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Du patient objet au patient sujet.


par Marie Jutteau
IFSI des diaconesses - Université Paris Descartes - Diplôme d'état infirmier 2019
  

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III.1.4. Résultats buts

Les différents interviewés présentent divers parcours professionnels. L'IDE11 a toujours travaillé auprès d'adultes, en psychiatrie pendant trois ans, puis en libéral depuis quinze ans. L'IDE2 est diplômé depuis huit ans, il a commencé par de l'intérim dans des services adultes. Il a désormais l'intention de passer le concours pour être infirmier en pratique avancée. L'IDE3 est récemment diplômé et son premier poste fût en néphrologie adulte : il part dans quelques mois pour faire de l'intérim en service adulte. Enfin, l'IDE4 fût pendant longtemps jeune fille au pair, elle devient auxiliaire puéricultrice en 2000 puis infirmière en 2017. Une fois diplômée elle tente la pédiatrie mais elle se rend compte que la prise en charge des enfants ne lui convient pas et change alors de service pour être en néphrologie adulte.

1 Pour des raisons de confidentialité, les prénoms ont été remplacé par IDE1, IDE2, IDE3 et IDE4.

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Ces quatre entretiens avec les IDE m'ont permis de recueillir plusieurs points de vue sur les quatre questions à propos du corps, de l'instrumentalisation du corps, de l'autonomie et du consentement.

Dans un premier temps, en posant la question sur la représentation du corps du patient que les IDE pouvaient avoir dans leur soins, trois d'entre eux ont introduit l'importance de l'observation et du regard lors de la prise en charge. En effet, l'un d'eux énonce « le regard soignant » pour rentrer en contact avec le patient, tandis qu'un autre explique qu'il faut « regarder tout le corps [...] dans sa globalité » afin de détecter un éventuel problème. Ces deux infirmiers parlent des notions de « pudeur » et « d'intimité » qu'ils ajoutent à leur observation qui seraient indispensable dans la considération du corps. L'IDE1 ajoute l'importance de l'absence de jugement face au corps dévoilé qu'il soit « handicapé » ou « abîmé ». De plus, l'IDE4 et l'IDE3 abordent la notion du patient objet en disant que « le corps n'est pas un objet » ou qu'il « n'est pas seulement un objet de soin ». L'IDE4 ajoute que le corps du patient ne se dissocie pas de « l'être vivant » ou de « l'être sensible » que peut être le malade : en effet, elle précise qu'il « ressent des douleurs, des désagréments » et qu'« il a toujours des sensations ». De plus, elle évoque le message que peut transmettre le soignant à travers ses gestes : « la façon de toucher [...] ça renvoie des messages, par exemple si tu le touches [le patient] avec violence ça renvoie un message que tu ne veux pas faire le soin, il pourrait interpréter [...] que tu n'es pas contente d'être là, que tu n'es pas contente de prendre soin de lui ».

Dans un deuxième temps, je pose la question sur l'instrumentalisation du corps dans les soins en faisant référence au patient objet. Ma question est de savoir si les infirmiers connaissent cette expression d'instrumentalisation ou d'objectification du corps et ce qu'elle évoque pour eux. Deux infirmiers ont partagé que cela leur était déjà arrivé, pour deux raisons différentes. L'IDE1 pense que ça lui ait surement arrivé à cause du manque de temps dans le milieu libéral (« quand t'es dans un jour où t'es pressé [...] je vais pas te dire que ça m'est jamais arrivé »). L'IDE3 pense que c'est à cause « des habitudes » ou « des automatismes » et partage la manière dont ça s'est déroulé pour lui. L'IDE2 connaît aussi cette expression d'instrumentalisation du corps mais a beaucoup de mal à le concevoir, il le définit à trois reprises comme « un terme assez péjoratif » mais « comprend que [le corps] puisse devenir autre chose quand il arrive à l'hôpital ». La suite de ma question tend à connaître les solutions qu'ils mettent en place pour éviter cette instrumentalisation. La majorité d'entre eux ont évoqué l'importance de

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l'information fournit aux patients, L'IDE1 explique la nécessité de « toujours dire ce qu'on va faire, «ça va faire froid, ça va faire chaud, je vais vous attraper comme ci, comme ça« » et l'IDE4 rappelle l'intérêt de s'adapter au patient « tu te présentes, tu annonces le soin, tu demandes si c'est le bon moment, s'il veut que tu reviennes dans cinq minutes ou tout de suite, si la personne est prête [...] on ne force pas mais on essaye toujours d'expliquer ». L'IDE3, lui, évoque la solution de « l'écoute active », « c'est le fait de parler avec le patient, tout est dans la communication ». Enfin, l'IDE4 précise que l'infirmier « ne vient pas parcequ'[il a] des soins à faire,[...] [il] vient parce qu'[il] veux prendre soin de la personne » et elle ajoute que même si c'est sur le corps que les soins sont réalisés « il y a l'esprit, il a sa façon de penser, sa façon de voir [...] il faut englober l'ensemble ».

