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L'art numérique: médiation et mises en exposition d'une esthétique communicationnelle


par Lauren Malka
Celsa-Paris IV - Master 2 de Management Interculturel et Communication 2005
  

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Conclusion générale

«C'est un art qui est comme l'enfant en train de grandir, qui refuse la mesure mais qui ne veut pas revenir à maman non plus » (Daniel Cacouault, Cf. Annexe p.XIX)

Cette étude de la pratique artistique émergente qu'est l'art numérique, des difficultés de sa naissance théorique, institutionnelle et esthétique au public, clarifie et dépassionne à plusieurs égards les discours qui définissent celle-ci. Au delà de toute polémique questionnant la légitimité artistique de tels usages, nous avons tenté en effet de déchiffrer et de démêler la multiplication hétérogène des logiques esthétiques et communicationnelles à l'oeuvre, au travers d'une analyse théorique et pragmatique. Par ailleurs, nous avons mobilisé les idéologies gouvernant ce champ artistique afin de les nuancer et de montrer en quoi elles opacifient l'esthétique naissante aux yeux du public. De manière plus générale, nous avons montré de quelle manière la mise en exposition de l'art numérique reflétait, par son hétérogénéité mais également par sa richesse esthétique, les multiples discours, mythes et concepts définissant l'esthétique de la communication.

Dans un premier temps, nous avons tenté de mener une exploration « phénoménologique » des différents discours, conceptions et appropriations qui caractérisent ce champ artistique depuis sa naissance. Nous avons constaté une complexité définitionnelle certaine, analysée et décantée sous l'angle historique, institutionnel et artistique. L'art numérique s'est tout d'abord défini par la conception de ses premiers artistes et penseurs qui souhaitaient déjà dématérialiser l'objet artistique, ouvrir l'oeuvre d'art à l'ordre de l'éphémère et de l'inachèvement afin de créer un espace artistique entre l'oeuvre et le spectateur qui ne soit plus un simple espace de contemplation distante, mais un espace d'inter-créativité. Puis, les appropriations institutionnelles de cette définition très conceptuelle du champ artistique ont montré la difficulté de cette création d'un espace relationnel entre l'oeuvre numérique, dématérialisée et le spectateur. La singularité de cet art, son aspect esthétiquement incorrect et l'idéologie révolutionnaire qui le caractérise ont souvent transformé l'esthétique de l'éphémère et de l'immatériel en une ponctualité sans substance, difficile à cerner et à institutionnaliser durablement. Enfin, les perceptions des artistes numériques actuels sur leur propre courant créatif montrent pour leur part l'écart entre les discours qui la gouvernent et les logiques esthétiques et médiationnelles qu'elle tente de révéler. Le courant artistique naissant apparaît alors comme une forme balbutiante, qui peine à s'affranchir des injonctions à la nouveauté et à la démocratisation pour trouver de réelles modalités d'identification et de mises en scène auprès du public.

Cette analyse objective de la naissance conceptuelle et de la recherche identitaire de l'art numérique est ensuite éclairée par une immersion à l'intérieur des pratiques et des stratégies, des dispositifs et des tactiques artistiques. Nous avons tenté de photographier ce labyrinthe en perpétuel mouvement afin d'en avoir une vision claire et actuelle, et d'en dégager une description empirique et lisible. Les trois types d'organisations observées, sites Internet, institutions d'art classique et moderne, et centres de recherche et de création contemporaine et numérique, montrent en effet l'extrême diversité des définitions et mises en scène possibles du concept d'esthétique de la communication. Sur Internet, le dispositif d'exploration interactive de l'oeuvre ou de contribution du spectateur fait intimement partie du projet artistique et transforme ainsi le spectateur en un objet esthétique et médiationnel. Par ailleurs, les différentes institutions d'art classique, moderne et numérique hors ligne répondent par leurs expositions aux objectifs divers de démocratisation ou d'esthétisation de la création numérique. Leurs procédés artistiques et communicationnels extrêmement divers, entre spectacularisation des oeuvres, argumentation presque commerciale de ses logiques conceptuelles, cloisonnement intimiste du lieu artistique sacralisant la relation du spectateur à l'espace, ou encore socialisation du lieu affranchissant le visiteur de toute injonction à la contemplation artistique, déstabilisent fortement le spectateur et le médiateur traditionnel, qui ne forment qu'une seule et même personne. Ces derniers doivent tous deux s'infiltrer dans un espace de médiation esthétique aménagé préalablement par l'artiste, et interagir avec des oeuvres aux codes inconstants, qui imposent leurs propres logiques médiationnelles et esthétiques sans se référer à un dispositif originel et identifiable.

En ce sens, les trois hypothèses de départ qui ont guidé nos recherches et nos questionnements sont toutes trois confirmées et à la fois enrichies par notre double recherche théorique et pragmatique.

-Tout d'abord, l'art numérique nous apparaissait d'ores et déjà comme une notion ambiguë, à la croisée de nombreux courants artistiques et conceptions esthétiques, et aux frontières diluées par la multiplicité de ses idéologies, et la polyphonie de ses réappropriations définitionnelles.

Cette première hypothèse, qui comprend à la fois l'idée d'une ambiguïté esthétique et conceptuelle de l'art numérique, a été confirmée au travers de nos recherches documentaires, théoriques et historiques. Nous avons vu en effet que ce champ artistique se définissait par la naissance parallèle de trois courants distincts, l'art informatique, l'art vidéo et le Net art dont la caractéristique commune est de mêler les disciplines artistiques traditionnelles tout en faisant appel à d'autres supports et à d'autres médiums. Par ailleurs, la singularité de cette démarche artistique et la difficulté de son institutionnalisation ont entraîné de perpétuelles réappropriations définitionnelles et une opacification de ses logiques auprès du public. Cependant, il est important de nuancer l'aspect assez catégorique de cette hypothèse dans la mesure où l'analyse minutieuse de ces définitions, et l'attention portée aux données subjectives et objectives de l'art numérique, permet de clarifier les voix distinctes de cette polyphonie discursive. Nous avons ainsi pu distinguer le caractère idéologique et formel de certains discours, concernant notamment les aspects contestataires, révolutionnaires et totalement démocratisant de l'art numérique.

- Par ailleurs, une deuxième hypothèse montrait l'esthétique de la communication comme redéfinissant le rapport à l'oeuvre d'une manière complexe, difficile à comprendre pour le public, visant à la fois la démocratisation de l'art et une relation individualisée et esthétisée au public.

Cette hypothèse de départ semble totalement confirmée par le témoignage des acteurs de la création et de la médiation de ce champ artistique, chargés précisément de créer cette espace esthétique de la communication entre l'oeuvre et le spectateur. Il semble même que la contradiction entre la démocratisation de l'art numérique et de son expérimentation conceptuelle et physique par le spectateur individualisé constitue l'une des dialectiques fondamentales rythmant l'intégralité de notre étude. Il existe en effet une idéologie de démocratisation de l'art numérique dans la mesure où celui-ci ouvre l'objet artistique à la manière d'un spectacle, utilise les médiums de la communication de masse, et ne prend ainsi sens que dans sa confrontation au public. Or, l'esthétique individualisante de l'art numérique, confrontant le spectateur au dispositif artistique dans lequel il doit s'infiltrer, confère toute sa dimension et sa complexité au concept d'esthétique relationnelle. Les artistes et médiateurs interrogés ont ainsi montré la difficulté et les risques d'opacification, pour le public, d'une mise en scène qui individualise physiquement et mentalement le spectateur et spectacularise à la fois le processus artistique.

-Enfin, notre dernière hypothèse était celle d'une ambiguïté des médiations, engendrée par l'opacité des notions, qui se manifeste par la multiplicité et l'hétérogénéité des modes scénographiques et communicationnels de valorisation et d'exposition des oeuvres d'art numérique.

Cette dernière hypothèse, qui implique l'idée d'une adéquation entre la logique opaque des définitions notionnelles de l'art numérique, et celle de ses médiations est confirmée par notre étude, bien que notre analyse sémiotique des logiques d'exposition et de valorisation de l'art numérique auprès du public la nuance quelque peu. En effet, les multiples esthétiques et positionnements communicationnels des différentes institutions exposant l'art numérique apparaissent comme le reflet des inconstances et négociations définitionnelles et déstabilisent le spectateur. Or, notre immersion au sein des mises en exposition de la création actuelle nous montre une certaine richesse des médiations, telles qu'elles sont mises en scène par chacune des institutions. Les expositions évoquées semblent toutes éclairer à leur manière un concept de l'art numérique, de l'esthétique relationnelle ou de l'esthétique propre de l'artiste exposé, et orientent ainsi le spectateur dans son errance interprétative. Ainsi, cette hétérogénéité, qui apparaît comme une errance des médiations, et qui demeure souvent dans l'ensemble assez opaque pour le public, n'est pas vaine et semble constituer un ensemble dialectique en perpétuelle évolution.

Cet art nous apparaît ainsi comme une forme d'expression entièrement définie, pour l'instant, par sa propre quête d'une identité cohérente et d'un mode de monstration valorisant auprès du public. Or, si l'on en suit l'affirmation de Daniel Cacouault selon laquelle l'art numérique est « comme l'enfant en train de grandir », il semble nécessaire de considérer ce texte, immortalisant un courant naissant qui ne cesse d'évoluer et de se transformer, comme la première étape d'une étude plus générale traitant de la naissance progressive d'une médiation artistique. En ce sens, cette étude doit être prolongée par une exploration plus élargie de la notion artistique et médiationnelle d' « esthétique de la communication », et par une réflexion approfondie traitant des dispositifs à construire pour réinventer l'exposition. Il s'agira ainsi, au travers d'une recherche théorique croisée sur l'exposition, la médiation culturelle et l'art actuel (art contemporain, conceptuel, numérique, installations et performances), et d'une observation pragmatique des dispositifs utilisés, de tenter d'élaborer un système de propositions de règles esthétiques, scénographiques et communicationnelles adressées aux différents concepteurs de ces expositions artistiques. Ce travail de recherche permettra d'envisager, au travers de recommandations concrètes les perspectives de développement futures des formes de la médiation artistique.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci