., 1986).

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La sous-unité f3, qui est différente pour chaque hormone, est codée sur différents gènes situés sur le chromosome 19 (LH, hCG et TSH) ou sur le chromosome 11 (FSH). La sous-unité f3 de l'hCG est codée dans 6 gènes différents mais très similaires situés dans un groupe de gènes sur le chromosome 19. L'hCG a une structure similaire à la LH, mais contrairement à elle, l'hCG existe sous plusieurs formes, connues comme l'hCG classique, l'hCG hyper-glycosylée et l'unité f3 libre de l'hCG hyper-glycosylée (Cole, 2009 ; Fournier et al., 2015). Chacune de ces 4 molécules ont des fonctions physiologiques différentes.

Cette hormone a été appelée hormone chorionique gonadotrope. La stimulation de la production de la progestérone par le corps jaune a été longtemps la seule fonction connue de l'hCG. La glycosylation des hormones aurait une influence directe sur leur bioactivité. L'hCG hyper-glycosylée interviendrait davantage dans l'implantation que l'hCG classique (Cole, 2009). Trois équipes indépendantes ont montré que le blastocyste pré-implantatoire sécrète l'hCG dans l'espace utérin qui se lie à son récepteur hCGR sur la surface déciduale. En réponse, la décidue se prépare pour l'implantation (Srisuparp et al., 2001 ; D'Hauterive et al., 2004). L'hCG augmente la sécrétion du Leukemia Inhibitory Factor (LIF) et diminue celle de l'interleukine 6 par les cellules endométriales, molécules connues pour leur influence sur l'implantation embryonnaire (D'Hauterive et al., 2004). Il favorise la différenciation des cytotrophoblastes en synciotiotrophoblastes. Il peut réguler la synthèse des prostaglandines et la formation de l'Adénosine monophosphate cyclique (AMPc). Une étude publiée en 2013 a montré que les différentes formes d'hCG stimuleraient l'invasion trophoblastique indépendamment du récepteur classique à l'hCG, le LHCGR (Lee et al., 2013). L'hCG a également des actions angiogéniques et immunologiques, il augmente la formation des vaisseaux sanguins et la migration et la maturation des péricytes (Berndt et al., 2006 ; Bourdiec et al., 2013). L'hCG assure au placenta un approvisionnement en sang maternel adéquat durant son invasion de l'endomètre fonctionnel avec une nutrition optimale du foetus. L'hCG régule la prolifération des cellules Natural killer utérines (uNK) (Bansal et al., 2012). Ces cellules n'expriment pas le LHCGR et l'hCG agirait directement sur ces cellules par un autre récepteur, le mannose récepteur qui est exprimé par les uNK (Kane et al., 2009). L'hCG agit également sur d'autres cellules immunitaires, les monocytes, en promouvant leur fonction et leur sécrétion d'IL-8 (Kosaka et al., 2002), et aussi induisant les fonctions des macrophages (Wan et al., 2007). En stimulant la fonction des macrophages, l'hCG assainit l'endomètre en l'épurant des cellules apoptotiques et en le défendant d'éventuelles infections, deux mécanismes importants pour le maintien de la grossesse. Par ailleurs, l'hCG influence la différentiation et la fonction des cellules dendritiques, diminuant leur capacité à stimuler la prolifération des LT (Wan et al., 2008).

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Au niveau des cellules nucléaires du sang périphériques, l'hCG induit la sécrétion de différentes cytokines, dont l'IL-1â et LIF et pourrait stimuler l'invasion trophoblastique (Yu et al., 2015).

Finalement, l'hCG a différents effets sur les lymphocytes T (Cluster de Différenciation CD4+), avec un impact positif sur la prolifération des cellules T CD4+25+ et en attirant ces cellules vers l'endomètre en début de grossesse (Khil et al., 2007 ; Schumacher et al., 2009). Des études récentes montrent par ailleurs qu'une trop grande quantité d'hCG, telle qu'utilisée en Procréation Médicalement Assistée (PMA) pour déclencher l'ovulation, serait délétère pour la réceptivité utérine, tout est une question d'équilibre (Evans et Salamonsen, 2013).

2-5-2- La LH

La LH est sécrétée par la glande pituitaire et est une glycoprotéine hétérodimérique avec une masse moléculaire de 28kDa comprenant deux sous-unités. Cette hormone a un rôle essentiel dans la reproduction en induisant la maturation ovocytaire et en provoquant l'ovulation durant le cycle menstruel. La LH contrôle la production de la progestérone par le corps jaune et si une grossesse survient chez l'être humain, l'hCG sécrétée par les cellules embryonnaires supplante le rôle de la LH pour la régulation de la production de la progestérone. Pour l'établissement de la grossesse, la LH favorise la décidualisation de l'endomètre. Des scientifiques ont exploré les propriétés d'adhésion des lymphocytes dans l'utérus murin et ont révélé que cette adhésion était plus grande en présence de LH. Ces auteurs ont suggéré que la LH pourrait activer les molécules d'adhésion à la surface des précurseurs des cellules uNK, ainsi qu'augmenter leur recrutement dans l'utérus. Ils suggèrent encore que la LH pourrait avoir un impact sur le recrutement des cellules uNK (Van Den Heuvel et al., 2005).

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3- Développement embryonnaire et grossesse 3-1- La période embryonnaire

La période embryonnaire va de la quatrième à la huitième semaine du développement, et au cours de laquelle la gastrulation à lieu (Le Moigne et Foucrier, 2009).

3-1-1- La gastrulation

C'est la période de développement au cours de laquelle se mettent en place les 3 feuillets primitifs de l'embryon, à l'origine de tous les organes/tissus du nouveau-né et de l'adulte :

- Ectoderme ou ectoblaste, feuillet superficiel.

- Mésoderme ou mésoblaste, feuillet moyen.

- Endoderme ou endoblaste, feuillet inférieur (Bourenane, 2011).

Le domaine latéral forme l'ectoderme de surface, précurseur de l'épiderme. L'endoderme qui donne naissance à l'épithélium de surface des muqueuses digestive et respiratoire ainsi qu'à l'épithélium glandulaire de nombreuses glandes annexées à ces tractus. Les cellules endothéliales des futurs vaisseaux sanguins de l'embryon dérivent du mésoderme (Catala, 2002).

3-1-2- La neurulation

La neurulation primaire est la transformation de l'ectoderme de la région sus-chordale en un tube neural primitif. La neurulation secondaire, par opposition à la neurulation primaire, concerne le développement de la partie terminale de la moelle épinière. Rappelons que la ligne primitive produit avant de disparaître (29ème jour), une structure mésoblastique qui persiste et qui s'appelle l'éminence caudale. Cette dernière sera à l'origine de la partie caudale du tube neural et de l'élongation de la moelle épinière (Lowery et Sive, 2004).

3-1-3- La métamérisation

Le mésoblaste para-axial est constitué de cellules épiblastiques s'invaginant depuis le noeud primitif et depuis la partie crâniale de la ligne primitive. Il forme une paire de condensations cylindriques au contact immédiat de la notochorde. Dès le début de la troisième semaine, ces cylindres vont être segmentés en somitomères (métamérisation) cranio-caudale. Les somitomères sont constitués d'amas de cellules mésoblastiques prismatiques pluristratifiés enroulés autour d'un axe central. C'est à partir de ces somites que vont développer les 33 vertèbres de la colonne vertébrale et les muscles squelettiques correspondants (Lopez-Sanchez et al., 2001).

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3-2- Évolution définitive des feuillets

Pendant le 2ème mois a lieu l'organogénèse : les principaux organes se forment entre la 4ème et 8ème semaine. L'embryon de 8 semaines a des membres, une face, des oreilles, un nez, des yeux, son coeur est cloisonné, sa gonade différenciée. Son cerveau, son estomac, son foie, ses reins sont fonctionnels. Durant la période foetale, les organes qui se sont développés durant la période embryonnaire (organogénèse) croissent et se différencient. On estime que 90% des 4500 structures répertoriées chez l'adulte apparaissent à l'état d'ébauches déjà durant la période embryonnaire. Dès la 8ème semaine, le foetus prend des allures typiquement humaines, bien qu'à la fin du premier trimestre la tête soit toujours proportionnellement plus grande. Les yeux en revanche se déplacent vers l'avant, et tant le pavillon de l'oreille que la crête du nez sont déjà formés. Il en va de même pour les paupières qui sont nettement reconnaissables. Sur le corps se développe le lanugo qui est un duvet très fin qui couvre tout le corps du foetus, à l'exception des paumes des mains et des plantes des pieds, et qui apparait dès la 18ème semaine de grossesse. Ce duvet sera remplacé peu avant l'accouchement par des cheveux terminaux (Moore et al., 2018).

4- Modifications physiologiques durant la grossesse

La grossesse se caractérise par d'importants ajustements physiologiques de tous les systèmes. Ces nouvelles caractéristiques ne sont pas toujours à l'avantage de la mère : elles permettent vraisemblablement une efficacité maximale de la croissance et du métabolisme du foetus. Le foetus, par l'intermédiaire des hormones placentaires déversées dans la circulation maternelle, manipule les mécanismes homéostatiques de la mère. Un grand nombre de modifications apparaissent tôt au cours de la grossesse, anticipant les demandes métaboliques du foetus. Il est utile de savoir quels paramètres biologiques sont perturbés pour ne pas faire d'examens inutiles car ininterprétables et pour ne pas les considérer comme pathologiques et traiter à tort (Le Moigne et Foucrier, 2009).

4-1- Modification cardiovasculaires

Au cours du 1ier et 2ème trimestre, les changements hémodynamiques apparaissent dès la 6ème semaine d'aménorrhée et sont caractérisés par une augmentation du débit cardiaque associé à une baisse des Résistances Vasculaires Systémiques (RVS) et pulmonaires et une augmentation du volume d'éjection systolique. Cette baisse d'RVS par la sécrétion de la progestérone et d'autres facteurs qui est à l'origine de cet état d'hyperdynamisme circulatoire. La baisse de la pression artérielle stimule la sécrétion de la vasopressine, l'hyper-débit est dû à l'augmentation de la volémie qui est l'expression de la rétention hydrosodée par les oestrogènes et de l'augmentation de la sécrétion d'aldostérone puis à la tachycardie (Cabrol et al., 2003, Thoulon, 2005).

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En parallèle, la progestérone permet l'adaptation vasculaire à cette hypervolémie par un relâchement des parois veineuses et des sphincters capillaires en augmentant la capacité du lit vasculaire (Cabrol et al., 2003, Thoulon, 2005).

Le coeur subit des modifications structurales semblables au coeur d'un sportif de haut niveau. La taille des quatre cavités et surtout de l'oreillette droite augmente dès la fin du premier trimestre. Une hypertrophie ventriculaire gauche est également remarqué, et une augmentation du diamètre des anneaux valvulaires pulmonaires et tricuspides (Campos, 1993 ; Le Moigne et Foucrier, 2009).

4-2- Modifications endocrines 4-2-1- La thyroïde

La TSH plasmatique diminue quand il y a le pic d'hCG placentaire puis augmente en restant dans la normale. Il existe une possibilité de goitre maternel par carence iodée car : il y a une augmentation de la filtration glomérulaire et de l'excrétion rénale d'iode, ou il y a des pertes d'iode au niveau du complexe foeto-placentaire en fin de grossesse. L'hypertrophie de la glande est un mécanisme compensateur, afin de maintenir la production hormonale. L'hyper-oestrogènie entraîne un taux plus que doublé de la protéine de transport, la Thyroxin Binding Protein (TBG) pendant la grossesse. L'augmentation de la TBG accroît la liaison de thyroxine (T4) et de triiodothyronine (T3). La production hormonale thyroïdienne augmente d'au moins 40% dès le 1er mois, et atteint le seuil de 75% au 3ème mois. Il en résulte une augmentation de la concentration de la T4 totale et à un moindre degré de la T3 totale proche de 1,5 fois la normale, apparaissant dès le début de grossesse (Letombe, 2012).

4-2-2 La parathyroïde

Les modifications maternelles du métabolisme phosphocalcique au cours de la grossesse sont importantes. Elles sont principalement liées à la minéralisation rapide du squelette foetal, une augmentation de l'absorption intestinale du calcium, une diminution de l'excrétion rénale de calcium, une augmentation des stocks calciques du squelette, une phosphoremie diminue jusqu'à la 30ème semaine d'aménorrhée, puis augmente jusqu'au terme de la grossesse (Cabrol et al., 2003 ; Thoulon, 2005).

4-2-3- L'hypophyse

Le taux de prolactine sérique monte progressivement pour être 5 à 10 fois plus élevé en fin de grossesse. Plus sa production augmente, plus celles de FSH et de LH (qui sont bas pendant la grossesse) diminuent. L'ocytocine augmente en cours de grossesse, pour atteindre 165 ìg/ml.

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Son rôle dans le déclenchement physiologique du travail est discuté, sa sécrétion pendant le travail est périodique et brève, et la fréquence des pics augmente au fur et à mesure que le travail avance. L'ocytocine aurait un rôle régulateur, mais non inducteur dans le déclenchement du travail (Cabrol et al., 2003 ; Thoulon, 2005).

La progestérone collabore avec les oestrogènes pour préparer l'endomètre à la nidation de l'ovule fécondé. Un taux élevé de progestérone inhibe également la libération de l'hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires (GNRH) et de prolactine. Lorsque la concentration de progestérone baisse durant la grossesse ou que son action est inhibée, une menstruation est déclenchée et l'embryon est évacué en même temps que le revêtement (Diaby, 2006).

4-2-4- La glande surrénale

L'unité foeto-placentaire sécrète une grande quantité d'hormones stéroïdes ou peptidiques qui modifient le fonctionnement des glandes endocriniennes maternelles. Les stéroïdes sexuels augmentent oestrogènes, progestérones et androgènes (élevés au 1ier trimestre et atteint leur maximum vers la 32ème SA), ainsi que l'hormone placentaire lactogène. La synthèse des stéroïdes s'effectue à la fois dans les surrénales maternelles et foetales. Le placenta ne synthétise pas les stéroïdes, mais il joue un rôle important dans leur métabolisme. Les catécholamines sont peu modifiées sauf l'adrénaline et la noradrénaline qui diminuent. Le cortisol plasmatique double dès le début de la grossesse. Mais, la fraction libre restant stable, il n'y a pas de trouble clinique. L'aldostérone (minéralo-corticoïdes) augmente également car le système rénine-angiotensine-aldostérone est stimulé pendant la grossesse. Ce système est régulé par la volémie, la natrémie et la kaliémie. La sécrétion est fortement stimulée lors de l'accouchement (Cabrol et al., 2003 ; Thoulon, 2005).

4-3- Modification du métabolisme glucidique

Au cours du 1ier et 2ème trimestre, les métabolismes sont modifiés pour faire face aux exigences du développement de l'oeuf et de ses annexes. Le métabolisme de base augmente de 15 à 30% surtout, la prise de poids est continue. Elle répond au développement de l'oeuf, de l'utérus, des glandes mammaires, de l'eau et des électrolytes et des réserves stockées. Le métabolisme glucidique est le plus précocement et le plus profondément modifié pour répondre aux besoins énergétiques. La prédominance habituelle de l'hyper-insulinémie, en début de grossesse sera responsable des hypoglycémies avec baisse de la tension artérielle, le plus souvent associées à des fringales et surtout à une acétonémie apparaissant au lever et se traduisant par les nausées et les vomissements gravidiques classiques (Catov et al., 2007).

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Au cours du 3ème trimestre, la croissance du foetus devient exponentielle et ses besoins nutritionnels augmentent. Pour s'adapter à cette nouvelle configuration, le métabolisme maternel est réorienté vers un catabolisme : la progestérone, le cortisol, les prolactines et la leptine induisent une diminution de la réponse à l'insuline ayant pour conséquence une augmentation des concentrations plasmatiques en acides gras libres et en glycérol. Il en résulte une plus grande concentration de nutriments maternels disponibles pouvant traverser le placenta et atteindre le foetus (Catov et al., 2007).

4-4- Modifications hématologiques

Dès le 3ème mois de grossesse, la masse sanguine augmente de façon précoce et progressive au cours de la grossesse, avec une augmentation importante du volume plasmatique (+ 40%) et dans une moindre mesure du volume globulaire (+ 15%). L'augmentation du volume plasmatique n'est pas compensée par l'augmentation de l'érythropoïèse, ce qui aboutit à une fausse anémie par hémodilution. L'augmentation de l'érythropoïèse nécessite un apport accru en fer et en acide folique. La ferritine diminue au cours de grossesse (-35% au 3ème trimestre) du fait de la consommation foeto-placentaire. L'hyperleucocytose, essentiellement à polynucléaires neutrophiles, débute dès le 1ier trimestre et s'accentue en fin de grossesse. Le taux des ions sodium (Na+), potassium (K+) et chlore (Cl-) restent à peu près stables, le calcium (Ca++) et le magnésium (Mg++) diminuent à cause du transfert de ces électrolytes de la mère au foetus et de l'augmentation de leur filtration glomérulaire. La diminution du Ca++ entraine la stimulation de la parathormone (Cabrol et al., 2003, Thoulon, 2005).

4-5- Modifications des fonctions rénales

La grossesse normale entraîne des modifications physiologiques de la fonction rénale et des compartiments liquidiens de l'organisme.

- Augmentation du débit de filtration glomérulaire (DFG) de 30 à 50% au cours
de la grossesse : elle débute dès la 6ème SA, est maximale aux 2ème et 3ème trimestres puis diminue à partir de la 36ème SA.

- L'augmentation du DFG s'explique par la forte augmentation du flux plasmatique rénal,
auquel s'associent une diminution précoce de l'albumine plasmatique et la diminution de la pression oncotique (Le Moigne et Foucrier, 2009).

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- Augmentation de l'excrétion urinaire de sucres réducteurs, de nombreux acides aminés

et de protéines, l'excrétion d'autres sucres (lactose, fructose, xylose) est également augmentée pendant la grossesse et une lactosurie est présente chez 50% des femmes enceintes à terme. Il existe une protéinurie physiologique, pouvant aller jusqu'à 300 mg/ 24 heures.

- L'augmentation de l'eau totale est de l'ordre de 7,5 kg. La majeure partie de cette eau
est intracellulaire, mais il existe une expansion associée des volumes extracellulaires. Le volume plasmatique augmente de 50% pendant la grossesse. Cette hypervolémie est perçue comme normale par les récepteurs volémiques d'où l'inutilité des diurétiques ou de la restriction sodée.

- L'osmolarité plasmatique diminue du fait de la baisse de l'urée sanguine, une baisse modérée
de la natrémie et une diminution du seuil osmotique de la soif (Letombe et al., 2012; Pierre et al., 2009).

4-6- Modifications respiratoires 4-6-1- Modifications anatomiques

Certaines modifications surviennent dès la 10ième à la 12ième SA, c'est-à-dire bien avant que l'utérus refoule le diaphragme : les cotes inferieures s'évasent, l'angle xiphoïdien passe de 70° à 105°, le niveau du diaphragme s'élève de 4 cm, le diamètre antéro-postérieur du thorax augmente de 2 à 3 cm. Il existe aussi une hypotonie des muscles abdominaux ainsi qu'une congestion de l'arbre respiratoire (Cabrol et al., 2003, Thoulon, 2005).

4-6-2- Modifications fonctionnelles

Il y a une augmentation du débit sanguin pulmonaire et une augmentation de la captation de l'oxygène par minute. L'augmentation des besoins en oxygène (pour le foetus et le placenta) est de 20 à 30%. L'élévation du taux de progestérone entraine une augmentation du débit respiratoire avec une augmentation de la ventilation alvéolaire d'où une hyperventilation qui entraine une hypocapnie et une légère alcalose respiratoire. L'augmentation de l'élimination du dioxyde de carbone (CO2) entraine une baisse de la pression CO2 artériel. Il y a donc une polypnée et une hypocapnie maternelles avec une tendance à l'alcalose respiratoire. Le potentiel d'H+ (pH) reste cependant normal car il y a une augmentation de l'excrétion rénale des bicarbonates et une diminution de leur réabsorption. L'ensemble de ces phénomènes expliquent que de nombreuses femmes enceintes se sentent facilement essoufflées (Cabrol et al., 2003, Thoulon, 2005).

Chapitre I Physiologie et physiopathologie de la reproduction chez l'humain

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4-7- Modifications hépatiques

Au niveau de la vésicule biliaire, la progestérone entraine une hypotonie et donc une stase vésiculaire. La vidange est donc ralentie. En parallèle, sous l'effet des oestrogènes, la concentration en cholestérol est accrue, augmentant l'indice de lithogénicité de la bile. Ces 2 phénomènes font que le risque de lithiase biliaire est augmenté. Au 3ème trimestre, le foie n'est pas palpable car il est refoulé par l'utérus en haut, à droite et en arrière. Son volume est inchangé. Les conséquences biologiques de ces modifications, surtout en fin de grossesse, sont multiples : une augmentation des phosphatases alcalines de 2 à 15 fois la normale, une augmentation des lipides et du fibrinogène ainsi qu'une diminution de l'albumine, de la bilirubine et de la créatinine (Le Moigne et Foucrier, 2009).

4-8- Modifications de la coagulation

La grossesse normale s'accompagne d'un état d'hypercoagulabilité avec une augmentation du fibrinogène et des facteurs VII, VIII et X, une diminution de l'activité fibrinolytique de la protéine S. Une interprétation finaliste serait de considérer la protection contre l'hémorragie du post-partum, au prix du risque de thrombose.

- Facteurs de coagulation : les taux d'un grand nombre d'entre eux (comme le fibrinogène
et le facteur VII coagulant) augmentent considérablement dès le 3ème mois de grossesse pour atteindre un taux maximum au 3ème trimestre, mais les taux des facteurs XIII et XI diminuent jusqu'à 50%.

- Activité fibrinolytique : elle diminue progressivement au cours de la grossesse,
puis se normalise rapidement après l'accouchement.

- La protéine S : sous sa forme totale et libre diminue fortement en cours de grossesse
(Letombe et al., 2012; Pierre et al., 2009).

4-9-Modifications immunitaires

Pour l'immunité humoral, la synthèse des immunoglobulines (Ig) commence tôt complétant ainsi par le passage transplacentaire de ces Ig l'arsenal immunologique du foetus. Par rapport à la réponse immunitaire de type cellulaire, elle peut apparaitre dès la 20ème semaine d'aménorrhée. En effet, la grossesse constitue un paradoxe immunologique qui a permet la formulation de plusieurs hypothèses afin de comprendre ce mécanisme de tolérance de la greffe que constitue le foetus. Parmi lesquelles, une hypothèse qui s'appuie sur le fait que le foetus ne développe pas une maturité antigénique ne peut pas être retenue car les antigènes apparaissent précocement à la surface des cellules pendant la vie embryonnaire (Cabrol et al., 2003 ; Bruyére et al., 2014).

Chapitre I Physiologie et physiopathologie de la reproduction chez l'humain

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Une autre hypothèse qui consolide l'absence de la réponse maternelle ou l'inaptitude de la mère à se sensibiliser vis-à-vis des allo antigènes d'origine foetale ne peut également être retenue comme hypothèse car cette sensibilisation existe pour les antigènes du système ABO et du système HLA (Human Leukocyte Antigen) (Poncelet et Sifer, 2011 ; Bruyére et al., 2014).

5- Physiopathologie de la reproduction chez l'être humain

L'infertilité est depuis plusieurs années, considérée par l'organisation mondial de la santé comme une pathologie à part entière, dans le cadre du concept de santé reproductive qui reconnait à chaque être humain le droit à la procréation (Poncelet et al., 2011). L'OMS fournit diverses définitions pour l'infertilité. Certaines définitions ont un caractère clinique, alors que d'autres ont été élaborées dans des contextes démographiques ou épidémiologiques (OMS, 2013).

Deux exemples d'une définition clinique de l'infertilité de l'OMS :

- « Infertility is a disease of the reproductive system defined by the failure to achieve

a clinical pregnancy after 12 months or more of regular unprotected sexual intercourse ».

- « Infertility is the inability of a sexually active, non-contracepting couple to achieve
pregnancy in one year »
(OMC, 2013c).

Les définitions démographiques ont pour but de refléter les changements démographiques au sein d'une population ainsi que les différences de fécondité entre diverses populations (Gurunath et al., 2011 ; Poncelet et Sifer, 2011).

- « An inability to become pregnant with a live birth, within five years of exposure based upon

a consistent union status, lack of contraceptive use, non-lactating and maintaining a desire for a child » (OMC, 2013c).

Les définitions épidémiologiques se rapportent la prévalence de l'infertilité médicale au sein d'une population donnée. Ainsi, la mesure privilégiée est l'absence de grossesse. L'exposition au risque de devenir enceinte doit être prise en compte, bien qu'il soit défini de façon variable d'une étude à l'autre (Gurunath et al., 2011).

- « Women of reproductive age (15-49 years) at risk of becoming pregnant (not pregnant, sexually active, not using contraception and not lactating) who report trying unsuccessfully for a pregnancy for two years or more » (OMC, 2013c).

Chapitre I Physiologie et physiopathologie de la reproduction chez l'humain

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Malgré les variations de termes et de définitions de l'infertilité, certains auteurs ont signifié que l'infertilité correspondait davantage à la définition de l'incapacité plutôt qu'à celle de la maladie. Puisqu'une personne présentant une infertilité idiopathique peut-être en parfaite santé physique et émotionnelle malgré l'échec de la reproduction. En effet, l'infertilité peut être causée par une maladie telle que l'endométriose ou le cancer des testicules. Elle peut également être causé par une dépression et des troubles d'anxiété. Les défauts de différenciations des spermatozoïdes, d'implantation embryonnaire, ou également un dysfonctionnement utérin, les maladies endocrines, les anomalies du cycle menstruel et tubaires, chez la femme, l'hypogonadisme hypo-gonadotrophique, l'insuffisance testiculaire, et anomalies du spermogramme chez l'homme sont parmi les causes de l'infertilité du couple (Poncelet et Sifer, 2011 ; Khetarpal et Singh, 2012). L'infertilité peut être causée par des anomalies de la fécondation, elles surviennent si :

- L'un des gamètes est porteur d'une anomalie chromosomique, celle-ci sera transmise

au zygote.

- Deux spermatozoïdes entrent ensemble dans l'ovocyte : ce phénomène rare est à l'origine
d'un oeuf à 66 chromosomes + 3 chromosomes sexuels (triploïdie).

- Une erreur de réplication de l'ADN des pronucléus qui survient au moment de l'amphimixie.

- La répartition des chromosomes au moment de la formation des deux blastomères est inégale.

C'est l'étiologie retrouvée qui oriente la prise en charge. Celle-ci peut être l'abstention thérapeutique, lorsque l'infertilité est récente, la femme jeune et l'exploration initiale négative. À l'autre extrême en cas de pathologies sévères intéressant l'un ou les deux membres du couple, on fait appel aux techniques les plus sophistiquées d'aide médicale à la procréation (Poncelet et Sifer, 2011 ; Bry-Gauillard et al., 2014).

1- Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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Définition

L'Avortement spontané selon l'OMS correspond à l'expulsion hors de l'organisme maternel d'un foetus de moins de 500 grammes ou de 22 SA (Garcia-Enguidanos et al., 2002). Les avortements spontanés apparaissent souvent de façon aléatoires, et nombreuses sont les femmes qui vont en être touchées au cours de leur vie. Plusieurs femmes recevront un diagnostic d'avortement spontané suite à des saignements vaginaux et/ou des crampes utérines. D'autres n'auront eu aucun signe avant-coureur de cet arrêt de grossesse que sont les saignements ou les crampes, par exemple, et l'apprendront seulement au moment de leur première échographie (Morin et Vanden Hof, 2006). L'avortement spontané peut être classé, selon ses caractéristiques cliniques, en différentes catégories (Poncelet et Sifer, 2011).

2- Symptomatologie

Plusieurs signes peuvent être rencontrés en fonction du stade évolutif. 2-1- La menace d'avortement

Métrorragie et coliques discrète : ces métrorragies sont faites de sang rouge ou noir mais toujours sans caillots. Un fait important est à signaler ici : l'absence de contractions utérines et de fièvre. C'est une phase importante car un traitement entrepris précocement peut sauver l'oeuf s'il est vivant et génétiquement viable. À l'examen, le col est long et fermé, l'utérus est d'une taille en rapport avec le terme de la grossesse (Daftary, 2005).

2-2- L'avortement proprement dit

La patiente consulte pour des métrorragies persistantes, d'un sang rouge avec des caillots et/ou des douleurs à type de contractions utérines rythmées. À l'examen on retrouve :

- Au speculum de saignements souvent abondants gênant l'examinateur, le produit est expulsé
au niveau du vagin.

- Au toucher vaginal on retrouve un col modifié, ramolli, raccourci, surtout ouvert
aux 2 orifices. L'utérus est d'un volume inférieur ou supérieur au terme de la grossesse (Sennaoui et al., 2015).

3- Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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Classification générale 3-1- L'avortement thérapeutique

C'est l'interruption de la grossesse décidée par le médecin pour une raison médicale. Elle peut être eugénique lorsqu'il existe une malformation foetale reconnue ou suspectée. Elle peut se faire pour sauvetage maternel si l'évolution de la grossesse engendrera un risque majeur pour la santé ou la vie de la mère (Merger et al., 2003).

3-2- L'avortement non médicalisé

Selon L'OMS, il est défini comme : « une intervention visant à interrompre une grossesse non désirée soit par des personnes qui ne possèdent pas les compétences nécessaires soit dans un contexte où les conditions sanitaires minimales n'existes pas ou les deux à la fois » (OMS, 2019).

3-3- L'avortement à répétition

Selon l'OMS, c'est la survenue de deux FCS ou plus ; consécutifs chez la même patiente, également appelé : maladie abortive (Lansac et al., 2002).

3-4- L'avortement inévitable

Le processus d'avortement est réellement déclenché, la grossesse sera expulsée tôt ou tard ; aucun retour en arrière n'est possible car la contractilité utérine est intense et ne s'arrête qu'à l'expulsion du produit de la grossesse en dehors de la cavité utérine (Daftary, 2005).

3-5- L'avortement manqué

C'est une rétention des produits de conception bien après la mort reconnue du foetus avec une période d'une durée de 2 mois de façon conventionnelle dans la définition (Daftary, 2005).

4- Classification des fausses couches spontané à répétition en fonction de 4-1- La chronologie

4-1-1- Fausses couches spontanées ultra-précoces ou infracliniques

Appelées aussi avortements menstruels spontanés, ou nidations précocement abortives, survenant avant l'implantation du blastocyste ou juste après l'implantation, ce type d'avortement désigne tout avortement spontanée survenant dans les 7ème au 10ème jour suivant l'implantation ovulaire, ce qui correspond aux 8ème au 17ème jour post-conceptionnel (Abbara, 2015).

Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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4 1-2- Fausses couches spontanées précoces

Qui survient à partir du 18ème jour post-conceptionnel jusqu'à la fin du premier trimestre, après que l'oeuf ait été bien implanté dans l'endomètre utérin. La grossesse est cliniquement décelable (Andriatsiaronimanga, 2005 ; Diacoumba, 2008).

4-1-3- Fausses couches spontanées tardives

L'avortement spontané du 2ème trimestre de la grossesse : c'est l'expulsion spontané au 2ème trimestre de la grossesse d'un foetus avant la 22ème SA ou moins de 500 grammes.

4-2- Le stade évolutif

4-2-1- La FCS retardée ou grossesse arrêtée : il s'agit d'une découverte fortuite d'une grossesse arrêtée au premier trimestre avec un embryon sans activité cardiaque ou un oeuf clair.

4-2-2- La mort foetal in utéro : avortement après 25 SA.

4-2-3- La FCS menaçante ou menace de FC : présence de métrorragie au premier trimestre, absence d'expulsion en cours avec un col fermé.

4-2-4- La FCS en cours ou inévitable : associant douleur et métrorragie d'intensité croissante, col ouvert et expulsion en cours.

4-2-5-La FCS complète : définie par une disparition des douleurs, une diminution des saignements, col fermé après une expulsion associée à une vacuité utérine à l'échographie.

4-2-6-La FCS incomplète ou rétention trophoblastique : avec rétention du produit de conception qui se manifeste par la persistance de douleur et/ou de saignements secondaires à la persistance d'une rétention retrouvée à l'échographie (Agostini et al., 2006 ; Beucher, 2010).

5- Épidémiologie

L'incidence des ASR correspond au nombre des femmes qui souffrent chaque année des pertes consécutives de grossesse dans une population à risque. Les ASR sont fréquentes, concernant 15 à 20% des grossesses et au moins une femme sur quatre durant sa période d'activité génitale présente une FCS (Beucher et al., 2014). En outre, ces chiffres peuvent être incertain, car certaines femmes ne se rendent pas compte qu'elles ont avorté et d'autres ne consultent pas un médecin même en cas de doute (Sennaoui et al., 2015).

Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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Pour chaque année, de 2003 à 2012, une étude a été menée sur l'incidence des ASR et qui a été calculée dans deux différentes populations à risque : la première population a inclus les femmes âgées entre 18 et 42 ans, la deuxième population a inclus les femmes enregistrées comme enceintes (qui ont accouché ou ayant vécu des fausses couches). L'incidence des ASR dans les deux populations a augmenté de 74% et 58%, respectivement, au cours de la période d'étude (Rasmark et al., 2017).

6- Étiologie et hypothèse physiopathologique 6-1- Étiologie mécanique

Des anomalies utérines seraient trouvées chez jusqu'à 19% des femmes atteintes d'ASR et peuvent être classées comme acquises ou congénitales. Les anomalies acquises comprennent les myomes et les polypes de l'endomètre, les synéchies tandis que l'utérus cloisonné est classé parmi les anomalies congénitales (Jaslow et al., 2010).

6-1-1- Anomalie utérine

6-1-1-1- L'utérus cloisonné

Les avortements sont fréquents dans les utérus cloisonnés. Plusieurs mécanismes sont proposés pour expliquer les avortements :

- Un défaut de croissance de la taille de l'utérus qui ne peut s'adapter à la grossesse,

théorie contredite par les résultats des métroplasties abdominales qui réduisent cette taille.

- Une incompétence cervicale, parfois secondaire aux manoeuvres instrumentales

lors des avortements précédents mais qui n'explique pas les avortements du premier trimestre.

- Une vascularisation et une innervation anormale de la cloison à l'origine
d'une implantation défectueuse. Le site d'implantation est fondamental, les grossesses qui s'implantent ailleurs que sur la cloison se déroulent normalement.

Les métroplasties abdominales bien qu'efficaces avaient l'inconvénient théorique d'imposer une césarienne, mais avaient surtout la réputation d'entraîner environ 30% de stérilités post-opératoires. La métroplastie contrôlée par hystéroscopie ou échographie est efficace et sans danger. L'indication de la résection hystéroscopique de la cloison sera posée dans un contexte d'avortements à répétition, d'avortement au second trimestre ou d'accouchement prématuré. Dans une série de 165 patientes dont 67 ont eu deux fausses couches et 98 au moins trois, on retrouve à l'hystéroscopie 28% d'anomalies utérines dans le premier cas et 32% dans le second (Weiss et al., 2005).

Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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6-1-1-2-Les synéchies

Les synéchies correspondent à l'accolement par adhérences des faces internes de l'utérus. Elles peuvent être totales lorsqu'elles intéressent l'ensemble de la cavité et l'isthme utérin ou être partielles lorsqu'elles concernent une portion variable de la cavité utérine et/ou de l'isthme (Bricou et al., 2009). Les synéchies sont présentes chez environ 1,5% des patientes ayant un antécédent opératoire et chez 7 à 21,8% des patientes présentant des ASR (Ventolini et al., 2004).

6-1-1-3-Les Myomes

Le léiomyome, plus communément appelé myome ou encore fibrome utérin, est une tumeur bénigne de l'utérus humain, qui se développe aux dépens des cellules musculaires lisses (Bazot et al., 2004). La transformation du myomètre en fibrome implique des anomalies génétiques, l'influence de facteurs de croissance locaux, et surtout l'action des oestrogènes et de la progestérone. Les fibromes augmentent le risque de fausse couche spontanée en début de grossesse (Bukulmez et Doody, 2006). Cela concerne uniquement les femmes ayant de volumineux fibromes sous-muqueux qui déforment la cavité utérine, ou lors de la croissance rapide du volume du myome (Ouyang et al., 2006).

6-1-1-4- Autres malformations utérines

- L'hypotrophie utérine : c'est un utérus d'aspect rigoureusement normal mais

dont les dimensions sont réduites.

- L'hypoplasie utérine : c'est un utérus dont les dimensions sont réduites et dont
la morphologie et les proportions sont également modifiées. Les dimensions et les proportions sont celles d'un utérus infantile ou foetal.

- De béance cervico- isthmique : c'est la rupture du verrou de la chambre utérine
(Diaby, 2006).

6-1-1-5- Endométriose

L'endométriose se définit par la présence, en situation ectopique, de foyers composés d'un tissu possédant les mêmes caractéristiques morphologiques et fonctionnelles que l'endomètre (cellules glandulaires et stroma). Ces foyers, en se comportant comme l'endomètre, sous l'influence des hormones, entraînent des lésions et des signes spécifiques de la maladie (Daraï et al., 2007 ; Poncelet et Sifer, 2011).

Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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Sur de petites séries rétrospectives étudiant son effet dans le cadre de cycles d'AMP, elle serait associée à une diminution des taux d'implantation et à une augmentation des taux de FCS allant jusqu'à 50% contre 2,8% en l'absence d'adénomyose (Maheshwari et al., 2012).

6-1-2-Les anomalies des annexes

Plusieurs anomalies sont décrites dont la majorité concerne : l'artère ombilicale unique, les noeuds du cordon, les anomalies du placenta et l'hydramnios qui est un excès de liquide amniotique. Ces anomalies sont associées à des complications maternelles et foetales telles que : mort foetale ou le décollement placentaire prématuré (Keita, 2008).

6-2- Étiologie infectieuse

Toute infection aigue peut provoquer des avortements. Ces avortements peuvent récidiver si l'infection n'est pas découverte et guérie. L'infection arrive soit :

- Par voie hématogène (nécessité de traverser la barrière placentaire au niveau des villosités) :
les infections virales seraient plus fréquentes durant le 1ier trimestre car les virus et les protozoaires traversent la barrière placentaire plus facilement que les bactéries.

- Par voie ascendante : principalement les infections bactériennes trans-cervicales
après le premier trimestre (Poncelet et Sifer, 2011 ; Sennaoui et al., 2015).

6-3- Étiologie endocrinienne

6-3-1- Syndrome des ovaires polykystiques

Le Syndrome des Ovaires Poly-Kystiques (SOPK) est l'un des désordres hormonaux féminins les plus communs. Ses composantes sont multiples : reproductifs, métaboliques, néoplasiques et cardiovasculaires, ont un impact majeur sur la santé publique. L'excès d'androgène et la résistance à l'insuline, probablement d'origine génétique, sont à la base d'une grande partie de la symptomatologie clinique. La résistance à l'insuline du SOPK semble s'accompagner d'un plus grand risque d'intolérance au glucose, de diabète de type 2, d'anomalies lipidiques et peut entraîner le développement de maladies cardiovasculaires. En cas de traitement inducteur par citrate de clomifène dans le cadre de SOPK anovulant, est mis en évidence un taux de fausses couches d'environ 20%, potentiellement lié à l'effet anti-oestrogénique responsable d'une atrophie endométriale avec échec d'implantation. Toutefois, aucune étude ne met en évidence un risque accru d'ASR en cas de SOPK. Il est important en cas de SOPK avéré de rechercher un syndrome métabolique associé (Koivunen et al., 2008).

Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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6-3-2-Insuffisance lutéale

Après ovulation, le corps jaune sécrète de la progestérone qui provoque une transformation sécrétoire de l'endomètre pour que l'implantation puisse se produire

avant que le placenta ne prenne le relais de la production de progestérone. Cette dernière produite par le corps jaune fournit également le soutien nécessaire à une grossesse précoce. Un défaut dans la fonction du corps jaune est non seulement associé à l'échec d'implantation, mais aussi à une augmentation du risque de fausse couche (Haas et Ramsey, 2008).

Un dysfonctionnement en phase lutéale est associé à une production de progestérone insuffisante et à un risque d'échec d'implantation conséquent. Bien que certaines estimations suggèrent qu'il peut représenter un pourcentage important des cas d'infertilité, il reste peu de consensus sur ses critères diagnostiques, l'étiologie ou la réponse au traitement. La supplémentation par un progestatif est le traitement le plus couramment utilisé lorsque la dysfonction de la phase lutéale est suspectée. Cependant, comme la majorité des études cliniques ont mis l'accent sur le soutien de la phase lutéale en cours d'AMP (utilisation d'analogues de la GnRH ou aspiration des cellules de la granulosa au cours de la ponction ovocytaire), on en sait beaucoup moins sur le rôle des progestatifs chez les femmes présentant une infertilité due à un dysfonctionnement de la phase lutéale en dehors des cycles d'AMP. Malgré l'utilisation répandue de ces progestatifs et de nombreuses années d'expérience clinique, les essais contrôlés bien conduits sont actuellement limitées et il semblerait qu'en cas de FCS sporadique, les progestatifs soient inefficaces pour prévenir le risque de récidive de FCS (Haas et Ramsey, 2008).

6-3-3- Dysthyroïdies

L'hyperthyroïdie est associée à une augmentation du risque de fausse couche spontanée. De même que l'hypothyroïdie auto-immune (maladie d'Hashimoto) par le biais des anticorps antithyroïdiens anti-thyro-peroxydase (TPO) et anti thyroglobuline. Une augmentation du risque de fausse couche spontanée a également été mise en évidence en début de grossesse en cas de TSH supérieure à 2,5 mUI/L (De Groot et al., 2012).

6-3-4- Diabète

Le diabète équilibré n'est pas responsable de FCS, alors qu'un diabète déséquilibré est associé à une majoration du risque de FCS (Jovanovic et al., 2005).

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6-3-5- L'hyperprolactinémie

L'hyperprolactinémie est fréquemment associée à des anomalies ovulatoires. Elle pourrait également être imputée dans les ASR à une altération de la folliculogénèse ou de la maturation ovocytaire ou à une phase lutéale courte. Une étude portant sur un sous-groupe de patientes ayant fait des ASR dans un contexte d'hyperprolactinémie a montré l'efficacité de la bromocriptine sur le maintien des grossesses ultérieures. Le rôle délétère de l'hyperprolactinémie n'a pas été confirmé par une autre série, dont le faible effectif limite cependant l'intérêt (Gurbuz, 2003 ; Poncelet et Sifer, 2011).

6-4- Étiologie immunitaire

6-4-1- Syndrome des anti-phospholipides

Le Syndrome des Anti-Phospho-Lipides (SAPL) est une entité complexe associant des anomalies cliniques (de type thrombotique) et biologiques (la présence d'anticorps de type anti-phospholipides). Il se définit en obstétrique par l'association d'antécédents de pertes foetales et de la présence d'anticorps anti-phospholipides (anti-cardiolipides et/ou anticoagulant circulant). Les Anti-Phospho-lipides (APL) pourraient nuire à la formation du placenta. Les deux auto-anticorps les plus fréquents l'anti-coagulant-lupique et l'anticorps anti-cardiolipine (ACL) sont dirigés contre la phospho-sérine et la phospho-éthanol-amine, protéines adhésives impliquées dans la formation et l'invasion trophoblastique. Des APL inhibent la synthèse d'hCG par du trophoblaste murin en culture. Ainsi, les ASR, reconnues comme facteurs de risque de pathologies placentaires thrombotiques tardives comme la prééclampsie ou l'hématome rétro-placentaire pourraient être dues à des thromboses placentaires précoces (Arvieux et Hachulla, 2002 ; Lejeune, 2003).

6-4-2- Avortement immunologique

Les Incompatibilités Foeto-Maternelles Érythrocytaires (IFME) sont définies par la fixation d'allo-anticorps maternels sur le globule rouge du foetus, anticorps transmis pendant la grossesse et qui ont pour cible les antigènes de groupes sanguins du foetus, d'origine paternelle. Les complexes immuns ainsi formés provoquent une immuno-hémolyse tissulaire. Les anticorps anti-érythrocytaires peuvent se développer au cours ou au décours d'une grossesse par activation du système immunitaire maternel, après une première étape de sensibilisation par des hématies foetales porteuses de caractéristiques paternelles parvenues dans la circulation maternelle (Cortey et al., 2012).

Chapitre II Les Avortements Spontanés à Répétition

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Ce passage d'hématies correspond à des Hémorragie Foeto-Maternelle (HFM) qui sont spontanées et dans ce cas occultes en cours de grossesse, avec une fréquence de 45% au troisième trimestre. Les HFM peuvent être provoquées : fausse-couche, interruption volontaire de grossesse, mort foetale in utero, accouchement, etc. (Cortey et al., 2012). La grossesse pourrait échouer par défaut d'anticorps bloquant. L'hypothèse des anticorps bloquants a inspiré les traitements immunologiques dont les fondements théoriques sont :

- La mère met en place une réponse immunitaire cellulaire qui doit être bloquée.

- Les anticorps bloquants apparaissent dans toutes les grossesses d'évolution normale.

- En l'absence de ces anticorps, il y a avortement. L'identité des antigènes HLA entre les deux

partenaires a été accusée d'être à l'origine du défaut de synthèse des facteurs bloquants.

Des dysfonctionnements de l'immunité cellulaire sont à l'origine de plusieurs hypothèses. Une orientation de la réponse cellulaire T vers la voie T-helper1 (Th1) produirait des cytokines responsables de l'avortement. Chez les femmes affectées, le trophoblaste, le sperme, les microbes activeraient le système immunitaire maternel qui produirait les cytokines Th1, les interférons (IFN-y) et les (Tumor Necrosis Factor) TNF-a, capables d'inhiber la prolifération, les fonctions du trophoblaste et la croissance embryonnaire. TNF-a induit la formation de thromboses. Selon les séries, 50 à 80% des femmes souffrant d'ASR inexpliqués auraient une réponse cellulaire anormale de typeTh1 vis-à-vis des antigènes trophoblastiques. L'activité des cellules NK serait plus élevée dans certains cas d'ASR (environ 12%). Ces hypothèses (défaut de reconnaissance, absence de facteurs bloquants, déficit en cytokines de type Th2, excès de cytokines Th1, excès d'activité NK) n'ont pas trouvé de confirmation pour l'instant (Poncelet et Sifer, 2011).

6-4-3- Le lupus

C'est une maladie d'origine auto-immune qui comporte des manifestations cliniques extrêmement polymorphes, cutanéo-viscérales, évoluant par poussées, associées à la présence d'auto-anticorps dirigés contre les constituants du noyau cellulaire. Concernant les FCS répétées, toutes les études montrent que leur taux est augmenté en cas de lupus, atteignant 20 à 30% des grossesses. Les facteurs de risque de FCS précoces et de pertes foetales tardives sont la présence d'anti-phospholipides et les antécédents de perte foetale. Les études in vitro évoquent une toxicité directe des anti-phospholipides sur le développement embryonnaire et trophoblastique, avec des défauts d'invasion expliquant les FCS précoces et les pathologies placentaires plus tardives (Molad et al., 2005).

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6-5- Étiologie vasculaire et métabolique

6-5-1- L'hypertension et les maladies vasculaires

Les maladies hypertensives peuvent avoir une influence néfaste sur le développement ovulaire au début de la grossesse et comporte aussi bien des risques d'avortements que d'hypotrophie et de mort in utero. Facile à mettre en évidence, si l'hypertension évidente, si la tension artérielle se révèle normale dans les conditions de repos, il ne faudra pas éliminer l'origine vasculaire car il arrive qu'elle soit en cause lorsqu'ils existent des facteurs de risque tels que des antécédents familiaux d'hypertension ou d'accidents vasculaires chez les parents ou collatéraux, aggravés éventuellement par le tabagisme. Chez ces patientes, il faudra découvrir l'origine vasculaire par des tests a l'effort, l'épreuve du froid, le roll overtest et l'étude des vaisseaux au niveau du fond d'oeil et de l'endomètre qui peuvent être le siège de lésions vasculaires importantes (Diaby, 2006).

6-5-2- Maladie coeliaque

La maladie coeliaque est un trouble auto-immun associé à une intolérance au Gluten qui a pour effet la destruction progressive des villosités de l'intestin grêle. Les symptômes de la maladie coeliaque sont très divers et peuvent se produire à tout âge. Parmi ces symptômes, la maladie abortive est une circonstance rare de découverte de la maladie coeliaque. En effet, 19,4% des femmes atteintes de cette maladie ont des aménorrhées mais aussi, des oligo-hypo-ménorrhées, dysménorrhées et des métrorragies (Stazi et Mantovani, 2000). Il existe aussi une forte corrélation entre maladie coeliaque et fausses couches précoces, menaces d'avortement, toxémie gravidique et retard de croissance intra-utérin. La pathogénie de tous ces problèmes gynéco-obstétricaux reste méconnue, mais les hypothèses sont partagées entre l'origine auto-immune et la malnutrition (Eliakim et al., 2001). Dans le cadre de la recherche de la physiopathologie de ces troubles, certains auteurs se sont intéressés à des vitamines et oligoéléments comme l'acide folique, le sélénium et le zinc. Ceux-ci sont des nutriments essentiels pour la fonction reproductive de la femme, et sont mal absorbés en cas de maladie coeliaque. Ces auteurs ont montré, entre autres, que le déficit en zinc engendre un trouble dans la sécrétion et l'action de la LH et celle de la FSH ce qui perturbe le fonctionnement ovarien. Ceci peut expliquer en partie les problèmes d'infertilité et de fausses couches précoces engendrées par la maladie coeliaque. L'autre piste physiopathologique explorée pour essayer de saisir le mécanisme de ces perturbations de la vie génitale associées à la maladie coeliaque est celle de l'auto-immunité. Dans ce sens, certains auteurs ont comparé des sérums de femmes en bonne santé à ceux de femmes atteintes de maladie coeliaque active avec des manifestations gynéco-obstétricales (Shamaly et al., 2004).

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Ils ont prouvé qu'il existait une relation entre la présence d'anticorps anti endomysium et anti trans-glutaminase et ces manifestations cliniques. Ces cas cliniques illustrent bien l'association entre la maladie coeliaque et les fausses couches à répétition (Shamaly et al., 2004).

6-6- Thrombophilie

En début de grossesse (5 à 7 SA), l'invasion trophoblastique des artères spiralées utérines entraîne l'apparition de bouchons vasculaires (plugs) conduisant au maintien de l'hypoxie embryonnaire nécessaire à sa bonne évolutivité. En effet, l'embryon est à ce stade dépourvu des moyens de défense enzymatique contre les radicaux libres de l'oxygène, et ces plugs luttent également contre les variations tensionnelles maternelles et permettent la mise en route du coeur embryonnaire et l'extraction des déchets embryonnaires vers les premiers lacs intervilleux (Merviel et al., 2004).

Le problème est qu'en amont de ces plugs, les éléments figurés du sang stagnent et peuvent conduire à la formation d'un thrombus si la femme présente des facteurs de risque comme une thrombophilie. Lorsque les plugs doivent commencer à disparaître (à partir de la 8ème SA), les thrombus restent et la grossesse s'interrompt par défaut de perfusion de l'embryon. De même, ces thrombus peuvent empêcher la deuxième colonisation trophoblastique des vaisseaux utérins, et conduire à la survenue d'une pathologie vasculaire de la grossesse. Les thrombophilies génétiques sont liées soit à un déficit des inhibiteurs naturels de la coagulation (antithrombine III, protéines S et C), soit à des mutations du gène de la méthylène tétra-hydro-folates réductase, du gène de la prothrombine (G20210A) ou du facteur V (mutation Leiden) (Merviel et al., 2004).

6-7- Étiologie génétique

Les variables génétiques semblent jouer un rôle complexe dans l'efficacité de la reproduction humaine. Classiquement, les taux élevés d'erreurs chromosomiques ont été parmi les principales étiologies de la perte foetale et des études plus récentes ont commencé à mettre en évidence le rôle important que des anomalies monogéniques spécifiques peuvent jouer dans le maintien de la grossesse (Kassie et al., 2015).

6-7-1- Anomalies chromosomiques

Les études cytogénétiques ont montré que la plupart de ces anomalies sont des anomalies chromosomiques numériques ou aneuploïdies (86%), et une minorité des cas sont causés par des anomalies chromosomiques structurales (6%) ou mosaïsme chromosomique (8%) (Goddijn et Leschot, 2000 ; Poncelet et Sifer, 2011).

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On suppose que 50% des anomalies chromosomiques détectées dans les avortements spontanés se produisent de novo alors que les parents présentent des caryotypes normaux (Carvalho et al., 2010). Les anomalies survenant de novo sont donc accidentelles et ne sont donc en principe pas responsable d'ASR. Cependant, l'incidence de certaines aneuploïdies méiotiques augmentant avec l'âge maternel (Stephenson et al., 2002).

Les anomalies de nombre sont la majeur cause des FCS sporadiques et répétées, parmi ces anomalies ; des trisomies (16, 18, 21 ou 22), des triploïdies, polyploïdies et des monosomies X. Les anomalies de structure représentent 3 à 4% des aberrations chromosomiques et sont constituées de 3 variétés : la translocation, la mosaïque et les chromosomes en anneau (Carvalho et al., 2010).

6-7-2- Anomalie génique

La mutation génique consiste en une altération fine de la molécule ADN. Elle n'est donc pas visible, contrairement à l'aberration chromosomique, jusqu'à présent il a été détecté que les mutations des gènes de structures responsables de la synthèse des enzymes, des protéines et des récepteurs des cellules. Ainsi, des altérations graves d'un ou plusieurs gènes, incompatible avec la vie sont non seulement hautement probable mais a priori fréquentes en début d'embryogenèse et seraient à l'origine d'avortement très précoce, notamment infra clinique. Cette hypothèse est étayée par divers arguments. Après avoir éliminé toutes les causes connues d'avortements, y compris les aberrations chromosomiques, il reste une proportion importante d'avortement d'étiologie inconnue parmi lesquels le pathologiste constate surtout les décès embryonnaires foetaux apparemment primitif in utero. À l'origine de ces décès, il peut y avoir un blocage d'une grande voie métabolique et surtout, en raison de la nature dominante la transmission, des anomalies de structures des protéines (Diaby, 2006 ; Coutton et al., 2012).

6-8- Étiologie fortuite et psychologique

Sous ce qualificatif sont habituellement désignées les causes qui peuvent avoir une influence non prouvée médicalement mais auxquelles l'expérience donne un certain crédit : la fatigue, le travail debout, les trépidations, les longs voyages en voiture, etc. Il s'agit en général plus de facteurs déclenchant ou favorisants que de causes véritables. Il est certain qu'un utérus hypotrophique et hyper-contractile se contractera plus facilement et plus souvent chez une femme ayant une importante activité physique que chez une femme au repos ou ayant une vie calme : d'où les prescriptions logiques de prudence qui en découleront (Lejeune et Carbonne, 2007).

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L'écoute des patientes, le décryptage du traumatisme lié à l'annonce ou à la prise en charge des échecs de grossesses antérieures, la pression subie et la confiance qu'elles mettront dans la relation avec le médecin, augmentent les chances de succès des grossesses futures, de l'avis de tous les médecins qui les prennent en charge. Ce que les Anglo-Saxons appellent le loving care, c'est-à-dire l'empathie et le suivi rapproché en début de grossesse améliore de façon significative le pronostic obstétrical (Lejeune et Carbonne, 2007).

6-9- Autres étiologies

- Le traumatisme unique, même violent, est une cause rare d'avortement avant la douzième

semaine, l'utérus étant protégé de la contusion par la ceinture osseuse. Mais, il peut être l'occasion de l'interruption d'une grossesse déjà compromise.

En revanche, les microtraumatismes répétés peuvent provoquer l'avortement. L'usage des engins motorisés en fournit un exemple et le travail sur certaines machines trépidantes en est un autre (Andriatsiaronimanga, 2005).

- La béance du col est une affection obstétricale rare, caractérisée par une dilatation cervicale
indolore au cours du deuxième trimestre de la grossesse conduisant à l'expulsion du produit de la conception suite à une destruction traumatique des fibres musculaires de l'orifice interne du col ou suite à une inefficacité constitutionnelle congénitale. L'incompétence cervico-isthmique a été décrite pour la première fois par Palmer et Lacomme en 1947 (Abbara, 2016).

- Le facteur d'âge, lorsque la femme à l'âge > 30 ans, ayant des antécédents de fausse couches
spontanée, le surpoids ou le faible poids suite à des mauvaises habitudes alimentaires (Toilibou, 2009).

7- La part de l'homme dans les FCSR

En effet, si 60% des fausses couches du premier trimestre sont dues à des anomalies chromosomiques et qu'une majorité est d'origine maternelle, la technique d'hybridation in situ en fluorescence (FISH) sur les spermatozoïdes a montré une origine paternelle dans 8 à 12% des cas, correspondant à une incidence plus grande d'anomalies chromosomiques dans leurs gamètes. Une mesure de la fragmentation de l'ADN spermatique peut également être réalisée. Les causes de la fragmentation peuvent être génétiques : insuffisance en enzymes de réparation, augmentation des substances oxydantes secondaires à l'âge, processus infectieux et inflammatoire, ou à des facteurs environnementaux : toxiques, hydrocarbures, insecticides, chaleur, etc. Ces anomalies sont associées au risque de FCS (Gil-Villa et al., 2009).

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Les études chromosomiques des spermatozoïdes peuvent être établies et elles constituent une étiologie non négligeable à ce dysfonctionnement (Auger et al., 2009). Elle peuvent être faites :

- Par fécondation hétérospécifique : c'est une technique qui permet de voir les spermatozoïdes

et d'apporter des renseignements sur leur forme et leur structure.

- Par hybridation in situ : réalisée sur le noyau en interphase.

- La mesure de la fragmentation d'ADN : pour l'identification des cassures de l'ADN simple

et double brin au niveau de l'ADN des spermatozoïdes.

- Par la recherche d'anticorps anti-spermatozoïdes : suite à des traumatismes ou à une infection,
les hommes peuvent développer une immunité contre leurs propres spermatozoïdes, cela peut diminuer leur mobilité (Rives et al., 2004 ; Auger et al., 2009 ; Belloc, 2014).

8- Démarche diagnostique et prise en charge 8-1- Interrogatoire

Il est établi pour chercher et préciser : l'âge maternel, l'indice de masse corporel, des antécédents personnels gynécologiques, des antécédents obstétricaux, ainsi que des antécédents personnels thromboemboliques. La prise de toxiques, tabac, alcool, drogues ou médicaments, ainsi que les habitudes alimentaires sont explorés (Poncelet et Sifer, 2011 ; Lepage et al., 2015).

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