La troisième question a pour objectif de connaître la manière de considérer l'autonomie par les soignants. Pour ce faire, différentes réponses ont été données et toutes ont porté sur l'aspect physique de l'autonomie, soit le savoir-faire et les capacités du patient. Ainsi, L'IDE2 cite ses deux outils d'évaluation que sont la « communication » et « l'observation ». Il énonce que pour « la communication, on pose la question à la personne, [...] quand la personne va être alitée ou quand il va y avoir un manque de communication, on va déjà voir [...] si elle réussit à se mobiliser avec des gestes simples, plier les genoux, se mobiliser sur le côté, tenir la barrière, puis au niveau de la marche ». De plus, il implique l'équipe pluridisciplinaire dans cette évaluation en citant notamment le « médecin » et « les kinés ». L'IDE3 et l'IDE4 rejoignent cette même idée et soulignent l'importance de la considération de l'autonomie pour « favoriser au mieux l'autonomie » en détectant quand les patients « font d'eux-mêmes ». Ensuite l'IDE4 rappelle que « chacun à ses limites, par exemple, selon l'âge, la lourdeur de la pathologie, l'envie de la personne, le moment », il faut donc « s'adapter, [...] mettre une valeur sur les capacités d'opérer du patient, et encourager, ça stimule et ça le motive, ça lui donne de l'importance ». Pour finir, la question de la gestion du temps rentre en jeu, c'est pourquoi l'IDE1 et l'IDE4 l'évoquent dans leur pratique. L'IDE1 aborde le sujet du manque du temps en libéral en précisant que « c'est pas terrible »: « nous déjà en libéral [...] on a un problème, c'est un problème de temps [...] on laisse moins de place à l'autonomie [...] je préfère faire à leur place ». L'IDE4, en service hospitalier, énonce que l'infirmier « laisse quand même le temps pour que le patient fasse ce qu'il peut faire, qu'il ne faut pas se substituer à ses capacités sinon il va régresser ». Enfin, elle précise qu'« il faut toujours négocier, demander l'avis, accepter que la personne refuse » .

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Enfin, avec ma dernière question, je voulais connaître la place et l'importance que le consentement avait dans les soins des infirmiers. L'IDE1 a apporté une vision intéressante du consentement dans le milieu libéral. En effet, contrairement à l'hôpital, « il y a une grande différence c'est que les patients nous ouvrent la porte [...] donc là ils nous ouvrent la porte donc ils sont forcément consentants ». Pour l'IDE2, le consentement est « partie prenante de la démarche de santé », « ça fait partie intégrante du soin » : il ajoute que « c'est à partir de ça qu'on pourra accéder à ce corps et permettre la réalisation des soins » et « la bonne continuité des soins ». Il distingue deux types de consentement : le « consentement claire, libre et éclairé ou quelqu'un qui ne peut pas consentir de manière lucide ». Il finit en expliquant qu'en cas de refus de soin ce sera « un frein à la réalisation de la démarche de santé ». L'IDE4 rejoint la même idée que l'IDE2 sur le refus de soin et rappelle la loi en disant que « l'accord du patient fait partie de ses droits, il a le droit de refuser selon la législation, et il a le droit d'accepter ». Pour elle, il est important de demander l'accord de son patient car elle ne « veut pas entraver sa volonté ». L'IDE3 et l'IDE4 procèdent de la même manière en se positionnant à la place du patient. En effet l'IDE4 énonce : « on transfère toujours en se disant «si c'était moi« ou si c'était quelqu'un de ma famille, est ce que c'est correct. » et l'IDE3 dit que « personnellement j'aurais pas aimé qu'on me propose pas donc je propose tout le temps ». Enfin l'IDE4 explique que « ça rend humain les soins et il faut considérer le patient comme une personne respectable, [...] tu dois (pas dans le sens obéir) [...] avoir sa coopération parce qu'un patient qui coopère est un soin qui va mieux et sa santé qui s'améliore. ». Pour finir, l'IDE3 ajoute que c'est grâce à son éducation qu'il demande au patient leur consentement, en effet pour lui, il pense que « justement si on demande pas le consentement du patient, dans un sens, indirectement, on le considère comme un objet ».

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand