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Du patient objet au patient sujet.


par Marie Jutteau
IFSI des diaconesses - Université Paris Descartes - Diplôme d'état infirmier 2019
  

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III.2. Analyse de l'enquête

Ces quatre enquêtes m'ont permis de recueillir différents points de vue d'infirmiers sur la place que peuvent avoir le corps, l'autonomie et le consentement dans les soins.

Dans un premier temps il s'agira d'analyser la considération du consentement par la législation pour humaniser le patient, puis nous verrons la manière dont le respect de la dignité du patient par la pratique soignante permet de l'estimer et enfin, nous étudierons la façon avec laquelle la considération du patient l'humanise.

III.2.1. Un patient humanisé par la considération de son consentement grâce à la législation

Comme l'introduit l'IDE4, « l'accord du patient fait partie de ses droits ». En effet, chaque individu a des droits et c'est ce qui le désigne comme sujet aux yeux de la loi. Le sujet ou la personnalité juridique se définit par l'aptitude à être titulaire de droits et de devoirs. La reconnaissance du droit de l'individu permet donc de considérer le sujet comme un être doté d'une raison. On retrouve finalement l'idée de Descartes selon laquelle l'homme serait constitué de deux entités : le corps et l'âme. Le corps correspondant à la matière vouée à disparaître et l'âme, qui ferait vivre le corps, capable de penser et de raisonner. La célèbre phrase « Je pense donc je suis » de Descartes révèle que selon lui, la pensée permet l'existence du sujet et donc de l'individu. Cette pensée qui va faire de l'être vivant un être de raison va donc être soumise à des lois pour jouir de ses libertés sans entraver celles des autres.

De la même manière que cité dans le cadre de référence, l'individu a des droits légiférés par différents textes : le Code Civil qui régit les rapports entre les personnes et qui s'applique à tous les citoyens et le Code de la Santé Publique qui détermine notamment les droits des malades et les devoirs des professionnels et des établissements de santé. La Constitution, en tant que loi fondamentale, a pour rôle de protéger les libertés et les droits des citoyens contre les abus de pouvoirs des gouvernements qui se succèdent.

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Ainsi, tel que défini dans la Constitution par la loi de disposition de soi, l'IDE 2 fait référence au non-accès du corps par autrui1. Il rattache cette notion au consentement en disant que « le consentement ça fait partie intégrante du soin [...] c'est à partir de ça qu'on pourra accéder à ce corps ». Nous retrouvons à l'article 16-3 du Code Civil, le chapitre relatif au respect du corps humain qu' « il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui. Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir ».

Cet infirmier rajoute que « si on a pas ce consentement-là [...] ça va être un frein à la réalisation de la démarche de santé ». Cette représentation du consentement suit la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades confirmant à l'article L1111-4 qu'« aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. ».

Nous avons donc compris que le consentement fait partie des droits de l'individu, mais il est important de préciser que ce droit implique deux choses. En effet, l'IDE 4 évoque que le patient « a le droit de refuser [...] et il a le droit d'accepter » ce qui correspond à la notion précédemment expliqué de l'acceptation et du refus de soin. Ce concept présent dans la loi du 4 mars 2002, reconnaît la capacité du patient à juger ce qui est bon ou mauvais pour lui. Cette capacité à différencier le bien du mal est exploitée par Spinoza (philosophe du XVIIème siècle), qui définit le bien comme ce que l'on juge utile et bénéfique à nous-même et le mal ce qui nuirait à la conservation de notre être. C'est ce qu'illustre l'IDE3 par l'imitation d'un dialogue avec un patient lorsqu'il énonce « si vous ne voulez pas, je ne vais pas vous forcer ». L'IDE4 considère donc que le patient est capable de juger par lui-même et ajoute qu'elle ne compte pas « entraver sa volonté » car ce serait « un manque de respect ». Elle introduit donc le mot clef essentiel à la compréhension des différentes lois, celui de « volonté ». Cette volonté renvoie directement aux capacités du sujet qui, par sa raison, a la faculté d'exercer un libre choix.

Ensuite, pour avoir un consentement viable et fiable, il faut prendre en compte différentes choses. Dans un premier temps il faut que le patient soit capable de consentir et donc qu'il ait la capacité de juger, décider et s'exprimer. C'est ce problème que l'IDE1 rencontre avec

1 La libre disposition de soi renvoie aux libertés fondamentales comprenant le droit de dispenser de son corps et le droit à l'intégrité physique.

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certains de ses patients comme « une petite dame qui perd la tête » : il considérerait donc que sa démence entraverait sa capacité de jugement. De la même manière, en service de psychiatrie, lorsque cet infirmier évoque la difficulté de recueillir le consentement d'un patient « psychotique ». L'IDE2 complète en définissant selon lui deux types de consentement : celui claire, libre et éclairé et celui de « quelqu'un qui ne peut pas consentir de manière lucide ». Finalement il aborde les limites du consentement en se fondant sur la notion de la perte d'autonomie décisionnelle. En effet, nous avons vu dans le cadre de référence qu'un individu est doté de différentes autonomies : physique et psychologique. Au cours de l'enquête, c'est l'autonomie physique qui est majoritairement abordée, celle qui se définit par la capacité à agir. Mais l'autonomie décisionnelle ne reste pourtant pas imperceptible par les infirmiers car ils l'évoquent indirectement en se souciant de l'état de lucidité de leur patient pour décider.

Les infirmiers mentionnent ensuite l'importance de l'information fournie aux patients. En effet, nous avions vu la particularité des renseignements à partager qui permet le caractère « éclairé » du consentement. Lors des entretiens, les infirmiers énoncent surtout la nécessité d'informer face à un refus de soin pouvant entraîner des conséquences sur l'état de santé du patient. L'IDE4 cite les différents acteurs pouvant donner les informations aux patients en passant par l'explication ou l'argumentation : « Nous on essaye en tant qu'IDE d'expliquer [...] s'il refuse toujours alors on passe par le médecin et le médecin va expliquer [...] un peu plus le but de ce soin [...] ils ont d'autre arguments derrière [...] sinon si on arrive toujours pas à désamorcer la situation on peut en parler à la psychologue parce qu'elle a des connaissances et des mots qu'elle peut utiliser auxquelles on ne peut pas forcément penser. ». Enfin, l'IDE3 explique que « parfois dans les soins si c'est important, je lui dis les enjeux » : cette approche fait référence aux devoirs infirmiers face au refus de soins cités dans le Code Déontologique à l'article R. 4312-14. « Lorsque le patient, en état d'exprimer sa volonté, refuse le traitement proposé, l'infirmier respecte ce refus après l'avoir informé de ses conséquences [...] »

In fine, en continuité de la loi du 4 mars 2002, selon les IDE, la place du patient en tant qu'acteur de sa santé et de co-partenaire des soignants lui permet d'être considéré tout le long de sa prise en charge. Le soignant reconnaît alors le malade comme un être de raison capable de raisonner, juger et donc choisir en exprimant sa volonté par le biais du consentement. Pourtant, d'après les soignants, il semblerait que la considération du patient ne se fait pas seulement par le biais du consentement.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote